Traduit par Titus Burckhardt
Lettre 25
An-nafs
(l'âme, la psyché) et ar-rûh (l'esprit) sont deux noms désignant une seule et
même chose; faite de l'essence même
de la lumière, mais Dieu est plus savant. Elle se dédouble, cette chose, en
vertu de deux qualités opposées, qui sont
la pureté et le trouble, car la nafs, tant qu'elle subsiste, est troublée, et
c'est sous ce rapport qu'elle porte son nom; mais
si son trouble disparaît et qu'elle devient pure substance, elle est vraiment
appelée rûh. Nous voyons d'ailleurs que
les deux s'attirent mutuellement, car ils sont proches l'un de l'autre, et tous
les deux sont en principe doués de beauté,
de vertu et d'équilibre. Or, si Dieu veut sanctifier un de Ses serviteurs, Il
marie en lui esprit et âme, c'est-à-dire, Il
fait que l'un prenne possession de l'autre, ce qui se produit quand l'âme
revient de ses passions qui l'avaient éloignée
de sa vraie parenté et de sa patrie, qui l'avaient arrachée de sa vertu, sa
bonté, sa beauté, sa noblesse, sa supériorité
et son élévation et de tout ce dont son Seigneur l'avait comblée, jusqu'à ce
qu'elle niât sa propre origine et ne
pût plus la sonder; or, si elle ne reste plus dans cet état mais le quitte et
en revient entièrement, l'esprit la transporte
et lui transmet ses vérités et secrets que Dieu lui inspire, et qui n'ont pas
de fin. Dans la mesure même où elle
quitte ses passions, se renforce l'effusion de l'esprit de la part de son
Seigneur, de sorte que les noces de l'esprit et de
l'âme se multiplient, ainsi que leurs fruits, à savoir les sciences infuses et
les actions qui en naissent. La jouissance de
cela ne peut que porter l'homme à contrarier l'âme (passionnelle) et à
entraîner celle-ci malgré ses répulsions, ses rebuffades
et ses exécrations, car un tel comportement est rendu facile à l'homme par tout
ce qu'il y voit de "lumières",
"secrets" et "profits' spirituels.
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