samedi 3 mars 2012

L'Histoire de l'écriture arabe




Les origines nabatéennes de l’écriture arabe


LE DEVELOPPEMENT DE L’ECRITURE est chez les Arabes tardif du fait de leur état nomade qui favorisait surtout une culture orale. D’ailleurs, à la naissance de l’Islam, au début du VIIe siècle, le Coran fut d’abord diffusé par la tradition orale.
L’arabe appartient au groupe des écritures sémitiques consonnantiques ainsi appelées parce que de fait, seules les consonnes sont représentées. La plupart des spécialistes s’accordent aujourd’hui à penser, que l’écriture arabe dérive de l’écriture nabatéenne elle même d’origine araméenne. Les Nabatéens, installés sur les terres bibliques du royaume d’Edom en Arabie du Nord (actuelle Jordanie) vers le IVe siècle avant Jésus-Christ et dont la capitale était Pétra, parlait une langue araméenne et écrivait en araméen.


Progressivement s’est développé une écriture cursive formelle spécifiquement nabatéenne qui se distinguait de l’araméen par la présence de ligatures. Ce développement s’est doublé d’une évolution dans la langue parlée par les Nabatéens avec l’introduction progressive de termes et de constructions grammaticales arabes. C’est ainsi que vers le 2e siècle après Jésus-Christ, les Nabatéens parlaient majoritairement arabe comme l’atteste l’origine arabe de leurs noms et ne conservaient l’araméen, dans une version arabisée, que comme langue officielle.

L’écriture arabe est donc née aux alentours du VIe siècle de l’écriture cursive nabatéenne. Elle s’est progressivement répandue à l’époque de Mahomet à La Mecque puis à Médine. S’est ainsi développée la première écriture spécifiquement arabe, le Jazm, dont la raideur, l’angulosité et la proportion égale de ses lettres rappelle la graphie coufique. L’écriture Jazm devint bientôt celle de tous les Arabes et « assuma le statut de l’écriture sacrée que Dieu avait spécialement choisie pour transmettre à l’humanité son message divin. » (Safadi).

Inscription nabatéenne, Pétra

Inscription nabatéenne de Aslah de Pétra, Ier siècle avant .J-C



Inscription nabatéenne, Pétra

Inscription nabatéenne de la tombe du poète Imru’ al-Qays à Namarah (328)



Inscription nabatéenne, Pétra
Idem - Agrandissement



Ecriture cursive
Ecriture cursive ancienne tirée d’une inscription datée de 677



Les premiers développements calligraphiques

IL FAUT SOULIGNER le rôle central que le Coran a joué dans la formation de l’écriture arabe. Le besoin de consigner le Coran par écrit obligea précisément les Arabes à réformer leur écriture et à l’embellir, pour la rendre digne de la révélation divine. Omar, ami du Prophète et futur calife, pressa le premier calife Abu Bakr de mettre le Coran par écrit; ce travail fut réalisé par le secrétaire du Prophète Zayd ibn Thabit. Cette rédaction, codifiée sous le troisième calife Othman, fut copiée en cinq exemplaires qui furent expédiés dans les principales contrées de l’empire. Les copies ultérieures du Coran sont dérivées de ces premiers exemplaires, réalisés à l’époque en Jazm. À cette époque apparurent des variantes médinoises et mecquoises du Jazm, le Mail (écriture couchée), le Mashq (écriture allongée) et le Naskh (inscriptionnel); seules les deux dernières perdurèrent.
Le successeur de Othman, le cousin de Mahomet et son beau-fils, Ali Ibn Ani Talib est considéré comme le premier maître de la calligraphie en développant un style particulier de coufique.
Les Écritures Coufiques
L’écriture coufique est née à Kufah, dans la deuxième décennie de l’ère islamique. Grandement inspirée de l’écriture de la ville voisine de Hirah, al-Khatt al-Kufi (« écriture coufique » en arabe) est caractérisée par une graphie originale fondée sur son angulosité et ses formes carrées prononcées, faites de courts traits verticaux et de lignes horizontales prolongées. Contrastant avec ces verticales basses, les lignes horizontales sont allongées.
Parallèlement, l’écriture Mashq développa des caractéristiques individuelles et devint légèrement plus cursive, avec un profil vertical bas et des traits horizontaux allongés.
L’écriture coufique atteignit sa perfection dans la seconde moitié du VIIIe siècle et acquit de facto une prééminence qui dura plus de trois siècles: elle devint l’unique écriture employée pour la copie du Coran. L’austérité des origines, fut alors dépassée avec le développement de l’écriture coufique ornementale. Son élégance simple en fit une écriture très prisée pour des usages épigraphiques. Son développement se poursuivit jusqu’au XIIe siècle, date à laquelle l’écriture devint essentiellement décorative.
Le Coufique oriental est une variante développée par les Perses à la fin du Xe siècle qui se distingue du Coufique traditionnel par ses longs déliés qui restent verticaux, avec des barbelures au sommet, et ses traits courts inclinés ou penchés vers la gauche, donnant ainsi un mouvement dynamique vers l’avant. La plus fameuse de ces écritures est l’écriture Qarmate dans laquelle les caractères du Coufique oriental sont intégrés à un fond richement enluminé, fait de motifs floraux et d’arabesques.



Écriture Mashq
Écriture Mashq d’un Coran
(ca 725)





Inscription coufique omeyyade
Inscription coufique omeyyade aux lettres triangulaires, dédicace d’un bassin construit pour le Calife Hisham
(724-743)





Coufique fleuri
Coufique fleuri





Ecriture qarmate
Ecriture qarmate


Réformes et codification de l’écriture arabe


POUR REPONDRE au besoin impérieux d’apprendre l’arabe aux nouvelles contrées conquises par les Musulmans, il s’avéra rapidement impérieux de conduire certaines réformes afin d’établir de manière définitive la pronociation correcte du Coran.

La réforme de l’écriture arabe

Abou al-Aswad al-Douali (?-688) fut le fondateur de la grammaire arabe et inventa le système de signes diacritiques qui consiste à placer de grands points colorés pour indiquer les éléments du discours arabe non représenté par des lettres.

Ce travail fut complété par le vice-roi omeyyade al-Hajjaj Ibn Yousouf al-Thaqafi, qui pour régler le problème de la différenciation des consonnes qui partageaient une forme identique, demanda à Nasr Ibn Asim et Yahya Ibn Yamour d’imaginer un système fondé sur l’usage de petits points noirs placés au-dessus et au-dessous du contour de la lettre par groupes de deux ou trois.

Le développement des écritures cursives

L’écriture arabe, depuis ses origines, s’est divisée en deux très larges catégories - le Moqawwar wa-Modawwar (incurvée et arrondie) et le Mabsot wa-Mostaqim (allongée et droite). Le Mashq et le Coufique appartiennent à la deuxième catégorie.

La catégorie incurvée et arrondie remonte à la première décennie de l’ère musulmane et certainement, plus anciennement encore, à la période pré-islamique. Longtemps, elle n’a servi que pour des usages profanes.

Sous les Omeyyades, les écritures Tomar, Jalili, Nisf et Tholoth furent ébauchées. Mais c’est le Jalil et le Tomar qui furent les écritures officielles des califes omeyyades. Les écritures Nisf et Tholoth dérivent directement du Jalil, écriture monumentale. Le degré de cursivité de ces dernières a la particularité d’augmenter à mesure que la taille des lettres diminue.

Ce fut le génie d’Abou Ali Ibn Moqlah (846-940), vizir des trois califes abassides al-Moqtadir (908-932), al-Qahir (932-934), al-Radi (934-940), et sa connaissance de la science géométrique qui introduisirent l’étape la plus importante dans le développement de la calligraphie arabe. Ibn Moqlah se fixa comme tâche de dessiner une écriture cursive qui soit à la fois belle et parfaitement proportionnée.

Il instaura un système global de règles calligraphiques de base, fondé sur le point en losange comme unité de mesure. Il redessina le contour géométrique des lettres et corrigea leur forme et leur taille au moyen du point, de l’Alef et du cercle. Il s’agit de faire un Alef qui est « calligraphié et mesuré avec la pensée », puis de dessiner un cercle dont le Alef est le diamètre. Chaque lettre a pour base ce cercle.

Ce faisant, Ibn Moqlah a doté l’art calligraphique arabe de règles scientifiques précises, d’après laquelle chaque lettre, pourvue d’une discipline rigoureuse, est rattachée aux trois unités standards que sont le point, le Alef et le cercle. Cette méthode d’écriture, baptisée al-Khatt al-Mansob, fut perfectionnée par ses élèves dont le plus célèbre est Ibn al-Bawbab (?-1022). Pour comprendre l’importance d’Ibn Moqlah dans l’histoire de l’écriture arabe, il est possible de citer Abdullah Ibn al-Zariji, qui au Xe siècle remarquait: « Ibn Moqlah est un prophète dans l’art de la calligraphie. Son cadeau est comparable à l’inspiration des abeilles lorsqu’elles construisent les alvéoles. »

Progressivement, les écritures cursives, surtout le Tholoth, commencèrent à pouvoir rivaliser pour la copie du Coran avec les écritures coufiques.



Bismillah
Bismillah en Tholoth











Alef et cercle étalon
Alef et cercle étalon
Alef tracé d’après l’échelle des sept points en losange





Lettre ‘Ayn
Lettre ‘Ayn dans le système
de proportion



Les six écritures principales de la tradition classique

A PARTIR DU NASKHI, le calligraphe Ibn Moqlah identifia six styles d’écriture :
Le Tholoth

Le Tholoth, apparu au VIIe siècle, est une écriture statique et monumentale, essentiellement utilisée à des fins décoratives dans les manuscrits et les inscriptions. Elle a également été utilisée pour la copie des Corans, surtout pour les têtes de chapitre et les colophons. On la considère comme la plus importante des écritures ornementales.

Le Naskhi

Le Naskhi, dont les origines remontent au VIIIe siècle, est apparue dans sa forme systématisée au IXe siècle. Considérée comme peu élégante, elle était surtout utilisée pour la correspondance ordinaire. Avec l’arrivée du papier, qui remplaça le parchemin, et grâce à Ibn al-bawbab qui en fit une écriture élégante, ce style gagna ses lettres de noblesse et servit d’écriture principale de Corans. À ce jour d’ailleurs, il y a plus de Corans copiés en Naskhi que dans toutes les autres écritures arabes réunies. Elle est presque toujours formée de courts traits horizontaux et de verticales d’égale hauteur au-dessus et au-dessous de la ligne médiane. Les courbes sont pleines et profondes, les jambages droits et verticaux, les mots bien espacés en général.

Le Mohaqqaq

Le Mohaqqaq était originellement une écriture dont les lettres étaient moins angulaires que le Coufique, avec des ligatures bien espacées; l’ensemble était « produit avec méticulosité » comme son nom l’indique. Avec la découverte du papier autour de 750, l’écriture acquit une certaine rondeur qui la rendit plus facile à tracer et devint l’écriture favorite des scribes. Modifiée par Ibn Moqlah, elle conserva ses déliés allongés sans presque de pleins ni d’enjolivures accusées sous les lignes. Cela en fit l’écriture favorite des Corans de grand format.

Le Rayhani

Le Rayhani, né au IXe siècle a des liens de parenté certains avec le Naskhi et le Tholoth. Elle est caractérisée par la finesse de ses lettres, finesse accentuée parce que le traits et les fioritures des lettres se terminent en pointes aiguës, et que les signes diacritiques sont très fins et toujours appliqués à l’aide d’une plume différente, dotée d’une entaille beaucoup plus petite. Elle est également considérée comme la sœur du Mohaqqaq car, entre autre, le centre des boucles des lettres n’est jamais rempli. Néanmoins, à la différence du Mohaqqaq, il utilise pleinement les fioritures sublinéaires, comme le Tholoth. Le Rayhani fut surtout prisé pour les grands Corans par les Perses.

Le Tawaqi

Le Tawaqi (signature) est issu de l’écriture Riyasi, que les califes abbassides utilisèrent pour signer leur nom et leur titre. Plus arrondie que le Tholoth, l’écriture Tawaqi est assez proche de l’écriture Riqa, mais s’en distingue par des lignes plus épaisses, des courbes plus arrondies, ce qui lui donne une apparence beaucoup plus lourde. Elle est également plus grande et plus élégante que le Riqa ce qui en fera une écriture utilisée pour les occasions importantes.

Le Riqa

L’écriture Riqa (petite feuille) provient à la fois du Naskhi et du Tholoth. La forme géométrique de ses lettres et particulièrement les fioritures des finales, ressemble beaucoup à celles du Tholoth, mais elle est bien plus petite et dotée de courbes plus arrondies et ses Alefs ne sont jamais écrits avec des barbelures. Le centre des boucles des lettres est invariablement rempli, les lignes horizontales sont très courtes et les ligatures structurées avec densité, les finales étant souvent attachées aux initiales. Son emploi fut réservé au courrier personnel et pour les livres profanes de moyen format. C’est aujourd’hui l’écriture manuscrite la plus employée dans le monde arabe.

Le Tomar

Il est possible d’ajouter à ces six écritures principales, l’écriture Tomar qui aurait été conçue sous le premier calife omeyyade Moawiya (661-680). Ce dernier en fit une écriture royale et est à ce titre une des plus ancienne écritures arabes. Bien qu’elle ait gardé des caractères grands et lourds, elle perdit vers le Xe siècle, son aspect statique et angulaire.



Ecriture Riqa
Ecriture Riqa





Ecriture Tomar
Ecriture Tomar
« Allah est mon espérance »




Ecriture Tholoth
Ecriture Tholoth






Ecriture Naskhi
Ecriture Naskhi


Les écritures maghrébines et les développements tardifs

Les écritures maghrébines

Au Maghreb, l’Occident islamique, des formes spécifiques d’art furent développés; la calligraphie n’échappa pas à cette tendance. C’est ainsi, que le Coufique occidental se développa vers 670 à Kairouan. Ce Coufique est sensiblement plus arrondis que son homologue oriental et surtout fait preuve d’une plus grande cursivité grâce à ses courbes bien déterminées et ses demi-cercles presque parfaits.

De ce Coufique, nacquit le Maghribi, une écriture cursive qui surpasse en délicatesse les autres cursives orientales par la finesse de ses lignes, la liberté coulante de ses courbes ouvertes, la clarté et la rondeur de ses boucles et par-dessus tout, par les fioritures accusées sous les lignes qui lui confèrent une qualité unique d’intégration. Un autre aspect du Maghribi est que ses déliés se terminent invariablement par une légère courbe vers la gauche, en une fin assez émoussée, tandis que ses pleins ont une ligne effilée dont les courbes, tournées aussi vers la gauche, peuvent se prolonger jusqu’à l’aire du mot situé au-dessus.

On distingue quatre styles de Maghribi que sont le Qayrawani, l’Andalousi, le Fasi et le Soudani:

  • le Qayrawani dénote une légère ressemblance avec le Naskhi et a de très courts déliés. Une variante monumentale est utilisée dans les Corans.
  • l’Andalousi est plus compact et plus délicat que les autres styles. Originaire de Cordoue, il fusionna avec le Fasi lorsque les Arabes durent quitter le sol espagnol.
  • le Fasi (de Fez au Maroc) est de plus grande dimension que l’Andalousi et est moins décoré que ce dernier.
  • l’écriture Soudani a d’abord été créée à Tombouctou vers 1210 avant de se développer en Afrique sub-saharienne. Écriture favorite des peuples musulmans de cette région, ses lignes sont plus épaisses et ses lettres plus denses que le Maghribi issu du Fasi et de l’Andalousi.

Les développements calligraphiques tardifs

L’effondrement de l’Islam arabe face aux invasions mongoles, la conversion des princes mongols à l’Islam, ont freiné le développement artistique mais ne l’ont pas stoppé. Certains princes mongols comme Timour et son fils ont été de grands mécènes. Tandis que plus à l’ouest, en Egypte, les Mamelouks se faisaient les champions de la continuité calligraphique.


En Perse, au XVIe siècle, l’écriture Taliq fut créée à partir d’une écriture ancienne cursive sans prétention. Dérivée du Riqa et du Tawqi, cette écriture sera très prisée des Persans, des Indiens et des Turcs.

Le Nastaliq est une variante du Taliq formée à la fin du XVe siècle et est devenue l’écriture nationale perse. Le Nastaliq se distingue par ses formes arrondies, sa clarté et sa pureté géométrique. Il est également caractérisé par un manque de hauteurs en pointe, des dents dans les lignes horizontales de certaines lettres (sin et shin), un remplissage fréquent du centre des boucles, et la terminaison de la plupart des lettres non liées en traits fins et pointus. Un autre aspect commun est que les courbes montrent un fort contraste dans la largeur de leur ligne qui change brusquement du maximum au plus fin. Il est à noter que cette période est également marquée par la richesse d’enluminure des Corans, réalisés à cette époque en Nastaliq en Perse.

Par ailleurs, se développa en Inde en Afghanistan une écriture cursive mineure, la Bihari caractérisée par la largeur et l’allongement de ses traits horizontaux qui contrastent nettement avec la finesse et la délicatesse de ses lignes verticales. En Chine, l’écriture Sini (chinoise) émergea avec ses lignes très fines et à la rondeur exagérée.



Maghribi
Sourate IV, « Les femmes »
en Maghribi épais, Maroc, XIe siècle


Ecriture Andalousi
Ecriture Andalousi




Ecriture Taliq
Ecriture Taliq





Bismillah en écriture Sini
Bismillah en écriture Sini



La calligraphie ottomane

LES OTTOMANS dominèrent le monde islamique à partir de la défaite Mamelouk de 1517. Ils étaient renommés pour leur amour de la calligraphie et surent assimiler toutes les traditions calligraphiques et ornementales arabes et perses.


Les écritures officielles

Le Shekasteh (forme brisée) fut la première écriture spécifiquement ottomane issue par ailleurs directement de la tradition persane. Ce style est caractérisé par une compacité exagérée due à des ligatures étroitement jointes, et à des verticales très basses et très penchées, et à une absence de signes vocaliques. Le Shekasteh-amiz est son écriture sœur ornementale et a été surtout utilisée dans les chancelleries et les administrations officielles alors que le Shekasteh était réservé aux lettres personnelles et à la correspondance d’affaires.

Le Diwani est une écriture développée au XVe siècle, fortement cursive (à l’excès diraient certains) et dont les lettres sont dénuées de points et liées inhabituellement ensemble.

L’élaboration définitive du Jeli Diwani date de cette époque également. La principale caractéristique de ce style réside dans des ornements abondants et des procédés décoratifs variés qui n’ont pas néces-sairement de valeur ortho-graphique. L’ensemble se présente comme une masse solide et structurée, formant des rectangles droits ou légèrement courbes, ou bien d’autres figures géométriques.

Pour conclure: divers styles

L’écriture Ghobar (poussière) connue sous le nom de Ghobar al-Halbah est attribuée à al-Ahwal qui la fit dériver du Riyasi au IXe siècle. Elle consiste en des minuscules lettres rondes qui ont emprunté certaines caractéristiques au Tholoth et au Naskhi. Elle a été créée pour écrire des messages pour pigeons voyageurs mais a ensuite été très utilisée par les Ottomans pour la calligraphie des Corans de petites tailles: on a pu écrire le Coran (77.934 mots) sur une coquille d’un œuf de poule.

On peut enfin citer toute une série d’écritures secondaires d’intérêt divers:

  • le Zoulf-iarous, la “mèche de la mariée”, est un style dont les lignes sont épaisses et se terminent en fins épis qui provoque de petites boucles;
  • le Goulzar est la technique qui consiste à remplir l’espace intérieur des grandes lettres au moyen de divers procédés ornementaux;
  • le Mothanna ou Aynali est l’art de l’écriture miroir, dans laquelle l’unité de gauche reflète celle de droite;
  • la calligraphie zoomorphique consiste à disposer l’écriture de manière à dessiner un animal voire végétal;
  • le Toughra est un procédé calligraphique qui connut la notoriété en devenant l’emblème des sultans ottomans. Il consiste en une sorte de cryptage inimitable. Dans ce procédé, les premières lettres sont particulièrement proéminentes et forment une base compacte dont sont projetés des appendices, les dernières lettres du nom. Généralement, pareilles signatures sont assez peu lisibles et le sont d’autant moins que les premières lettres sont disporportionnées;
  • le al-Khatt al-Sunbali écriture lourde et stylisée peu utilisée;
    le Harf al-Nar qui ajoute à ces caractéristiques, comme son nom le suggère, des langues de feu;
  • le Siyaqat, enfin, est une graphie fonctionnelle, créée par les Ottomans pour les institutions du gouvernement, et surtout pour les bureaux délivrant des patentes ou tout autre document commercial ou financier. Elle est caractérisée par des lignes lourdes et droites ainsi qu’une relative angularité.
Ecriture Diwani
Ecriture Diwani




Ecriture Jeli Diwani
Ecriture Jeli Diwani





Ecriture Taliq
Exemple indien
de l’écriture Zoulf-i’arus, c.a.1820




calligraphie d’écriture Tholoth
“Au nom d’Allah, le Clément, le Miséricordieux”, relevé d’un calligraphie d’écriture Tholoth
en forme de poire, de Al Rifai, 1924




Toughra
Toughra du sultan Mahmoud Khan, calligraphiée en 1808 par Moustafa Raqim



Article rédigé par: Jean-Christophe Loubet del Bayle
Beyrouth, Juin 1996
Publié en juin 2000 sur T&C - Remis en page en avril 2006

Sources:
Blachère (Régis), traducteur, Le Coran, G.P. Maisonneuve & Larose, Paris, 1956 & 1980
Khatibi (Abdelkebir) & Sijelmassi (Mohammed), The Splendor of Islamic calligraphy, Thames & Hudson, Londres, 1995
Massoudy (Hassan), Calligraphie arabe vivante, Flammarion, Paris, 1981
Meynet (Roland), L’Ecriture arabe en question, Coll. Hommes et Sociétés du Proche-Orient, Dar-el-Machreq, Beyrouth, 1971
Safadi (Yasim Hamid), Calligraphie islamique, Chêne, Paris, 1978
Schimmel (Annemarie), Islamic calligraphy, Coll. Iconography of Religions, E.J.Brill, Leyde, 1970


Illustrations:
Les illustrations sont extraites des différents ouvrages précités.
L’image de titre est une calligraphie zoomorphique tirée de tableaux d'une confrérie soufie, un texte d’éloge à l’Imam Ali, souvent appelé « le lion de Dieu ».
La calligraphie présentée ci-dessus est l’oeuvre originale d’Edmond Fakhri et reprend le nom de l’auteur de cet article.


http://www.typographie.org/index.html

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