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samedi 4 février 2017

Maurice Gloton, une figure emblématique du vivre-ensemble












Assim Olakorede
   

Ainsi va la vie. Parmi les gens, il y a souvent le Monsieur Normal. Il est né normal, dans une famille normale, mène une vie normale et sa mort est également normale. Personne ne se souvient de son passage sur terre. Tel n’est pas le cas de Maurice Gloton, qui vient de nous quitter après une vie bien remplie.


S’attarder sur ses travaux de traduction et sa qualité d’écrivain pourraient être trompeur. Maurice Gloton, que Dieu lui fasse miséricorde, est un bâtisseur de ponts. Il est bâtisseur de ponts entre l’orient et l’occident de par ses travaux intellectuels. Il est bâtisseur de ponts entre génération de par sa présence, par exemple, aux côtés des jeunes à travers l’association « Union des Jeunes Musulmans » dans la genèse de cette dernière. Il est bâtisseur de ponts entre les nouveaux musulmans et les musulmans de naissance. Il est bâtisseur de ponts entre les gens tout simplement par le fait d’enseigner et de répandre l’amour de Dieu et l’amour en Dieu. Il a saisi très tôt le concept du vivre-ensemble, à savoir, se connaître pour s’aimer et pour se comprendre, les ingrédients d’une vie paisible et sereine dans la société.


Aujourd’hui, Maurice Gloton rejoint ses compagnons de combat tels qu’Eva de Vitray-Meyerovitch, Najm Oud-din Bammate, Muhammad Hamidullah, Jean-Loup Herbert, Vincent Monteil pour ne citer qu’eux, que Dieu leur fasse miséricorde. Ensemble, avec des origines diverses et parcours différents, ils ont fait l’émission « connaître l’Islam » devenu aujourd’hui « Islam » sur une chaine de télévision publique. A travers cette émission, ils ont contribué, à leur manière, à faire progresser la connaissance de l’Islam ; non pas par la violence commise au nom de l’islam à la quelle l’islam est étrangère, répétons-le, mais par la spiritualité et l’amour de l’autre quelles que soient ses convictions religieuses ou ses idées politiques.

La génération actuelle devrait s’inspirer de la vie de Maurice Gloton. L’ouverture vers le monde et vers l’autre est plus que jamais d’actualité au moment où les promoteurs du repli sur soi, pour des ambitions personnelles d’ailleurs, semblent prendre le dessus presque partout.

Brisons le mur de chacun pour soi ou de chacun dans son coin. Rassemblons-nous, unis dans nos diversités, nouveaux musulmans ou de naissance, toutes tendances confondues. C’est l’une des clés pour contribuer, avec succès à la transformation de la société. Un vœu pieux me signalerez-vous, avec la volonté de tous et des invocations, tout est possible avec l’aide de Dieu. Laissons-nous rêver, « tous les grands projets commencent par un rêve », on dit.





Ma rencontre avec Maurice Gloton - Azais Khalsi








Azais Khalsi


C’est avec tristesse que nous apprenons le départ de notre frère en Dieu Obeidallah Maurice Gloton.

Dans l’histoire de l’humanité, de grands hommes traversent l’histoire en léguant une œuvre majeure et magistrale, permettant ainsi à celles et ceux qui restent, de profiter pleinement du travail et du sacrifice pour Dieu, œuvre de toute une vie.

Sa conversion à l’âge de 20 ans n’aura pas du tout présagé un tel parcours, noble et humble, car c’est pendant les 70 années qui suivront qu’il se consacrera à une langue, particulière, subtile, riche, équilibrée, qu’est la langue arabe.

Cette belle langue, dont on dit aujourd’hui que c’est une langue violente, dénuée de spiritualité. C’est ce grand travail, minutieux, digne des plus grands horlogers, qui redonnera au monde francophone, la beauté et la subtilité de cette langue, rares sont ceux qui ont réussi à nous faire ressentir sa douceur et son délice.

C’est en 2002 que Dieu me permit de le rencontrer pour la première fois, après la parution de « l’index Coranique », une des œuvres majestueuses.
Une rencontre qui marquera la vie d’un jeune francophone en quête d’une compagnie et qui le liera à celle de la belle compagnie Prophétique par la suite.

Parmi les rencontres des hommes du soufisme qui marquent aujourd’hui le paysage francophone, c’est celle qui aura marqué tout mon être. Quatorze belles années que j’ai apprécié tant l’homme était l’expression d’une spiritualité vivante.

Chacune de mes rencontres avec le défunt Obeidallah, était une visite d’apprentissage. A peine arrivé, sa conjointe mettait à notre disposition du thé et des petits gâteaux qui devaient nous permettre de tenir toute la matinée. Nous parlions des différents travaux d’écriture en cours, de futures publications comme « Jésus fils de marie », « Adam », « La traduction du Coran », nous nous arrêtions longuement sur l’index coranique où il m’expliquait la façon de l’utiliser et comment profiter pleinement de ce fabuleux travail.

Grâce à lui, j’ai pu apprécier l’arabe, qui devenait accessible, beau et fin.
Chacune de mes rencontres m’a permis de m’enrichir et de prendre conscience du pouvoir des mots. Obeidallah Gloton, notre défunt frère, avait les mots en lui, il avait fait ce travail profond d’introspection qui lui permit de lire le texte en homme détaché et ainsi d’exposer en toute neutralité la beauté des textes soufis.

Il m’a rappelé que lire, demande un détachement, une certaine réalisation intérieure, afin d’apporter une contribution saine, totalement impersonnelle.

Aussi, en ses côtés, nous lisions doucement afin de mesurer chaque mot, chaque phrase, nous revenions parfois plusieurs fois sur les mêmes textes, il voulait être sûr de n’avoir rien oublié.

Lorsqu’il demandait mon point de vue, j’étais gêné, mais je compris que c’était surtout pour me valoriser, valoriser son invité, un homme de Dieu qui dévoile en chacun de nous, nos grandes possibilités cachées.

Humilité, voilà comment je terminerai ce modeste témoignage.
Il y aurait tellement de choses à dire, mais les hommes de Dieu sont des personnes qu’on ne comprend qu’après leur départ.

samedi 19 juillet 2014

Maurice Gloton - Apport de l'oeuvre de René Guénon à l'Occident et à l'Orient




René Guénon naquit en 1888, à Blois, dans le coeur de la France, là où l'on dit parler le Français le plus pur, et mourut il y a maintenant cinquante ans (ndlr : article datant de 2001) au Caire où il est enterré. De nombreux lecteurs qui ont étudié son oeuvre et profité de son enseignement ne connaissent presque rien de l'homme car, ainsi qu'il l'a très souvent indiqué, il s'effaçait derrière la Doctrine métaphysique qu'il a si bien su exprimer dans un style très accessible malgré la difficulté à rendre en langage clair les vérités d'ordre universel.

Il acquit une formation universitaire qui lui permit d'enseigner le Français et les mathématiques. C'est en 1910 que remonterait sa "conversion" à l'Islam. En 1930 il partit au Caire où il s'installera définitivement puis se maria avec une égyptienne qui lui donna quatre enfants. Il s'affilia à la Tarîqa Shadhouliyya et fut connu sous le nom de `Abd al-Wâhid Yahyâ.

Très tôt, il évolua dans différents milieux ésotériques ou initiatiques, la Franc-Maçonnerie, entre autres et collabora à différentes revues. Il participa activement, de 1925 à 1927 avec Charbonneau-Lassay, l'auteur du Bestiaire du Christ, à la rédaction de la revue "Regnabit" dirigée par le père Anizan. Il mit en lumière le rapport étroit qui liait les symboles de différentes traditions passées ou orientales au Christianisme et leur commune origine sacrée. Il écrivit dans la revue "la Gnose" et fonda la revue "le Voile d'Isis" qui s'appela plus tard "les Etudes Traditionnelles". C'est dans cette revue qu'il exprima, sous forme d'articles isolés ou suivis, l'essentiel de son oeuvre qui sera ensuite reprise et publiée dans des ouvrages d'ensemble, sous les titres que nous connaissons actuellement.

Dans la revue "La Gnose", il signe du nom de Palingenius, des articles remarquables par la profondeur des idées et par leur universalisme. C'est dans cette revue qu'il définira ce qu'est justement cette Gnose dont il n'aura de cesse de montrer les différents aspects que l'on retrouve dans toutes les traditions authentiques :

"Ce qu'il faut entendre par "gnose", c'est la connaissance traditionnelle qui constitue le fonds commun de toutes les initiations et dont les doctrines et les symboles se sont transmis, depuis l'Antiquité la plus reculée jusqu'à nos jours, dont la longue chaîne n'a jamais été interrompue."

Cette perspective universelle de la connaissance véritable et des vérités éternelles qu'elle implique est exprimée d'une manière très forte et personnelle par Maître Eckhart de cette manière :

"Quand j'étais encore dans ma cause première, là je n'avais pas de Dieu, et j'étais ma propre cause. Je ne voulais rien, je ne désirais rien, me connaissant moi-même dans la jouissance de la vérité. C'est moi-même que je voulais et rien d'autre ; ce que je voulais, je l'étais, et ce que j'étais, je le voulais ; j'étais libre de Dieu et de toutes choses. Mais quand je sortis de ma volonté libre et que je reçu mon être créé, j'eus un Dieu ; car avant qu'il y eût des créatures, Dieu n'était pas encore Dieu, mais Il était ce qu'Il était. Lorsque la créature fut et qu'elle reçut sa nature de créature, Dieu n'était pas Dieu en Lui-même, Il était Dieu dans la créature'" (Sermon : "Pourquoi nous devons nous affranchir de Dieu même", traduction de Gandillac).

Cette distinction entre l'Essence divine inqualifiable dans Laquelle tous les êtres sont fondus et la manifestation de toutes leurs possibilités, avec les degrés hiérarchiques qu'ils comportent, a été magistralement mis en lumière dans les livres doctrinaux que René Guénon a consacrés à ce thème majeur de la métaphysique. Cette perspective sera développée surtout dans deux de ses principaux ouvrages doctrinaux : "Les états multiples de l'être", et "l'Homme et son devenir selon le Védanta".

L'Essence divine est infinie et éternelle, elle contient toutes choses et n'est contenue par aucune d'elles même la plus sublime. En tant qu'Infini, rien ne sort d'elle et rien ne peut y entrer. Elle est à l'origine de toute chose et aucune chose n'a d'existence en dehors d'Elle. C'est pourquoi toute manifestation est rigoureusement illusoire par rapport à elle, ce qu'on retrouve formulé dans ce verset coranique fondamental : "O les êtres humains ! Vous êtes les démunis jusqu'à Allâh alors qu'Allâh est le Riche absolu qui se passe de tout et le Très-Louangé." (Coran 35-15). Nous avons résumé, en quelques phrases concises, l'essentiel de ce qui est appelé, dans le Soufisme des disciples d'Ibn `Arabî : Wahdat al-Wujûd, l'Unicité de l'Existence universelle.

L'Essence divine constitue le "Soi ultime", dont Guénon parlera en termes magistraux. Citons-le dans un passage capital de l'"Homme et son devenir selon le Védanta" au chapitre distinction du "Soi" et du "Moi" :

"Le "Soi" est principe transcendant et permanent dont l'être manifesté, l'être humain par exemple, n'est qu'une modification qui ne saurait d'ailleurs aucunement affecter le principe"… "Le Soi en tant que tel, n'est jamais individualisé et ne peut pas l'être, car, devant être toujours envisagé sous l'aspect de l'éternité et de l'immutabilité qui sont des attributs nécessaires de l'Etre pur, il n'est évidemment susceptible d'aucune particularisation qui le ferait être autre que soi-même. Immuable en sa propre nature, il développe seulement les possibilités indéfinies qu'il comporte en soi-même par le passage relatif de la puissance à l'acte à travers une indéfinité de degrés et cela sans que sa permanence essentielle en soit affectée, précisément parce que ce passage n'est que relatif et parce que ce développement n'en est un, à vrai dire, qu'autant qu'on l'envisage du côté de la manifestation en dehors de laquelle il ne peut être question de succession quelconque, mais seulement d'une parfaite simultanéité, de sorte que cela même qui est virtuel sous un certain rapport ne s'en trouve pas moins réalité dans l'éternel présent. A l'égard de la manifestation, on peut dire que le "Soi" développe ses possibilités dans toutes les modalités de réalisation, en multitude indéfinie, qui sont pour l'être intégral autant d'états différents, états dont un seul, soumis à des conditions d'existence très spéciales qui le définissent, constitue la portion ou plutôt la détermination particulière de cet être qui est l'individualité humaine."

Le grand maître du Soufisme, Ibn `Arabî, né à Murcie en 560/1165 et mort à Damas en 638/1240 ne dira pas autre chose sous des formes propres à l'Islam à propos du "Wujûd" ou de la Réalité absolue qui manifeste Ses possibilités infinies.

Le "Wujûd" comporte des "degrés" innombrables. Le premier est celui de l'Essence absolue ou le Mystère du Mystère qui transcende toute relation, toute manifestation et toute détermination et qui demeure inaccessible, inconnaissable et indicible. On ne parle de l'Essence qu'en termes négatifs et en tant que telle, elle ne se révèle pas.

Ibn `Arabî distinguera, dans la Possibilité infinie de l'Essence, l'Unité absolue indivisible et indifférenciée que René Guénon dénommera "la Non-dualité". Cette Unité contient en Elle, d'une manière synthétique tous les Noms divins sans qu'on puisse pourtant en distinguer un seul en Elle. Dieu Lui-même y fait allusion dans le hadîth saint suivant :

"J'étais un Trésor (caché) ; Je n'étais pas connu. Or, J'ai aimé être connu. Je créai les créatures et Je les fis connaître par Moi. Alors elles Me connurent."
Ce Processus primordial sera décrit par Ibn `Arabî par l'expression : "La Surabondance sanctissime" (al-Fayd al-aqdas).

Au degré suivant, et aux confins de la manifestation universelle, Ibn `Arabî distingue l'Unicité divine ou l'Unité plurale, qu'il appellera : "la Surabondance sainte" (al-Fayd al- muqaddas) en laquelle l'Essence absolue est envisagée comme le Principe de la Manifestation des possibilités divines. Elle comporte une infinité de propriétés et de réalités qui sont resserrées dans le Point métaphysique qui la symbolise. René Guénon parlera de ce principe comme de l'Etre pur, Principe de la Manifestation universelle.

Nous pouvons remarquer que les deux points de vue, celui de l'universalisme des doctrines traditionnelles de tous les temps que Guénon a su si bien exprimer dans toute son oeuvre immense, et celui d'Ibn `Arabî, coïncident mais, bien entendu, sous des modes d'expressions très différents.

En partant de ces principes universels et essentiels qui caractérisent l'être humain dans sa dimension divine, René Guénon va développer, toujours en plein accord avec les Traditions authentiques de tous les temps actuellement connues, les différents états de la constitution de cet être humain fait à l'image même de Dieu, ainsi qu'on le retrouve explicitement tant dans la Tradition hébraïque que dans l'Islam. Il est l'Homme universel qui totalise aussi bien les degrés divins que les degrés cosmiques dans leurs réalités informelles ou angéliques et formelles ou individuelles.

La conscience que l'être humain a de sa constitution intégrale est amoindrie ou oblitérée par le jeu incessant de la manifestation dans la multiplicité cosmique. Cette perte de conscience ou cette aliénation spirituelle s'effectue progressivement, selon des lois cycliques rigoureuses que les diverses traditions appellent "les quatre âges de l'Humanité". René Guénon y fera souvent référence, surtout dans ses ouvrages critiques, tels que "la Crise du monde moderne", "le Règne de la quantité et les signes des temps" ou "Orient et Occident". Il y décrit avec beaucoup de force de conviction la décadence du monde actuel que la Tradition hindoue appelle "l'âge sombre ou l'âge de fer". Les Messagers divins et les Prophètes, êtres parfaitement réalisés en Dieu et possédant la connaissance essentielle et existentielle, sont envoyés à chaque phase critique de la décadence humaine pour rappeler les vérités essentielles et instituer les moyens de grâce adéquats pour que les êtres humains reconnaissent, d'une manière plénière la présence du divin en eux. Certains ouvrages de Guénon présentent cet aspect de la réalisation spirituelle et des organisations traditionnelles qui y donnent accès. Citons : "Initiation et réalisation spirituelle" et "Aperçus sur l'initiation". Il mettra en garde aussi contre les pseudo-ésotérismes et les subversions doctrinales dans deux ouvrages fondamentaux : "le Spiritisme" et "le Théosophisme".

Après ce trop court survol de l'oeuvre de René Guénon et de son contenu doctrinal, nous voudrions montrer pour conclure quelle a été et quelle est encore actuellement l'influence de cette oeuvre en France et son rayonnement à l'étranger.

Guénon a précisé à plusieurs reprises qu'il n'était pas un maître spirituel et, par conséquent, qu'il n'avait pas de disciples au sens strict du terme. Il faut comprendre, de cette déclaration, qu'il n'avait pas cette charge mais que sa fonction était principalement de faire prendre conscience, aux personnes de bonne volonté et d'aspiration spirituelle sincère, de la Doctrine universelle et de la réalisation spirituelle qui en découle. Ses disciples intellectuels sont alors ceux qui relèvent de cette perspective. Ainsi, tant en France que dans d'autres pays voisins, un nombre appréciable de personnes, formées par l'intermédiaire de son oeuvre, sont revenues à leur tradition d'origine ou ont adhéré à l'une des formes de révélations accessibles aux occidentaux comme par exemple l'Islam et le Soufisme qui en constitue l'aspect intérieur. C'est à travers certaines d'entre elles, qui assimilèrent profondément son oeuvre, que va se développer, sous la forme islamique, la publication d'oeuvres d'Ibn `Arabî et de son Ecole. Michel Vâlsan fut, en France, le représentant qualifié qui fit connaître, dans les Etudes traditionnelles, par des traductions et des annotations fort pertinentes, certains des ouvrages du Maître andalou. De plus, actuellement, des disciples de Michel Vâlsan ou des personnes qui ont bénéficiées à la fois de l'apport de René Guénon et de Michel Vâlsan continuent de faire connaître tant les oeuvres du Shaykh al-Akbar, Ibn `Arabî, que celles d'autres maîtres soufis authentiques.


René Guénon est maintenant mondialement connu, aussi bien par la réédition et la diffusion permanente de ses ouvrages en français, que par leurs traductions en de nombreuses langues. Puisse le contenu universel de son oeuvre continuer de rayonner de plus en plus dans notre monde trop souvent submergé par le progrès technique et les valeurs économiques au détriment de l'aspect spirituel de l'être humain, et cela avant que la fin de l'âge sombre dont parlent les différentes traditions ne vienne sceller le cycle cosmique actuel !


jeudi 3 octobre 2013

Biographie de Fakhr Ad-Dîn Ar-Râzî - Maurice Gloton









D'après le Traité sur les Noms Divins de Fakhr ad-Dîn ar-Râzî (فخرالدين الرازى), traduit par Maurice Gloton, éd. Albouraq, 2009


 
Muhammad Abû ‘Abd Allâh Muhammad Ibn ‘Umar Ibn al-Husayn Ibn Hasan Ibn ‘Alî surnommé Fakhr ad-Dîn, gloire de la Religion, naquit à Rayy, le vingt-cinq Ramadân de l’an 544 ou 543/1149 selon certains chroniqueurs . C’est de sa ville natale qu’il tint son nom Râzî . Il fut redevable d’un de ses surnoms, Ibn al-Khatîb, le fils du prédicateur, à la fonction qu’occupait son père, prédicateur à Rayy, Diyâ ad-Dîn abû al-Qasîm .
Son nom ne doit pas être confondu avec celui de Abû Bakr Muhammad Ibn Zakariyyâ plus connu en occident latin sous l’appellation de Razès, célèbre médecin et philosophe mort en 313/925, trois siècles avant Râzî .

Fakhr ad-Dîn ar-Râzî fut un imâm (chef préposé) magnifique, Maître difficilement égalé en maintes disciplines et sciences islamiques . Il était d’une compétence éprouvée dans les sciences religieuses fondamentales (uçûl al-Dîn), théologien habile, logicien, commentateur, auteur d’un grand nombre d’ouvrages célèbres dans tout l’univers islamique . Il possédait la maîtrise dans toutes les disciplines qu’il abordait . Il avait la connaissance parfaite de l’arabe et du persan et composa des poésies dans ces deux langues . Il enseigna le droit canon (fiqh), la théologie dogmatique (kalâm) 1, l’histoire, la philosophie – surtout celle d’Ibn Sinâ 2, l’Avicenne des latins, dont il commenta plusieurs ouvrages et auquel il emprunta certains aspects doctrinaux fondamentaux . Il aborda l’alchimie sans grand succès . Il connaissait bien la médecine, l’astrologie, la physognomonie (firâs), la géométrie et la minéralogie et composa sur ces disciplines plusieurs traités qui firent longtemps autorité .
Cet homme de culture encyclopédique, ouvert, à toutes les connaissances de l’époque était servi merveilleusement par une mémoire fidèle et précise qui faisait la grande admiration de ses contemporains . Son jugement et sa démarche logique, rigoureuse et méthodique contribuèrent à faire imposer ses vues en matières théologique et philosophique et l’aidèrent à triompher aisément de ses adversaires principaux : les Mu’tazilites 3 et les Karramites 4  .

Son éloquence était célèbre . Sa voix chaleureuse communiquait l’émotion religieuse et lui-même avait le don des larmes qui passait dans son auditoire . Cette facilité à s’exprimer était encore relevée par une rare habileté à trouver des preuves sur tous les sujets qu’il traitait en public ou dans ses écrits, ce qui confondait et mortifiait souvent ses adversaires . Malgré ses dons exceptionnels qui le mettaient loin à la tête de ses contemporains, il restait prudent en traitant les questions touchant au droit canon, à la théologie et à la philosophie et savait pleurer sur ses fautes et ses erreurs ainsi qu’en témoignèrent certains de ses contemporains dont le célèbre soufi, Muhyî ad-Dîn Ibn ‘Arabî surnommé le Sheikh al-Akbar, le Maître le plus grand 5, qui lui fit parvenir une épître dont nous présenterons le contenu plus loin .
Sa voix était chaude, vibrante et puissante comme sa personne dont la stature, sans être très grande impressionnait .

A Hérat, où il passa une grande partie de sa vie et où il s’éteignit, les notables de la ville, les grands docteurs en diverses sciences assistaient à ses prédications . Il avait la confiance de la plupart des gens qui reconnaissaient en lui un homme d’une intelligence exceptionnelle et d’un savoir hors pair . Lorsqu’il voyageait, il avait une suite impressionnante de savants, disciples en toutes sciences qui l’accompagnaient, trois cents, dit-on !
Son père, prédicateur à Rayy, était docteur de la Loi religieuse selon l’école d’interprétation de l’Imâm al-Shâfî’î 6 et d’obédience théologique ash’arite 7 . Selon l’usage fréquent à l’époque, il enseigna les sciences religieuses à ses deux fils, Fakhr al-Dîn et Rukn al-Dîn, l’aîné qui montra fort peu de dispositions pour l’étude mais beaucoup de jalousie pour son frère cadet .

Râzî, dans son traité intitulé tahçîl al-haqq, l’acquisition de la vérité, justifie la science qu’il reçut par tradition en remontant jusqu’à l’Imâm al-Shâfî’î . Il sera amené pourtant à rejeter certains points doctrinaux et d’interprétation de ses deux illustres prédécesseurs : l’Imâm al-Shâfî’î en Droit et Abû al-Hasan al-Ash’arî en Théologie, pour adopter quelquefois le point de vue des Mu’tazilites ou des philosophes tel que Ibn Sînâ et présenter ses propres perspectives doctrinales originales .
A la mort de son père, il eut deux Maîtres célèbres, Al-Kamâl as-Samnanî en Droit et al-Majd ad-Din al-Jîlî en Théologie et en Philosophie 8 . Ce dernier fut un disciple de al-Hâmid Ghazâlî 9 . Râzî suivit Majd ad-Din al-Jîlî un certain temps dans les voyages qu’il fit à Marâgha où il fut appelé à prêcher et à enseigner .

Selon l’usage, il entreprit de voyager après avoir achevé son cycle complet de formation religieuse et philosophique .
On le retrouve à Khwarazm disputant avec les Mu’tazilites . Devant l’hostilité de ceux-ci, il fuit et retourne à Rayy .

Ensuite, il partit en Transoxiane 10 vers 580/1184, toujours débattant des questions théologiques délicates avec des représentants de différentes écoles doctrinales : Mu’tazilites, Karramites et Matûridites 11 .
Des contacts s’établirent, à son retour à Rayy, avec le gouverneur de Ghazna, Shihâb ad-Dîn al-Ghûrni qui le reçut avec beaucoup de considération et d’honneur au point de lui faire construire une école où il put enseigner . Il dut lutter contre les Karramites, avec succès dans un premier temps, en faisant revenir à l’orthodoxie, le frère du gouverneur, Ghiyâth ad-Dîn, l’arrachant ainsi à leur emprise .

Râzî retourne au Khurâsân en 584/1188 et bénéficie du patronage du roi ‘Ali ad-Dîn Tukush . Il devint le précepteur de son fils Muhammad . Quand celui-ci parvint au trône à la mort de son père, l’influence de Râzî grandit .
Il voyagea, dit-on, aux Indes en passant par Samarkande et finit par s’établir à Hérat en 600/1203 où il passa le reste de sa vie . Il acquit là de nombreux biens . Sa renommée devint telle qu’on l’appelait le Sheikh al-Islâm .

Son orthodoxie sunnite, de tendances ash’arites et shâfi’îtes, tant en matière de théologie que de jurisprudence, lui avait attiré des ennemis acharnés, parmi les Mu’tazilites, les Karramites et, quelquefois, les Matûridites . Certains de ses adversaires, jaloux de son succès et de son emprise auprès des grands et du peuple, tentèrent des émeutes contre lui . On l’accusa même d’encourager la philosophie aristotélicienne dans ses écrits et dans ses paroles . Jusqu’à sa mort, il eut à combattre, sans relâche, les adversaires de la Tradition « orthodoxe » .
Le testament qu’il dicta sur son lit de mort est une « véritable » profession de foi et constitue un témoignage de total abandon à Dieu . Il y justifie son approche des disciplines de la Loi sacrée .

Il s’éteignit le mardi premier de Shawâl, jour de la fête de la Rupture du Jeûne, l’an 606/1209 à soixante ans à Hérât où sa tombe est toujours vénérée 12 .

Son œuvre écrite

L’œuvre écrite de Râzî, laissée à la postérité est considérable . Certains de ses contemporains faisaient entendre, non sans quelque malice, qu’une partie de son immense fortune venait de là . Même si cette insinuation est fondée, un auteur médiocre, à cette époque, ne pouvait composer une telle somme sans que les lecteurs ou les auditeurs n’eussent reconnu la portée d’une telle œuvre .
Les ouvrages qu’il composa traitent de la plupart des disciplines scientifiques de son temps : théologie (kalâm), droit canon (fiqh), éthique (‘ilm al-akhlâq), philosophie (hikma ou falsafa), grammaire, rhétorique, commentaire du Coran (tafsîr), médecine, astrologie, géométrie, physiognomonie, chirognomonie, le tout à notre connaissance actuelle représentant plus de cent titres dont certains sont de véritables sommes : son immense commentaire du Coran constitue à lui seul trente-deux gros volumes .

En dehors de ce grand commentaire coranique intitulé Mafâtih al-Ghayb, Les Clés du Mystère, qui abonde en questions théologiques, ses traités les plus connus sur le Kalâm sont les suivants :

-Al’arba’în fî uçûl al-dîn, Quarante questions sur les principes de la Religion ;

- Asâs al-taqdîs qui traite de la transcendance et de l’immanence de Dieu ;

-Al-ma’âlim fî uçûl al-dîn traitant de diverses questions théologiques controversées ;

-Al-mabahith al-‘imâdiyya fî al-matâlib al-mu’ adiyya

-Al-mahçûl

-Al-muhaççal, précis de méthode et de somme théologique

-Lawâmi’ al-bayyînât fî sharsh asmâ’ Allâh al-husnâ wa al-çifât, traité qui fait l’objet de la présente traduction .

 
1.      Le terme Kalâm signifie parole et discours . L’origine de la désignation de la Théologie dogmatique ou scolastique islamique par ce mot Kalâm est en relation étroite avec le problème majeur en Islam de la Parole divine, en Dieu-même, comme Qualité d’essence et dans Son expression révélée .

La Théologie dogmatique ainsi désignée se présente comme une approche rationnelle des données et des lieux théologiques . Elle ne traite donc pas, si ce n’est accidentellement, des questions mystiques, de gnose, de réalisation spirituelle que le Taçawwuf approfondira comme étant de son domaine propre .

2.      Ibn Sînâ (Abû ‘Alî Husayn ibn ‘Abd Allâh) est né à Afshana près de Boukhara en 370/980 et mort en 428/1037 près de Hamadan . Caractère précoce et encyclopédique, il maîtrisait les disciplines suivantes : grammaire, géométrie, physique, médecine, jurisprudence, théologie, philosophie . Cf. Henry Corbin, Histoire de la philosophie islamique, Paris, 1964 . Cf. Ibn Sînâ, Livre des Directives et Remarques, traduction avec introduction et notes par A.M. Goichon, Paris, 1951 . Cf. Henry Corbin, Avicenne et le Récit visionnaire, Paris, 1979 (seconde édition) .

3.      Les Mu’tazilites représentent une Ecole musulmane de tendance rationaliste qui prit naissance dans la première moitié du IIè siècle de l’Hégire à Basra et se développa très rapidement à Bagdad et dans l’univers islamique de l’époque .

L’origine du nom mu’tazilite est controversée . Leur doctrine repose sur cinq thèses principales : 1) L’Unité divine (tawhîd) transcendante et négation des Qualités divines distinctes de l’Essence . 2) La Justice divine (‘adl), libre arbitre et liberté . 3)  La promesse et la menace ou le sort des croyants dans la vie future . 4) La situation intermédiaire (al-manzila bayna al-manzilatayn) entre la Foi et l’incrédulité . 5) L’Ordre divin de faire le bien et d’interdire le mal (al-amr bi al-ma’rûf wa al-nahy ‘an al-munkar) .

Pour l’exposé complet sur cette Ecole Cf. Albert N. Nader : Le Système philosophique des Mu’tazila, Beyrouth, 1956 et Louis Gardet et M.M. Anawati : Introduction à la Théologie musulmane, Paris, 1948 .

Pour faciliter l’exposé de Râzî sur les aspects doctrinaux des différents représentants de l’Ecole Mu’tazilite, nous donnons ci-après le nom des principaux d’entre eux avec la date de leur mort, sur deux tableaux synoptiques, l’un concernant la branche de Basra et l’autre celle de Bagdad .

4.      Cette Ecole tire son nom de son fondateur Abû ‘Abd Allâh Muhammad b. Karrâm né à Nisâbur dans la première moitié du III/IV – siècle et mort en 255/870 . On ne connaît sa doctrine que par des hérésiologues tels que Baghdâdî, théologien ash’arite et Sam’ânî .
Il disait que Dieu est une substance (jawhar) . Sa tendance anthropomorphiste lui faisait interpréter très concrètement les versets de Coran dans lesquels Dieu est décrit avec des membres ou des caractéristiques des êtres créés d’où, selon lui, la localisation de Dieu et de Son Trône . Les partisans de cette école sont dénommés les Corporatistes ou Anthropomorphistes (mujassîma) . V. ‘Abd al-Qâhir al-Baghdâdî, Kitâb al-farq bayna al-firaq, Le Caire s.d. p. 202 sq. ; et aussi Michel Allard : Le Problème des Attributs divins, Beyrouth, 1965, pp. 321 – 328 .

5.      Muhyî ad-Dîn Abû ‘Abd Allâh Muhammad Ibn ‘Alî Ibn Muhammada Ibn al ‘Arabî al-Hâtimû at-Tâ’î naquit à Murcie le 27 Ramadân 560/7 août 1165 et mourut à Damas le 28 rabi’a II 638/16 novembre 1240 . Il ne doit pas être confondu avec le traditionaliste né à Séville Abû Bakr Muhammad Ibn ‘Abd Allâh (468/1076 – 543/1148) . Son œuvre immense traite de toutes les sciences religieuses islamiques depuis celles de la Loi exotérique (sharî’â) jusqu’à celles de la Vérité essentielle (haqîqâ) et de la Voie spirituelle ou mystique (tarîqa) . Citons ses ouvrages les plus célèbres : Les Ouvertures spirituelles mecquoises (al-Futûhât al-makkiyya), Le livre des Chatons des Sagesses (al-Fuçuç al-hikam), traduit intégralement, annoté et commenté par Charles-André Gilis, éd. Albouraq – Librairie de l’Orient, 1997-1998 . Osman Yahia a recensé dans son Histoire de la Classification de l’œuvre d’Ibn’Arabî, plus de 800 titres dont 550 seraient encore existants .

6.      Al-Shâfî’î (150/767-204/820), est le fondateur d’une des quatre Ecoles de droit canon qui porte son nom : l’Ecole d’interprétation shafî’îte . Il est l’auteur des traités al-Umm et al-Risâla . Il fut un spécialiste du droit mais aussi du Hadith et innova une science du droit fondé sur des principes abstraits appelée depuis uçûl al fiqh dont les règles et les lois particulières sont les branches (furû’) .

7.      L’Ash’arisme du nom de son fondateur Abû al-Hasan ‘Alî b. Isma’îl b. Abî Bishr al-Ash’arî né à Basra en 260/873 et mort en 324/936 à Bagdad . Il commença par suivre l’Ecole mu’tazilite jusqu’à quarante ans . A la suite d’une transformation intérieure, il se sépara de cette école pour enseigner une voie moyenne entre elle et celle des littéralistes attachés à la lettre de la Sunna . Il écrivit de nombreux ouvrages dont les plus connus sont : Maqâlât al-Islâmiyyin, Kitâb al-Ibâna, al-Risâla ilâ Ahl al-Tajr, al-Risâla fi Istihsân al-Hawd fi ‘ilm al-Kalâm, Kitâb al-Luma’ .

Sa doctrine est un équilibre entre le rationalisme des Mu’tazilites et le littéralisme des gens de la Tradition . Cet équilibre se retrouve chez lui dans la position moyenne qu’il professa entre la transcendance et l’immanence de Dieu et les anthropomorphismes qui Le décrivent . Cette voie modérée qui donna un si grand essor à sa doctrine se retrouve exposée chez lui dans les trois difficultés théologiques majeures : le problème des Qualités divines, celui de la Parole divine incréée ou/et créée, celui du libre arbitre et de la prédestination . Voir à ce sujet l’introduction et chapitre neuf . Il existe des ouvrages qui traitent de la doctrine ash’arite . Citons celui de Michel Allard : Le Problème des Attributs divins dans la Doctrine d’Al-Ash’arî et de ses premiers grands disciples, Beyrouth 1965 .

Râzî et l’ascendance de sa lignée théologique ash’arite directe : Diyâ al-Dîn Abûl-al-Qasîm, son père, disciple de Sulayman ibn Nâçir al-Ançarî, disciple de Imân al-Haramayn Abû al-Ma’âlî al-Juwaynî (m. 478/1085) qui fut le disciple de Abû ‘Ishâq Isfarâ’înî (m. 418/1027), Abû al-Hasan al-Bâhili qui fut disciple de Abû al-Hasan ‘Alî Ibn Ismâ’il al-Ash’arî .

8.      Signalons que Majd ad-Dîn al-Jîlî fut le maître non seulement de Fakhr ad-Dîn Râzî mais aussi du célèbre Shihâb ad-Dîn Yahyâ Suhrawardi appelé le Sheikh al-Ishrâq, né en Iran en 549/1155 et mystérieusement mort dans la citadelle d’Alep en 587/1191 . Il fut le fondateur de l’Ordre des Ishrâqiyyûn . V. Henry Corbin : En Islam iranien (tome II) Sohrawardî et les Platoniciens de Perse, Paris, 1978 . De plus, Majd ad-Dîn fut disciple du célèbre Abû Hâmid Ghazâlî (450/1056-501/1111) . Ce maître en théosophie islamique forma Râzî à la philosophie d’Avicenne .

9.      Abû Hâmid Ghazâlî, naquit au Khorassan, près de Tûs en 450/1056 . C’est lorsqu’il était étudiant qu’il rencontra le célèbre Imâm al-Haramayn, Abû al-Ma’âlî al-Juwaynî ash’arite qui devint son maître . Il enseigna à Bagdad . Après une crise mystique intérieure, il quitta cette ville et sa situation pour suivre la voie des Soufis pendant dix ans . Il voyagea à Damas, Jérusalem, en Egypte, à La Mecque . Il revint ensuite à Nishâpour quelques années où il enseiga et mourut à Tûs en 501/1111 . Son ouvrage le plus célèbre est l’Ihyâ’ ‘Ulûm al-Dîn, la Vivification des Sciences de la Religion, véritable somme théologique d’obédience ash’arite dans laquelle il situe le Taçawwuf à sa véritable place d’honneur .

10.    V. Fathalla Kholeif A study on Fakhr al-Dîn al-Râzî and his controversies in Transoxiana, Beyrouth, 1966 .

11.    Abû Mançûr Muhammad ibn Muhammad al-Mâturîdî al-Samarqandî, mort en 333/944 fut le chef éponyme de cette Ecole . On ne connaît toutefois que fort peu de choses sur ce personnage qui naquit à Samarkande . Son Œuvre maîtresse, actuellement disponible est son Kitâb al-Tawhid présenté par Fathalla Kholeif Edition, Beyrouth, 1970 .

Sa doctrine considérée comme orthodoxe diffère néanmoins sur des points importants de l’Ecole ash’arite . En droit canon il appartenait à l’Ecole de Abû Hânîfa persan comme lui, de tendance libérale et rationnelle .

Les différences doctrinales théologiques avec l’Ecole ash’arite résident surtout dans la qualification des actes de l’homme qui lui est attribuée . Maturîdî affirmait aussi que le Fidèle peut dire : « Je suis vraiment croyant », sans préciser : « si Dieu veut » . Dieu ne punit point les obéissants . Les « Mâturîdite » sont considérés comme des gens de la Tradition et du Hadîth : les Ash’arites le sont dans l’Occident de l’Islam, les Mâturîdites dans l’Orient . Le principal représentant de cette Ecole est le célèbre Najm ad-Dîn Hafs an-Nasafî (m. 537/1142) dont la ‘Aqîda est encore enseignée dans les grandes Mosquées avec les œuvres de Jurjânî, Ijî et Taftâzânî

12. Pour plus de détails sur la biographie et bibliographie de Râzî, on peut consulter : Encyclopédie de l’Islam à Fakhr al-Dîn al-Râzî, Fathalla Kholeif :  A Study on Fakhr al-Dîn al-Râzî and his controversies in Tansoxiana, Beyrouth, 1966 . Ibn Hajar al-Asqalânî et Ahmad Ibn ‘Alî : Lisân al-Mizân, Hyderabad 1330/1912, Ibn al-Qiftî, Jamâl al-Dîn Abû al-Hasan ‘Alî Ibn Yûsuf : Tarikh al-Hukamâ’, Leibzig 1320/1902, al-Safadî Salâh al-Dîn-Khalîl Ibn Aybak : Al-Wâfi bi al-Wafayât, Damas, 1959 .

 

 

 

lundi 19 novembre 2012

Des Noms de Qualités Intelligibles ou principielles (Asmâ’ al-çifât al Ma’nawiyya)



 
 
 

 "Traité sur les noms divins d'Ar-Râzi, préface de Pierre Lory et traduction de Maurice Gloton." 617-625

I. Al-Muhît : L’Enveloppant, l’Englobant, Celui qui Cerne

Allâh a dit : Ne se trouve-t-Il pas envelopper toute chose ? (Coran XLI, 54) . Il fait donc allusion au fait qu’Il enveloppe toute chose de Sa Science et qu’Il garde le nombre de toute chose . Allâh enveloppe les infidèles (Coran II, 19) .

Allâh montre aussi qu’Il est puissant sur toutes les réalités possibles, qu’aucun être invincible ne peut l’emporter sur Lui et que nul fuyard ne raffaiblit .

II. Al-Qarîb : Le Très-Proche

Allâh dit : Nous sommes plus proche de lui que sa veine jugulaire (Coran L, 16)

Cette proximité  (qurb) comporte plusieurs aspects :

-Le premier : Allâh est proche de Ses créatures par la science .

-Le second : Il est proche d’elles par Sa Puissance attributive .

Le principe influent (mu’aththir) qui se trouve en elles est Sa Puissance et entre elle et les créatures il n’existe aucun intermédiaire (wâsita) .

Selon nous, tous les êtres produits (kâ’ inât : les étants) sont principiellement actualisés par la Puissance d’Allâh .

-Le troisième : Allâh est proche, en répondant favorablement à celui qui L’appelle  car Allâh a dit : Et lorsque Mon serviteur te questionne à Mon sujet, en vérité, Je suis proche (qarîb) . J’exauce l’appel de l’invocateur lorsqu’il M’appelle (Coran II, 186) .

III. Al-Mudabbir : Le Recteur, Le Provident

Al-Khattâb a dit : « Al-mudabbir est Celui qui connait les tenants et aboutissants des choses (abdâr al-umûr wa ‘awâqibihâ).

Il se peut qu’on veuille aussi dire par ce nom : Celui qui conduit les affaires avec sagesse et les gère en harmonie avec Sa volonté (mashî’a) .

Se rattachent à ce Nom les cinq Noms suivants :

1)al-qâdir, le Puissant est Celui qui est Maître de déterminer fermement (mutamakkin) l’action (fi’l) et l’abstention (tark) et celui qui les ratifie . Il est permis de dire : « O Celui qui détermine fermement l’acte et l’abstention ! O Celui qui valide l’acte et l’abstention !

Assurément, ce nom ne se rencontre ni dans le Coran, ni dans les nouvelles prophétiques . Certains professent à Son sujet que le tawqîf, la fixation invariable des Noms divins par tradition, ne s’applique pas à lui . D’autres tranchent qu’il n’y a pas de preuve pour autoriser à le considérer comme Nom divin .

2)al-murîd : le Volontaire

On trouve dans le Coran le verbe Arâda, vouloir, conjugué à différentes personnes, par exemple dans les versets suivants :

Allâh veut (yurîd) la facilité pour vous et non la difficulté (Coran II, 185) .

Allâh veut l’allègement pour vous (Coran IV, 28).

Nous voulions (nurîd) combler de bienfaits ceux qui étaient asservis sur terre …(Coran XXVIII, 5)

Allâh décide de ce qu’Il veut (Coran V, 1)

3)al-qaçd : le Dessein

Les Théologiens le mentionnent bien qu’il ne se trouve pas dans le Coran.

4) al-mashî’a : le Vouloir divin

Allâh a dit : Allâh fait ce qu’Il veut bien (yashâ’) (Coran XIV, 27).

Et ils ne voudront (tashâ’ûn) que ce qu’Allâh veut (yashâ’) (Coran LXXXI, 29).

En ce qui nous concerne , nous ne faisons aucune différence entre irâda, volonté normative et mashî’a, vouloir créateur.

5) al-ikhtiyâr, le choix du meilleur, le libre arbitre

Allâh a dit : Et ton Seigneur crée ce qu’Il veut et choisit le meilleur (yakhtaru) (Coran XXVIII, 68).

Sache que al-ikhtiyâr est la demande du meilleur (talab al-khayr ou l’incitation exigeant le bien préférentiel).

Le puissant (qâdir) qui l’est en déterminant l’acte ou l’abstention (d’une manière équilibrée) s’interdit de préférer (yarjah) l’abstention à l’acte et réciproquement sauf s’il a la parfaite compréhension des tenants et aboutissements qui déterminent chez lui de faire prévaloir l’un ou l’autre.

Le mobile prépondérant (murajjih) du serviteur est triple : la science, la probabilité ou conjecture (zhann) et la conviction (i’tiqâd). Chez Allâh, conjecture et conviction ne sont pas possibles et seule reste la science (‘ilm)-

C’est pourquoi Al-Hasan al-Baçrî a pu dire : « La volonté (irâda) chez Allâh est seulement l’incitateur déterminant (al-dâ’î) » qui est proprement la science qu’Il a de la compréhension intégrale (ishtimâl) des tenants et aboutissants qui déterminent chez Lui de faire prévaloir l’acte .

Al-ikhtiyâr se réfère alors à l’incitation exigeant le bien préférentiel (talab al-khayr) selon le commentaire que nous venons de faire .

Sache-le ! La Parole coranique précitée : Et ton Seigneur  crée ce qu’Il veut et choisit le meilleur, indique que Son vouloir créateur (mashî’a) ne repose pas sur la science qu’Il a de comprendre le bien préférentiel (khayr) car alors il ne resterait nulle différence entre mashî’a ou Vouloir créateur et ikhtiyâr ou incitation exigeant le bien préférentiel . Il faudrait conclure d’une telle assertion que le propos divin : Il fait ce qu’Il veut et Il choisit le meilleur reviendrait à signifier que la chose voulue (par Dieu) (shay’) serait en relation avec elle-même, ce qui est absurde . Il faut donc que le Vouloir créateur (mashî’a) soit plus universel (a’amm) que le choix du meilleur (ikhtiyâr). Cette volonté exprime alors l’aptitude (çifa) nécessaire à l’actualisation de la préférence (tarjîh), celle-ci pouvant être tantôt sans l’incitation exigeant le bien préférentiel  (talab al-khayr), tantôt avec une telle incitation .

IV- Al-Mahabba : L’Amour

Certains représentants de notre école prétendent qu’il n’existe aucune différence entre l’amour et la (mahabba) et la volonté (irâda).

Pour justifier leur point de vue ils affirment que les philologues (ahl al-lugha) soutiennent que chacun des mots exprimant la volonté peut être employé indifféremment .

Par exemple : pour exprimer que je veux quelque chose je peux utiliser les verbes suivants : vouloir (arâda ou shâ’a), désirer (radiya), aimer (ahabba).

Si je précise : j’ai voulu (aradtu) et je n’ai pas désiré (mâ radîtu) ou l’inverse, il s’agit d’expressions contraires .

D’autres représentants de notre école soutiennent qu’il existe une différence entre volonté, amour et satisfaction.

La preuve donnée par l’argument rationnel, disent-ils, est qu’Allâh est Volontaire (murîd) à l’égard de tous les êtres produits (kâ’inûn).

Le contexte coranique fait ressortir qu’Allâh n’aime pas certaines choses . Ainsi dit-il :Et Allâh n’aime pas (lâ yuhibbu) la corruption (fasâd) (Coran II, 205), verset qui signifie qu’Allâh n’aime pas  qu’elle trouve sa place dans la Religion . Cette parole coranique relative à l’amour peut s’interpréter de deux manières :

-La première : l’amour exprime ici tant la volonté de témoigner de la générosité du Bien-Aimé que l’élévation de Son Rang .

-La seconde : l’amour, toujours selon ce verset, traduit la volonté de louanger le Bien-Aimé.Il faut en tirer la conséquence que l’amour permet d’atteindre la récompense auprès d’Allâh dans la Vie dernière et de faire la louange jusqu’à Lui en ce bas-monde .

Les premiers répondent que le propos divin : Allâh n’aime pas la corruption, est une proposition équivoque ou indéfinie (qadiyya  muhmala) non universelle (kulliyya) qui réclame un complément précisant la manière dont elle s’applique .

Selon nous, Allâh n’aime pas la corruption chez les êtres religieux même s’Il ne l’aime pas davantage chez les corrupteurs . Nous pouvons ajouter qu’Allâh n’aime pas la corruption puisqu’Il n’aime pas qu’on l’ordonne dans la Religion et dans la Loi1.

V-Al-Ridâ : La Satisfaction, l’Agrément

Certains disent qu’aucune différence n’existe entre la satisfaction et la volonté (irâda). D’autres soutiennent le contraire en argumentant ainsi : Allâh veut l’infidélité (kufr) pour les Infidèles sans pourtant en être satisfait en vertu de l’autorité de ce verset : Allâh n’est pas satisfait de l’infidélité de Ses serviteurs (Coran XXXIX, 7).

Allâh dit aussi : Allâh s’est montré satisfait des Fidèles (Coran XLVIII, 18), propos mentionné pour servir d’enseignement .

Allâh précise dans l’avant dernier verset précité : Si vous avez de la reconnaissance, Il l’agréera de vous (Coran XXXIX, 7) .

Il dit encore : Ô âme rassérénée, retourne vers ton Seigneur agréante et agréée (râdiya mardiya) (Coran LXXXIX, 27 et 28) .

Tous ces versets montrent que l’agrément (ridâ) est réservé aux Fidèles sans qu’il le soit aux Infidèles . C’est donc la preuve que la satisfaction (ridâ) n’est pas la volonté qui s’applique à tous indistinctement .

En outre, on dira : « Ô mon Dieu ! sois satisfait de nous ! » Or, si cette disposition n’avait pas été réservée aux Fidèles, il n’aurait pas été convenable de faire une telle demande .

De plus, ceux qui professent ce point doctrinal interprètent l’agrément comme l’acte d’accorder la récompense ou comme la mention de la louange et de l’éloge . 

Mon père et Maître donnait une troisième interprétation de l’agrément : Il exprime l’abandon de l’opposition . Il s’appuyait sur les vers suivants de Ibn Durayd :

« Je suis content à contre cœur !

« De force, est satisfait

« Celui qui s’irrite du revers du Destin ! »

On trouve cette nouvelle prophétique « Que Celui qui n’est pas satisfait de Mon Arrêt immuable (qadâ’ ou destin) cherche un autre Seigneur que Moi ! ».

Si on admet que la satisfaction exprime l’abandon de l’opposition, le propos divin : Il n’agrée pas l’Infidélité de Ses serviteurs, s’interprète ainsi : Allâh ne renonce point à l’Infidélité (des serviteurs) ou encore : Il ne renonce pas à ce qu’ils s’opposent à l’acte d’infidélité .

Les premiers répondent à cet argument en disant que cette façon d’interpréter manque d’autorité pour deux raisons :

-La première : Dans le Coran le mot serviteurs concerne les gens de la connaissance certaine (ahl al-îqân).

Allâh a dit : Les serviteurs du Tout-Miséricordieux qui marchent sur terre avec tranquilité lorsque les ignorants les interpellent répondent : paix (salâm) (Coran XXV, 63). Une source à laquelle  boivent les serviteurs d’Allâh (Coran LXXVI, 6), c’est-à-dire les Fidèles .

Le verset précité : Il n’agrée pas l’infidélité de Ses serviteurs, signifie donc : Il n’agrée pas les Fidèles (dans leur infidélité) .  Et c’est ce que nous disons nous-mêmes.

-La seconde : Il n’est pas satisfait d’établir l’infidélité à cause de leur religion .

VI-Al-Sukht : L’Emportement, l’Irritation

Pour la plupart des théologiens, ce terme exprime la volonté de châtier .

Allâh ne cesse d’être satisfait de certains et d’être irrité par d’autres .

Satisfaction et irritation se rapportent alors à la Volonté (irâda) (qualité d’Esssence) .

Pour d’autres,  l’irritation se réfère à une qualité divine d’activité, celle de faire parvenir le châtiment

La première interprétation – celle de faire de ce terme une qualité principielle – est plus probable .

VII-Al-Ghadab : La Colère, le Courroux

C’est la volonté de faire parvenir la punition.

Allâh a dit : Allâh est courroucé à leur encontre (Coran XLVIII, 6)

La différence entre colère (ghadab) et irritation (sukht) réside dans le fait que celle-ci implique l’opposition (i’râd) et celle-là la sanction (ta’dhîb) .

Le  terme le plus proche de ghadab est bught, l’inimitié (mot qui comporte la permutation des mêmes lettres composant le nom ghadab, lequel exprime la volonté de mépriser (ihâna) et d’abaisser (isqâta) en rang et en dignité .

VIII-Al-Muwâlâ : l’Amitié, l’Assistance

IX-Al-Mu’âdâ : l’Inimitié, l’Hostilité

Le premier terme comporte la volonté d’honorer (karâma), le second celle de mépriser (ihâna) .

X-Al-Karâha : l’Aversion, la Répugnance, la Contrariété

Allâh a dit : Mais Allâh a répugné à les envoyer (au combat) et les en a empêchés (Coran IX, 46) .

La doctrine de gens de notre Ecole est que l’aversion, chez Allâh, se rapporte à Sa Volonté (irâda) de ne pas laisser une chose demeurer dans la non-manifestation ou privation essentielle (‘adam açlî) . Elle connote aussi la réalisation de l’improbation (içâl al-dhamm) dans cette vie et du châtiment (‘iqâb) dans l’autre vie sur l’individu .

Les Mu’tazilites, quant à eux, professent ceci :

-De même que la Volonté est une des Qualités d’Allâh, de même l’aversion en est une autre.

Pour nous, il est logique que l’aversion soit une qualité qui nécessite de préférer la non-manifestation (‘adam) à la manifestation (wujûd) car en apparaissant, elle impose l’improbation (dhamm) dans cette vie et le châtiment dans l’autre .  Or la volonté comporte tous ces sens ; il est donc nul besoin de poser une autre qualité !

Les Mu’tazilites objectent aussi que la volonté est dépendante des seules opérations adventices (hudûth) . Or, disent-ils, la permanence  de la non-manifestation n’implique pas d’acte adventice .

Il n’est donc pas possible de faire dépendre la volonté de la contingence .

Nous répondrons que l’être intelligent peut dire ceci à un autre : « je veux (urîdu) que tu ne fasses pas ceci ou cela » . Or, un tel propos invalide leur opinion .

Nous allons présenter maintenant des mots proches de la notion de Volonté mais qu’il n’est toutefois pas permis d’employer pour qualifier Allâh-Exalté soit-Il - :

-Le premier : al-tamannâ : le désir, le souhait, le vœu

On admet unanimement qu’il n’est pas possible d’appliquer ce terme à Allâh . En effet, ce mot présuppose l’incapacité (‘ajz) .

Le souhait, selon nous, est l’expression d’une certaine volonté bien qu’on sache qu’il ne puisse se réaliser ou encore qu’il reste possible ou douteux qu’il s’actualise .

Les Mu’tazilites objectent que le souhait se produit seulement en parole, tel le propos suivant : « Puissè-je faire cela ». Cette objection est inconsistante (da ‘îf) pour plusieurs raisons :

-La première : ce propos :  « Puissè-je faire cela » nécessite que nous ayons la possibilité de déterminer quel sens il convient de lui donner . Plus même ! Il s’agit, en la circonstance, d’apprécier un discours incertain et dont personne ne saurait dire s’il est question d’un souhait . Qu’il s’agisse d’un souhait, nous saurons qu’il doit l’exprimer . Or, nul sens de ce genre n’est suggéré par ces mots sauf celui de la simple velléité (irâda) que nous venons de mentionner (avant cette objection) .

-La seconde : Le pauvre s’avise de dire : « je voudrais être roi en ce bas-monde » .Or, tout un chacun pourrait exprimer qu’Untel désire (tamannâ) la royauté . Nous savons donc bien que le souhait est ce que nous venons de dire .

-La troisième : Le muet peut avoir des souhaits même s’il ne les exprime pas .

-La quatrième : Du dormeur ou de l’homme gravement malade qui prononce : « puissè-je faire cela » ou encore de l’ignorant du sens de ce propos lorsqu’il le formule, personne ne peut contrôler qu’il désire effectivement telle chose ..

Voici donc bien établie l’inanité de l’opinion des Mu’tazilites à ce sujet . Pourtant l’utilité de notre réfutation est la suivante .

Si Allâh voulait l’infidélité de l’infidèle, bien qu’Il sache que celui-ci ne puisse devenir croyant, ce comportement constituerait un souhait au regard de l’acte de foi .Le souhait étant impossible chez Allâh, il s’avère qu’Il ne veut pas la foi de celui qui est infidèle .

-La deuxième : al-sahwa : l’appétit, l’appétence, l’envie

La différence entre appétit et volonté est illustrée par l’exemple suivant : le malade veut boire la médication salutaire sans en avoir l’appétit  . D’autre part, il peut avoir envie de manger une figue sans un acte de volonté délibérée .

-Le troisième : al-‘azm : la résolution, le propos décidé

C’est la détermination (tawtîn) de l’âme après l’hésitation (taraddud) qui engendre l’ignorance de savoir qu’il convient d’agir ou non ou bien de renoncer à faire . Un telle disposition étant impossible quand il s’agit d’Allâh, il n’est pas permis de la Lui attribuer .

 

1 . Pour toutes ces notions liées à l’amour, voir notre traduction du Traîté d’Ibn ‘Arabî, Traité de l’Amour, Paris 1986 .