mercredi 5 juin 2013

An-Nûr - Lecture et commentaire des versets 35 à 38

MADANI















Abū Chady al-Madanī




اللَّهُ نُورُ السَّمَاوَاتِ وَالْأَرْضِ مَثَلُ نُورِهِ كَمِشْكَاةٍ فِيهَا مِصْبَاحٌ الْمِصْبَاحُ فِي زُجَاجَةٍ الزُّجَاجَةُ كَأَنَّهَا كَوْكَبٌ دُرِّيٌّ يُوقَدُ مِنْ شَجَرَةٍ مُبَارَكَةٍ زَيْتُونَةٍ لَا شَرْقِيَّةٍ وَلَا غَرْبِيَّةٍ يَكَادُ زَيْتُهَا يُضِيءُ وَلَوْ لَمْ تَمْسَسْهُ نَارٌ نُورٌ عَلَى نُورٍ يَهْدِي اللَّهُ لِنُورِهِ مَنْ يَشَاءُ وَيَضْرِبُ اللَّهُ الْأَمْثَالَ لِلنَّاسِ وَاللَّهُ بِكُلِّ شَيْءٍ عَلِيمٌ (35)
فِي بُيُوتٍ أَذِنَ اللَّهُ أَنْ تُرْفَعَ وَيُذْكَرَ فِيهَا اسْمُهُ يُسَبِّحُ لَهُ فِيهَا بِالْغُدُوِّ وَالْآَصَالِ (36) رِجَالٌ لَا تُلْهِيهِمْ تِجَارَةٌ وَلَا بَيْعٌ عَنْ ذِكْرِ اللَّهِ وَإِقَامِ الصَّلَاةِ وَإِيتَاءِ الزَّكَاةِ يَخَافُونَ يَوْمًا تَتَقَلَّبُ فِيهِ الْقُلُوبُ وَالْأَبْصَارُ (37)
لِيَجْزِيَهُمُ اللَّهُ أَحْسَنَ مَا عَمِلُوا وَيَزِيدَهُمْ مِنْ فَضْلِهِ وَاللَّهُ يَرْزُقُ مَنْ يَشَاءُ بِغَيْرِ حِسَابٍ (38)

 

Allāhu nūru s-samāwāti wa-l-ari

mathalu nūrihi ka-mishkātin fīhā mibā

al-mibāu fī zujājatin

Az-zujājatu ka-annahā kawkabun durriyun yūqadu min shajaratin mubārakatin zaytūnatin lā

sharqiyatin wa lā gharbiyatin

yakādu zaytuhā yuī’u wa law lam tamsashu nārun

Nūrun ‘alā nūrin yahdī Allahu li-nūrihi man yashā’u

wa yaribu Allahu l-amthāla li-nnāsi wa Allahu bi-kulli shay’in ‘Alīmun (35)

Fī buyūtin adhina Allāhu ‘an turfa‘a wa yudhkara fīhā āsmuhu yusabbiu lahu fīhā bil-ghuduwi wal-āāli (36)

Rijālun lā tulhīhim tijāratun wa lā bay‘un ‘an dhikri Allāhi wa iqāmi -alāti wa iītā’i z-zakāti yakhāfūna yawman tataqallabu fīhi l-qulūbu wa-l-abāru (37)

li-yajziyahumu Allāhu asana mā amilū wa yazīdahum min falihi wa Allāhu yarzuqu man yashā’u bi-ghayri isābin (38)

24-35
Dieu est la Lumière des cieux et de la terre, et le symbole de Sa lumière serait un foyer où se trouve une lampe qui elle-même serait nichée dans un récipient de cristal ayant l’éclat d’un astre brillant qui tirerait sa luminosité d’un arbre béni, un olivier qui n’est ni de l’Orient ni de l’Occident et dont l’huile jetterait sa clarté presque d’elle-même, sans avoir été touchée par aucune étincelle, donnant ainsi lumière sur lumière. Dieu guide vers Sa lumière qui Il veut et propose des paraboles aux hommes, car Sa science n’a point de limite.


24-36
En ces maisons [des mosquées] que Dieu a permis d’élever, et où Son Nom est invoqué ; Là, célèbrent Sa Transcendance, matin et après-midi,


24-37
des hommes qu’aucun négoce ni transaction ne détournent de la joie d’exalter le Seigneur, d’accomplir la salât ou de faire l’aumône [Zakāt], et redoutent un jour où les cœurs seront bouleversés et les regards annihilés d’épouvante,


24-38
dans l’espoir que Dieu les récompensera pour le meilleur de ce qu’ils auront accompli et leur accordera un surcroît de Sa grâce, car Dieu dispense Ses bienfaits à qui Il veut sans compter.


Essai de commentaire :

Ce passage admirable, extrait de la sourate La Lumière (an-Nūr, médinoise, v. 35 à 38), décrit Allah, qu’Il soit exalté, comme la Lumière des cieux et de la terre, un éclat recouvrant les univers. Toutefois, ce sens s’écarte du principe du tanzīh , (Transcendance absolue d’Allah). Pour dissiper tout soupçon de ressemblance entre Lui et les choses créées, les érudits musulmans ont élaboré des interprétations plus plausibles dont voici les principales directions :

1- Le mot « nūr » est synonyme du Créateur (hāliq). Ces deux termes ont une signification commune : faire apparaître les choses, les donner à voir. Le Créateur fait jaillir les choses de l’inexistence à l’existence, de la même manière que la lumière les transfère de l’occultation à l’apparition. Ce sens est destiné à ceux qui nient qu’Allah est bien le Créateur des cieux et de la terre.

2- Le mot « nūr » pourrait désigner : « Celui qui accorde l’intelligence », ( Mufīdh al-idrāk ). Ce verset sous-entend cette phrase : Allah [accorde l’intelligence à Ses serviteurs résidant dans] les cieux et la terre pour les guider vers la bonne voie. Par cette lumière symbolique, Allah éclaire les esprits et oriente les cœurs. Sa lumière illumine « la terre » des cœurs, retrouvant ainsi la guidance après l’égarement. « Allah, rapporte Ibn ‘Abbās, est la lumière des cieux et de la terre. Il guide ceux qui peuplent les cieux et la terre ».

3- Le mot « nūr », selon al-abarī (grand exégète, m. 923 à Bagdad), est synonyme de Mudabbir , (celui qui administre, dirige). « Allah, précise-t-il, est la lumière des cieux et de la terre, c’est-à-dire : Lui, L’ordonnateur suprême. Le sens du verset en serait : « Allah accorde la connaissance aux peuples des cieux et de la terre pour se rendre compte des éléments nuisibles afin de pouvoir les éviter ; et des éléments bénéfiques afin de les suivre. Ceci se produira par la guidance divine, (hidāya), une manifestation de Sa Direction (tadbīr) du monde.

4- Le mot « nūr » signifie : « exempt de tout vice », à l’instar de l’expression : « une personne nuwār », c’est-à-dire : « au-dessus de tout soupçon ». Allah est certes exempt de toute imperfection que l’entendement humain puisse imaginer. Il est au-delà de tout ce que l’on puisse dire et entendre !

5- Le verset signifie qu’Allah possède la lumière, comme dans l’expression : « Zayd est généreux » signifiant que Zayd est doté de générosité. Cependant, il faudrait sous-entendre le deuxième terme de l’annexion. Le sens en sera : Allah est doté des lumières des cieux et de la terre, ou Allah est le Créateur des lumières des cieux et de la terre.

6- Le mot « nūr » est utilisé au sens de l’adjectif « lumineux », celui qui illumine les cieux et la terre par le soleil, la lune et les autres astres. Le mot est pris au sens propre : la lumière est concrète. Cet avis est attribué à al-Hasan al-Barī, à Abū al-Aliya et à al-Dhaḥḥāk. Lillumination des cieux se fait par les anges ; celle de la terre par les Messagers, sur eux bénédictions et salut, et par les Savants. Il s’agit d’une lumière symbolique. Cet avis est attribué à Ubayy ibn Ka‘b. Le sens du verset : Allah est celui qui illumine les cieux et la terre par les anges, les Messagers et les Savants. Cette interprétation exhorte les Croyants à reconnaître la vertu de cette élite grâce à qui Allah éclaire les esprits et leur indique le droit chemin.

7- Le mot « nūr » signifie les signes coraniques et cosmologiques qu’Allah avait établis pour indiquer Son Existence, Son Unicité et le reste de Ses Attributs. Ces signes indiquent la meilleure vie dans ce bas-monde et l’au-delà. Aussi, ce verset s’adresse-t-il à ceux qui peuvent méditer le royaume d’Allah et Ses signes qu’Il y a dressés. Ce sont des preuves indéniables de l’existence du Vrai, qu’Il soit exalté. Le verset est destiné à l’élite qu’Allah a prédisposée à la pénétration des sens du cosmos et du Coran. Al-Alūsī (Exégète iraquien, m. 1854) opte pour cette interprétation et rajoute que ce choix (« lumière » est synonyme du « Lumineux ») est soutenu par la lecture de certains : munawwir des cieux et de la terre ; munawwir étant le participe actif du verbe nawwar (illuminer).

8- Dans son épître « Tabernacle des lumières », al-Ghazālī (m. 1111) écrit : « Il est établi qu’Allah est Lumière. Nulle autre lumière n’existe hormis Lui. Il est toutes les lumières. Il est la lumière absolue. Il est la Lumière suprême par laquelle les choses se révèlent pour Lui et par Lui. Les cieux, la terre et le reste des mondes sont pleins de lumières des deux sortes. C’est-à-dire la lumière attribuée à la vue et celle attribuée au cœur ». Al-Ghazālī prend ici le mot « lumière » au sens propre, car il considère que la Transcendance absolue ne se réalise que si toutes les lumières reviennent à Lui. Il n’a nul associé. Ce sont les lumières des signes divins et des secrets de l’Omnipotence (qudra). Allah dit : « Nous leur montrerons Nos signes dans les horizons et en eux-mêmes, jusqu’à ce qu’il leur apparaisse avec évidence que ceci est la Vérité. Ne suffit-il pas que ton Seigneur soit témoin de toute chose ? » (Coran, 41, 53).

En somme, Allah, qu’Il soit exalté, a fait exister les cieux, la terre et tous les univers. Il a accordé à l’homme l’intelligence et l’a guidé au Bien et au Vrai. Il l’a exhorté à méditer Ses Signes éloquents et à explorer les phénomènes de la nature. Il lui a montré Ses Signes par lesquels Il se manifeste dans les horizons et dans les âmes. Le Vrai c’est Lui. Toute chose hormis Lui est illusion, effacement et présence éphémère. Pour rendre Sa connaissance possible, Allah a donné un exemple que les interlocuteurs connaissent : la lumière, brillante illustration pour qui veut méditer… Il ne trouvera que la Lumière…

Abū Chady al-Madanī


Paris, Vendredi 28 décembre, 2012.


 

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