Contemple la Maison :
pour les cœurs sanctifiés
sa Lumière brille à découvert
Ils la regardent par Dieu, sans voile,
son auguste et sublime secret leur apparaît.
(Futûhât, I, 47)
Rappel descriptif
Située au centre de la grande Mosquée sacrée de la Mère
des Cités -la Mecque-, le Temple de la Ka’ba-Maison sacrée de Dieu [Bit Allah
el Haram]-, est une construction de forme cubique recouverte d’un voile de
brocart noir (kiswa) brodé de versets coraniques en lettres d’or partiellement
échancré sur une grande porte en cuivre.
Tout à la fois centre terrestre et spirituel, elle est
le point d’orientation vers lequel se tournent les musulmans pour prier (Qibla)
et le but de leur pérégrination conformément aux piliers de l’Islam.
Dans son angle oriental est enchâssé une pierre noire
de forme elliptique cernée d’argent ; orientée en direction de la vaste plaine
d’Arafat (*), elle marque l’endroit où doit commencer les circumambulations
(tawaf) rituelles, étape incontournable du grand pèlerinage (Hajj).
(*) Le Mont-Arafat dite Jabal ar-Rahmah
(montagne de la Miséricorde) est une colline à l’est de la Mecque, là où Adam
et Eve séparés ont été réunis et pardonnés. Centre informel, c’est là où
l’Envoyé (saws) a prononcé son dernier sermon. (Le pèlerin est tenu de s’y
tenir le neuvième jour de Dhou- l-Hijja sans quoi son pèlerinage est invalidé).
Historique
sacré
Le premier temple de la Mecque appelée alors Bakka a
été édifiée par Adam. (Coran III, 96) (1) Détruite par le déluge où seul
survécut Noé, elle a été reconstruite et revivifiée par Abraham et son fils
Ismaël(2) puis orientée vers Jérusalem
[Maqâm d’Ibrahim « station d’Abraham »] (3) ; enfin, par Muhammad (sala
Allah ‘alih wa salam), cette
revivification sera pleinement actualisée et réorientée restituant la sacralité
et l’universalité du lieu tout en bouclant le cycle des révélations
prophétiques. (4)
« Quand la Ka’ba était un sanctuaire de forme
circulaire, au début du cycle adamique, on ne pouvait lui assigner une
quelconque orientation. Abraham, en reconstruisant le Temple avec Ismaël son
fils, lui donna, une forme et une orientation correspondant exactement à la
direction de Jérusalem. De plus, on remarquera que la diagonale tracée à partir
de l’angle syrien du Temple est orientée vers l’immense plaine de ‘Arafat,
contrée qui jouxte le territoire sacré environnant la Mekke.
Jérusalem est considérée comme ville sainte par les
trois religions dites monothéistes et l’endroit où elle fut primitivement
édifiée se situe au lieu sacré qui était dénommé Salem, la cité de la Paix
(Genèse 14/18). C’est en cet endroit béni qu’Abraham-dont le nom hébreu premier
était encore « Abram, père très haut », et bien avant la naissance de son fils
Ismaël, rencontra providentiellement le Roi de Justice, roi de Salem,
Melchisédek (Malki-Sèdèq en hébreu), Prêtre du Dieu suprême (El-Elion en
hébreu).
[…]
Plus tard, par inspiration divine, le nom d’Abram
deviendra Abraham, « père d’une multitude », et c’est en tant que représentant
du « Roi du Monde », selon l’expression de René Guénon (Le Roi du Monde,
chapitre VI) qu’il reconstruisit avec son fils Ismaël le sanctuaire de la
Ka’ba, détruit à l’époque du Déluge, et le revivifia, restituant ainsi à la
Mekke sa fonction sacrée et centrale de Dépôt de la Tradition primordiale et
universelle inaugurée par le prophète Adam.
Cette Présence divine, centrale et sainte que la
Métropole de l’Islam universel, dernière révélation, conserve depuis Adam, Noé,
Abraham et Ismaël, fut réactualisée en sa plénitude, au moment de « la Prière
des deux Qibla », l’an deux de l’Hégire, avec le Sceau des Prophètes, Muhammad,
par ordre divin, dans le nouveau cycle de l’Islam historique.
La Mekke, avec
la Ka’ba en son cœur, est ainsi redevenue ce qu’elle était primordialement : le
Centre effectif du véritable Islam œcuménique et de la Présence plénière de
Dieu sur terre ».(5)
La Ka’ba et La circunambulation ou le Trône
et la procession des anges
Faire retour au Centre, à l’Unique (tawhid), telle est
la signification profonde de l’orientation de la prière et du pèlerinage à la
ka’ba, projection terrestre du Trône divin.
L’Orant
s’oriente, s’achemine, puis, de même que les anges circumambulent autour du
Trône, il accomplit sept circumambulations (Tawaf)( Coran XVII, 29) autour de
la Ka’ba.
« Sache que pendant le Tawaf, tu ressembles aux anges
rapprochés processionnant et tournant autour du Trône. Ne pense pas que le but
soit que ton corps tourne autour du Temple mais bien plutôt que ton cœur
processionne en commémorant le seigneur au temple, afin que ce rappel ne
provienne initialement que de Lui et ne s’achève que par Lui, comme les
Tournées commencent du Temple pour finir au Temple.
Sache que le tawaf sublime est celui du cœur autour de
la Présence seigneuriale et que le Temple est un symbole apparent situé dans le
monde du royaume (mulk) de la présence qui ne peut être contemplée par la vue
sensible, cette présence étant celle du Monde de la royauté céleste (malakût).
De façon analogue, le corps est le symbole extérieur dans le monde apparent
(‘âlam al-shahâda) du cœur qui ne peut être attesté par la vue sensible, car le
cœur se trouve dans le monde de la réalité occultée (‘âlam al-ghayb).
Sache que le monde du royaume et le monde sensible
conduisent au monde de la réalité occultée et au monde de la Royauté céleste
celui à qui Dieu a ouvert la porte. Cette analogie est suggérée par le fait que
le temple fréquenté (bayt ma’mûr) dans les cieux correspond à la Ka’ba.
Le Tawâf que les Anges font autour du Temple fréquenté
ressemble à celui que les êtres humains font autour de ce temple (terrestre).
Lorsque le degré (rutba) de la majorité des créatures se trouva amoindri au
point de ne plus leur permettre de faire de telles tournées, on leur ordonna
d’imiter les anges dans la mesure du possible et on leur promit que ceux qui
ressembleraient à certains seraient d’entre eux. .. » (6)
La ka’ba et la pierre noire ou le cœur et son trésor
caché (7)
Quand Adam repentant retrouvât grâce auprès de Dieu et
reçut l’ordre de partir (de l’Inde, dit-on) pour l’Arabie, l’Ange Gabriel lui
offrit une perle blanche étincelante… Splendeur de l’Esprit qui se
matérialisera enpierre noire pour se dissimuler aux regards sensibles ainsi que
l’a suggéré le Prophète (sala Allah ‘alih wa salam) :
« La pierre noire et le Maqam sont deux perles du
Paradis. Allah a voilé leur lumière et s’Il n’avait pas voilé leur lumière,
elles auraient éclairé ce qu’il y a entre l’Orient et l’Occident ».
Il incombe à chacun, par la Grâce de Dieu, de chercher
le moyen d’en retrouver l’éclat.
Selon cette
autre parole du Prophète (saws) :
« la Pierre noire est la droite (yamîn) de Dieu sur
terre, avec laquelle Il appose Son Sceau sur la créature comme l’homme serre la
main de son frère » (8)
Et celle d’Ali
(que Dieu l’agrée) :
« Lorsque le Très-Haut contracta alliance avec la
descendance de l’homme, il enregistra le contrat dans un livre qu’il scella
avec cette pierre. .. »
C’est dans le «souvenir de Dieu » qui est fidélité au
pacte prééternel : « Ne suis-Je pas votre Seigneur ? » (Coran VII, 172), liant
Dieu à ses créatures(Mithaq) qu’il est possible de découvrir ce trésor caché,
la Perle angélique enfouie au tréfonds de son cœur afin de ré-endosser la
nature édénique dans la Proximité divine.
Pierre-témoin, de notre fidélité et de notre engagement,
l’embrasser et la toucher à l’instar de l’Envoyé de Dieu (saws), c’est comme se
dépouiller et revêtir son être réel.
Omar (que Dieu l’agrée) dit: « Je sais que tu n’es
qu’une pierre et que tu ne peux m’apporter ni bien ni mal. Si je n’avais pas vu
le Prophète (saws) te toucher et t’embrasser, je ne t’aurais jamais touchée ni
embrassée.» (Sahih Boukhari) Puis il sanglota.
La destruction de la Ka’ba annoncera la fin des
temps-ci. Il est en effet dit que lorsque Dieu voudra détruire notre monde il
débutera par la Ka’ba.
Wallâhu A’lam
(1) Selon Abd Allâh Ibn’Amru : « Alors que Dieu fit
descendre Adam hors du Jardin paradisiaque, Il lui dit : « Avec toi, Je vais
faire descendre un temple (bayt) autour duquel on circulera comme on le fait
autour de Mon Trône… »- « La première maison qui fut suscitée pour les hommes
pour qu’y soit célébré le culte de Dieu est celle qui se trouve à Bakka »
(Ad-Durr ul-manthûr, as-Suyûtî, 2/93).
(2) C’est
lorsque Ismaël (alayhis salâm) atteindra sa treizième année, qu’Abraham
(alayhis salâm) reçut l’ordre de bâtir un édifice dédié au culte de Dieu à
l’emplacement originel de la Ka’ba, lieu où ne subsistait plus qu’une petite
colline et que lui avait indiquée l’Ange Gabriel (Djibraîl). Tous deux
entreprirent ainsi les travaux de remise à jour des fondations restantes . « Et
quand Abraham et Ismâil élevaient les assises de la Maison: “O notre Seigneur,
accepte ceci de notre part! Car c’est Toi l’Audient, l’Omniscient ». (Coran II,
127) et (Coran II, 125)
(3) Grosse pierre sur laquelle se trouve l’empreinte
des pieds d’Abraham, à l’endroit même où il prenait support lorsqu’il
construisit avec son fils Ismaël (alayhas salâm), la Kaaba [Coran IV, 97].
C’est devant ce maqâm que L’Imam préside la prière rituelle.
(4) (Coran V, 3)
(5) pp.106-107 Les Secrets du pèlerinage en Islam, de
Al-Ghazâli chez Albouraq. Traduit par Maurice Gloton.
(6) p. 268 Les
secrets du Pèlerinage en Islam Ghazali al Bouraq
(7) “Ni la terre
ni le ciel ne peuvent Me contenir, le cœur de Mon serviteur croyant Me
contient” a dit L’Envoyé (saws)-Hadith Qûtsi-.
(8) Hadith du
Prophète (saws) rapporté par Ibn’Abbâs, ‘Abdallâh et Ibn Omar
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