lundi 25 mars 2013

Lettres d'un maître soufi - Le sheikh Al-'Arabi Ad-Darqâwî - Traduit par Titus Burckhardt - Lettre 48 - "Je ne vois aucun bien à ce que ma colère se mêle avec la tienne"






Traduit par Titus Burckhardt
Lettre 48
 
Un des nobles (shorafâ) de Fès, un des grands seigneurs de la ville, me gourmanda vivement, en pleine assemblée de frères, alors que j'étais assis devant lui sans mot dire. Il déversait son fiel sur moi, tandis que je ne parlais ni ne répondais. Lorsqu'un assez long temps s'était écoulé ainsi sans que je ne lui aie répondu, il me dit brusquement:

"Parles donc, car je te parle!" Sur quoi je lui dis: "J'ai connu de vrais nobles qui m'ont pris comme maître, et Dieu les en récompensa."
 
- "Comment cela?" me dit-il. Je lui dis: "Si je parlais avec toi, pendant que tu es porté à la dispute, j'aurais peur de tomber dans le même travers. Or si nous commençons tous les deux à nous disputer, quel bien en récolterons nous? Par Dieu, je ne vois aucun bien à ce que ma colère se mêle avec la tienne".
 
Alors il me dit avec force et vivacité: "C'est ainsi que les gens m'ont parlé de toi, disant que tu étais un grand savant." Il regretta ce qu'il
avait dit de mal de moi et m'en demanda instamment pardon. A partir de ce moment, il eut pour moi un grand amour.

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