mardi 11 juin 2013

Abdes-Sellem-ben-Machich - Par Louis Rinn


                                        Tombeau de sidi ’Abd es-Salâm ibn Machich (Que Dieu l'agrée)




Par Louis Rinn (MARABOUTS ET KHOUANS , ÉTUDE SUR L’ISLAM EN ALGÉRIE, chap. XVII, ORDRE PRINCIPAL DES CHADELYA, 1884)




Abou-Median forma un grand nombre de disciples qui se dirent Madanya (au singulier Madani), épithète que prirent ensuite plusieurs docteurs, en souvenir du Saint d’El-Eubbad. Son successeur, et le véritable chef de l’ordre nouveau issu de son enseignement, fut le Marocain Abou-Mohammed-Abd-es-Sellem-ben-Machich-ben-Mansour-ben-Brahim-et-Hassani, chérif originaire des Beni-Arous, du Djebel-Alem, près de Tétouan.

Contemporain et sujet du sultan Abd-el-Moumen (mort en 1160 de J: C.)(1), Abd-es-Sellem-ben-Machich semble avoir voulu continuer l’oeuvre religieuse entreprise par le fondateur de la dynastie des Almohades (unitaires)(2).

A l’exemple d’Ab-el-Moumen et de Sid Abdallah-ben-Tomert qui, avant d’être souverains, s’affirmèrent comme pontifes intransigeants vis-à-vis de tout pouvoir temporel, Abdes-Sellem-ben-Machich professa, toute sa vie, un unitarisme rigoureux, et excessif dans ses déductions dogmatiques, liturgiques ou politiques. Plus religieux que ses deux illustres prédécesseurs, n’ayant pas leur ambition malsaine, et sincèrement imbu des doctrines soufies de son maître spirituel, il resta constamment en dehors de toute compromission avec les représentants de l’autorité séculière, et recommanda à ses disciples le mépris de toutes les fonctions publiques et l’éloignement absolu de tous les détenteurs du pouvoir. Mais, s’il encouragea l’insoumission, il ne prêcha pas la révolte, et il blâma toujours ceux qui, sous un prétexte religieux, prenaient part à des soulèvements politiques.

Son enseignement ne fut jamais ni agressif, ni turbulent. Il avait coutume de dire : « Priez Dieu sans cesse et sans compter ; ne parlez pas d’autrui, et préservez vos cœurs du désir de voir les hommes à vos pieds.

 

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(1) L’année 1160 de J.-C. comprend, dans le calendrier hégirien, les onze derniers jours de l’an 554, toute l’année 555 et le premier jour de l’année 556.
(2)

El-Mouhidoun, les unitaires, un.

 

L’amour de Dieu est le seul pôle autour duquel tournent tous les biens.... Que votre langue, au lieu de parler des choses de ce monde, ne parle que de Dieu; que votre coeur s’attache au Créateur, au lieu de s’attacher à la créature. Purifiez votre coeur des doutes et des pensées vaines, avec l’eau de la certitude des vérités morales. Ne levez jamais votre pied du sol et ne l’y posez jamais sans avoir en vue l’obéissance à Dieu.

Ne vous asseyez jamais que là où vous serez certain de ne pas rencontrer la révolte contre Dieu. »

 Sa conduite était en tout conforme à ses paroles. Aussi fut-il un des premiers à dévoiler l’imposture d’un certain Mohammed-ben-Mohammed-ben-Abou Touadjin, thaumaturge et intransigeant, qui s’était mis à la tête d’un parti de rebelles.

Ben-Machich paya de sa vie sa noble attitude vis-à-vis de cet énergumène, qui le fit assassiner par ses partisans, l’an 625 de l’Hégire (1227-1228 de J.-C.). Les Berbères, furieux de la mort de ce saint homme, tuèrent aussitôt son assassin.

Mouley-Abd-es-Sellem-ben-Machich est resté, depuis, l’objet de la vénération de tous les Musulmans : de nombreux pèlerinages ont lieu à son tombeau, dans le Djebel-Alem, et les Khouan-Soufi de la Tunisie portent, encore aujourd’hui, le nom de Mechichya ou de Sellamya.

Mais ce qui contribua surtout à illustrer Ben-Machich, ce fut d’avoir eu l’honneur de former à son école le célèbre Abou-Hassen-Ali-ech-Chadeli. Aussi, parmi les élogieuses appellations que lui a décernées la piété des fidèles, se trouve le titre de « précurseur et maître de Chadeli » en arabe Imamech-Chadeli et, par corruption, Imam Chadouli.

 
à suivre ...

 

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