Eric Geoffroy
I - Effondrement d’un régime
II - Le nouvel ordre ottoman
1 - La conquête
2 - Les difficultés de la nouvelle administration
3 - Le pouvoir ottoman et les ʿulamā’
4 - Effets du changement de pouvoir sur la vie religieuse
I - Effondrement d’un régime
Le système mamelouk bénéficie de nombreux atouts, parmi lesquels la puissance militaire, la centralisation de l’administration et le maintien de l’ordre intérieur, une prospérité économique due à une production agricole régulière en rapport toutefois avec la démographie ; sa richesse provient également du contrôle du commerce international entre la Méditerrannée et l’océan Indien. Dès le début du ixe/xve siècle, ces atouts donnent des signes de faiblesse, mais les historiens font réellement commencer la période de déclin dans les années 1460 à 1470 ; à cette date, le processus conduisant à la conquête ottomane est bien engagé1.
Rappelons que l’absence de principe héréditaire chez les Mamelouks circassiens développe une grande instabilité politique, dont seuls émergent, pour la seconde moitié du ixe/xve siècle, Qāytbāy et Qanṣawh al-Ġawrī, le premier régnant de 873/1468 à 901/1496 et le second de 906/1501 à 922/1516. Les factions rivales de mamlūk-s vétérans d’anciens sultans luttent pour le pouvoir, mettant le sultan en place dans une situation fragile ; à la fin du régime, celui-ci en arrive à être choisi contre son gré, car il sait qu’il n’a pas derrière lui une coalition d’émirs suffisante, et ne possède donc pas les moyens de sa politique : c’est le cas d’al-Ġawrī et du dernier sultan mamelouk, Ṭūmānbāy. Par ailleurs, les mamlūk-s nouvellement importés qu’on appelle ǧulbān étaient jusqu’alors soumis à leur ustāḏ, et les voici insubordonnés, se livrant à des exactions sur la population et amenant l’insécurité dans les rues du Caire. L’indiscipline des Mamelouks va de pair avec un relâchement dans leur entraînement militaire et un manque d’adaptation aux nouvelles armes comme le canon.
À partir de 890/1485, les Bédouins de Syrie profitent de la faiblesse du régime pour se rebeller, dévaster les villages et piller les caravanes de commerçants ou de pèlerins, lorsqu’ils ne se déchirent pas entre eux. Ils n’hésitent pas à livrer bataille à l’armée mamelouke, et profitent des crises et des séditions politiques pour tenter de déstabiliser le pouvoir2.
La crise économique et financière s’explique notamment par un taux de mortalité très élevé, dû aux grandes épidémies de peste et aux famines qui sévissent au ixe/xve siècle. La peste frappe les Mamelouks, étrangers peu immunisés, et l’achat de nouveaux esclaves grève lourdement le budget de l’État ; mais la Mort Noire ravage surtout le monde rural, où la main-d’œuvre fait cruellement défaut. La campagne dévastée rapporte moins à l’État mamelouk, qui tirait des concessions foncières (iqṭāʿ) et de la fiscalité rurale des revenus importants ; cet appauvrissement n’empêche pas les mamlūk-s du sultan ou des grands émirs de réclamer à leur maître une paye régulière. Les villes ne sont pas mieux loties, car elles manquent de produits essentiels et la vie y est très chère. Une telle conjoncture explique que les grandes zāwiya-s cherchent à vivre en autarcie grâce à leurs propres cultures, et que parfois des centaines de personnes frappent à leur porte en quête de nourriture.
La découverte en 1497 du Cap de Bonne Espérance constitue un autre facteur important de déclin, puisqu’elle donne aux Portugais le contrôle de l’Océan indien ; ces derniers coupent ainsi la route des épices venant d’Extrême-Orient et transitant par l’Égypte, sur lesquelles l’État mamelouk prélevait des taxes fructueuses. Non seulement cette source de revenus se tarit, mais il faut de plus investir dans une flotte de guerre pour combattre les Portugais dans l’Océan indien et la Mer Rouge d’un côté, la piraterie franque en Méditerrannée de l’autre.
Entre temps, une autre puissance est entrée sur la scène du Moyen-Orient. Les Safavides, conduits par Šāh Ismāʿīl (m. 930/1524), parviennent en une dizaine d’années, à partir de 1490, à imposer le chiisme duodécimain à toute la Perse3. Une telle expansion n’est pas sans inquiéter les Mamelouks. Dès 907/1501, date à laquelle est fondé l’État safavide, le bruit se répand à Damas que Šāh Ismāʿīl s’apprête à conquérir la Syrie. En 914/1508, il s’empare de Bagdad, y fait détruire les sanctuaires des grands docteurs sunnites et mettre à mort certains personnages. Les succès militaires de Šāh Ismāʿīl mobilisent le nā’ib de Damas, qui prélève une contribution de guerre et apprête une armée.
Ajoutons qu’il faut aussi alimenter l’effort de guerre contre l’Ottoman, et l’on comprendra que les sultans emploient des méthodes expéditives pour faire face aux difficultés financières ; ils s’arrogent ainsi des monopoles sur diverses denrées, confisquent terres et biens, accaparent parfois les revenus des fondations pieuses (awqāf)4. Le sultan al-Ġawrī en arrive à lever des taxes énormes sur le commerce ; ces impôts, non coraniques, le rendent définitivement impopulaire5. La recrudescence de la pratique de l’alchimie que l’on constate à cette époque6 est un trait que partage le Moyen Âge occidental finissant. Les situations de crise politique ou culturelle suscitent toujours des manifestations plus ou moins authentiques d’ésotérisme. Doit-on de même lier cette recrudescence à la crise financière qui sévit alors ? Les dirigeants, en effet, condamnent officiellement la kīmiyā’, mais ils ont souvent recours aux cheikhs qui s’y adonnent, et semblent les assimiler à des faiseurs d’or.
Au début du xe/xvie siècle, le régime est exsangue et l’autorité centrale n’atteint plus la province ; la population urbaine prend parti pour telle ou telle faction de Mamelouks, ce qui donne lieu à de grandes séditions, notamment à Damas et à Alep (en 903, 905 et 910 h.). À Damas même, la population pâtit des exactions des bandes de jeunes marginaux, qui constituent des milices puissantes et rivales : les zuʿrān ou zuʿar7. Ceux-ci se livrent entre eux de véritables batailles rangées, défient l’autorité du vice-roi (nā’ib) et règnent sur des quartiers entiers de la ville. Les hommes de religion utilisent en vain leur prestige pour intercéder entre les différentes factions. Dans ces circonstances, on comprend que les populations syrienne et égyptienne entrevoient la venue des Ottomans comme une délivrance.
Les prédictions des soufis, aussi nombreuses que précises, sur l’écroulement des Mamelouks face aux Banū ʿUṯmān se font l’écho de l’espoir quasi messianique qui traverse le peuple de voir renversées l’injustice et l’anarchie. Ces prédictions sont le fait de “ravis en Dieu” (maǧḏūb), dont une des caractéristiques spirituelles est le don du dévoilement (kašf), de l’avenir en particulier. Tel maǧḏūb nargue les émirs du sultan al-Ġawrī en leur annonçant l’arrivée des Banū ʿUṯmān. Un autre affirme aux ouvriers construisant au Caire le futur mausolée du souverain que c’est peine perdue, puisque celui-ci mourra dans la bataille décisive de Marǧ Dābiq contre les Ottomans. Un autre encore dit au même sultan : « Va-t-en et remets les clés de la Citadelle [siège du pouvoir central au Caire] à ses [futurs] propriétaires [c’est-à-dire les Ottomans]. » Dans une autre prédiction, un maǧḏūb annonce à Šaʿrānī que Sélim passera, après avoir conquis le Caire, par tel endroit de la ville, lui montrant même l’endroit où le sabot de son cheval frappera le sol, ce que Šaʿrānī affirme avoir effectivement constaté. Un autre maǧḏūb, qui entre souvent en conflit avec le nā’ib de Damas, voit le futur sultan ottoman Sulaymān – le fils de Sélim – à la mosquée des Omeyyades et l’appelle en public par ses nom et titre...8
Lors des périodes de transition et de troubles dynastiques, les extatiques remplissent fréquemment le rôle de “mages” de la vie politique, comme l’a remarqué A. L. de Prémare à propos du Maroc au xvie siècle9. Mais de telles prédictions, il faut le noter, sont également attribuées à des ʿulamā’ ayant toute leur raison ; Suyūṭī aurait ainsi donné en 910/1504 – un an avant de mourir – des informations précises sur la première période ottomane10.
II - Le nouvel ordre ottoman
1 - La conquête
En 896/1491, Qāytbāy a essayé de calmer l’appétit des Ottomans, en signant une paix avec Bāyazīd II ; la trève dure jusqu’en 918/1512, date de l’avènement de Sélim. Mamelouks et Ottomans s’allient même un moment contre les Portugais qu’ils arrivent momentanément à tenir hors de la Mer Rouge. Bāyazīd en profite pour briser la montée du chiisme chez les tribus turcomanes (les Qizilbāš) ralliées aux Safavides ; son fils, l’énergique Sélim, fait campagne contre Šāh Ismāʿīl sur son propre territoire et le défait en 920/1514.
Libéré de la menace chiite à l’est, Sélim peut se retourner contre les Mamelouks, qui tentaient de s’allier contre lui avec Šāh Ismāʿīl : il écrase en 922/1516 l’armée du vieux sultan al-Ġawrī au nord d’Alep, à Marǧ Dābiq. La Syrie se soumet sans résistance, et Sélim laisse comme gouverneur à Damas un émir mamelouk, Ǧanbirdī al-Ġazālī. Les Ottomans anéantissent ce qui reste des Mamelouks près du Caire, à al-Raydāniyya, et prennent possession de l’Égypte en 923/1517, après l’ultime bataille de Guizeh.
Les maîtres soufis du Caire semblent jouer un grand rôle dans la transmission du pouvoir. Pour eux, comme pour les hommes de religion en général, Mamelouks et Ottomans sont à titre égal des étrangers, des « Turcs ». Ce qui leur importe, c’est que le pouvoir temporel, quel qu’il soit, défende l’Islam sunnite en pratiquant le moins d’injustice possible. Quand ils voient, sous al-Ġawrī, l’anarchie et l’oppression prendre des proportions extrêmes et sans possibilité de retour, ils tendent la main aux Ottomans qui promettent au moins de mettre fin à la confusion générale. Ainsi, un cheikh prestigieux comme Ǧalāl al-Dīn al-Bakrī (m. 922/1516) prépare-t-il la place au sultan Sélim lorsqu’il refuse d’être porté au califat par des émirs révoltés (il descend en effet du premier calife Abū Bakr) : « Votre sultan est proche », leur répond-il11. ʿAbd al-Ġanī al-Nābulusī affirme qu’al-Bakrī aurait même été chercher Sélim en Syrie ; le souverain, ajoute-t-il, serait entré au Caire conduit par le cheikh et le maître spirituel de celui-ci, ʿAbd al-Qādir al-Dašṭūṭī12. Selon Ibn Ayyūb, l’Ottoman, après avoir pris Damas, aurait rendu visite au cheikh šāḏilī Muḥammad Ibn ʿArrāq pour lui demander l’autorisation de conquérir l’Égypte13. Semblable événement est rapporté à propos du maître égyptien Abū al-Suʿūd al-Ǧāriḥī (m. 933/1526), qui donne son aval par un geste symbolique (išāra), et non de manière explicite, indiquant par là qu’il aide seulement le destin à se réaliser14 ; cela ne l’empêche pas, dans le même temps, de faire prêter serment aux émirs mamelouks de soutenir le dernier sultan Ṭūmānbāy15.
Les cheikhs du taṣawwuf ne s’impliquent cependant pas réellement dans la vie politique. Que peuvent-ils opposer, par ailleurs, au déchaînement de la soldatesque ? La conquête du Caire se fait dans un bain de sang, et le sultan Ṭūmānbāy, qui a succédé à al-Ġawrī contre son gré, est pendu à Bāb Zuwayla ; avec lui s’éteint le régime mamelouk. Beaucoup d’émirs sont tués, et la population civile, qui déchante vite, subit également les sévices des soldats ottomans.
2 - Les difficultés de la nouvelle administration
L’Égypte, jusqu’alors point de mire du monde islamique, est reléguée désormais au rang de province de l’Empire ottoman, à l’instar de la Syrie. L’une et l’autre sont maintenant gouvernées par des beylerbey ou vālī, qui ont le titre de pacha et dirigent l’armée de leur province. Les gouverneurs de petites circonscriptions s’appellent sandjak bey16. Le premier gouverneur d’Égypte, Ḫayrbak (m. 928/1522), est un ancien officier mamelouk – il fut gouverneur d’Alep – qui gagna le camp ottoman à Marǧ Dābiq. Nous verrons qu’il apprécie et fréquente les soufis.
À Damas, la mort du sultan Sélim en 926/1520 – alors que son fils Sulaymān est encore jeune – donne la tentation au gouverneur, Ǧanbirdī al-Ġazālī, de reconstituer à son profit un pouvoir mamelouk : il se fait nommer sultan dans la ville par un groupe d’émirs et de ʿulamā’ ; mais, n’ayant pas l’appui de Ḫayrbak, sa rébellion est vite écrasée en 927/1521, et sa tête envoyée à Istanbul. Cette première rébellion contre l’autorité centrale est suivie d’une autre plus grave, celle d’Aḥmad Pacha “le traître”, gouverneur d’Égypte de 929 à 930 h. ; on l’accuse de conspirer avec Šāh Ismāʿīl pour imposer le chiisme duodécimain dans son pays. Le Grand Vizir ottoman Ibrāhīm Pacha, envoyé au Caire par le sultan Sulaymān, reprend la situation en main en émettant une série de décrets (qānūnnāme) organisant l’administration politique de l’Égypte pour près de trois siècles : les gouverneurs, nommés pour une courte période, sont désormais sous la dépendance étroite du pouvoir central.
3 - Le pouvoir ottoman et les ʿulamā’
Les hommes de religion s’aperçoivent très vite qu’ils jouissaient d’un statut privilégié sous les Mamelouks. Beaucoup d’émirs, même si leur formation était souvent précaire, s’intéressaient à la religion, suivaient les cours des grands ʿulamā’ et leur demandaient des fatwas, sans parler des liens privilégiés qu’ils entretenaient avec les soufis. Établis de manière définitive au Caire, ils connaissaient les milieux religieux, et entretenaient avec eux des relations assez étroites. Émirs et ʿulamā’ suivaient grosso modo la même loi, la Šarīʿa.
Or voici que les Ottomans, parallèlement à la Loi islamique, imposent leur loi turque (qānūn ou yasaq), très mal perçue par les Musulmans syriens et égyptiens. Ils font du hanafisme le rite officiel, ce qui leur permet de donner une formation plus homogène au corps des cadis, qui voient leurs attributions et leur indépendance réduites, et de les intégrer étroitement à l’administration de l’État. Les quatre grands cadis, d’abord supprimés, sont rétablis mais on laisse l’institution s’éteindre d’elle-même. Avec le grand cadi hanbalite Aḥmad Šihāb al-Dīn al-Futūḥī (m. 949/1542) disparaît aussi, selon Šaʿrānī, le dernier šayḫ al-Islām d’origine arabe17 ; les cadis de quelque importance viennent en effet maintenant de Turquie18. Le surnom honorifique šayḫ al-Islām reste attaché aux plus grands ʿulamā’, mais il désigne maintenant avant tout un personnage unique résidant à Istanbul, sorte de patriarche ayant autorité sur les cadis et les ʿulamā’ de l’Empire. Il est aussi le grand mufti et remplace peu à peu les deux qāḍī ʿaskar turcs qui, jusqu’au milieu du xe/xvie siècle, nomment et contrôlent cadis et ʿulamā’ des provinces.
4 - Effets du changement de pouvoir sur la vie religieuse
Si l’attitude globale des Ottomans ne diffère pas de celle des Mamelouks à l’égard des soufis, les premiers se rendent impopulaires par des mesures visant à simplifier, depuis Istanbul, la gestion de leur grand domaine. Ces mesures touchent notamment des aspects de la vie religieuse, traditions parfois séculaires auxquelles le peuple est attaché. Les nouveaux dirigeants réduisent ou suppriment beaucoup de cérémonies publiques. La plus populaire est sans conteste la fête de l’anniversaire du Prophète (al-mawlid al-nabawī), qui avait lieu sous les Mamelouks à la Citadelle du Caire avec grand faste et distribution de nourriture. Or, les Ottomans bradent la grande et magnifique tente du mawlid achetée par Qāytbāy ; ils ne manifestent aucune largesse envers le peuple, et la fête passe presque inaperçue19. Cette cérémonie sera bientôt récupérée par l’ordre familial des Bakrī, qui vont détenir l’autorité de la mašyaḫat al-mašā’iḫ sur les confréries égyptiennes de l’époque ottomane20.
Les maîtres d’Istanbul apportent cependant de nouvelles habitudes religieuses. Hormis celles qui proviennent du hanafisme, il faut mentionner l’importance accordée à la nuit du milieu du mois islamique de Šaʿbān, spécialement célébrée21, ainsi qu’aux deux grandes fêtes islamiques : jusqu’à nos jours, le ʿĪd al-fiṭr est fêté en Syrie durant trois jours, et le ʿĪd al-kabīr durant quatre jours. Les Ottomans se distinguent surtout par la vénération qu’ils accordent à Ibn ʿArabī. Une des premières initiatives du sultan Sélim, après la prise de Damas, est de bâtir sur la tombe du maître un véritable complexe monumental, comprenant qubba (mausolée), ǧāmiʿ (grande mosquée) et takiyya (c’est-à-dire une cantine pour les pauvres, et non un “couvent” pour soufis)22. Cet ensemble est tellement associé au pouvoir ottoman qu’il est appelé “la construction sultanienne” ou “sélimienne” (al-ʿimāra al-ḫankāriyya23, al-salīmiyya). Les cérémonies religieuses y sont célébrées avec un faste rivalisant ou dépassant celui de la mosquée des Omeyyades.
Les Damascènes n’acceptent pas toujours ces nouvelles options, et leur refus du changement se concrétise parfois sur le plan politique. Ainsi, lorsque Ǧanbirdī al-Ġazālī, l’ancien émir mamelouk devenu gouverneur ottoman de Damas, se révolte contre Istanbul, il s’empresse de faire arrêter les travaux de construction sur la tombe d’Ibn ʿArabī, pour marquer symboliquement le retour à l’ancien régime et gagner en popularité24. L’insurgé remet également en usage les rites rythmant la nuit damascène, ceci à la grande joie des habitants25.
Eric Geoffroy
Notes
1 Cf. I. M. Lapidus, Muslim Cities, p. 38-43 ; E. M. Sartain, Jalāl al-Dīn al-Suyūṭī, p. 13-18 ; P. M. Holt, The Age of the Crusades, Londres, 1986, p. 192-202 ; J.-Cl. Garcin, « Le Caire et l’évolution urbaine des pays musulmans », dans Ann. Isl., XXV, 1991, p. 301.
2 Ils se rangent ainsi un moment aux côtés du dawādār Āqbirdī, lequel, soutenu par certains émirs du Caire, cherche à prendre le pouvoir au jeune fils de Qāytbāy, al-Nāṣir (cet événement est connu comme « la fitna du dawādār »). Āqbirdī étant tenu en échec en 903/1498 par les Damascènes qui restent fidèles au sultan, les Bédouins trahissent leur pacte et se retournent contre lui (cf. al-ʿUlabī, Dimašq bayna ʿaṣr al-mamālīk wa al-ʿuṯmāniyyīn, p. 75 et 338). Le dawādār est un émir proche du sultan, chargé de la signature et de la correspondance sultanienne.
3 Sur cette dynastie, issue d’une voie initiatique, cf. infra, p. 230.
4 Ceci explique en grande partie le déclin de l’institution de la ḫānqāh, laquelle dépend de fonds étatiques et des awqāf qui lui sont attachés : en cette époque difficile, les émirs ont d’autres domaines à financer que le soufisme.
5 Cf. J.-Cl. Garcin, « Deux saints populaires », p. 136.
6 Cf. infra, p. 255-256.
7 Le phénomène est ancien au Moyen-Orient : on parle en Iraq de ʿayyār, en Égypte de ḥarāfīš ou de ǧuʿaydiyya. Ces milices parallèles justifient leurs sévices sur la population (rançonnement, viols, meurtres, etc.) en prétextant paradoxalement qu’ils protègent cette population contre les dirigeants, les nantis, ou telle autre bande de brigands. Sur leur rôle à Damas, voir A. al-ʿUlabī, Dimašq bayna ʿaṣr al-mamālīk wa al-ʿuṯmāniyyīn, p. 95-110.
8 Cf. respectivement Ṭ.K., II, p. 140 ; Kaw., I, p. 287 ; Ṭ.K., II, p. 149, 187 ; Kaw., I, p. 283-284.
9 Cf. Sīdī ʿAbd al-Raḥmān al-Mejdūb, Paris-Rabat, 1985, p. 103-104.
10 Ibn Iyās, Badā’iʿ, V, p. 218 ; Šaʿrānī, Ṭ.Ṣ., p. 31-32.
11 Cf. J.-Cl. Garcin, « Deux saints populaires du Caire », p. 141, note 59.
12 al-Ḥaqīqa wa al-maǧāz fī al-riḥla ilā bilād al-Šām wa Miṣr wa al-Ḥiǧāz, Le Caire, 1986, p. 261.
13 Rawḍ, fol. 225a-b.
14 Kaw., II, p. 200 ; Ibn al-Ḥanbalī, Durr, I, p. 950.
15 Ibn Iyās, Badā’iʿ, III, p. 69 ; J.-Cl. Garcin, « Deux saints populaires », p. 135.
16 Pour plus de détails sur l’administration ottomane, cf. A. Raymond, introduction de sa thèse Artisans et commerçants au Caire au xviiie siècle, Damas, 1973 ; Histoire de l’Empire ottoman, sous la direction de R. Mantran.
17 Ṭ.Ṣ., p. 81.
18 Beaucoup ont en effet pour nom al-Rūmī (cf. la Nuzhat al-ḫāṭir d’Ibn Ayyūb).
19 M. Winter, Society and Religion, p. 16-17.
20 Cf. Muḥammad al-Bakrī, Kitāb bayt al-Ṣiddīq, p. 374-380.
21 Ibn Ṭūlūn, Mufākahat al-ḫullān, II, p. 115-116.
22 Cf. Kaw., I, p. 210, ainsi que l’article d’Abd al-Qadir al-Rihawi et Émilie E. Ouéchek, « Les deux Takiyya de Damas, la Takiyya et la Madrasa Sulaymāniyya du Marǧ et la Takiyya as-Salīmiyya de Ṣāliḥiyya », dans B.E.O., XXVIII, 1975, p. 221-225.
23 Al-ḫankār désigne en persan le sultan.
24 Cf. Ibn Ṭūlūn, loc. cit., II, p. 124 ; « Les deux Takiyya de Damas », p. 223. Au ixe/xve siècle en effet, la majorité du peuple et des ʿulamā’ de Damas est hostile au Šayḫ al-Akbar, et sa tombe, nous le verrons, est volontairement négligée. Les travaux que les Ottomans entreprennent sur celle-ci se font donc de nuit, car on craint les réactions de la population (H. Laoust, Les gouverneurs de Damas, p. 149).
25 La nuit était divisée en trois parties, chacune étant annoncée par des tambours battant à différents endroits de la ville, ceci jusqu’à l’heure de la prière de l’aube (ṣalāt al-faǧr) ; cette pratique avait été introduite par les Ayyoubides (cf. al-ʿUlabī, Dimaq, p. 126).
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