vendredi 29 janvier 2016

Grillot de Givry - Lourdes

                                








                                       Source  : La Tour Saint Jacques num. 13-14    jan-apr_1958




























dimanche 24 janvier 2016

La France doit redécouvrir la langue arabe - Un atout délaissé







Jean-Charles Coulon, Heidi Toelle 
http://orientxxi.info/magazine/redecouvrir-le-monde-arabe-a,0779 

Comment communiquer et créer des ponts quand on ne peut pas échanger ni se comprendre ? Les auteurs de cette tribune dénoncent les conséquences du délaissement de l’enseignement de la langue arabe en France, l’une des langues les plus parlées au monde, et appellent à un tournant politique.


Ecouter les élites politiques et certains médias français parler du monde arabe est un spectacle consternant qui en dit long sur l’ignorance et le mépris dont la culture et la civilisation arabes font actuellement l’objet. Ainsi, l’actuel président de la République, François Hollande, rebaptise «  Daech  » du nom de «  Dash  », et on se souviendra de l’intervention de Nicolas Sarkozy 1 , alors ministre de l’intérieur, au cours de laquelle il a qualifié les sunnites d’«  ethnie  » et s’est avéré incapable de différencier sunnites et chiites. Et ne parlons pas des spécialistes autoproclamé(e)s, bien implanté(e)s dans les médias, qui dénigrent du haut de leur ignorance le travail de chercheurs spécialistes à la compétence internationalement reconnue. 

Enfin, les Occidentaux se glorifient d’avoir éliminé des dictateurs laïcs, mais entretiennent les meilleures relations avec les pires dictateurs théocratiques, voire esclavagistes. Aucune réflexion n’est menée sur la politique irresponsable des Occidentaux — dont la France —, alors qu’elle a conduit à la situation catastrophique dans laquelle se trouve actuellement le monde arabe et musulman et a un effet néfaste sur le climat social en France. Ne serait-il pas mieux que conseillers politiques, diplomates et journalistes aient une formation adéquate, voire une connaissance approfondie de la langue, de la culture et de l’histoire du monde arabe et musulman  ? Or, quand on examine ce qui se passe au niveau des ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche, on ne peut que déplorer que les choses n’aillent pas dans le bon sens.L’arabe n’est pas seulement la langue du Coran et des enseignements du Prophète  ; elle est aussi celle d’une culture vieille de plus de 1500 ans.En effet, des années 1970 à aujourd’hui, plus il y a d’élèves d’origine arabe en France, et parmi eux d’élèves désireux d’apprendre l’arabe, moins il y a de cours et de professeurs d’arabe dans le secondaire. Ainsi, en 2014, environ 9 000 élèves sur presque 5 millions et demi étudient l’arabe dans le secondaire, soit approximativement 0,16 %. Or, on sait que les élèves qui apprennent l’arabe en France sont en réalité beaucoup plus nombreux : ils l’apprennent donc à la mosquée ou dans des cours privés, ce qui contribue à leur faire identifier l’arabe exclusivement comme une langue religieuse, la langue du Coran, et leur interdit d’en découvrir toutes les autres facettes. Faut-il souligner que l’enseignement de l’arabe dans l’école publique et dans les universités ferait comprendre aux élèves et aux étudiants que l’arabe n’est pas seulement la langue du Coran et des enseignements du Prophète, mais celle d’une culture vieille de plus de 1500 ans qui a, entre autres, produit l’une des plus grandes littératures du monde — encore largement ignorée par les Français — et introduit une partie de la philosophie et des sciences grecques en Europe  ? 

Il serait donc temps d’inciter les principaux et proviseurs à créer des sections d’arabe. En effet, bon nombre d’entre eux refusent depuis des décennies de le faire par crainte que leur établissement ne se trouve méprisé et associé, dans l’imaginaire collectif, aux zones d’éducation prioritaire (ZEP). Il serait également temps de faire comprendre aux parents d’élèves et aux élèves eux-mêmes, quelle que soit leur origine, l’intérêt de s’ouvrir à une culture autre et d’apprendre à mieux connaître celle dont on est originaire. Ajoutons que l’enseignement de l’arabe dans l’école publique contribuerait certainement à l’ouverture d’esprit des élèves de toutes origines. Enfin, un tel enseignement constituerait une réelle reconnaissance de la culture arabe qui ne se résume pas à la religion, contribuerait sans doute à faire reculer les discriminations dont les Français d’origine arabe et/de confession musulmane sont actuellement victimes, entre autres, lors du recrutement dans le privé, mais aussi, hélas  ! dans le secteur public, y compris dans les universités et les bibliothèques universitaires. 

Cela aiderait aussi à briser les préjugés islamophobes que les médias ne cessent de propager, en se focalisant essentiellement sur les franges les plus extrémistes des musulmans et en donnant l’image simpliste d’un islam uniforme qui ne correspond à aucune réalité. Faut-il rappeler que ce sont entre autres ces préjugés et ces discriminations qui contribuent à créer un climat social de plus en plus délétère  ? Cette situation conduit inévitablement à l’intériorisation du mépris subi et décourage souvent nos concitoyens d’origine arabe à s’investir pour mieux connaître leurs racines de peur de se retrouver ipso facto marginalisés ou soumis à la suspicion. Seule une volonté politique claire peut améliorer la situation en incitant les responsables concernés à changer d’attitude à l’égard de l’enseignement de la langue et de la culture arabes. 

Signes du déclin des études arabes en France : dans les années 1970, il existait encore une option «  arabe première langue  », alors que depuis les années 1990 l’arabe n’existe plus que comme option en troisième langue et exceptionnellement en deuxième langue, et ce dans un nombre très réduit d’établissements. Or, cette langue est extrêmement riche sur le plan lexical et passablement complexe sur le plan morphologique, si bien que les conditions actuelles d’apprentissage de l’arabe — et d’autres langues — ne permettent pas de les maîtriser véritablement à l’issue de trois ou quatre années de lycée. Et ce d’autant moins que la dégradation générale de l’enseignement de la grammaire, du latin et du grec ancien rend plus difficile encore l’apprentissage de langues étrangères telles que l’allemand, l’arabe et le russe, pour ne citer qu’elles. Ce constat vaut également pour les quelques diplômes d’université (DU) qui sont censés permettre de rattraper, en un ou deux ans, les années de lycée. Ces DU rendent certes de grands services, mais ne sont qu’un piètre substitut à une formation plus étalée dans le temps.Qu’il s’agisse d’enseignement de la langue, de linguistique, de littérature classique et moderne, d’histoire moderne et contemporaine, d’islamologie, de sociologie ou d’anthropologie, la situation est catastrophique sur l’ensemble de la France.La faiblesse de l’enseignement de l’arabe dans le secondaire a, par ailleurs, pour conséquence le nombre ridiculement bas de postes ouverts à l’agrégation correspondante : quatre en 2010, trois en 2011, deux depuis 2012, pour ne parler que des quatre dernières années. La situation est encore pire pour le Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (Capes) d’arabe qui, sous le fallacieux prétexte d’une absence de demande, a carrément été supprimé en 2011 et 2013. Quant aux années 2012 et 2014, le nombre de postes y a été réduit respectivement à un seul et à deux. Ajoutons que 60 % des enseignants sont «  titulaires sur zones de remplacement  » (TZR). 

À l’université, 6 000 à 8 000 étudiants sur un total de 2 millions et demi, soit environ 0,33 % dans une hypothèse haute, s’engagent chaque année dans un cursus d’arabe dont un tiers en langues étrangères appliquées (LEA). Seules 25 universités sur 73 proposent un enseignement d’arabe, soit environ un tiers. En ce qui concerne les postes à l’université, qu’il s’agisse d’enseignement de la langue, de linguistique, de littérature classique et moderne, d’histoire moderne et contemporaine, d’islamologie, de sociologie ou d’anthropologie, la situation est catastrophique sur l’ensemble de la France. Et pourtant, ce n’est pas faute de candidats sérieux, puisque nous connaissons des docteurs ayant soutenu d’excellentes thèses, qui se trouvent au chômage ou survivent grâce à de petits boulots n’ayant rien à voir avec leur spécialité et généreusement payés au Smic. Quel gâchis de compétences  ! 

Cette situation lamentable décourage d’ores et déjà de nombreux étudiants pourtant prometteurs de s’engager dans la préparation des concours et/ou dans celle d’une thèse, et risque de conduire à terme au tarissement définitif du vivier des enseignants et chercheurs arabisants. 

Malgré cette situation désastreuse, on arguera peut-être que le mépris à l’égard des sciences humaines en général et des études arabes en particulier se justifie par le fait qu’elles ne sont pas immédiatement rentables, étant donné que le savoir n’est plus envisagé que comme un moyen de produire de la richesse matérielle. Or, les relations commerciales, économiques et financières supposent bien souvent, pour être compétitifs et profitables, que l’on réussisse à établir des relations humaines respectueuses de la culture de l’autre. Autrement dit, même dans une perspective de «  compétitivité  », leitmotiv de nos politiciens et économistes, il arrive que les sciences humaines soient capables de prévenir des désastres économiques, sans parler du fait qu’elles ont contribué et contribuent encore à apaiser les conflits, à humaniser les échanges entre les cultures et à donner du sens aux rapports entre les nations et les citoyens – et ce dans une perspective à long terme. 

Il serait donc temps et bienvenu que nos politiques se décident à investir dans l’avenir, en permettant aux sciences humaines, et plus particulièrement aux études arabes, de retrouver leur prestige et leur niveau d’excellence sévèrement mis à mal par une politique de courte vue, mise en œuvre hier par un gouvernement de droite et poursuivie, voire accentuée, par un gouvernement prétendûment de gauche. 

Jean-Charles Coulon, Heidi Toelle 
http://orientxxi.info/magazine/redecouvrir-le-monde-arabe-a,0779 


1) Le 26 février 2007 sur BFM TV. 



SIGNATAIRES DE LA TRIBUNE 

 Sobhi Boustani, professeur de littérature arabe moderne à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco)  ; 

 Pascal Buresi, directeur de recherche au Centre interuniversitaire d’histoire et d’archéologie médiévales du Centre national de la recherche scientifique (CIHAM-UMR 5648/CNRS), directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (Ehess), directeur de l’Institut d’études de l’islam et des sociétés du monde musulman (IISMM)  ; 

 Chihab Dghim, docteur ès lettres en littérature arabe, qualifié au poste de maître de conférence, au chômage  ; 

 Brigitte Foulon, maître de conférences de littérature classique habilitée à diriger des recherches à l’université de Paris III-Sorbonne Nouvelle  ; 

 Jean-Claude Garcin, professeur honoraire d’histoire de l’islam médiéval à l’université d’Aix-Marseille  ; 

 Marie-Aimée Germanos, maître de conférence en linguistique à l’Inalco  ; 

 Pierre Guichard, professeur émérite d’histoire de l’islam médiéval à l’université de Lyon II-Lumière  ; 

 Kadhim Jihad Hassan, écrivain et traducteur, professeur de littérature arabe et comparée à l’Inalco  ; 

 Pierre Lory, directeur d’étude en islamologie à l’École pratique des hautes études (EPHE)  ; 

 Catherine Mayeur-Jaouen, professeur d’histoire contemporaine à l’Inalco, présidente du groupement d’intérêt scientifique (GIS) Moyen-Orient et mondes musulmans  ; 

 Christian Müller, directeur de recherche (CNRS) et responsable de la section arabe de l’Institut de recherche et d’histoire des textes (IHRT). 

Jean-Charles Coulon
Chargé de collections pour le domaine arabe à la bibliothèque universitaire des langues et civilisations (Bulac/Inalco) ; secrétaire de rédaction de la revue Arabica.

Heidi Toelle
Professeur émérite de littérature arabe moderne à l’université Paris III Sorbonne-Nouvelle ; directrice de la revue Arabica.

Les compagnons de Seïdina Ahmed Tidjani

















jeudi 21 janvier 2016

A.A.H.- Interdiction du porc








 
Dans l'hindouisme, Varâha (sanskrit : वराह) est le troisième avatar de Vishnou : celui-ci s'incarna en sanglier pour vaincre Hiranyaksha, un asura (démon) qui avait entraîné la terre au plus profond des océans, à l'issue d'une bataille de mille ans. Varâha releva alors la terre (Bhumidevi) au bout de ses défenses.


 






1°)L'interdit médical :


 C'est le 1er argument avancé ; en effet, on peut attraper une maladie mortelle appelée « trichinose » (sans parler de l'Oedème de Quincke et des diverses parasitoses ) mais, disent les européens, on a actuellement des moyens sanitaires   de contrôler et  de conserver cette viande que n'avaient pas les Anciens.


Cet argument ne nous convainc pas, car  le porc était inconnu dans le Hijaz où est né l'Islam et d'autre part ,même si Religion est faite pour l'homme (et non l'inverse) et entretient son équilibre et sa santé, un interdit médical n'est pas un interdit religieux. IL doit donc y avoir d'autres raisons plus subtiles  qui échappent à la science occidentale. Mais le lobby de la viande de porc est tellement puissant, surtout en Allemagne, qu'aucun médecin n'oserait soutenir publiquement sa nocivité pour la santé.


 Il va falloir  faire des recherches  historiques approfondies


 2°)Historique :


 On remarque que dans l'antiquité égytienne (soit, avant Moïse), le porc est considéré comme maléfique, donc non consommable, car les mythes disent que Seth dans ses luttes contre Horus apparaissait sous la forme d'un porc noir, dont la nature « typhonienne »  leur faisait horreur; mais, un seul jour dans l'année, l'interdit était levé et on mangeait de cette viande (1). Cette curieuse exception nous fait penser, par analogie, à un rite  hindou relatif aux serpents, où  3 jours dans l'année ces animaux  étaient inoffensifs. En résumé, le monde sémitique considère le porc comme impur, interdit et dangereux pour l'homme (interdit confirmé et renforcé plus tard par le Judaïsme  et l'Islam).


L'interdit n'exclut pas un origine sacrée, comme l'indique le mot » tabou » qui signifie à la fois interdit et sacré, comme le montre le schéma ci-dessous:









Commentaire : à l'origine, on ne consomme pas le sanglier, non pas parce qu'il serait impur ,mais parce qu'il est Sacré; ce qui est sacré est aussi interdit, mais ce qui est interdit devient impur sous une forme dérivée (le porc/le chien), qui semble surgir à la fin du cycle, quand le sanglier et le loup ne sont plus connus comme symboles ésotériques traditionnels (cf.   René Guénon – Sf de la SS) et sont consommés (par ex en Chine actuelle); on remarquera également qu'une grande partie de l'univers échappe à cet interdit, notamment chez les peuples  de race jaune (y compris les Indiens d'Amérique du sud, apparentés lointainement aux mongols).


 On ne connaît pas d'interdit chez les gréco-romains, avec cependant une exception pour les membres d'une « confrérie » initiatique comme les Pythagoriciens qui étaient strictement végétariens, encore que certains ont fait observer  que les athlètes devaient bien  avoir le droit de consommer de la viande (ce qui ne veut dire : du porc), comme le colosse Milton, gendre de Pythagore...


 3°)L'interdit coranique:


 Au grand scandale des bien-pensants de la science moderne, nous  avons déjà affirmé publiquement que, non seulement l'homme ne descendait pas du singe, mais plutôt - ô paradoxe – que le singe descendait de l'homme ! En d'autres termes, le singe était un homme dégénéré. Cette logique valait bien celle des évolutionnistes  purs et durs!


 Or, quand on lit le verset 60 de la sourate V (al-mâ'ida = « la Table servie »), on   retrouve cette affirmation : »...Ceux que Dieu a maudits, contre lesquels Il s'est mis en courroux, ceux dont Il a fait des porcs [khanâzîr], des singes [qarada](2)et des adorateurs du diable... » (trad. Penot,Editions Alif, 2005). Bien sûr, dirons les esprits forts ,mais le Qoran, pas plus que la Torah ne sont des livres de science au sens moderne. Seulement, la même science reconnaît que les cellules de l'homme et du porc sont analogues, au point que - sans être toujours prévenus par les chirurgiens - les patients (qui recevaient autrefois de l'insuline de porc) reçoivent maintenant des cellules de porc  pour reconstituer des tissus perdus ou nécrosés! Le comble de l'ignominie a été atteint récemment, quand des chercheurs ont réussi l'implantation de cellules humaines dans des embryons de porc"  qui généreraient à leur tour des cellules de substitution dans le corps du patient! Ils appellent ces hybrides des «chimères »(3), ce qui n'est guère rassurant ! Autant vouloir traiter l'homme comme un animal sous prétexte de le soigner ; Quel respect pour l'être humain! Il est vrai que les mêmes qui croient dur comme fer que l'homme descend du singe ne sont pas à cela près !...Alors, pourquoi se gêner ?


Si cela ne suffit pas, on rappellera que quand le christ chasse 7 démons, ils vont tous se « réfugier » (= se « réincarner »?) dans un troupeau de cochons ! Le nom de cet animal, dans toutes les langues euro-africaines, désigne le vice et la saleté.(cerdo,puerco,porco,cochon,Schwein,hallüf,pig...etc)


 4°) Le problème du cannibalisme:


En fait, c'est pour nous la raison fondamentale de l'interdiction du porc : on ne mange pas son semblable (sauf dans quelque tribu dégénérée); les cellules étant communes, manger du porc revient à enfreindre un tabou originel et non abrogé. D'ailleurs, les truies ne mangent -elles pas, parfois leurs petits ? On peut bien appeler cela du cannibalisme…


Il est intéressant de noter que cet interdit concerne aussi un mammifère comme le dauphin, qui est connu pour être ami de l'homme, car il a souvent sauvé des nageurs en difficulté ou menacés par des requins (d'où le symbole du dauphin pour le Christ , « sôter »(= sauveur) en grec, à rapprocher du nom divin « sattar », en arabe); mais le dauphin n'est pas considéré comme impur; seulement, c'est cette fois-ci un interdit « linguistique » : Ibn 'arabi note qu'il s'appelle « khanzir baharî », c'est à dire « cochon de mer », et cela suffit à le rendre « tabou ».


En conclusion si l'Islam n'avait eu que ces 2 interdits : le porc et l'alcool, ce serait déjà un bienfait pour l'humanité! (4)


(1)réf; : Jean Hani, thèse sur « La religion égyptienne dans la Pensée de Plutarque », les Belles-Lettres, 1976; p. 320-323


(2)Curieusement,en espagnol (qui a gardé beaucoup de racines arabes, le porc se dit « cerdo », rac « qrd », que l'on retrouve dans « qird/ pl. : qarada ou qurûd », mais avec le sens de « singe » en arabe; or, le même verset cite à la fois « les porcs et les singes ». La coïncidence méritait d'être signalée


(3) Certains linguistes pensent que «chimère» [en grec : Χίμαιρα, Khaïmara est apparenté à « himâr», - l'âne rouge - autre symbole typhonien .


(4) nous n'oublions pas ce qu'a dit autrefois un éminent psychiâtre : « Si l'Islam n'avait prescrit que l'interdiction de l'alcool, ce serait un grand bienfait, car le secteur psychiâtrique est saturé à 30 % d'ivrognes, violeurs, agresseurs et fauteurs d'accidents mortels ! »


PS : Ces notes remontant à 1985, il se peut qu'entretemps, le sujet ait été traité plus à fond . Toute ressemblance ne serait pas due à un plagiat de notre part .








A.A.H.- L’EXISTENCE CORPORELLE ET LA DEMARCHE INITIATIQUE












En ce jour Nous préserverons ton corps afin que tu sois un signe pour ceux qui viendront après toi, même s’ils sont nombreux les gens qui ne prêtent aucune attention à Nos signes . C X :92  (Traduction A. Penot)




[Note : Ce texte constitue la première partie d’un tryptique inédit à ce jour, nous la publions ici avec l’aimable autorisation de l’auteur et du site http://dinul-qayyim.over-blog.com/



« Pourquoi as-tu laissé abîmer ton corps ? »
(reproche d’Ibn ‘Arabî à al-Hallaj qui, selon lui,
aurait pu et dû éviter sa condamnation et son exécution.)




                                                     



* Note liminaire : Certaines des considérations suivantes ne sont pas d’origine livresque et ne comportent donc point de références (sauf le minimum requis quand certaines notions se trouvent déjà dans le domaine public-)


Avertissement de l’auteur (février 2015) : Cet article rédigé avec le soutien du regretté directeur de Vers La Tradition, M. Goffin (qui voulait faire un n° spécial sur le Corps dès 2004) a été refusé par son successeur, sous des prétextes oiseux qui cachaient mal son hostilité  anti-vâlsanienne à mon égard; et voilà comme un lieu de liberté préservé pendant 25 ans par M. Goffin a été anéanti par quelque censeur prétentieux et imbu de son « pouvoir ».





                                         

     Ière PARTIE


I


Dans la note 26 page 76 de son article de VLT (n° 95 mars 2004), René Luong a attiré notre attention par cette remarque peu courante : « la question du  »corps » pris comme support de la marche initiatique est totalement absente des débats guénoniens ». Nous lui ferons remarquer aimablement que cette formule reprend presque mot pour mot la note de René Guenon (dans La Grande Triade -ed. de 1957,p.106) qui donne le titre de nos réflexions.


Avant de développer succinctement ce thème, rappelons que dans le champ des publications ésotériques européennes, seul René Guénon l’a abordé trois fois : a) dans son article inachevé « les conditions de l’existence corporelle » [1912]; b) au sujet des qualifications corporelles dans ses différents articles réunis en 1946 sous le titre « Aperçus sur l’Initiation »; c) dans l’article « Kundalini » (Etudes sur l’Hindouisme). Mais dans le premier cas, la chose vue dans une perspective générale et «philosophique» n’est pas vraiment traitée d’un point de vue initiatique ni opératif, c’est-à-dire que l’on n’y trouve ni enseignement, ni aide permettant de progresser sur la voie de la réalisation pour ceux qui auraient dépassé le stade virtuel (quant aux autres, aucun ouvrage ne leur permettra de se passer d’un maître (1)). Il est vrai qu’il s’agit d’un texte de jeunesse (1912), époque où René Guénon ne traite pas encore des conditions de l’initiation et de la réalisation.


Pour en revenir au milieu  »guénonien » actuel (avec toutes les réserves que cet adjectif comporte) s’il n’y a pas de débat sur le problème du corps, c’est parce qu’il s’agit trop souvent de sujets d’origine chrétienne, mal à l’aise dans  »leur peau », n’ayant jamais intégré dans leur pratique antérieure à leur conversion les valeurs corporelles mises à leur place légitime par toutes les doctrines orientales (notamment le soufisme, l’hindouisme et le taoïsme). Donc ce n’est pas chez eux que l’on trouvera un début de connaissances techniques sur la question. Et, soit dit en passant, il est en effet étrange que les Catholiques romains n’aient aucune ablution (2), alors que les protestants en ont au moins une partielle (après le coït). Dans un temple japonais, même un non-Japonais doit faire un  petite ablution avant d’entrer… Le corps n’est pas un mal qu’il faudrait ignorer (3) mais un élément à intégrer… Comme le dit la Sunna : « la hayâ’ fî-d-dîn » (4). Nous voulons dire que tant que l’on ne considère pas le corps comme un support essentiel – mais non dominant – de la réalisation, il ne faut pas espérer faire de progrès (5).


Les êtres ne sont pas tous les mêmes, il y a d’abord ceux nés avec la fitra (6) (la nature primordiale adamique) que René Guénon désigne une seule fois discrètement dans un passage trop souvent oublié – et souvent incompris : « il existe encore actuellement, même en Occident, des hommes qui, par leur  »constitution intérieure », ne sont pas des  »hommes modernes » (…) et c’est à ceux-là que nous avons toujours entendu nous adresser exclusivement » [Initiation et Réalisation spirituelle, chap.2](7). René Guénon ne parle pas de  »qualifications » comme dans ses deux ouvrages sur l’initiation : il emploie l’expression de  »constitution intérieure » [khuluq](8), c’est-à-dire de gens qui sont nés ainsi, qui ne le deviennent pas, et dont c’est le statut [hukm]; ceci est irrémédiable et les autres prétendus savants livresques n’y peuvent rien : l »’intelligence » ne compensera jamais l’absence de cette fitra. Il est une compréhension et un vécu innés de la vie traditionnelle intégrale qui ne doivent rien à des talents extérieurs, fussent-ils géniaux.

Nous citions l’islam; sait-on que les êtres missionnés (rasûl, nabî, walî, fard) ont un corps apparemment identique aux autres mais qualitativement (on aurait envie de dire :  »moléculairement ») différent, bien que cela soit invisible. Qu’on se rappelle bien ce que disait l’une des épouses du Prophète Muhammad : « Son Corps [khuluqu-hu] c’était le Coran »(9). Voilà une formule lapidaire qui n’a de sens que par ce que nous avons essayé de résumer ci-dessus. Cette formule est à rapprocher absolument de celle de la tradition chrétienne : « Verbum caro fit » (Jn prol. v.13) : « Et le Verbe se fit Chair », qui est rigoureusement équivalente (10). Or dans le prologue de l’Evangile selon saint Jean – [« in principium erat verbum / omnia per ipsum facta sunt / in ipso vita erat et vita erat lux hominum... [Verbum] erat lux vera… qui non ex sanguinibus / neque ex voluntati carnis / neque ex voluntati viri sed ex Deo nati sunt »] – il y a un triple rapport initial entre le verbe (le logos du texte grec), la lumière et la création; et un deuxième aspect : « ceux qui sont nés non de la chair ni du sang, mais de la volonté de Dieu »(11). Il y aurait donc des êtres dont le statut corporel ne serait pas le même – malgré les apparences – que celui des autres. Ce thème de la lumière est extrêmement net dans l’ésotérisme islamique où il se rapporte au Prophète lui-même (haqiqa muhammadiya – rûh muhammadiya – nûr muhammadî) : en fait foi le verset de la sourate La Lumière (XXIV, 35), où un nom divin [nûr – dans : « Allâhu nûru- s-samawâti wa-l-ard »] désigne – pour les ‘arifûn bi-Llâh – univoquement le Prophète lui-même et sa perfection corporelle, n’en déplaise aux exégètes verbeux qui ont dit tout et n’importe quoi sur cet admirable verset, voulant y voir à tout prix le Christ, la religion chrétienne (comme Michel Hayek), quand ce n’est pas le Bouddha – à cause de l’arbre béni ! (« shajaratin mubârakatin zaytûnatin »)(12).


Seulement, ce qui n’est jamais dit, c’est que ce verset et cette lumière sont l’emblème et la nourriture des rijâl al-ghayb, domaine réservé de l’islam caché, dont le maître est seyyidunâ al-Khidr et dont les groupes informels qui ne relèvent que de lui sont par nature inaccessibles à la longue théorie des murîdin, lesquels ignoreront toujours cette rûhâniyah – réalité spirituelle – car leur nature les empêche d’entrer en contact avec elle, qui est bien plus que ce soufisme « anonyme » dont monsieur Chodkiewicz n’a entrevu – semble-t-il – que l’écorce extérieure. . Et ici nous condamnons une fois de plus cette érudition livresque qui stérilise presque tous les écrits  »soufis » des Européens et autres occidentalisés (convertis ou non) comme l’a fort bien écrit, et peut-être malicieusement, monsieur Chodkiewicz: « Il n’est pas licite d’enseigner une science quelle qu’elle soit (…) si la connaissance qu’on en a n’est fondée que sur la seule lecture individuelle. » – et nous ajouterons : fût cette lecture celle des textes akbariens eux-mêmes ! (13)


Pour en revenir au thème de la lumière, certains êtres prédestinés à de hautes fonctions rayonnent de cette lumière [on dit que quand le Prophète paraît au Diwân as-Sâlihîn il est impossible de poser son regard sur lui] qui se manifeste par exemple dans le cas de seyyidunâ ‘Isâ, lors de la Transfiguration. Sa lumière venait non de l’extérieur mais de l’intérieur de lui-même (14). Est-il vraiment incompréhensible que le processus de la lumière engendrant le corps [cf. dans les années soixante, les dires de certains savants modernes : la matière fait penser à de la lumière condensée] puisse s’inverser ou devenir réversible, de sorte que le corps à son tour libère la lumière intérieure dont il est fait, et qui est évidemment la plupart du temps invisible comme nous le disions plus haut : le même corps apparent n’est pas le même selon que l’on est prophète ou simple individu. C’est pour cela que certains sont l’objet d’une élection divine [yaf’alu mâ yashâ’]. Les autres prétentieux devraient en prendre leur parti et, pour progresser (même s’ils sont dépourvus de qualifications pour quoi que ce soit, malgré la pratique forcenée, les lectures, les rattachements divers…) partir de leur modeste statut. En fait, beaucoup trop de gens ambitieux gardent leur mentalité profane après le rattachement, ce qui explique le taux d’échecs, en tout cas le peu de cas de réalisation. Comme le dit seyyidunâ ‘Isâ : « Le grain qui tombe sur une terre aride ne germe pas et meurt ».


Ce corps lumineux invisible (15) est tellement important que ses couleurs servent de critères initiatiques aux Maîtres réalisés (et voyants, ce qui n’est pas le cas de tous) pour savoir si leur aide est appropriée, efficace, si le disciple progresse ou au contraire régresse, selon une certaine hiérarchie chromatique (16). Ici le lecteur est en droit de se demander : pourquoi accorder autant d’importance pratique au corps ? C’est que la ma’rifa est occultée par les ténèbres [zulm] du corps. Autrement dit, l’action directe (et non plus l’influence ou l’enseignement) d’un maître [murshid] est de chasser les ténèbres du corps du disciple. Comment ? En l’abreuvant de lumière –  »abreuver », car il convient d’en souligner l’aspect fluide. Et il ne s’agit pas ici de symboles, d’allégories ou de sens figurés. Mais seuls comprendront ceux qui sont concernés. Un maître comme Najmu-d-Dîn Kubrâ ne dit pas autrement ce que nous affirmons ici sans référence.


Quand nous affirmons l’importance du corps lumineux (qui préfigure le corps glorieux de la deuxième résurrection), il nous faut signaler les cas rares mais toujours actuels de femmes [aux fonctions spirituelles et temporelles très élevées] caractérisées par l’aménorrhée sans stérilité (énigme insoluble pour la gynécologie moderne !), l’exemple le plus célèbre étant celui de la Vierge Marie  (17) (dont le nom arabe grammaticalement masculin – batûl – ne comporte pas de féminin, car il lui est exclusivement réservé) (18); il y a celui de Jeanne d’Arc [cf. article de Michel Vâlsan, Etudes Traditionnelles 1969], née évidemment avec la fîtra, et d’autres femmes (notamment afrad) complètement inconnues… L’intérêt de ces exemples, c’est que ces êtres, non seulement sont libérés de la plupart des préoccupations corporelles, mais peuvent pratiquer les rites exotériques et ésotériques sans jamais être interrompues par l’impureté légale liée au cycle menstruel (qu’on se rappelle la présence continue de Marie au Temple, sans oublier le cas de Seyyida Fâtima).


Quand nous parlons phénoménologiquement du corps, on pourrait croire qu’il est statique; en fait, l’influence spirituelle (le rattachement) peut modifier l’apparence corporelle, notamment l’éclat du regard (visible seulement pour ceux dont l’oeil intérieur a été préalablement ouvert par un rite – connu surtout en Afrique noire – ou par don naturel) (19). Il y a même des cas plus curieux et ce serait celui de René Guénon après sa rencontre avec un envoyé du centre caché de l’islam (rajul al-ghayb) d’après un témoin de l’époque dont les descendants ont récemment (1999) rapporté les dires : « après cette rencontre il ne fut plus jamais le même, même son physique avait changé, notamment la forme des mains [?] ». Il n’est pas rare que l’impact régénérateur de l’initiation provoque comme une deuxième jeunesse autant physique qu’intellectuelle en réactivant toutes les fonctions (organiques, mentales, etc…). Encore faut-il que le réceptacle relève de ce que René Guénon appelle une  »constitution intérieure » qui n’est pas celle d’un homme moderne. Sans parler des miracles proprement dits, nous connaissons personnellement des cas de modifications corporelles sur le lieu saint de la Mecque, chez des pèlerins atteints de malformations osseuses : l’effet de la baraka particulière à ce territoire sacré peut agir à l’insu du sujet (contrairement au cas des malades venant expressément à Lourdes dans le but d’être guéris).


Même s’il se renouvelle constamment (on dit que les cellules sont régénérées tous les sept ans) le corps de l’individu humain est un phénomène unique : on ne revient pas une deuxième fois dans le même corps; autrement dit, il n’y a pas de réincarnation. Les entités qui se superposent et habitent le corps peuvent être multiples (20) mais ce corps unique est une  »chance » (nous voulons dire une grâce providentielle) unique et n’est pas remplaçable ou interchangeable. C’est un support privilégié et le statut normal de l’être humain est la corporéité c’est-à-dire que l’état posthume, défini comme séparation du corps et de l’âme, ne peut être qu’une anomalie provisoire, réparée à la fin du cycle par une première puis une deuxième résurrection définitive (corps glorieux). Cette  »incarnation » peut, par hérédité psychique ou par métempsychose, bénéficier d’ « éléments » appartenant à d’autres êtres (généralement passés) ou recueillir les connaissances informelles liées à un statut antérieur ( »préexistence des âmes  »), ce dont témoigne le don d’αναμνησις (= réminiscence) bien connu des anciens, notamment de Socrate, et qui explique en grande partie le fameux « don des langues » sous son aspect linguistique (subalterne mais spectaculaire). Si l’on ne voit pas le rapport direct entre ce phénomène et la corporéité, nous dirons qu’il s’appuie sur une particularité phonatoire extérieurement invisible mais bien réelle. Il y a donc des marques corporelles (nous aimerions aborder ultérieurement cette question pour ce qui concerne le Prophète Muhammad et Ibn ‘Arabî).


Autre difficulté que nous n’abordons qu’incidemment : les liens entre le corps et l’âme. La distanciation à la limite de la séparation du corps et de l’âme, du vivant de l’être humain, peut se produire à l’état de veille (jadhb) ou durant le sommeil. Le problème est le retour de l’âme dans le corps, qui n’est pas sans risque (la séparation ne doit pas durer plus de trois jours, sous peine de mort réelle, inexplicable pour l’entourage)(21). Ceci n’a évidemment rien à voir avec les pseudo-voyages en astral des rosicruciens modernes qui prennent ce phénomène préternaturel pour un signe de réalisation initiatique (22), ni avec le phénomène propre aux Abdâl (qui laissent leur corps sous forme de double) et à d’autres êtres qui ne le sont pas (et n’en ont pas conscience). Certains  »réalisés-vivants » dans le monde arabo-islamique (équivalents aux jivân-mukti des hindous) connaissent une assomption à l’état d’éveil qui les mène au-delà du système solaire (cf., en partie, ce que dit ‘Abd el-‘Azîz ad-Dabbagh sur le barzakh, dont le secret est bien gardé). Mais ici, nous ne pouvons en dire plus.


Par ailleurs, peu comprennent que l’on peut vivre sur plusieurs plans de conscience à la fois, que l’on peut disposer de 72 heures par jour, là où la plupart n’en vivent que 24, ce qui rend sans intérêt l’obsession de la longévité (qui n’a certainement pas le même sens chez les taoïstes que pour la gérontocratie actuelle, cliente des laboratoires faiseurs de ‘miracles’ où l’on prolonge des individus non pas parce qu’ils auraient des fonctions traditionnelles à remplir, mais tout simplement parce qu’étant milliardaires ils ont les moyens de s’offrir des cures de rajeunissement. Avec la peur de l’échéance, on retrouve là l’inversion typiquement contre-traditionnelle, qui est celle de la parodie moderne dans sa conception du corps, lequel ne devrait jamais être un but en soi mais un support de réalisation)(23).


Pour les êtres dont l’existence corporelle est ressentie comme un boulet à traîner – il existe une tyrannie du corps – il ne reste plus qu’à faire semblant de vivre, en respectant de son mieux les règles traditionnelles qui gèrent le quotidien (ce que les Gens du Blâme appellent : « les cinq prières et l’attente de la mort »). Pendant que la plupart assument ce que Guénon appelle « la vie ordinaire », avec plus ou moins de conviction, les happy few vivent dans un autre monde (qui n’a rien à voir avec les imaginaires mondes parallèles, lancés autrefois par les suppôts de la pseudo – voire de la contre – tradition, du genre Pauwels et consorts de la revue Planète). Au lieu de s’épuiser dans le quotidien, certains se dépensent au service d’Allâh et les profanes qui les voient apparemment inactifs, se demandent d’où vient leur fatigue. C’est là qu’un Réalisé clairvoyant leur dit : « Notre nafs aussi est au service d’Allâh; notre corps ni notre sommeil ne nous appartiennent »; et cette activité invisible peut être aussi usante que la vie des gens perdus dans des advélitations illusoires. La voie salébreuse du sulûk est autrement ardue : c’est un jihad incessant avec peu de périodes de répit; donc, une fois de plus, la question de la longévité est une question oiseuse. D’ailleurs le corps, même cadavérique, a des prolongements bénéfiques : lieux de pèlerinage, reliques, tombeaux des saints, protection territoriale liée à ces tombes (c’est pour cela qu’il est interdit de déplacer le corps d’un saint hors de son lieu de décès ou de sa tombe. Cette transgression ne porte jamais bonheur aux profanateurs : quand on veut priver les croyants et disciples de la baraka d’un saint reconnu, on se coupe soi-même immanquablement de toute baraka)(24).


(A suivre…)


P.S. Faut-il préciser que les données développées ci-dessus ne doivent rien aux travaux d’Henri Corbin; lequel,malgré sa vive intelligence,s’est égaré pendant des années dans l’hérésiographie islamique(*).Il a eu cependant le grand mérite de rassembler des textes peu connus (souvent plus ismaéliens que chiites, et souvent plus chiites que sunnites) et très importants sur les thèmes de l’Ange, la Lumière, l’Imam Caché et surtout le Barzakh.


(*)- cf. les critiques très pertinentes de Chodkiewicz à propos du  »corbinien » Ruspoli dans Le Sceau des Saints.


A.


Notes :


(1) – Et ceci fait comprendre que la perspective ésotérique théorique ne se confond jamais avec la perspective initiatique pratique. Cette distinction renvoie pour nous à la différence entre murîdîn et murâdîn, catégorie inconnue, et pour cause, de nos savants islamologues à l’érudition livresque dépourvue de toute ma’rifa – connaissance directement inspirée par Dieu – et donc de toute autorité magistrale.[↵]


(2) Les Esséniens préchrétiens – et donc précurseurs – avaient déjà des ablutions comparables à celles de l’islam ou de l’hindouisme.[↵]


(3) Lesquels chrétiens ont oublié leur tradition, selon laquelle le corps est le temple du Saint-Esprit.[↵]


(4) c’est-à-dire : « pas de fausse pudeur dans le domaine (notamment sexuel) de la loi (divine) ».[↵]


(5) On remarquera qu’intentionnellement nous ne traiterons pas de sexualité car elle est à 99 % d’ordre nafsani (animique, psychique) et ne relève donc pas de notre étude. En cas de nécessité,on pourra toujours se référer à « la Métaphysique du Sexe » de Julius Evola![↵]


(6) cf. Coran VII, 172. Tous les rites de l’islam s’expliquent par la notion de fitra (par exemple les soins du corps, cf. Michel Vâlsan : L’Islam et la fonction de René Guénon, Paris, 1984, p.150, n.79; sans parler des interdits alimentaires que nous aborderons plus loin).[↵]


(7) Il serait temps de faire enfin une lecture initiatique de René Guénon et non indéfiniment spéculative comme c’est le cas de presque tous les livres qui lui ont été consacrés, à l’exception notable des deux articles de Michel Vâlsan dans les Etudes Traditionnelles de 1951 et 1953, sans lesquels nul n’aurait rien compris à la personne, à l’oeuvre et à la fonction de René Guénon. Pour une lecture ‘intellectuelle’, signalons les excellents articles de René Luong et de G Servant dans les numéros spéciaux sur René Guénon de Connaissance des Religions (n°65-66, Paris 2002) et de Vers la Tradition (n° 83-84, Mars 2001). Quant à ceux qui lisent René Guénon avec la mentalité occultiste (le goût plus ou moins malsain du rare, du bizarre, des sciences cachées et de tout ce qui est parapsychologique) inutile de leur dire qu’ils sont pris au piège des apparences du Mystère [al-ghayb] et n’arriveront jamais à la connaissance.[↵]


(8) Ce qui n’est pas la même chose, car les qualifications sont contingentes, changeantes, et limitées à des conditions d’initiation spécifiques et non universelles.[↵]


(9) Par cette citation, on remarquera que le mot  »corps » (en fait, en arabe, khuluq renvoie plutôt à  »nature profonde ») – comme pour le Christ (autrement les chrétiens qui communient seraient de vulgaires anthropophages) – n’est pas à prendre en un sens matériel, encore moins matérialiste. D’ailleurs, certains traduisent khuluq par  »disposition innée »,  »caractère inné », ce que connote très exactement le terme de fitra. De plus, signalons qu’il y a bien des mots distincts, en arabe comme en sanscrit, pour désigner les différents corps. N.B. : pour définir cette sainteté du corps des missionnés, Ibn ‘Arabî, dans son Livre des Théophanies (n°44), parle d’ailleurs de  »tat’hîr jibily », c’est-à-dire  »sanctification congénitale » (traduction inédite de Michel Vâlsan).[↵]


(10) On remarquera l’appauvrisssement du texte évangélique en passant du grec au latin, où λογος est traduit par verbum qui n’est que le verbe ou la parole; alors que λογος, dans la métaphysique grecque, signifie « le lien entre la terre et le ciel » [on peut rapprocher le mot logos de jugus (lien) en latin, cf. yoga en sanscrit et Joch en allemand.][↵]


(11) Le corps comme support de la volonté divine (= élection de certains et non d’autres).[↵]


(12) Cf. l’excellente traduction, remarquablement annotée et commentée, de Nabîl Badrawî : L’arbre aux secrets du Cheikh al-‘Alawî (Paris, 2003, p.36-37 et sq.).[↵]


(13) Connaissance des Religions n° 69/70 p.88.[↵]


(14) Cette Transfiguration, représentant le corps glorieux de la deuxième Résurrection, vient à l’appui de la doctrine islamique selon laquelle seyyidunâ ‘Isâ fait partie de ces êtres qui n’ont pas connu la mort (avec Idris, Ilyas et Khidr, qui, ce n’est pas un hasard, ont en commun le thème de la lumière). Cf. aussi l’extraordinaire fath (ouverture intuitive) de ‘Abd el-‘Azîz ed-Dabbagh dans le Kitâb al-Ibrîz (p. 14-16).[↵]


(15) Najmu-d-Dîn Kubrâ parle du « soleil de l’esprit qui va et vient dans le corps ». On retrouve cette notion de rayonnement dans la racine universelle RA [latin radius → fr. rai, rayon etc…, en égyptien : le dieu soleil Râ et le verbe arabe ra’â → impératif : ra (vois !)].[↵]


(16) Elle ne concerne que ceux qui sont dans cette situation initiatique .Quant aux autres catégories,on pourra se reporter à ce qu’en dit Ibn ‘Arabi, notamment dans ses Tartîbu-t-Tasawwuf (traduit par Ivan Aguéli dans « La Gnose » de 1911-12 )et jamais cité chez les soufistes professionnels ! – Ainsi ce traité n’est recensé ni par monsieur Chodkiewicz, ni par madame Addas.)[↵]


(17) Contre cette thèse, il y a un passage de Tabarî où il prétend que Marie aurait eu trois menstrues avant de donner naissance à seyyidnâ ‘Isâ, tout en restant au Temple ![↵]


(18) Cf. également le cas du mot fard en arabe qui ne comporte pas de féminin et que l’on croit en occident l’apanage exclusif des hommes, alors qu’il y a des femmes afrâd : leur type spirituel est au-delà de la limitation sexuelle.[↵]


(19) La même acuité visuelle permet de déceler la perte de virginité – en dehors des conditions fixées par l’éthique traditionnelle – chez les jeunes filles : l’éclat du regard se ternit (*), au contraire de la parturiente dont la nature est qualitativement renouvelée par l’eutocie. « Le Paradis est sous le pas des mères » disait le Prophète.


(*)- Les suicidés qui ont survécu présentent la même ternissure oculaire.[↵]


(20) D’où les pseudonymes de certains  »missionnés » qui correspondent à autant d’entités distinctes (mais un pseudonyme unique peut correspondre à son tour à plusieurs entités). Curieusement, si René Guénon et Aguéli ont usé de plusieurs signatures, tel ne fut pas le cas de Michel Vâlsan.[↵]


(21) Il y a même une formule spéciale pour faciliter ce retour.[↵]


(22) Ni avec le dédoublement (pathologique) où le sujet voit, par exemple, au-delà d’un mur.[↵]


(23) cf. l’importance profane excessive accordée au sport, qui n’a plus rien à voir avec l’esprit olympique grec des origines.[↵]


(24) Quand on se rappelle la nécessité impérieuse attachée à la préservation du corps embaumé des pharaons (*) sans lesquels l’Egypte entière aurait été privée de protection, et les malédictions terribles lancées contre les profanateurs, on comprendra d’autant mieux ce que nous voulons dire – idem pour la conservation des corps des Dalaï-lamas et des momies incas. Ce thème de l’incorruptibilité du corps reste à développer.


(*)- cf. Sourate Yûnus (X, 92): « Nous te préserverons dans ton corps », verset qui confirme cette nécessité.[↵]






II



Dans notre 1er chapître, nous n’avons pas précisé à chaque fois de quel « corps » nous parlions, laissant le mot avec son sens général car la langue française est pauvre en ce domaine, le latin, l’allemand et le grec, n’étant guère mieux lotis : ainsi, ces langues emploient le même mot pour les corps physico-chimiques et les corps animés (corps, corpus, körper…). Il nous faudra recourir aux langues arabe et sanscrite pour y voir plus clair.


Dans l’immédiat, nous allons pourtant faire un inventaire lexical des quelques possibilités offertes par l’allemand et le grec.


Rappelons que c’est le problème posé par le rite de l’Eucharistie (qui signifie, non pas « corps » mais « action de grâces ») qui nous a alerté sur les difficultés inhérentes à l’absence de terme spécifiques chez les Chrétiens pour distinguer entre le corps ordinaire et le « Corps du Christ » célébré dans la fête du Saint-Sacrement. Or, les Allemands emploient un terme original pour le désigner (donc différent du mot Körper): ils disent « Fronleichnam », reprenant 3 mots anciens signifiant « l’enveloppe du Corps du Seigneur », ce qui indique bien la conscience d’une difficulté pour rendre la notion de transsubstantiation, opposée aux conceptions hérétiques qui parlent d‘impanation (le corps serait dans l’hostie, mais celle-ci ne serait pas le Corps du Christ) ou de simple symbole (au sens faible); dans cette conception il n’y aurait aucune présence surhumaine ni extracorporelle dans l’eucharistie, ce qui est évidemment inacceptable pour les Catholiques. Mais il ne peut non plus s’agir du corps au sens matériel, sous peine de faire des chrétiens des « anthropophages » ! La théologie romaine n’a pas facilité les choses en imposant la formule latine du Notre père : « panem nostrum quotidianum », alors que les Orthodoxes ont la précieuse expression initiatique « artos épiousios », c’est à dire le pain supra-essentiel (allusion aux 2 sortes de corps). Pour résumer, nous constatons que, si les Chrétiens n’ont pas toujours la terminologie adéquate, ils ont bien perçu la notion de 2 corps distincts1, ce qui montre un parallèle entre les 2 sortes de corps et les 2 sortes de pain.


Et, anticipant un peu notre étude de la langue arabe, nous allons nous demander comment les chrétiens d’orient (de langue arabe) ont tenté de résoudre la question, car ils devaient traduire cette différence entre le corps ordinaire et le nouveau Corps de la transsubstantiation.


En arabe, il y a au moins 2 mots (entre autres) : jism et jasad. Or, très habilement ils ont choisi le terme le moins matérialiste possible et parlent (pour la Fête du Saint-sacrement / Fête-Dieu) de ‘id al-jasad. Or nous savons grâce à ibn ’Arabi que jasad correspond au corps « subtil »2. Il y a même en orient une 2ème expression concurrente : bayram al-qurban, où « qurban » signifie « offrande ou sacrifice », mais ce mot apparemment sémitique nous rappelle curieusement la racine latine « corpus ».


Une autre curiosité se trouve dans le mot allemend « Boden » qui signifie « le sol, la terre » et a donné le mot anglais « body » (le corps); or, le mot arabe badan est évidemment apparenté à cette racine3. Enfin, pour réunir grec, arabe et français, signalons qu’il y a trois doublets rassemblant les 3 notions connexes de corps, tombeau et temple :


sôma / sêma (= le corps est un tombeau)


corps / temple (« détruisez ce temple, je le rebâtirai en 3 jours » – il parlait du temple de son corps, précisent les Evangélistes Jean et Mathieu)


darih / durah (darih signifie tombeau; et durah, mot de la même racine, se dit pour un temple rencontré par le Prophète au 7è Ciel, lors de son voyage nocturne4. – NB: Il semble qu’il s’agisse de la maison visitée (bayt ma’mura).


Enfin, il y a un parallèle intéressant, uniquement en grec, entre le « corps » et le « pain », comme nous le disions ci-dessus, dans le Pater Noster.


Il reste cependant la question de la 2è partie du Rite « Ceci est mon sang », « mon sang est vraiment un breuvage »; mais ceci nous entraînerait trop loin de notre sujet, qui est le Corps comme support de la Réalisation (René Guénon, « La Grande Triade », p.1065).


Maintenant, nous pouvons revenir au lexique arabe.


Nous pensons que Corbin a embrouillé les choses en croyant habile de dédoubler les mots jism et jasad (Corps spirituel et Terre céleste, p.222, Paris, 2005, 3è édition) : il distingue 2 jism et 2 jasad en leur attribuant : au ler, le corps subtil, et au 2è, le corps matériel, ce qui constitue une étrange inversion des réalités, si l’on suit ibn ‘Arabi. Mais le chef des études soufies à Paris et Téhéran (jusqu’en 1978) n’en a cure : il a trouvé 4 sortes de corps et s’en tient là, alors qu’il existe d’autres termes arabes que nous allons enfin énumérer pour que l’on en juge :


Dans le coran, il y a déjà 3 termes : badan (le corps physique ou inerte), jism (le corps vivant, au sens général) et jasad (le corps subtil) qui ne sont pas du tout équivalents.


Il y a le qâlib (qui a donné le français: galbe) qui, nous dit Ibn ‘Ajiba (Lexique du Soufisme, p.222/224), est l’enveloppe corporelle recevant l’entité subtile de l’âme. C’est le corps considéré comme une sorte de moule; à propos de ce moule, Ibn ‘Ajiba ajoute: « Dieu [a] coutûme de créer la vie dans un moule : tant que la vie s’y maintient, l’homme reste en vie. Cependant, bien que les esprits soient déposés dans les moules corporels, ils s’en dégagent dans l’état de sommeil, s’en séparent et reviennent ensuite ». (cf. Coran, sourate al-Zumar, XXXIX, 42). D’autres Maîtres parlent d’ « alvéoles » ou niches dans le barzakh, où les esprits partis en mission reviennent, in sha’a Llah… (inutile de parler de corps « astral » comme le dit bizarrement Corbin, op. cit. p.222) : la tradition arabo-islamique est bien assez riche sans que l’on y ajoute des fantaisies individuelles !


Il y a les « ashbâh » (sing. : shabah) qui sont les « apparences corporelles » (en dialecte : les fantômes)


Il y a encore le juththa : cadavre; de là même racine: juthwât : tombeau (cf. le grec : sôma sêma).


Enfin, 7è et dernier, il y a un terme qui n’est pas recensé par Ibn ‘Ajiba, et pourtant usuel : « dhât » (pl. dhawât), non pas au sens connu et métaphysique d’ « essence », mais au sens de « personne intégrale : »corps+âme+esprit ». Ainsi, quand on entend certains dire : « Je suis allé à la Mecque », la question est parfois : « Kunt bi-r-rûh aw bi-n-nafs ? » (Y êtes-vous allé en esprit ou avec votre âme ?) – Si la réponse est : « La, bi-dhâtî », c’est en français, littéralement : « en chair et en os », ce qui ne veut pas dire forcément à pied (cf. les « ahl-al-Khotwa »).


Les termes techniques « jamad » (corps minéral et « jaram » (corps physique / planète) sont évidemment en dehors de notre champ lexical.


Les hindouistes se vantent souvent d’avoir à leur disposition 5 mots pour désigner le corps; nous trouvons que l’arabe, n’est pas mal loti avec ses 7 termes distincts correspondant à autant d’entités différentes qui ne sont pas des synonymes.


A.A.H.


Notes:






1 Dans sa conférence de carême (Radio Notre-Dame du 20/3/2010) le prêtre a essayé d’expliquer la question de la transsubstantiation en disant : « Là où est le Corps du Christ, là est aussi l’AME »; mais ceci ne fait que repousser le problème. A notre tour, nous pouvons proposer une hypothèse audacieuse: au Pain, correspondrait le Corps; au Vin, l’Ame; et à l’Esprit, les paroles de la Consécration (prière de l’épiclèse pendant l’anaphore), sans lesquelles il n’est pas de Rite initiatique christique. Ces 3 éléments faisant penser à la triade alchimique (puisqu’il y a transformation, transmutation ou transsubstantiation) : Sel, Mercure et Soufre.


2 Dans ses Istilahât, Ibn ‘Arabi précise, dans un formule étonnante : « [le jasad, c’est] tout esprit qui se manifeste au moyen d’un corps (jism) igné ou lumineux ». Or le christ est dit, dans le Coran, « Rûhu-Llah » (Esprit de Dieu) : cette simple définition résout pour nous l’ambiguïté de terminologie posée par la notion de Présence réelle dans l’hostie. Mais pour les théologiens catholiques, ce genre d’argument n’est pas forcément pertinent.


3 A titre anecdotique, on peut citer le mot français « bedaine » (la racine arabe indique aussi la corpulence).


4 Curieusement, Kazimirski situe ce temple au 4è ciel.


5 Il faut bien rappeler, à la suite de Guénon, que l’Eucharistie est un rite initiatique, (et non pas un rite d’initiation. – Confusion commise par F. Schuon et J. Tourniac !) passé dans le domaine exotérique, d’où les difficultés inextricables en théologie chrétienne courante pour essayer de faire assentir la présence toute spirituelle du Christ, appelée Présence réelle, dont les Chrétiens font à tort un cas unique dans l’histoire de l’humanité, oubliant le sacrifice de Melki-tsedeq, la Présence réelle dans l’Arche d’Alliance des Hébreux, et la Présence réelle dans la Lecture du Qor’ân; voire la Présence réelle dans le rite Soma des Hindous (cf. Guénon « Caïn et Abel, avant-dernière note).


[Note : Ce texte constitue la deuxième partie d’un triptyque inédit à ce jour, nous le publions ici avec l’aimable autorisation de l’auteur. ]





III


 LE  CORPS  ET  LA  GUERISON INITIATIQUE














On dit que S. Dawûd (David) quand il se sentit vieillir, fit venir une jeune fille vierge (I,Rois ,I,1) pour partager sa couche et lui redonner la santé.  On donne à celle-ci le surnom de Sulamite (car originaire de la région  de Solem – on remarquera la racine SLM ,désignant la Paix, et, accessoirement, la santé). Le texte ajoute : « Et il ne la connut point » .On retrouverait cette jeune fille dans le magnifique « Cantique des Cantiques ». Ceci est évidemment incompréhensible à notre époque d’impudeur, sans parler des redoutables interprétations psychanalytiques qui n’ont pas manqué  de jaillir des bas-fonds !



  Que devons-nous comprendre ? Seule la 
fitra de la vierge ou de l’enfant peut transmettre une bénédiction ( = une Grâce en langage chrétien ou une « baraka » en langage islamique – Nous ne disons pas  un « Rattachement »). Évidemment, au cours du temps, cette pratique sainte et exceptionnelle  a dégénéré et a même été condamnée par le Concile de Nicée.



      De même, une fois perdu le sens initiatique, les esprits épais de la philosophie moderne et profane en ont conclu que Socrate était tombé dans la perversion, et on en fit le mot « socratisme » pour désigner la pédérastie. Nous ne nions pas que la chose ait existé, mais Socrate a condamné ces Maîtres sans scrupules, vils séducteurs qui abusent de leurs jeunes disciples : lui-même a toujours prôné une relation spirituelle, ce qui n’empêche pas qu’il ait pu pratiquer  ce que l’on appelle savamment  le « Synéisaktisme »(= équivalent masculin du sulamitisme); comme il s’agissait de personnes du même sexe, cette équivoque a été mal interprétée. Et comme Louis Massignon était curieux de toutes les bizarreries sexuelles de l’espèce humaine (ne s’est-il pas intéressé au cas de Marie-Antoinette qui ne peut être louche que pour des esprits malveillants), il en a fait un article à part entière (« Lettres Nouvelles  », sept-oct. 1955) où il nous livre  un fait (datant apparemment de 1907) qui illustre fort bien ce qu’était le Sulamitisme : il relate qu’un abbé  s’était confié à une jeune novice d’origine 
juive, lui avouant qu’il n’arrivait pas à se guérir du vice d’intempérance ; à quoi , la jeune fille lui répondit: « venez me voir dans ma cellule, je vous donnerai une bonne bouteille que j’y ai cachée pour vous »  on ne sait pas ce qu’il se passa, mais il y eut guérison immédiate du chapelain..



   Mais l’explication de Massignon, pour ingénieuse qu’elle soit, reste toute littéraire  : il croit qu’ « une sorte de torpille magnétique désamorce chez l’autre le courant, éteint toute tension charnelle »! (et il ajoute, curieux aveu : « Cela existe; mon témoignage est direct » (? !)



NB Comme l’a bien vu Yvon Belaval, dans son introduction au « Banquet » de Platon (L de P, 1967,p.23), « Il n’y a que la métaphysique qui puisse … faire comprendre  [cela];  et la réponse de la métaphysique  est que l’amour est en définitive, d’essence religieuse » (nous aurions préféré le mot « initiatique », mais il n’appartient pas au vocabulaire des philosophes !).


    Ainsi la Beauté de l’Ame est supérieure à celle du Corps, pour Socrate et Platon, et l’Amour entre Maitre et disciple n’a rien de charnel ; c’est à cela que l’on reconnaît les sectes modernes, où les relations avec le « Gourou » ne sont jamais pures.






C’est l’Amour d’êtres qui aiment au dessus d’eux-mêmes, quelque chose de plus puissant que leur ego : pour eux, l’Aimé est plus que l’Amour ; et dans la poésie arabe (qui a tant inspiré le poète français Aragon, qui a reconnu sa dette à la spiritualité arabo-islamique), l’Aimé s’appelle « al-Habib » qui reste au genre neutre, au-delà des sexes (on notera que le mot « al-Habib » vaut 53, valeur correspondant à d’autres secrets initiatiques .



     Quant aux guérisons obtenues par l’intermédiaire de magnétiseurs ou autres guérisseurs, elles sont souvent le cas de gens ayant bénéficié eux-mêmes d’une guérison miraculeuse (par ex :  à Lourdes).



 Il nous restera à voir le cas des thérapies par les noms divins, pratiquées par certains guérisseurs musulmans contemporains (
mu’âlaja b-il-asma’i al-husnâ), mais comme il ne s’agit  de choses pratiquables que par un Maître, nous ne donnerons qu’une petite partie du document (en arabe), car il est à craindre que certains ne cherchent à jouer avec le feu . Disons, sans trahir de secret, que le guérisseur doit prononcer un certain nombre de fois un nom divin, répétition différente et appropriée selon l’organe déficient, qui peut aller de quarante-cinq jusqu’à 1512 fois …





TABLEAU :

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Note complémentaire :





Nous ne pouvions terminer ce 3è chapitre sans signaler des cas de guérisons miraculeuses, par exemple celle du Cheykh ‘Izz al-‘Arab al-Hawar,  du Caire .




On devait lui extraire une tumeur dans un poumon, après confirmation par la radiographie . Mais la nuit de l’opération, il entendit une voix lui dire de faire la grande ablution . Après d’être recouché, il vit le mur de la chambre s’ouvrir et une procession d’hommes venant du fleuve (le Nil), habillés comme des docteurs, entra dans la chambre . Ils étaient 12 ; ils ouvrirent sa chemise puis refermèrent les boutons : c’était apparemment cela l’opération ! Le lendemain, on l’emmena en salle d’op . On vérifia les radios : il n’y avait plus de tumeur, donc plus de raison de l’opérer . Il fut donc mis en observation pendant un mois . Au bout de ce laps de temps, un jeune docteur vint l’ausculter et lui demanda à brûle-pourpont : « Où avez-vous mis la maladie ? » Le Cheykh répondit franchement en racontant ce qui lui était arrivé . Le docteur s’écria : « pourquoi ne pas me l’avoir dit tout de suite ? C’est la 3è fois que cela arrive depuis 4 ans ! »…





 Tous ces « docteurs » qui l’avaient visité étaient tous de la famille du Prophète (S A’ wa S) et celui qui l’ avait opéré miraculeusement était Sidi Zayn al-‘Abidin (le fils de Husayn) . (Témoignages recueillis par Valérie Hoffman, professeur en Illinois – dans « Les voies d’Allah », Fayard, 1996 ; p. 596 à 600, résumées par nous) .



..... ..NB :..Sans rapport direct avec ce qui précède,nous nous contenterons de rappeler le don de guérison des rois de France, appelé « pouvoir de guérir les écrouelles », don de guérison lié à l'onction par l'huile sainte du sacre de Clovis. Or, écrouelles (=scrofules, donc maladie de peau), est apparenté à la racine « scrofa »(= truie). Ceci nous semble en rapport avec l'absence d'interdit alimentaire pour les Chrétiens d'occident.(contrairement au Christ et aux chrétiens d'orient -juifs convertis qui garderont l'interdit du porc.) . Cette curieuse dérogation fait suite à une vision de saint Pierre abolissant tout interdit ! Avait-il ce pouvoir ou était-ce une facilitation à l'entrée de « goy » dans le nouveau christianisme,-non soumis aux loi juives,- fondé à Rome par Pierre et Paul (et non par le Christ), miséricorde inspirée ?
Les chrétiens ne sont pas choqués par cette dérogation et disent que ce n'est pas leur problème! Ils sont bien les seuls, avec les peuples asiatiques (et amérindiens qui sont de même origine) à n'avoir aucune restriction alimentaire. On peut en effet trouver à l'appui de saint Pierre et de la thèse occidentale un verset énigmatique des Evangiles qui fait dire au Christ : » Ce n 'est pas ce qui entre dans le corps de l'homme qui est impur, mais ce qui en sort ». Mais, à notre connaissance, le Christ n'a jamais consommé de porc!
Signalons enfin que pour les médecins actuels, ces « écrouelles » seraient analogues au lymphome (mais là, il ne s' agit plus de dermatologie ,mais d'oncologie). Il n'empêche que c'est bien, à l'origine, une maladie de peau et qu'un patient atteint d'un oedème de Quincke, suite à l'ingestion de viande de porc, est strié des pieds à la tête de rayures comme en ont les porcelets ou les marcassins. (sans parler d'une risque de mort par étouffement.). Seul le roi de France pouvait le guérir (même si les Anglais prétendent que le roi d'Angleterre bénéficierait du même privilège -?) .Guénon disait que, comme ce n'est pas une vue de l'esprit , les «musulmans qui avaient mangé du porc par mégarde ressentaient les symptômes d'une sorte d'empoisonnement   ».      
                
En conclusion , la levée de l'interdit par saint Pierre ne nous semble pas avoir résolu le problème, que cette levée n'est pas valable pour tout le monde (dans le monde chrétien) et que le don de guérison du roi de France est venu miséricordieusement compenser cette imperfection

 II ème PARTIE

IV
LES RITES CORPORELS



Nous allons traiter maintenant le cas de la Grèce antique qui semble avoir été le seul pays au monde à avoir donné un forme très particulière et très « nationale » à ce que l'on appelle à tort « Jeux Olympiques »: le terme Jeux (peut-être hérité de Romains - »jocus ») est impropre car il ne s'agit pas de « jeux «  mais de Rites sous l'égide de Zeus, le Maître des dieux de l'Olympe, au nombre de 12 . Certains historiens prétendent qu'il y avait eu, bien avant, des sortes de rites sportifs. Possible, mais ils n'ont jamais eu cette codification très spéciale.


Qu'on en juge !


I°) Le terme « olympia »(pluriel de « olympios) est en fait composé de O- et de la racine « lump » ou « lamp » qu'on retrouve immédiatement en français (lampe, lampadaire) et en latin (lumen); cette racine signifie la lumière , celle qui vient du séjour des dieux , quand ils sortent de la nuée qui entoure le sommet du mot Olympe (2900m) – mais curieusement, les « Jeux « se pratiquent non pas au mont Olympe (en Thessalie) mais assez loin au sud-ouest,à Olympie ,en Elide (Pélopponèse). Ce « O » dit « prosthénique »nous semble désigner un centre spirituel, car cette racine universelle se retrouve en suèdois où « ö » désigne une île (donc au sens symbolique : un Centre ) et en tibétain, où le même mot, prononcé de façon identique , signifie littéralement « Centre », puisque c'est le nom de la région centrale du Tibet ! IL s'agit donc bien de vestiges phonétiques et sémantique de la langue primordiale (cf. VLT n° 73, 1998). D'ailleurs les auteurs anciens (Hérodote, Jamblique...etc) nous signalent que les 12 dieux de l'Olympe parlent un langage qui n'est pas celui des hommes de l'époque (on situe le début des Olympiades en – 776 avant J-C).


2°)Le lieu où se déroulent les Rites en l'honneur de Zeus est considéré comme un territoire sacré, inviolable où règne la Paix et où les athlètes s'exercent en tenue primordiale, c'est à dire nus (d'où le terme de « gymnastique » où « gymnos » veut dire: nu). C'est une période de Trêve, clause qui n'est plus respectée depuis longtemps par les prétendus Jeux « olympiques » modernes. Et en effet, les épreuves ,même si elles signifient en grec « combat » (c'est le sens d' « athlos », d'où le mot athlétisme), font penser à une sublimation des pulsions guerrières de l'homme, car les engins dont nous parlerons plus tard ne sont pas des armes, sinon des « substituts d'armes, même le javelot qui n'est pas fait pour tuer dans l'enceinte olympique. D'ailleurs Platon fut sacré 2 fois héros olympique et Pythagore, au moins une fois. Ces êtres n'étaient pas des va-t-en guerre !





Mais ils représentaient pour les Grecs l’idéal de l’  « Homme complet » ; c-à-d accompli dans les 3 ordres de réalité : corps, âme, Esprit, la parodie profane de cet accomplissement trouvant son pseudo-équivalent au XVIIè siècle, avec la formule de l’  « Honnête homme », style Pascal ou Descartes qui pratiquaient la physique et la philosophie, mais sans aucun engagement initiatique (malgré les tentatives de Descartes d’entrer en contact avec les Rose-Croix), et pour ce dernier, dans la négation de l’esprit . (il réduisait le spirituel au « mental » : je pense, donc je suis – apparemment, personne ne s’est avisé que l’inverse eût été plus vrai !) : l’âme, elle, étant réduite à quelque fonction psychique du genre des « esprits animaux ) tout sur un fond de dualisme tout à fait anti-traditionnel !





Inutile d’ajouter que ces êtres souffreteux eussent été bien incapables de lancer un disque de 5 kg (seulement 2 kg actuellement : l’homme moderne s’est bien atrophié !) . Mais on trouve chez Rabelais, sous forme comique et démesurée à son habitude, le programme encyclopédique et « sportif » de Gargantua .


Dans des civilisations non indo-européennes, on trouvera ce culte du corps magnifié à un degré indépassable, comme dans la pratique des Sumos qui fait penser à un culte du Surhomme, sorte de demi-dieu, et rappelle, semble-t-il, les géants des origines, thème que l’on retrouve dans bien d’autres civilisations (Grèce, proche-orient…) . Là encore, il ne s’agit pas de sport ni d’amusement, mais d’un rite shinto fort ancien, réservé aux seuls Japonais (*) et interdit aux femmes, exactement comme chez les Grecs, mais sous un aspect beaucoup plus martial .


3°) a) Plus que le célèbre « mens sana in corpore sano » des Latins, les rites olympiques nous semblent une véritable préparation ou mise en condition (expression reprise par les sportifs actuels, mais sans horizon initiatique) de l’être, en vue d’un développement spirituel, donc d’un accomplissement .


b) Le Yoga des Hindous n’est pas un but ni une « religion » (encore moins un exercice « hygiénique » comme le croient presque tous ses pratiquants !) mais une préparation de l’être entier à une Voie spirituelle, en s’appuyant sur « le support » du corps, idée directrice, prise chez René guénon, laquelle guide tout notre développement depuis la Ière partie .


c) Enfin, même si l’analogie n’apparaît pas à première vue, nous en dirons autant de l’Alchimie (car elle prend appui sur le corps ou la matière), qui n’est ni un but (« faire de l’or », comme le disait naîvement ce pauvre Canseliet – mais alors, pourquoi est-il mort dans la misère ?), ni une religion, mais une méthode de Purification ; Or les grimoires  alchimiques sont si bien codés et si secrets  qu’ils en sont devenus incompréhensibles donc inutiles aux « modernes » ; sans jouer sur les mots, on peut dire que c’est bien une méthode « hermétique » : le secret a été si bien gardé qu’il a été perdu, malgré les prétentions de l’Ecole « hermétique » de Fulcanelli . Faute d’avoir la clef des symboles, les curieux ne voient que l’aspect extérieur et matériel du symbolisme métallurgique employé et ne parlent que d’opérations vulgaires, de four (« athanor »), de transmutation . Ces gens-là ignorent que Sidi Belhassen al-Shadhili (au XIIIè siècle) fit un jour de l’or, par simple projection, non pas de « poudre philosophale », mais par son pouvoir théurgique (cf. l’anecdote de l’enfant urinant dans un plat à couscous !) .


En fait l’essentiel de l’Alchimie se résume à la compréhension et à la pratique de 2 voies essentielles : La VOIE sèche et la VOIE humide .


René Guénon, véritable alchimiste non « métallurgiste »  en savait quelque chose (il suffit de se reporter à son dernier ouvrage : « La grande Triade ») . Et ceux à qui cette clef est destinée comprendront ce que nous voulons dire (car elle se retrouve dans deux catégories initiatiques du Tasawwuf : comprenne qui pourra !)


Bref, dans chacune de ces méthodes, il faut un Maître, sans quoi ces pratiques se révèlent non seulement illusoires, mais dangereuses…(y compris dans leur déviation moderne appelée « sport ») .





(*)On nous objectera qu'il y a quelques étrangers depuis 2010 (non-asiatiques); ces exceptions sont récentes, et aucun ne peut se targuer  du titre  de Yokozuna.








V


LA MARCHE INITIATIQUE DES BOUDDHISTES JAPONAIS


(kai-ho-gyo)











Ce rite avait déjà attiré notre attention il y a bien longtemps ,en lisant l'ouvrage de Paul Arnold, paru chez Fayard en 1972. Il parlait d'un jeûne total de 9 jours ; mais pendant ces 9 jours, le disciple ne devait ni se coucher ni dormir ,ce qui est incompréhensible pour la médecine occidentale qui enseigne que l'on ne peut survivre à 4 jours de jeûne total (sans manger ,ni boire ,dormir! ) .





Or, une trentaine d'années plus tard, la chaîne de télévision européenne ARTE (connue pour la qualité de ses émissions culturelles, voire ésotériques) projetait le samedi 11 mars 2000,de 20.45 à 21.40, dans le cadre de l '« Aventure humaine » ,une émission spéciale intitulée : »Les mille jours ,ou la marche éternelle d'ajari » ,présentée comme un documentaire réalisé par Daniel Moreau en 1999. Mais la présentation de l'émission dans « Télérama » par Cécile Maveyraud était parfois défectueuse,comme on en jugera par les quelques extraits suivants :





« Ajari n'est pas un prénom, ajari est un titre. Celui obtenu par des moines bouddhistes de l'Ecole TendaÏ. Ils sont 5 ajari vivant aujourd'hui au Japon, héritiers d'un enseignement teinté de mysticisme et de pratique ascétique..Pour devenir grand Maître de la pratique, les moines doivent parcourir en 1000 jours répartis sur 7 années, 38 400 kms dans la montagne Hiei et dans les rues de Kyoto . Daniel Moreau a filmé l'un d'eux .Vêtu de blanc, sandales de paille au pied et chapeau en forme de lotus sur la tête, l'homme s'arrête 260 fois pour prier .Solitaire dans la nature . Entouré en ville où les gens s'agenouillent sur son passage pour qu'il pose brièvement sur leur tête et leurs épaules son chapelet . Depuis  1200 ans , cette marche existe et n'a jamais changé . Ces 1000 jours doivent permettre de « trouver une paix avec la réalité du monde . Cet exercice repose sur le principe de gratitude que les Ajari doivent à leur Maître comme à la nature, comme à autrui . ».





Cécile Maveyraud termine par cette critique : »Le sujet aurait mérité, par moments, d'être traité de manière plus abstraite .Une abstraction qui aurait permis d'exprimer davantage l'état d'esprit, les sensations et qui aurait été peut-être plus parlante que les mots. »








On voit que cette dame n'est pas spécialiste de la question, car cette marche n'existe pas depuis 1200 ans et , curieusement, il y a plusieurs types de « marche initiatique ». Nous pensons, que, comme la méthode propre à chaque Zawiya dans le Soufisme, le déroulement et les modalités techniques précises dépendent de chaque Maître , ce que ne disent ni Daniel Moreau , ni Cécile Maveyraud . D'autre part, sa critique montre les limites de la mentalité occidentale : elle regrette un manque d'abstraction tout en réclamant plus de développements sur les « sensations » (?). Elle veut sans doute dire qu'il y manque un éclairage doctrinal ; mais pour cela, il aurait fallu se référer à Guénon. Ou au moins, à la doctrine de l'Ecole Ten -DaÎ sur laquelle nous reviendrons tout à l'heure.





Quoi qu'il en soit, la vision pendant près d'une heure des extraits de cette marche initiatique est intéressante et ...impressionnante.Même si on ne sait rien sur le sort de l'initié , qui est en danger de mort pendant 9 jours ...IL paraît qu'autrefois, celui qui n'arrivait pas au bout de l'épreuve était tout simplement décapité (un peu comme dans 2è partie du « seppuku » -suicide d'honneur) ! Inutile de dire que les initiés ,évidemment sous le contrôle d'un Maître ne sont pas improvisés. Déjà ils doivent effectuer 1 000 kms de marche préparatoire en 7 ans; il y faut des qualifications corporelles rarissimes. On remarquera que ce chiffre présente un sens arithmologique ,car 1 000 jours correspondent à peu près à 3 ans + 3 mois + 3 jours ,suivis de 9 jours et nuits de Kai-Ho -Gyo qui signifie en japonais : méditation ambulante; rite se déroulant dans un lieu sacré, la montange Hiei, près de la ville sainte de Kyoto. Le titre d'Ajari,comme n'auront pas manqué de le remarquer les connaisseurs ,vient tout droit du sanscrit : »achariya », qui signifie « Maître »,comme dans le titre hindou de Shankar-achariya ». Dans l'article de Télérama cité plus haut, on semble confondre la fondation de l'Ecole Ten Daî et l'institution de la « marche initiatique », laquelle remonterait à 1548 ou à 1571 selon d'autres sources. Mais il faut souligner que cette Ecole a son origine en Chine,s ous le nom chinois de Tiân-Tai , japonaisé en « ten-daï ,[..... .....] que l'on peut traduire à peu près par : »Table du Ciel »





Maintenant, si l'on se réfère aux sources documentaires, on est surpris de voir que celui qui semblait faire autorité autrefois, D.T.Suzuki ,dans ses « Essais sur le Bouddhisme Zen »(réimprimé en 1972 en 3 volumes chez Albin Michel), quand il mentionne l'Ecole Ten-Daî, ne cite pas une seule fois la marche initiatique, même sous son nom japonais de « Kai-Ho-Gyo », ni le titre d' »ajari » !...Cette Ecole se situe évidemment dans le cadre de la Voie ou Méthode Zen, venue elle aussi des Indes par l'intermédiaire de la Chine (Dhyâna = Chen = Zen), comme l'a fort bien expliqué René Guénon. Il suffira donc de se reporter aux ouvrages de spécialistes sur le Maître Houeï-Neneg (chez Albin Michel, 1963/1984), notamment, pour comprendre la Doctrine, en attendant de revoir un jour sur ARTE un reportage plus précis sur la « Marche initiatique » qui nous semble s'insérer légitimement dans notre essai sur le Corps.





Pour finir, nous ferons remarquer que ,malgré leur apparent équilibre, leurs moeurs policées, leur esthétisme (patents dans leur tolérance, leur respect de l'étranger, la discrétion , l'art des jardins...etc) qui respirent la Paix, il y a tout à l'opposé, un côté excessif des Japonais qui est frappant dans le cas des Sumotori, des Kamikaze, du seppuku et enfin dans les rites extrêmement dangereux du Kai-Ho -Gyo.