lundi 2 avril 2012

Le Coran à la Mecque

 

 

Caractéristiques du Coran mecquois


Dans la caverne de Hirâ’, entre les montagnes mecquoises, la révélation commença à être faite au Messager de Dieu - paix et bénédiction de Dieu sur lui - appelant au monothéisme pur et fustigeant l’adoration des idoles. Cette révélation interpela la fitrah [1] de l’homme et le libéra de l’imitation aveugle des aïeux. Elle recommanda les vertus et interdit les vices. Elle attira l’attention des hommes sur l’univers et ce qu’il recèle, le ciel et Celui qui l’a merveilleusement créé, la terre et Celui qui l’a étendue, les montagnes et Celui qui les a établies, les mers et Celui qui les a écoulées... Il attira également le regard vers d’autres signes de l’univers comme la nuit obscure, le jour ensoleillé, la fascinante lune, les étoiles brillantes, les plantes florissantes, les vents, les pluies... Ces courts versets de sourate Al-Ghâshiyah nous interpellent dans ce sens : « Ne considèrent-ils donc pas les chameaux, comment ils ont été créés * et le ciel comment il est élevé, * et les montagnes comment elles sont dressées * et la terre comment elle est nivelée ? * Eh bien, rappelle ! Tu n’es qu’un rappeleur, * et tu n’es pas un dominateur sur eux. » [2].
Citons aussi ces versets de sourate `Abasa : « Que l’homme considère donc sa nourriture : * C’est Nous qui versons l’eau abondante, * puis Nous fendons la terre par fissures * et y faisons pousser grains, * vignobles et légumes, * oliviers et palmiers, * jardins touffus, * fruits et herbages, * pour votre jouissance vous et vos bestiaux. » [3].
La révélation mecquoise et la révélation médinoise ont, chacune, des caractéristiques propres et des signes distinctifs. Bien que la connaissance du caractère mecquois ou médinois des passages du Coran dépende de ce que les compagnons et les successeurs ont transmis, il est des signes et des règles qui permettent de distinguer la révélation mecquoise de la révélation médinoise. Ces signes furent décelés par les savants du passé à travers l’étude minutieuse du Noble Coran.
Parmi les caractéristiques de la révélation mecquoise citons :
  1. Chaque sourate où figure le mot kallâ (« non ! ») est mecquoise. Il y a 33 occurrences de ce mot dans le Noble Coran, toutes dans la seconde moitié du Coran. En effet, la seconde moitié du Coran est constituée essentiellement de sourates mecquoises ; sachant que la plupart des mecquois étaient des tyrans, ce mot constituait une menace, une admonestation et un reproche ferme qui leur étaient adressés.
  2. Chaque sourate qui contient l’apostrophe « Ô gens ! » et ne contenant pas « Ô vous qui avez cru ! » est une sourate mecquoise.
  3. Chaque sourate rapportant les récits des Prophètes et les communautés passées est mecquoise, exception faite de sourate Al-Baqarah.
  4. Chaque sourate mentionnant le récit de Adam et Satan est mecquoise, sauf, encore une fois, sourate Al-Baqarah.
  5. Chaque sourate débutant par des lettres détachées comme (Alif Lâm Mîm), (Tâ Sîn Mîm), ou (Hâ Mîm), est mecquoise, à l’exception de sourate Al-Baqarah et sourate Âl `Imrân.
  6. Chaque sourate comportant une prosternation pendant la récitation est mecquoise.
Ces caractéristiques, avec leurs exceptions mentionnées, constituent des signes certains et invariables.

 

Autres caractéristiques du Coran mecquois


Il y a des caractéristiques dominantes et des attributs fréquents qui touchent, dans leur ensemble, les champs de l’éloquence et du sens, et qui aident à déterminer le caractère mecquois ou médinois d’un verset.
Parmi les éléments fréquents dans la révélation mecquoise il y a :
Premièrement :
L’interpellation de l’intellect et de la réflexion. La révélation mecquoise attire l’attention sur les preuves manifestes et les signes dans l’univers qui témoignent de l’Unicité de Dieu et de Son Omnipotence.
Par exemple, sourate Qâf est une sourate mecquoise que le Prophète - paix et bénédiction de Dieu sur lui - récitait fréquemment pendant les sermons du vendredi au point que les femmes musulmanes dirent : "Nous n’avons appris sourate Qâf que du sermon du Prophète - paix et bénédiction de Dieu sur lui". Dans cette sourate, Dieu - Exalté Soit-Il - dit : "N’ont-ils donc pas observé le ciel au-dessus d’eux, comment Nous l’avons bâti et embelli ; et comment il est sans fissures ? * Et la terre, Nous l’avons étendue et Nous y avons enfoncé fermement des montagnes et y avons fait pousser toutes sortes de magnifiques couples de [végétaux],* en guise d’appel à la clairvoyance et un rappel pour tout serviteur repentant. * Et Nous avons fait descendre du ciel une eau bénie, avec laquelle Nous avons fait pousser des jardins et le grain qu’on moissonne, * ainsi que les hauts palmiers aux régimes superposés, * comme subsistance pour les serviteurs. Et par elle (l’eau) Nous avons redonné la vie à une contrée morte. Ainsi se fera la résurrection" [4].
Ces versets constituent un des modèles de da`wah [5] récurrents dans le Noble Coran. Ils interpellent l’homme et le renégat avec une telle force pour lui dire : "Tu n’as pas été créé sans but et tu ne seras pas laissé sans obligation à observer. Cet univers a nécessairement un Créateur et ce monde a forcément une finalité. Il faut après la mort une résurrection, un jugement et une rétribution. Et l’issue sera soit un Paradis soit un Enfer".
Dieu - Exalté et Glorifié Soit-Il - dit : "Pensiez-vous que Nous vous avions créés sans but, et que vous ne seriez pas ramenés vers Nous ? › * Que soit exalté Allah, le vrai Souverain ! Point de divinité en dehors de Lui, le Seigneur du Très sublime !" [6].
Deuxièmement :
Le Coran mena une violente guerre contre le polythéisme (shirk), l’idolâtrie (wathaniyyah) et les prétextes qu’avançaient les mecquois pour persister dans l’adoration des idoles. Le Coran ne leur laissa la moindre issue et leur fournit les preuves probantes de leur erreur. Il recourut à l’arbitrage des sens, en donnant des exemples, ô combien éloquents, qui montrent la perte des idoles, prouvent qu’elles ne peuvent ni faire du bien, ni nuire, et qu’elles ne peuvent rien pour elles-mêmes, ni à plus forte raison, pour autrui. Et il est bien connu que l’on ne peut donner à autrui ce dont on est soi-même démuni.
Il y a dans le récit d’Abraham une leçon à tirer et un modèle invitant à déraciner cette habitude déviante. Ainsi, ce dernier détruisit les idoles adorées en dehors de Dieu, puis dit à son peuple : "[...] ‹Adorez-vous donc, en dehors d’Allah, ce qui ne saurait en rien vous être utile ni vous nuire non plus. * Fi de vous et de ce que vous adorez en dehors d’Allah ! Ne raisonnez-vous pas ?›" [7].
Lorsque les mecquois s’entêtèrent dans leur égarement, prétextant qu’ils suivaient la voie de leurs aïeux, le Coran leur reprocha avec force de faire chuter la dignité de l’être humain dans ce gouffre de l’humiliation pour des pierres et des idoles. Il montra la sottise de leurs illusions et celles de leurs aïeux qui négligèrent l’étude des signes qu’il y a en eux et des signes divins qui comblent les horizons. Il enlaidit à leurs yeux l’immobilisme qui les poussait à l’imitation aveugle de leurs aïeux : "Et si leurs aïeux n’avez point d’entendement et n’étaient guère guidé...".
En outre, le Coran débattit avec eux quant à leurs croyances déviantes ; croyances qui se traduisirent par cette idolâtrie, l’ingratitude envers Dieu, le refus des prophéties, et la négation de la résurrection, la responsabilité et la rétribution.
Troisièmement :
Le Coran aborda les mauvaises coutumes des mecquois. Il les appela à les délaisser, en leur montrant leurs effets néfastes sur l’individu et la société. Il leur interdit le meurtre, l’effusion du sang, l’enterrement des filles à leur naissance, la violation des honneurs, et l’usurpation de l’argent des orphelins.
A l’opposé, il loua les pieux qui se préservent de ces vices. Citons à cet égard ce verset de sourate Al-Furqân qui décrit les qualités des serviteurs du Tout Miséricordieux : "Et ceux qui n’invoquent pas d’autre divinité avec Allah et ne tuent pas la vie qu’Allah a rendue sacrée, sauf à bon droit ; qui ne commettent pas de fornication - car quiconque fait cela encourra une punition." [8].
Quatrièmement :
Le Coran exposa magnifiquement aux mecquois les fondements de l’éthique et les droits de la société. Il leur rendit détestables la mécréance, la perversion, la désobéissance à Dieu, l’anarchie, l’ignorance, le mauvais caractère, la dureté du coeur et la rudesse dans les paroles. Il leur fit aimer la foi, l’obéissance à Dieu, l’ordre, la science, l’amour, la miséricorde, la sincérité, le respect d’autrui, la gratitude envers les parents, la générosité à l’égard des voisins, la purification du coeur et la pureté de la langue...
Cinquièmement :
Le Coran relata aux mecquois les récits des Messagers, des Prophètes et l’histoire des peuples précédents. Il y a en ces récits d’éloquentes exhortations et des leçons bénéfiques montrant les règles divines que Dieu établit dans l’univers pour faire périr les mécréants et les tyrans et pour donner la victoire aux croyants et les bienfaisants. La victoire des croyants finit par arriver aussi longtemps qu’ils défendent la vérité et soutiennent la foi.
Sixièmement :
Le Coran s’adressa aux mecquois en des termes concis. C’est ainsi que les versets des sourates mecquoises furent courts. Les mecquois étaient, en effet, réputés pour leur éloquence. Ils étaient de grands orateurs, et la façon la plus appropriée pour les interpeller était d’user de mots forts et concis, plutôt que de recourir à de longs discours. Aussi la Haute Sagesse divine veilla-t-elle à ce que le progrès et l’élévation dans l’éducation des peuples et des individus se fassent de façon graduelle, en hiérarchisant les priorités. Nul doute que le credo et l’éthique sont plus importants que les différentes formes d’œuvres de culte et les transactions complexes : les premiers constituent, en effet, les fondements des seconds. C’est pour cela que la révélation mecquoise les aborda de façon fréquente et leur accorda le plus grand soin. Le Noble Coran commença par les fondements les plus prioritaires avant d’arriver aux questions de moindre importance, et suivit la méthodologie générale des Messages destinés à guider l’être humain, à l’honorer et à raffiner ses manières.
Dieu - Exalté Soit-Il - dit : "Nous ne t’avons envoyé qu’en miséricorde pour les mondes". Et le Messager de Dieu - paix et bénédiction de Dieu sur lui - dit : "Je n’ai été envoyé que pour parachever les nobles manières".

 

P.-S.


Traduit de l’arabe de `Ulûm Ad-Dîn Al-Islâmî (Les sciences de la religion islamique) de Dr. `Abd Allâh Shehâtah, éditions Al-Hay’ah Al-`Âmmah Al-Misriyyah lil-Kitâb, 3ème édition, 1998. ISBN 977-01-5786-4.

 

Notes


[1] la disposition originelle
[2] Sourate 88, Al-Ghâshiyah, versets 17 à 22.
[3] Sourate 80, `Abasa, versets 24 à 32.
[4] Sourate 50, Qâf, versets 6 à 11.
[5] Appel à Dieu, prédication.
[6] Sourate 23, Al-Mu’minûn, versets 115 & 116.
[7] Sourate 21, Al-Anbiyâ’, Les prophètes, versets 66 et 67.
[8] Sourate 25, Al-Furqân, Le critère, verset 68.

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