Tétraktys
* DENYS ROMAN, René Guénon et les destins de la
Franc-Maçonnerie, Les editions de l'OEuvre, Paris, 1982, ch. I, pp.
19-29.
Bien
entendu, le fait que le pentagone étoilé n'est pas forcément associé au nom de
Pythagore, et que beaucoup de Maçons latins ignorent même que le tracé de cette
figure constituait le signe de reconnaissance des Pythagoriciens, alors que,
par contre, le théorème sur le carré de l'hypoténuse est universellement connu
sous le nom de théorème de Pythagore, ce fait, disons-nous, a eu pour conséquence
que la Maçonnerie anglo-saxonne a gardé beaucoup plus vivant que la Maçonnerie
latine le souvenir de sa connexion avec le Pythagorisme. La chose lui était du
reste facilitée, parce que certains des anciens documents appelés Old
Charges font expressément mention de Pythagore comme ayant introduit la
Maçonnerie en Europe. –
Cependant,
c'est un Maçon italien, aujourd'hui décédé, Arturo Reghini, qui a publié, sur
les rapports entre Maçonnerie et Pythagorisme, le seul ouvrage de valeur dont
nous ayons eu connaissance (2).
Avant
de dire tout le bien que nous pensons de ce livre, nous devons émettre une
critique, et une critique grave. Son auteur méconnaissait absolument le Christianisme,
qu'il était pourtant bien placé pour connaître, au moins sous une de ses
formes.
C'est
même trop peu de dire qu'il le méconnaissait, il en donnait une image qui est
une véritable caricature. Comment s'exprimer autrement quand on voit l'auteur stigmatiser
« la hantise (3) sexuelle qui est diffuse dans les religions dérivées de l'hébraïsme
et qu'on retrouve dans le Christianisme, par exemple avec la circoncision, à
qui est consacré le premier jour de l'année, et dans le dogme de l'Immaculée
Conception » (4) ?
Ce
passage est vraiment incroyable. Il est presque impossible d'accumuler plus
d'erreurs en si peu de mots. Si les calendriers chrétiens occidentaux portent
au 1er janvier la mention « Circoncision », ce n'est nullement pour consacrer
l'année entière à une observance mosaïque que le Christianisme a pour sa part
abolie, mais simplement parce que le Christ, étant né traditionnellement le 25 décembre,
a été circoncis, selon la loi, le 1er janvier, et que toutes les Églises
chrétiennes ont coutume de
célébrer les événements de la vie de leur fondateur (5). Et la circoncision est
si peu l'effet d'une « hantise sexuelle » d'origine israélite, qu'elle est
pratiquée non seulement par les Juifs et les Musulmans,
mais par les peuples les plus divers, civilisés ou sauvages. En Australie par
exemple, lors des « rites de puberté », certaines tribus pratiquent la
circoncision ; dans d'autres tribus, on pratique l'arrachage d'une dent ; mais
nous ne pensons pas que les premières de ces tribus soient plus « hantées »
sexuellement que les secondes.
Circoncision de Jésus (SAWS)
Et
pour ce qui est de l'Immaculée Conception, qui d'ailleurs n'est un dogme que
dans le Catholicisme romain, nous ne voyons pas en quoi le fait de croire que
la mère du Christ a été exemptée du péché originel pourrait avoir un lien
quelconque avec la sexualité.
Ces
réserves, que tout homme d'esprit traditionnel fait naturellement, et qu'un
Maçon devrait faire a fortiori parce que, respectant toutes les
religions, il doit respecter particulièrement celle à laquelle appartient
l'immense majorité des Maçons, ne doivent pas empêcher de reconnaître les
mérites exceptionnels du livre d'Arturo Reghini. L'auteur, s'il connaissait mal
le Christianisme et la « tradition monothéiste » en général, avait par contre
une connaissance remarquable des mathématiques (profanes
et traditionnelles), de la littérature et de la tradition gréco-latine, et du
Pythagorisme en particulier. Il avait aussi étudié l'Hermétisme, l'oeuvre de
Dante et des « Fidèles d'Amour ». Et c'est ainsi qu'il a pu, avant de mourir,
écrire cet ouvrage précieux, indispensable à quiconque s'intéresse soit à la
science des nombres, soit à la doctrine maçonnique.
Bien
entendu, un livre de ce genre, qui comporte de nombreuses démonstrations
mathématiques et figures géométriques, ne se résume pas. L'auteur étudie successivement
la Tétraktys pythagoricienne (qu'il assimile au Delta lumineux de
la Franc-Maçonnerie) (chap. 1), le pentalpha (étoile à cinq branches)
(chap. IV) et la table tripartite (qui est la planche à tracer) (chap.
VI), c'est-à-dire trois des symboles fondamentaux des grades symboliques. Il
examine longuement en outre des questions telles que les « nombres synthétique
» (chap. II), les nombres premiers (chap. III), les puissances arithmétiques
(chap. V), le Grand-OEuvre et la palingénésie (dernier chapitre). Reghini
compare longuement le ternaire 1-2-3, qui est le seul ternaire de nombres successifs
dont la somme des deux premiers (1 + 2) soit égale au troisième nombre (3),
avec le « ternaire égyptien » 3-4-5, seul ternaire de nombres successifs tel
que la somme des carrés des deux premiers (9 + 16) soit
égale au carré du troisième nombre : 25. S'ensuivent des considérations sur la
géométrie à une dimension (symbole de la manifestation « linéaire ») à la
géométrie à deux dimensions (symbole de la manifestation « en surface ») qui
conduit à la « prise de possession » de la terre). Il explique aussi par le passage
du ternaire 1-2-3 au ternaire 3-4-5 le fait que les Loges du 1er degré sont «
éclairées » par le « Delta lumineux » à trois pointes et que celles du 2e
degré le sont par l'« Étoile flamboyante » à cinq branches (6).
D'autres
considérations sont possibles sur les nombres 3, 4 et 5, dont les figures
géométriques correspondantes sont le triangle, le carré et le cercle. En effet,
les Arabes, qui ont transmis leur numérotation au monde occidental, figurent le
chiffre 5 par un cercle. Dans l'Atalante fugitive du Rosicrucien Michel
Maier, ces trois figures sont associées au problème hermétique de la «
quadrature du cercle », et selon d'anciens textes, elles auraient été particulièrement
vénérées par les Maçons opératifs. Il est d'ailleurs probable que c'est pour
cette raison que les « quatre saints couronnés » furent choisis comme patrons
secondaires de la Maçonnerie, en raison des rapports du nombre 4 avec le carré,
du mot « saint » avec le triangle (à cause du Dieu « trois fois saint ») et de
la couronne avec le cercle.
L'auteur
donne d'intéressants détails sur la Tétraktys « où sont compris tous les
nombres en principe » : on sait que c'est par elle que les Pythagoriciens
prêtaient serment (7).
René
Guénon a si souvent parlé de cette figure, « source et racine de la Nature
éternelle », que nous nous bornerons à mentionner, à la suite de Reghini, une
question de l'« instruction » des Pythagoriciens Acousmatiques : « Qu'y a-t-il
dans le sanctuaire de Delphes? - La sainte Tétraktys, parce qu'en elle
est l'harmonie où résident les Sirènes. » Et l'auteur précise que les Sirènes,
à une époque très reculée, symbolisaient l'« harmonie des sphères » (8).
Sur
le pentalpha ou étoile à 5 branches, le livre que nous analysons met en
lumière les rapports numériques remarquables qui lient entre eux les divers
éléments de cette figure, et qui la « marquent », pour ainsi dire, de la « loi
d'harmonie ». - Ces rapports sont tels que chaque élément du pentalpha est
la « section d'or » d'un autre élément. Et l'auteur, citant Cantor, souligne
que cette section d'or avait une grande importance dans l'architecture d'avant
Périclès.
Le
chapitre VI contient de longues considérations sur la planche à tracer ou table
tripartite, qui est aussi la « clé des lettres » (9). L'auteur y voit la table
du mathématicien Théon de Smyrne, et montre
ses liens avec ce système de numération des Grecs. Et rappelant que la pierre
brute, la pierre cubique et la planche à tracer sont les 3 « bijoux immobiles
», il ajoute que toutes 3 se réfèrent « à la construction des temples, qui,
d'après le rituel, est la tâche de la Franc-Maçonnerie ». La planche à tracer «
rappelle que cette construction, exige la connaissance des nombres sacrés, et,
par sa forme même, elle souligne l'importance spéciale de la division ternaire
» (p. 154).
Il
poursuit : « notons enfin que la planche à tracer de l'ancienne corporation
maçonnique peut être associée, sinon identifiée, d'une manière très simple et
naturelle encore que vague et d'un intérêt relatif, avec l'ancien abaque (10)
pythagoricien, le deltos, ou mensa pythagorica, confondue plus
tard avec l'antique table de Pythagore qui, il n'y a pas si longtemps encore,
s'enseignait dans nos écoles » (pp. 158-159). Et l'auteur termine ce passage en
indiquant que chez les Romains le mot mensa signifieà la fois table à
calculer et table à manger (11).
A.
Reghini rappelle aussi que la planche à tracer, d'après le rituel d'Apprenti,
symbolise la mémoire, et il ajoute : « La déesse de la mémoire, Mnémosyne, est
la mère des 9 Muses, ces Muses qui montrent l'Ourse à Dante conduit par Apollon
et inspiré par Minerve (Paradis, ch. 2). Mnémosyne, dans le mythe
orphico-pythagoricien des 2 fleuves ou des 2 voies, est la fontaine de vie,
l'Eunoé dantesque, opposée à la fontaine mortelle du Léthé. En outre, pour Platon,
la compréhension est une anamnèse, un ressouvenir. Il faut tenir compte de ce
sens supérieur de la mémoire chez les anciens, si l'on veut comprendre pourquoi
elle est symbolisée par la planche à tracer (pp. 161-162). »
L'ouvrage
contient un grand nombre de considérations intéressantes sur la musique, et les
liens qui unissent cet art à la science des nombres. On y cite une tradition
rapportée par Diogène Laërce, et qui raconte comment Pythagore, « en écoutant
les sons émis par les marteaux d'un forgeron frappant sur
son enclume, observa que la hauteur de ces sons dépendait de la grosseur des
marteaux, et puis, en essayant avec des cordes également tendues, il trouva que
lorsqu'on diminuait la longueur de la corde le son s'élevait, et qu'on obtenait
des sons dont l'oreille percevait l'accord quand les longueurs des cordes
étaient entre elles dans des rapports numériques simples » (p. 83).
A.
Reghini fait remarquer ici que les rapports numériques les plus simples sont
ceux qui ont pour éléments les nombres de la Tétraktys : 1, 2, 3 et 4,
et que les cordes de la lyre d'Orphée ou tétracorde de Philolaüs étaient dans
le rapport 1/2 2/3 3/4. Mais il convient de remarquer aussi que la légende rapportée
par Diogène Laërce attribue une origine « métallurgique » à la musique et
particulièrement à la lyre, cette même lyre par laquelle Apollon réglait le
mouvement des astres, Orphée apaisait
la discorde, Arion charmait les dauphins et échappait au naufrage, et Amphion
édifiait les murailles de Thèbes (12).
Orphée ramenant Eurydice des enfers Jean-Baptiste COROT (1861)
*
* *
Nous
devons maintenant aborder une autre question. On sait que l'étoile à 5 branches
ou pentalpha était le signe de reconnaissance de l'école
pythagoricienne, c'est-à-dire leur symbole le plus important.
A.
Reghini rappelle que les membres de cette école faisaient correspondre avec
chacun des sommets de la figure une des lettres du mot υγιεια (santé). Et l'auteur ajoute que la
santé est pour le corps ce que l'harmonie est pour l'être total (p. 125) ;
c'est vrai, mais il semble n'avoir pas remarqué une particularité curieuse :
chacune des lettres composant le mot υγιεια est une « lettre pythagorique » :
Υ, upsilon (i grec), lettre pythagorique par
excellence symbolisant les « deux voies de la droite et de la gauche », et «
sous une forme exotérique, le mythe d'Hercule entre la vertu et le vice » (13).
Γ, gamma, la lettre G de la Maçonnerie, qui a la forme
de l'équerre, symbole essentiel (avec la spirale) du second degré, et dont
Guénon a indiqué qu'elle « représente les deux côtés de l'angle droit du
triangle 3-4-5, qui a (...) une importance toute particulière dans la
maçonnerie opérative » (14).
I,
iota, symbole universel de l'Unité (15).
EI,
c'est-à-dire l'inscription mystérieuse gravée sur la porte du temple de
Delphes, et qui, en réponse à l'injonction : « Connais-toi toi-même », formule
explicitement la doctrine « solaire » de l'Identité
Suprême (16).
Enfin
A, alpha, élément constitutif du pentalpha, première lettre de
l'alphabet, qui représente le « retour aux origines ».
Le
symbolisme de la succession de ces 6 lettres serait intéressant à étudier.
Remarquons qu'elles sont disposées autour de l'étoile à 5 branches selon le
sens polaire, ce qui est parfaitement normal puisque le pythagorisme procède de
la tradition hyperboréenne (17). D'autre part, dans la Maçonnerie de langue
anglaise, la « préparation du récipiendaire » au second degré semble indiquer
que les voyages de ce grade devaient se faire en sens polaire, ce qui du reste
était le sens des voyages dans l'ancienne
Maçonnerie opérative.
Ce
que nous avons dit sur la raison probable du choix du mot υγιεια ne doit pas nous empêcher de
reconnaître l'importance toute particulière qu'avait la santé, et, d'une façon
générale, le développement corporel, pour les Pythagoriciens. On sait que
Pythagore lui-même n'avait pas dédaigné de concourir aux Jeux Olympiques (18),
et le « Père de la Médecine », Hippocrate, établit sa science sur des bases
pythagoriciennes, comme lui-même le déclare expressément. La science des
nombres (théorie des « jours critiques ») joue un grand rôle dans cette médecine,
qui du reste était un « art sacerdotal » (exactement comme l'Ayur-Véda des
Hindous, avec lequel il pourrait être intéressant de la comparer) ; et le «
serment d'Hippocrate », prêté sur 4 divinités (Apollon, Esculape, Hygie et
Panacée), est exactement calqué sur les obligations initiatiques, et comporte,
comme le serment maçonnique en particulier, 3 éléments essentiels : invocation,
engagement, imprécation (19).
Nous
pensons qu'il pourrait être intéressant de comparer ces deux sciences héritées
du Pythagorisme : la médecine hippocratique et la Maçonnerie. Et si quelques-uns
de nos lecteurs trouvaient ces considérations étranges, nous leur demanderions
comment ils expliquent le fait que toute Loge opérative,
parmi les membres « acceptés », comptait obligatoirement un médecin (20).
*
* *
A.
Reghini cite à plusieurs reprises une expression des rituels italiens où il est
parlé des « nombres sacrés qui sont connus des seuls Francs-Maçons », et il y voit
très justement un indice de filiation pythagoricienne. En France, où
l'expression qu'il cite ne se rencontre pas, croyons-nous, on trouve pourtant
une autre formule aussi significative. C'est la salutation que doit employer un
Maçon écrivant à l'un de ses frères : « Je vous salue par les nombres
mystérieux qui vous sont connus. » Cette formule indique clairement que les
Maçons connaissent la « science des nombres », et que ces nombres ne sont pas
les nombres « vulgaires » des profanes, mais bien ces nombres «
mystérieux » dans lesquels les Pythagoriciens voyaient l'essence de toutes
choses.
Mais
la « science des nombres » n'est pas spéciale au Pythagorisme, pourrait-on
dire, et la Kabbale et l'ésotérisme islamique en font un usage constant. C'est
vrai, mais, comme René Guénon l'a fait remarquer, les traditions juive et musulmane
considèrent le nombre « arithmétiquement », tandis que
le Pythagorisme, né au sein d'un peuple sédentaire et par conséquent
constructeur, les considère en tant que ces nombres sont liés aux formes
géométriques : triangle, cube, etc. Et il en est évidemment de même de la
Maçonnerie.
*
* *
A.
Reghini cite encore le silence comme élément commun aux Ordres pythagoricien et
maçonnique ; à la vérité, c'est là un trait commun à toutes les organisations
initiatiques, mais il est vrai que les néophytes pythagoriciens restaient 3 ans
parfois 5, en gardant le silence et en s'instruisant (21). Et ces nombres
peuvent rappeler les « âges » de l'Apprenti et du Compagnon, qui sont
assujettis au silence pendant leur temps de probation.
Il
convient aussi de mentionner que chacun des 5 voyages du second degré est dit
représenter une des années d'étude du néophyte.
*
* *
Ainsi,
la Maçonnerie a, parmi ses symboles et ses usages, plusieurs éléments qui lui
sont communs avec le Pythagorisme : Delta, étoile flamboyante, planche à
tracer, triangle 3-4-5, importance donnée au théorème sur le carré de
l'hypoténuse, science des nombres, silence de 5 ans, usage des repas rituels,
importance donnée à la santé du corps (22). On comprend que l'auteur du livre
dont nous rendons compte fasse sienne l'affirmation de l'archiprêtre Domenico
Angherà : « L'Ordre maçonnique est la même chose, absolument la même chose, que
l'Ordre pythagoricien. » A. Reghini pourtant sait bien qu'il existe aussi des
éléments judaïques, johanniques, templiers, rosicruciens, hermétistes, dans la
Maçonnerie ; mais dans son enthousiasme pour le Pythagorisme, il considère tous
ces éléments comme des adjonctions inutiles et même nuisibles. Et cela
l'entraîne à déprécier le grade de Maître, où les éléments salomoniens, comme
on le sait, sont prédominants (23).
D'un
autre côté, quand on considère que tous les mots sacrés de la Maçonnerie sont
hébreux ; que l'ère et le calendrier maçonnique sont spécifiquement juifs ; que
le président d'une Loge est dit occuper la chaire du roi Salomon, et que ses 2
assesseurs représentent Hiram, roi de Tyr, et Hiram- Abiff ; que les légendes
du 3e degré et des grades subséquents roulent entièrement sur les événements qui
ont précédé, accompagné ou suivi la construction du Temple de Jérusalem, on est
porté à penser
que le caractère « salomonien » de la Maçonnerie ne fait aucun doute.
Par
le Pythagorisme, la Maçonnerie se rattache à l'Orphisme et même à la tradition
hyperboréenne conservée à Delphes. Mais au cours des âges l'apport de la tradition
juive, puis de la tradition chrétienne est venu lui imprimer ses caractères définitifs.
Les « légendes » de Salomon, du meurtre d'Hiram-Abi et de la grande-maîtrise
des deux saints Jean en sont le témoignage. Et cette « imprégnation » juive et
surtout chrétienne préparait les voies aux nombreux héritages qu'allait
recueillir l'Ordre maçonnique, héritages dont le plus illustre, le plus noble
et le plus précieux est celui des Templiers.
(2)
Les Nombres Sacrés dans la Tradition Pythagoricienne Maçonnique (Archè,
Milano, 1981). En appendice, treize lettres
de René Guénon à Arturo Reghini sont publiées.
(3)
Dans l'édition originale, le mot « hantise » était en français et souligné dans
le texte.
(4)
Chap. VII, p. 166 de la traduction française.
(5)
Du reste, les premiers chrétiens ont varié beaucoup dans la date où ils
faisaient commencer l'année : 25 mars, 25 décembre,
1er janvier, etc.
(6)
Chap. III. A propos des expressions maçonniques 1er, 2e, 3e degré, faisons
remarquer que la marche d'Apprenti trace
une droite ; celle de Compagnon détermine un plan ; celle de Maître parcourt
l'espace.
(7)
Au chap. I, il cite les paroles de Lucien : « Regarde, ce que tu crois être
quatre, c'est dix, et le triangle parfait, et notre serment. » La Maçonnerie
donne à la Tétraktys le nom de Delta Au chap. l, il cite les
paroles de Lucien : « Regarde, ce que tu crois être quatre, c'est dix, et le
triangle parfait, et notre serment. » La Maçonnerie donne à la Tétraktys
le nom de Delta ; et l'on remarquera que la lettre grecque Delta est
la 4e lettre de l'alphabet, qu'elle a la forme d'un triangle, et qu'elle est
l'initiale du mot Décas (dix).
Sur
la Tétraktys, on se reportera notamment au chapitre XIV des Symboles
Fondamentaux de la Science Sacrée de R. Guénon.
(8)
Il est étrange que les Sirènes soient devenues, chez Homère notamment, des monstres
avides de sang humain, comme si on avait cessé, dès une haute antiquité, de
comprendre la signification de ce mythe orphico-pythagoricien.
Certains
éléments de la légende homérique pourraient facilement être transposés dans un
sens initiatique : les prés riants et fleuris où les Sirènes sont assises
symbolisent sans doute la voûte étoilée ; les matelots aux oreilles remplies de
cire sont
les profanes « qui aures habent et non audient » ; les liens qui attachent les
pieds et les mains d'Ulysse au mât du vaisseau
symbolisent peut-être le renoncement à l'action de l'être qui suit la voie et
s'assimile ainsi à l'axe du monde. Le chant
« céleste » des Sirènes est assez significatif, puisqu'elles disent « connaître
tout ce qui arrive dans ce vaste Univers
».
(9)
Table tripartite se dit en anglais tiercel board, qui est devenu trestle
board et tracing board.
(10)
Ce mot désigne à la fois : la tablette carrée formant la partie supérieure d'un
chapiteau ; une machine à calculer en usage chez les Romains ; une table ou
étagère à vaisselle ; et une auge pour laver l'or. Le mot abaque évoque donc à la
fois l'architecture, la science des nombres, le repas et la métallurgie de
l'or. D'autre part, le mot calcul désigne non seulement l'art de compter, mais
toute pierre située à l'intérieur du corps humain (et qui symbolise ainsi la «
pierre cachée des sages »).
(11)
Sur les rapports vraiment curieux qui existent entre la table tripartite et la
table à manger, citons le passage suivant de La Vie privée des Anciens par
René Ménard (t. II, pp. 188-189) : « Les Romains faisaient 3 repas par jour. Le
plus important était le souper (caena) qui se prenait quand les affaires
étaient terminées. Un souper en règle devait avoir 3 services. Il y avait
ordinairement 3 lits pour chaque table : c'est ce qu'on appelait le triclinium.
Le triclinium régulier était disposé pour 3 personnes. Il y avait un
ordre déterminé pour le placement des convives. Les lits étaient placés sur 3 des
côtés de la table, et le 4e côté était réservé pour les besoins du service. Le
pythagoricien Varron, dans un ouvrage perdu dont Aulu-Gelle nous a conservé des
fragments, dit que le nombre des convives doit commencer à celui des Grâces et
finir à celui des Muses, c'est-à-dire qu'il faut être au moins 3, mais jamais
plus de 9. » Il est inutile de souligner l'analogie qui existe entre la
disposition des sièges dans une « Loge de table » et celle du triclinium,
la seule différence étant que les anciens mangeaient couchés.
(12)
Sur la lyre d'Amphion, cf. Le Roi du Monde, chap. XI. Pour les rapports
de Thèbes avec la Thébah hébraïque, cf. ibid. A propos du rôle
joué par le forgeron dans la construction de la lyre de Pythagore, il convient
de rappeler que la Bible (Gen. IV, 21-22) regarde comme frères Jubal, « père de
ceux qui jouent de la harpe », et Tubalcaïn, qui le premier travailla les
métaux. On sait le rôle important que ce dernier joue dans le symbolisme
maçonnique. Dans beaucoup de Loges américaines (mais nous ne savons pas s'il en
est de même en Angleterre), figure un tableau représentant l'histoire du
forgeron et du roi Salomon ; cette histoire très remarquable semble faire
allusion à une certaine « réintégration » de l'art métallurgique, dont on connaît
à la fois le caractère dangereux et sacré.
(13)
Symboles Fondamentaux, chap. XVIII et XXXVII.
(14)
Ibid., chap. XVII.
(15)
Cf. La Grande Triade, chap. XXV.
(16)
C'est Ananda Coomaraswamy qui a pour la première fois dans la Review of
Religion, exposé la signification que Plutarque n'avait fait
qu'entrevoir... ou qu'il n'avait pas voulu divulguer. (Cf. les comptes-rendus
de René Guénon, Études Traditionnelles, octobre 1946).
(17)
Il est dit que Pythagore avait apprivoisé une ourse qui obéissait à sa voix.
Sur les liens du Pythagorisme avec le culte
delphique de l'Apollon hyperboréen (le Dieu géomètre), cf. La Crise du Monde
Moderne, chap. 1.
(18)
Tous les jeux de la Grèce antique avaient du reste un caractère traditionnel
évident ; les vainqueurs d'Olympie, rentrant
dans leur patrie « par la brèche des murs », symbolisaient sans doute la
nécessité de la « violence » pour regagner le « pays natal », qui est le «
royaume des cieux ».
(19)
« Les Fidèles d'Amour », dans le 3e grade de leur hiérarchie, possèdent un rite
appelé saluto (salut) ou salute (santé).
Il est assez curieux que ces mots salut et santé soient demeurés les 2 éléments
essentiels du rituel de la « Loge de table ». Il semble même que le nombre de «
santés », qui a beaucoup varié au cours des âges, doive être régulièrement de
5 ; pour la dernière de ces santés, dans les Loges anglo-saxonnes, est utilisée
une formule qui remonte à une grande antiquité, et où l'on évoque le « retour
au pays natal ». Et tout ce qui se passe après cette santé est considéré comme
« extra-maçonnique », comme si l'on voulait suggérer qu'avec ce retour, les «
objectifs de la Maçonnerie » sont atteints.
(20)
Cf. Aperçus sur l'Initiation, chap. XXIX.
(21)
Philosophumena.
(22)
Il est un élément très important de l'ascèse pythagoricienne qu'on est étonné
de ne pas trouver dans la Maçonnerie actuelle : c'est la musique. La Maçonnerie
opérative, qui utilisait, comme le Compagnonnage, de très nombreuses chansons,
possédait-elle certains chants, d'un rythme particulier, permettant de mettre
le chanteur en communion avec l'« harmonie des sphères » ? C'est possible ;
mais ce qui nous est parvenu, du moins en France, en fait de chansons
maçonniques, est d'un niveau tel que nous préférons n'en pas parler.
(23)
A. Reghini a l'air de penser que le grade de Maître a été introduit après 1717,
parce que, dit-il, les Constitutions d'Anderson
l'ignorent. Il se peut bien qu'Anderson ait ignoré ce grade, mais en tout cas les
éléments en existaient bien avant le XVIIIe siècle, car la Maçonnerie opérative
avait un caractère salomonien très prononcé.
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