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vendredi 13 mars 2020

FRANCE – ALLEMAGNE - Un couple conflictuel - J.F.

 Le 22 janvier 1963, le général de Gaulle et le chancelier Adenauer signent à l’Élysée un traité de coopération franco-allemand.




note préliminaire: en Europe, la France est très proche - déjà au point  de vue linguistique – de l'Italie; avec l'Espagne, c'est différent, il y a la barrière des Pyrénées et peut-être l'imprégnation « arabo-ibérique ».L'Angleterre est une sorte d'adversaire qui méprise vaillamment tous les autres peuples et nous assène sa morgue, voire son mépris: leur pays étant un royaume , ils se croient tous nobles (les Français républicains étant forcément une engeance inférieure).


NB. Les Anglais ont exécuté leur roi bien avant nous ,et s'ils ont rétabli la Royauté , ce n'est pas parce qu'ils seraient plus royalistes que nous, mais parce  que c'est un peuple conservateur, comme tous les peuples nordiques, au contraire des Latins, contestataires  et révolutionnaires.
 
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        Alors, l'Allemagne, nous dira-t-on ? (1)  Eh! bien , l'Allemagne, c'est l'histoire d'un couple: il y a une sorte de jalousie, de fascination pour l'art - supposé – du bien  vivre chez l'autre, de la bonne chère, de l'élégance, de la grâce des femmes ; c'est le pays de la mode, des parfums, des alcools de luxe.(1)L'allemagne est trop polluée par ses usines pour pouvoir survivre sans le bon air français( jusqu'à quand ?).Si l'on trace une carte schématique de l'Allemagne, on verra qu'elle se compose en gros d'autoroutes, de forêts et de villes  et surtout de villages reconstruits après-guerre avec 3 tours de béton où l'on entasse 15 000 habitants. Rien de la diversité et des espaces libres français. L'Allemagne a un côté monolithique.

  Tout ce qui peut manquer à un membre du couple devrait pouvoir bénéficier à l'autre; d'où l'idée de complémentarité. Mais la France ne se laisse pas courtiser facilement, malgré les idées courantes, selon  lesquelles la femme du voisin est toujours plus belle et plus « facile » que la vôtre ; et commence déjà le malentendu...
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 Un mot-clé définit l'Allemagne : le mot « Ordnung », c'est à dire non pas l'ordre donné ou l'Ordre  ni les ordres, mais l' ORDRE  opposé au désordre (qu'est supposé représenter son voisin français). Ainsi l'Allemand demande couramment :

-Ist alles in Ordnung? » qui se dit aussi bien  pour la santé que pour le moteur de la voiture ou l'état de la maison : « est-ce que tout fonctionne bien,? » (sous-entendu : dans la paix, l'harmonie, le calme  –  cf. L'emploi récurrent de l'adjectif « ruhig » = calme, silencieux, sans querelle ). IL est évident  que cette manie de l'ordre fait du Français mitoyen un dangereux trublion. 

 Etonnez-vous après cela que la bonne Allemagne ait eu des envies de rangement (un  peu vigoureux  en 1870,1914 et 1940) du côté de son cher voisin . Mais le mot voisin est beaucoup trop simplificateur ; il s'agit en fait d'un couple, car les contraires s'attirent (et finissent généralement en peu de temps en divorces cataclysmiques). Depuis longtemps (nous reviendrons sur ce thème politique), les deux grands pays d'Europe étaient la France et l'Allemagne, opposés et complémentaires : le dilemme était : comment faire que ces « conjoints » s'entendent sans se détruire mutuellement et surtout, sans ravager l'Europe comme au bon vieux temps des invasions et des migrations qui ont sévi sans discontinuité du 4è au 9è siècle ,et même au-delà.



Il y a eu une lutte pour l'hégémonie impériale entre François 1er et Charles-Quint. Finalement, c'est Charles -Quint (1500-1558) qui l'emporta. Mais on voit déjà (au 16è siècle) que les deux grands pays qui avaient une sorte de "Droit"  ou de juridiction sur l'Europe étaient  la France et l'empire germanique. Y avait-il subconsciemment un désir de réparer la perte de l'Empire carolingien, défunt dès 911 (au bout de 111 ans) ? Dans un excellent petit QSJ aujourd'hui épuisé, la grande médiéviste Régine Pernoud écrit :" Il (François 1er) ne possédait ni les qualités personnelles ni les moyens matériels suffisants pour rassembler les pièces  éparses d'un Empire  dont l'unité ne représentait rien  moins que l'Unité européenne" ( L'Unité européenne , 1944 -  PUF, QSJ n° 155 , p.98)

Mais quand on parle d'Allemagne, il faut s'entendre sur les mots : on ne peut parler d'Allemagne avant 1870 ; c'est Bismarck le Prussien (1815-1898) qui  va hâter la « nationalisation » poussant  artificiellement à la confrontation, alors que la France est un véritable Etat, constitué depuis depuis près de 7 ou 800 ans. Cette ancienneté et cette unité font rêver les nationalistes. Et pourtant, l'Allemagne est un pays fédéral déjà avant la lettre  et la constitution de 1945. Des régions comme la Bavière, la Rhénanie et la Prusse n'ont rien de « national ». Le ciment de cette Allemagne virtuelle, contrairement à la France  est fondé sur la langue (les dialectes locaux sont tous germaniques) et le sang, ce qu'on appelle le « jus sanguinis »  alors qu'en France, c'est  le « jus solis ».
 
(1)Nous essaierons dans ce court essai de comprendre comment les divergences entre 2 grands pays peuvent empêcher une entente profonde et durable, sans prendre parti à tout prix pour l'un  ou l'autre.
 
 
D'un côté, un véritable communautarisme, de l'autre une unité forcée par le centralisme et l'imposition de la langue à tout le monde, sous peine de ne pouvoir unir des régionaux aussi hétérogènes que les Provençaux, les Basques, le Bretons et les Alsaciens (pour faire court). L'Allemagne  ignore la notion de République, d'ailleurs c'était longtemps une sorte de  royaume, fait de  petits royaumes et principautés (dont certaines existent toujours). Même sous Weimar(1919-1929) le 2ème Reich ne fut pas aboli.  Il y a eu le Saint- Empire romain-germanique (962-1806 ) détruit par Napopléon Ier, puis le IIè Reich (1871-1918) et enfin la contrefaçon  sinistre d'empire (IIIè Reich) avec Hitler… Cependant que coexistait un Empire Austro-hongrois avec François-Joseph(1830-1916). Que de grandeur perdue !

     La France est un pays de sédentaires, d'agriculteurs depuis au moins 2 000 ans, alors que les Allemands, par certaines caractéristiques culturelles, sont d'anciens envahisseurs nomades devenus sédentaires ; avant de développer ce thème qui surprendra les historiens, nous pensons que la rencontre entre un peuple nomade fraichement sédentarisé en Europe et les Germains explique en partie le conflit et le rejet des Allemands d'origine juive (Ashkenase, déformation de l'allemand : « sachsenisch » = originaire de Saxe), le tout attisé par les théories racialistes qui fleurissent fin du 19è siècle.

    L'identité allemande repose, en gros, sur la « race »; par contre , quelqu'un est « français »  - et doit être  considéré comme tel - s'il obtient la nationalité française dans le cadre des lois de la République : c'est la République qui est le meilleur rempart contre les maniaques de l'identitaire. Ainsi, en Allemagne, un noir, un sémite ou un asiatique ne peuvent être considérés ni admis comme Allemands : pour eux, c'est une aberration, un illogisme et un sujet de heurt entre mentalité allemande et française. S'il y a un changement dans la Loi à ce sujet, c'est tout récent. Mais les mentalités ont-elles vraiment changé ? Il n'y a qu'à écouter les délires d'un certain Zemmour en France pour comprendre le problème posé par la nationalité en Allemagne. Même chose pour la laïcité : en Allemagne, en 1970 en tout cas, pour obtenir le droit de séjour, il fallait remplir un formulaire (Anmeldung) ne laissant pas le choix : on ne pouvait être que catholique ou protestant ; nous avons  même connu une Allemande qui croyait qu'un Allemand se convertissant à l'Islam , pouvait être condamné à de la prison !...Et les employés étaient scandalisés  quand un Français  remplissait le formulaire en rajoutant: « Keine Religion » ( = athée!).
Pour la République française, ce n'est pas la race ni la religion qui font le citoyen légal : c'est la carte d'identité, qui est une abstraction ne reposant que sur les principes d'une Constitution admettant dans le pays France des êtres de tous pays, toutes races, toutes religions.

 Dans la pratique, les choses ne se passent pas toujours aussi bien, mais au moins , les principes sont posés  et  définissent ce qu'est une République laïque qui considère d'abord le « bien commun (« res publica ») alors que les pays non-républicains s'appuient sur la ressemblance collective unie derrière un roi, dont on doit attendre les faveurs et qu'aucune loi n'oblige. Cette attitude  exclusive peut devenir la base des régimes fascistes ou extrémistes (cf. le Portugal de Salazar ou l'Espagne de Franco, sortes de « régences » en attendant le retour du roi .) .  Actuellement, la Constitution de la Vè, heureusement gravée dans le marbre, est attaquée par les socialistes (depuis Mitterrand), les communistes, la gauche pure et dure style Melenchon  et...par les extrémistes de droite : curieuse unanimité .Ces gens prétendent tous fonder  une VIè République (parlementaire ,comme la IIIè et la IVè !) : ils croient sans doute que l'on rédige un nouvelle constitution comme on écrit un tract. De l'avis de tous les juristes, jamais une Constitution n'avait été aussi solide  (elle dure d'ailleurs depuis 62 ans !) ni aussi équilibrée. Malheureusement, les petits hommes qui ont voulu porter sa toge  l'ont trouvée trop ample pour leur petite constitution : la France n'a plus de grands hommes et elle ne tient debout  que grâce à cette Constitution honnie. De Gaulle voulait fonder des Institutions , on peut dire qu'il a réussi.

    On comprend mieux alors la haine antirépublicaine des lepénistes - certains se disant aussi royalistes!  -  et traitant   il y a peu la République de « gueuse » : voilà qui sont les gens  prétendant maintenant gouverner la France en 2022!!!
 
     En conclusion provisoire, nous esquisserons une caractérologie succinte de l'Allemand moyen et du Français moyen.

  Les Allemands qui ont eu au Moyen-Age de grands sages et saints (Hildegarde von Bingen, Meister Eckardt... ; die Freunde Gottes » - cf. Bernard Gorceix : » Les Amis de Dieu » chez Albin Michel/1984) semblent avoir perdu cette pure Spiritualité au profit d'un moralisme et plus tard d'un matérialisme « scientifique », ajoutés à un collectivisme de fait qui devaient générer un hybride de Protestantisme et de Judaïsme comme Karl Marx. (en clair : une philosophie, une praxis, contraignante  comme le marxisme,  ne pouvait naître qu'en Allemagne) .Analogiquement, on pourrait dire que Descartes ne pouvait être que  français !  Mais la doulce France s'est bien rachetée depuis avec le rayonnement de René Guénon.
Pour l'Allemand , ce qui va compter  désormais c'est   l'efficacité (réelle mais redoutable, notamment dans le domaine de l'armement) pour solidifier son assise en Europe, pendant que le Français aussi doué dans d'autres domaines va continuer selon son tempérament individualiste  et centrifuge à jouer sur les grands mouvements d'idées, notamment les Valeurs de Liberté, en plus des slogans irréalisables d'Egalité et Fraternité. Si l'on voulait simplifier, on dirait que l'Allemagne représentait  la Force et la France la Justice. Mais entretemps est arrivé un pseudo-empire, appelé « Europe». Dans la revue « l'Initiation », Aguéli a une note intéressante où il situe la France dans ce qu'il appelle la tétralogie libertaire du monde : » l'Italie représente la liberté sentimentale; la France ..la Liberté intellectuelle.. » (Notes sur l'Islam,,1902). Pour l'Allemand, la Liberté n'est pas une valeur centrale, il préfère les valeurs sûres de Communauté, de solidarité collective qui assurent sa stabilité mentale ,sociale et économique . Le Français, de son côté , se tire avec élégance de situations de pagaïe  qui seraient insupportables pour un Allemand : ainsi, le régime a survécu  à un mois de graves désordres en 1968; Combien de fois avons-nous entendu des Allemands nous dire : « Wir beneiden Sie! » (= nous vous envions –   sous-entendu : pour cette légèreté et cette souplesse).Mais le côté anarchique français sera vite mis au pas en 1940, où, comme  le disaient nos parents  : « pour la Ière fois, les trains étaient à l'heure ! »

    Hélas, cette efficacité (« Wirksamkeit ») deviendra vite étouffante … il manque à l'occupant allemand ce zeste de distance et d'humour qui rend la discipline supportable : il y avait beaucoup de Prussiens dans les forces d'occupation, et la Prusse pendant longtemps a été  une sorte de « caste » de guerriers, de Khshatriya, comme dirait Guénon : on ne plaisante pas avec les Prussiens.!
On voit déjà se dessiner les brèches dans ce couple franco-allemand qui aurait dû s'entendre ,mais qui ne pouvait le faire longtemps! Et tous les rêveurs qui cultivaient  avec poésie le retour de la mythologie païenne des Germains le paieront cher après 1945 (notamment pendant la période de terreur de l' « épuration ») ; Mais  il faut leur rendre justice que, entre les 2 guerres, il n'était pas mal vu d'être un peu pro-allemand, au moins pour éviter une 3è guerre. Malheureusement, il y a eu l'avènement d 'un « possédé » du nom de Hitler; et les beaux rêves se sont envolés au bout d'un an d'occupation.

Ce n'est pas une excuse, mais il faut rappeler qu'une habile propagande franco-allemande  faisait croire aux Allemands que les Français  adoraient l'Allemagne  , et qu'ils attendaient leur venue quasiment  avec empressement ! Peu à peu les Allemands se sont vus  hués, puis agressés enfin il y a eu des attentats .Ils n'ont pas compris tout de suite ce qui se passait. Eux qui étaient venus « poliment » découvrent avec effarement qu'on les avait trompés et que la France, si chérie, n'était pas encore mûre pour une collaboration encore moins pour une occupation!
Mais, comme le disait P. Léautaud : « hypocrites, vous vous plaignez que l'Allemagne vous attaque, mais qui lui a déclaré la guerre en 1940 ?! »  D'autre part , beaucoup de Français en avaient  assez des gouvernements d'escrocs de la IIIè République, république des scandales, et n'étaient pas fâchés de voir un peuple voisin venir mettre de l' « ordre » (Ordnung »)!!

  1. Et pourtant,l'Allemand connaît depuis toujours le « mitsein » (l'art de vivre ensemble) pour lequel on n'a pas de mot, ainsi que la »Gastfreundlichkeit / Gemütlichkeit », qui représente la véritable convivialité germanique.
 
Si après tout cela, on se demande quelle peut être la place de l'Allemagne dans le monde, nous rappellerons une curieuse phrase de Heidegger dans sa très utile « « Lettre sur l'Humanisme » p.95 (Aubier-Montaigne, 1957) :
 
« La réalité allemande n'est pas annoncée au monde pour qu'en l'âme (Wesen) allemande le monde trouve sa guérison; elle est annoncée aux Allemands pour qu'en vertu  du destin qui les lie aux autres peuples, ils  s'inscrivent avec ces peuples dans l'histoire du monde (cf. zu Hölderlins Gedicht « Andenken ».Tübinger Gedenkschrift, 1943, p.322). Et Heidegger ajoute : « la patrie de cet habiter historique est la proximité-à-l'Etre (die Nâhe zum Sein) ».  Tout se rapportant à la Pensée et à l'Histoire de l'Etre chez Heidegger, il faut comprendre que l'entente des peuples ne se fera pas sans cette recherche et cette attention accordée à l'Etre (Sein ) auquel ce philosophe insolite voue une sorte de Foi philosophique qui ne  s'est jamais démentie jusqu'à sa mort (1976). Le titre de sa thèse (Sein und Zeit) insuffle sa démarche : Sein/Pensée; Zeit/Histoire , jusqu'à la fin.(a) On  notera en passant qu'on est loin  avec cette « entente » de  «l'Union pour  l'Entente intellectuelle entre les Peuples » de René Guénon (1926).
 
(a) Car Heidegger ne conçoit l'Etre que sous le mode de la Pensée et il affirme même (dans « Lettre sur l'Humanisme ») que c'est la seule façon de ne pas oublier l'Etre, alors que la Métaphysique manquerait son objectif en n'envisageant que l'être de l'étant (thèse très contestable!). En fait, il réduit la métaphysique, au sens habituel, à l'ontologie.
 
II ème PARTIE
 
Nous aimerions  à présent, avant de passer aux divergences ponctuelles et pas forcément irrémédiables,  faire partager l'impression que nous avons eue en voyageant, allant d'ouest en est , et traversant les régions frontalières des Vosges, Moselle et Alsace...Faut-il préciser que nous y avons vécu et travaillé longtemps?

  Les Vosges (incluses dans la Lorraine), c'est encore la France avec quelques « calques » langagiers  - comme on dit en linguistique - dont ne sont pas conscients les régionaux [par ex : une « paire »(ein Paar) pour dire « deux »; un cornet (allemand : Tüte) pour dire un sachet; ou carrément une syntaxe germanique, du genre :  « j'ai mon devoir fini » au lieu de : « j'ai fini mon devoir »]...Mais il ne s'agit là que de simples peccadilles. Les choses se gâtent dès que l'on aborde les rives du département de la  Moselle, à ne pas confondre avec l'Alsace, sous peine de rallumer les guerres tribales. Comme tous ces gens-là sont très régionalistes et chauvins,  il ne faut pas mettre non plus les Vosges en Alsace (comme le font tous les jours les journalistes diplomés et incultes), ni Nancy en Moselle ,et laisser  loin les « Gens d'en face »  comme disent aimablement les Vosgiens .Il  est vrai que les mariages alsaco-vosgiens réussissent rarement, surtout à cause des « vieux »  qui voient des Chleuhs partout (souvenirs des Alsaciens engagés de gré ou de force dans l'armée allemande -   les « malgré- nous » ).

      Quant à l'Alsace, le problème est grave  : certains ne veulent être ni Français ni Allemands, et adresser la parole en allemand à un Alsacien même jeune (qui refuse de parler français),   n'ayant jamais  connu la guerre, peut vous valoir de graves ennuis. Or leur dialecte - germanique, plus précisément « alémanique »– n'est pas directement accessible, même à quelqu'un qui connaît l'allemand. Il y a des blessures qui ne sont toujours pas refermées. Et les privilèges qu'ils ont gardés de l'époque allemande (prêtres, rabbins, écoles catholiques payés par l'Etat) leur valent encore les imprécations d'un Mélenchon, défenseur mordicus de la laïcité pure et dure ! Enfin, le chauvinisme local n'arrange pas  toujours les choses : l'Alsace aurait les meilleurs vins (c'est faux), la meilleure charcuterie ( c'est faux), les plus beaux paysages et châteaux (c'est encore faux !). Et puis, l'accent un  peu trop « allemand » de l'Alsacien lui  fait perdre des emplois, notamment dans l'Enseignement hors d'Alsace (lors des concours nationaux) .Faut-il ajouter, pour compléter logiquement tout cela,  qu' une certaine  absence d'exogamie (contrairement à l'ouest de la France, notamment la Bretagne) ne facilite pas les échanges, même si l'Alsacien sait être très aimable. Mais est- ce aux Français de devenir  alsaciens? On me citera d'honorables exceptions d'Alsaciens émigrés et  cosmopolites (peut-être parce qu'ils étouffaient dans leur « pays »?); mais on peut en dire autant de la Suisse tout fière de vous opposer des cas d'excentriques comme Jean Ziegler ou Michel Simon ! C'est peu : par contre, au quatre coins du monde, on trouve des Vendéens et des Bretons, exogames, internationalistes et capables de vivre hors du cocon . Les autres vivent renfermés dans leur petit trou qu'ils finissent par idéaliser....

     Oublions ces expériences vécues et  parfois pénibles..Pour conclure, nous nous sommes trouvé souvent plus à l'aise en franchissant le Rhin et en vivant dans le Palatinat où, au moins, quand certains défauts étaient trop pénibles, on pouvait se consoler en se disant: je suis en Allemagne ; ce sont des gens différents , ils  ont droit à mon indulgence (« andere Länder ,andere Sitten ») ; mais se trouver étranger dans son propre pays, cela est parfois insupportable. Et on comprend mieux alors les étrangers loin de leur pays, victimes d'ostracisme ou de xénophobie, et dont les extrêmistes exigent  plus de perfection que de leurs concitoyens. 

      Si l'on nous permet un souvenir personnel : nous nous sommes  trouvé beaucoup plus dépaysé en allant travailler  en Allemagne qu' après 2 ans de séjour dans le « bled » berbère , à la frontière libyenne : l'Allemagne est  un pays européen, de culture  chrétienne et de langue indo-européenne, donc théoriquement très proche du Français moyen,  et pourtant, nous nous sentions  plus d'affinité avec le pays du reg (= des cailloux, des cailloux  et sous chaque caillou, un scorpion!).Et puis, sous chaque pavé, on ne pouvait s'empêcher de sentir le sang à peine séché des horreurs de la guerre  1939-45....
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Revenons à l'hétérogénéité de nos chers voisins.

Répétons qu'ils avaient eux aussi leur conception et leur droit à la Grandeur, axée peut-être plus sur la force que la France. Mais leur rayonnement, sauf  vers l'Europe centrale, n'a pas réussi à s'étendre mondialement, nous voulons parler de la colonisation. Il est vrai que, après le massacre et le génocide total des Tasmaniens par les Anglais (il n'en reste plus ni langue, ni peuple  ni religion : c'est un cas unique au monde d'éradication totale), les Allemands ont exercé leur haine des Noirs (en 1904 , bien avant celle des Juifs, en massacrant la Namibie, dont il  ne reste que quelques  habitants, les non autochtones  étant Allemands d'origine et germanophones., ce qui surprend dans ce coin perdu d'Afrique noire . Ce génocide est soigneusement occulté par la plupart des journalistes et historiens. L'Allemagne est le pays d'Europe qui avait le moins de colonies  dans le monde ( seulement la Namibie, le Togo, les îles Samoa et Salomons) ; ce n'était pas par manque d'appétit (ils avaient essayé, en vain,  d'envahir le Maroc au  début 1900), mais peut-être sentaient- ils qu'ils manquaient d'affinités avec des peuples trop colorés ou trop éloignés de leur mentalité, et que leur place légitime était en Europe  . Même si c'est souvent par la force, il faut  reconnaître que la langue espagnole a l'air de s'être bien adaptée  aux peuples sud-américains, l'anglais semble s'être fait adopter par les indo-Hindous et le français par les peuples d'Afrique, pourtant de langue et de civilisation très différentes.

 Alors, nous nous posons la question : l'obstacle à  l'expansion de la « culture «  allemande, était -il d'ordre linguistique (cette langue étant réputée difficile)? . Quand on voit comment les petits commerçants du monde entier apprennent vite les rudiments de l'allemand (même si c'est limité ), on n'est pas vraiment sûr que ce soit l'argument adéquat , mais nous allons examiner, à la lumière de la linguistique générale et de la grammaire allemande en particulier, ce problème de façon précise et technique, en nous excusant auprès de nos lecteurs pour la difficulté de la chose.
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         Procédons d'abord à un bref aperçu des langues nordiques (anglais, allemand, suédois).Il y a une différence qui saute aux yeux du linguiste : ces langues ont une conjugaison très simplifiée si on  les compare aux langues méditerranéennes: latin, grec, roumain, italien, espagnol, portugais, français et...arabe, cette dernière possédant même une conjugaison tenant compte du genre (masc., fém) ,  -ce qui n'existe pas dans les langues gréco-latines – et du duel ,ce qui fait qu'il faut  apprendre non pas 6 personnes, mais 13 (= 5+5 + 3 pour le duel).

 « Deutsche Sprache, schwere Sprache »  (= l'allemand est une langue difficile, dit le proverbe)

    L'allemand, dont l'orthographe et la syntaxe ont été normalisées grâce à Luther (16è siècle, soit 2 siècles plus tard  que l'italien de Dante) présente une régularité de métronome avec une grammaire précise, loin des exceptions d'exceptions invraisemblables du français, langue où des latinistes délirants s'en sont donné à coeur joie d'inventer de toute pièce des accords et des catégories (subjectum, objectum) défiant les lois de la logique et n'ayant rien à voir avec l'esprit « gaulois » du français dont la morphologie et la syntaxe  étaient devenues depuis longtemps   analytiques et non  synthétiques comme le latin, supprimant les déclinaisons, mais gardant les aberrations de sa conjugaison  . Ceci nuira beaucoup à l'expansion  du français dans le monde, à l'exception  bien sûr des élites  (savants, moines, nobles, diplomates).Frédéric II de Prusse ne disait-il pas à son  ami Voltaire : « Je parle l'italien aux dames, le français aux hommes, le latin aux prêtres  et l'allemand ...aux soldats et aux chevaux ! ». Nous plaignons les malheureux obligés d'apprendre le français sans être francophones de naissance .Et pourtant, si beaucoup y arrivent; c'est qu'il doit y avoir une « baraka » spéciale du français pour soutenir les étudiants. On se rappellera que, lors de la dictée ultra-difficile dite de Mérimée, alors que Napoléon Ier fit 75 fautes, le vainqueur fut le prince de Metternich (1) avec seulement 3 fautes ...Ah! Le perfectionnisme allemand ! C'est une qualité que l'on peut envier  à nos voisins. Mais les Allemands vous diront que cette qualité a son revers : quand l'Allemand fait le bien, il le fait à fond ; quand il fait le mal , il le fait à fond aussi !

Ceci posé, quelles sont les divergences structurelles de base entre allemand et français?

      Une évidence saute aux  yeux (pour qui est linguiste): l'allemand est une langue orale (tout s'écrit, tout se prononce, comme l'espagnol ou l'arabe), alors que le français est une langue visuelle. Comme disait le Professeur Gagnepain (chef de l'Ecole de Linguistique de Rennes) : « en français, on parle  dans un système, mais on écrit dans un autre ». Ce n'est pas un hasard si les Allemands sont si portés sur la musique et les Français sur la peinture. Or, comme nous le signalions déjà supra, Guénon nous apprend que les art du temps (musique, poésie, chant) sont typiques des peuples nomades, alors que la peinture,  la sculpture, l'architecture sont l'apanage des peuples sédentaires.(2)

     Mais cette langue trop  bien structurée a un côté sérieux qui lui interdit le calembour(3).Le français peut jouer sans cesse sur  les mots  : la langue le lui permet et encourage ainsi une certaine forme d'esprit. Il est vrai qu'il n'y a qu'en français que les noms étrangers font rire impitoyabblement ; nous pensons au  premier Ministre Japonais Nakasoné ou à l'Algérien Ouyahya, nommé  dans un moment difficile, sans parler des jeux mots faciles comme : M.Yamamotokakapoté....etc.  A cela , le français ajoute le contre-pet (l'art de la contrepèterie), dont on retrouve la première trace chez François Rabelais, mais dont le principe (l'inversion ou l'échange des lettres ) n'est pas inconnu de l'arabe  qui peut jouer sur la métathèse de ses racines trilittères.

    L'allemand se prête bien au langage technique et scientifique, car il a des concepts clairs et précis; or, la langue est une  chose, la mentalité en est une autre; Nous voulons dire que le français qui joue volontiers sur les mots jusqu'en philosophie - (« L'Etre de la pensée est la pensée de l'Etre » Mme Delhomme -Poitiers, 1963), domaine où l'on devrait éviter ce genre de rhétorique  vide et simpliste (Sartre en a assez abusé)  - le Français (avec  « F ») disons-nous, a une exigence de clarté que l'on ne retrouve pas toujours chez nos cousins germains pour qui l'argument d'autorité interdit toute critique : le Maître a parlé et il n'y a plus qu'à s'incliner .Et l'on se contente de flou et d'obscurité magnifique. C'est là que l'on retrouve l'esprit frondeur, iconoclaste voire anti-clérical des peuples latins dont nous parlions ci-dessus et cela nous rappelle ce que nous apprit un Maître (authentique, celui-là) quand je n'admis pas certaine affirmation : « Ah !vous êtes bien français! »
  • -...?? ...-  « Oui, le Français n'admet pas de ne pas comprendre! »
  • -... ....- Puis après un temps : « Vous savez, ce n'est pas un hasard si Guénon était français ».
  • D'ailleurs un certain Georg Hamann eut l'imprudence  d'affirmer : « La vérité est une répartition appropriée de lumière et d'ombre », ce dernier terme ruinant le début de son assertion.(cité par Heidegger, « Le Principe de Raison »,p.56) .L'exigence de clarté, répétons-le, est typiquement française et ne se contente pas d'à peu-près. IL n'y a qu'à lire Guénon pour comprendre ce que nous voulons dire .Lui seul était capable de parler lumineusement de choses difficiles, sans alourdir ses écrits d'un vocabulaire redondant et obscur (nous pensons à Fr. Schuon ,avec ses « apocatastases » ou son « absolu sur-essentiel » - ???- ce qui enchantait ses lecteurs anglo-saxons).
  • IL faut croire que Heidegger avait un authentique charisme pour  faire passer son style (épouvantable pour les lettrés allemands qui le détestent) et la répétitivité de ses idées dans le milieu intellectuel français  qui constituait son auditoire de prédilection. Mais ces gens-là (Beaufret, Waelhens...etc..) étaient sans doute plus allemands que français d'esprit, dira-t-on pour se consoler.
 
(1)Autrichien , mais né à Koblenz
(2)Mais si on met en concurrence deux peuples nomades sur le même territoire, on aboutit au massacre: comment peut-on encore dire (comme Simone Veil) que les nazis n'avaient massacré que  des Juifs, alors qu'ils ont exterminé 500 000 Tsiganes sur  1 million?  Cette incompatibilité s'est poursuivie plus tard en Afrique au Rwanda avec le massacre des Tutsis par les Hutus, et actuellement par l'élimination des nomades du Yemen... Cela jusqu'à la fin des temps, où Caïn n'en finit pas de tuer Abel (cf. René Guénon : « Le Règne de la Quantité », chapitre XXI)
(3)Le seul que nous connaissions est le jeu de mot scolaire sur les enseignants « Schullehrer= Schulleerer »!)
 
      Revenons à la langue. On ne se connaît bien que par le point de vue extérieur: exemple : c'est en Allemagne que nous avons appris que les sonorités françaises étaient un régal pour une oreille allemande, car les Allemands, comme les Orientaux ont l'ouïe très fine. Il suffit de parler  français dans un transport collectif pour  voir les gens se taire peu à peu et écouter, alors qu'ils ne comprennent pas le français; quand on demande pourquoi, on nous répond : quand les Français parlent, on dirait le chant des oiseaux .Les Allemands ont du mérite de l'avouer, car s'ils aiment leur langue comme tout un chacun, ils ne lui reconnaissent pas la musicalité du français, et pourtant, ils apprécient beaucoup l'italien, mais le français, parait-il, est plus doux et plein de sonorités étranges (par ex, le son « or », avec un « r » très léger à la fin  et un « o » ouvert, qui est inconnu en Europe). Ainsi, les non-linguistes ne savent pas qu'il y a 16 sons voyellés (qui ne sont pas tous des phonèmes), qu'il n'y a pas de « r » roulé, sauf en pays catalan, ni de « ach-laut », ni de « h » : ces absences adoucissent la langue et produisent  parfois un roucoulement  très agréable aux oreilles de locuteurs qui souffrent de la dureté de leur langue. Le français est donc une langue délicate qui rebute un peu les débutants. Il n'empêche que le Français  a souvent un problème d'élocution et bute sur certains groupements de consonnes, comme on  le constate tous les jours à la télévision, alors que les Allemands ne bafouillent jamais et savent articuler. Mais  le Français a le mauvais goût de se moquer des accents anglais, allemands, portugais...etc, alors que l'inverse n'est pas vrai ! Par ailleurs, les Français comprennent généralement même ceux qui écorchent la langue, car chez nous, il  n'y a pas d'accent tonique ( sauf sur la dernière syllabe, mais cet accent n'est pas pertinent). Allez-vous  tromper d'accent tonique en espagnol : on  ne vous comprendra pas, même si l'on prononce parfaitement. Même chose en allemand.

     Une  autre difficulté du français , très proche en cela du chinois (!), c'est le nombre d'homonymes (homophones et homographes), chose que l'on ne trouve pas en Europe (encore que le suédois présente des « faux-amis » qui interfèrent avec l'anglais et l'allemand,  voire le français, et qui requièrent beaucoup de vigilance). Ce phénomène est en lien direct avec la caractéristique visuelle de la langue et la justifie en partie.

       Nous pensons (peut-être à tort) que, pour le Français,  la langue est plus importante que la race, et que pour se faire accepter, il faut savoir parler sans faute, alors qu'un étudiant noir parlant parfaitement l'allemand ne sera jamais adopté comme « allemand » , comme nous l'avons vu dans un reportage (avec caméra cachée) fait par l'auteur de « Tête de turc », Günther Walraff (4),  où il piégea de braves villageois  ébaubis de voir un noir (grimé ) parler parfaitement.. Après son départ ,on entendit les gens dire : « Il a beau faire; c'est pas quelqu'un comme nous ; il ne peut pas devenir allemand comme nous ».Ainsi donc, ce n'est pas la langue qui comptait; mais on nous dira que l'on peut retrouver ce genre de dérapage chez notre Français moyen...
            
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Particularités morphologiques et syntaxiques de l'allemand, diamétralement opposées à la structure française.
                             
  Ce sont des petits riens qui gênent les débutants, car l'inversion des  réflexes linguistiques impose un effort au locuteur français, franco-centriste et pas très disposé à la docilité envers une nouvelle langue : le Français est trop habitué à ce que ce soit le voisin qui fasse des concessions, de même les Anglo-américains avec leur impérialisme  linguistique.
 
Exemples : l'inversion des chiffres composés à partir de 17 (sieb-zehn/ acht-zehn/neun-zehn), puis 21 (= un-et vingt /einundzwanzig)...etc (exactement comme en arabe).Mais le français est-il plus logique et plus facile quand il oblige un Belge à dire :quatre-vingt-dix-huit, alors que ce dernier a  « noctante-huit » à disposition ?!

     L'inversion de l'heure : fr.s : 3 h et quart (viertel nach drei); 11h et demie (halb zwölf) et surtout : 3 h 25 ' va se dire : 5' avant la demie de 4 h (5 vor halb 4), ce qui  - on l'avouera –  demande un certain effort de calcul mental au début;

    Last but not least : la syntaxe, qui a la lourdeur du latin : les phrases sont longues, mais au moins leur construction est soumise à des lois précises : il y faut seulement plus de mémoire qu'en français. La difficulté qui saute vite aux yeux ,c'est qu'on comprendra tout de suite  où le Français veut en venir, alors qu'il faut attendre  la fin de la (longue) phrase allemande pour savoir si c'est « oui » ou si c'est « non ».Ceci explique que les Français s'interrompent souvent sans grand dommage, alors que l'Allemand vous foudroie du regard  si vous ne lui laissez pas finir sa litanie dont votre impertinence est en train de détruire la magnifique architecture, pesante mais solide !

Exemple :le modèle le plus courant de la phrase simple  est : C + V + S : impossible de mettre le S(ujet) après le C (complément). Nous disons : « aujourd'hui , on va sortir » et même plus couramment : « On va sortir aujourd'hui », mais l'Allemand commence rarement par le sujet.: il préfère commencer par le C(complément) et dit : « aujourd'hui sort on » ...

  Pour la phrase complexe , il faut là de solides connaissance en Analyse Logique, que l'on a tort de ne plus enseigner en France (les « arbres »  de Chomski sont un amusement qui ne prépare à aucune maîtrise de l'énoncé., et pas seulement pour l'allemand); ex :
« Je me demande s' il va encore  venir demain » : « Ich frage mich, ob er noch morgen kommen wird » = « S+V+C, K +S+ ADV 1+ADV 2 +INF + AUX du futur ».Signalons en passant que l'inversion complète de tous les éléments règne aussi en turc, ce qui est très déroutant et pose des problèmes quasi insolubles aux interprètes; ainsi, en exagérant à peine  : « je vais aller au marché  cet après-midi avec ma femme » devient : « femme-ma-avec-midi-après- cet -marché - au ...etc; ».

   Et cette phrase allemande complexe(= Principale + subordonnée) est encore la plus simple que nous ayons choisie. IL faut reconnaître que la phrase française est plus simple  et plus claire. Ceci peut expliquer  en  partie la paresse des Français à  apprendre les autres langues, encore que le Français, disons « l'élève », ne se rend pas bien compte de la difficulté du français écrit ; la France est le seul pays en Europe où l'on fait des dictées jusque dans le secondaire et jusque vers l'âge de 15 ans. C'est donc bien qu'il y a un problème, sans aller jusqu'à la dictée de Pivot ! Rien de tout cela en Espagne ni en Allemagne, d'ailleurs  ces langues  peuvent à la rigueur s'apprendre par l'oreille sans avoir besoin d'étudier la grammaire, qui est un luxe de linguiste!

     Un autre aspect dont n'est pas conscient  le locuteur français, c'est que sa phrase est du type quasi « agglutinant », un peu comme en eskimo : tout est lié ,il n'y a pas vraiment de rythme; Au contraire, la phrase allemande est nettement caractérisée par 3 phénomènes inconnus en français : l'accent tonique (Wortton », l'alternance  son long/son court (comme en arabe) et surtout l'accent de phrase « montant /descendant » (Satzton/ intonation) qui échappe à l'étranger et le trahit tout de suite. Le même phénomène sévit en suédois, mais en plus difficile et plus subtil, et comme la langue est moins gutturale, le suédois possède une  véritable mélodie qui charme  l'oreille. Pas étonnant que les Suédois soient si doués en chinois, vu leur modulation vocalique qui rappelle beaucoup les tons  du chinois.

Mais toute langue a  les moyens d'échapper à ses contraintes internes  et les difficultés citées n'empêchent pas les Allemands  d'exprimer ce qu'ils veulent, ni la gutturalité de s'opposer au don du chant qui les caractérise.

    Nous aimerions parler un peu du problème posé par l'argot (que l'Allemand appelle jargon!); y a-t-il un équivalent en Allemagne?. Nous connaissons directement 2 cas : le « Kölsch » (à Cologne) et le parler berlinois qui change les « s » en « t » et les g » » en « j »; par ex : dat itt (pour: das ist) et jut (pour  gut); mais est-ce vraiment un argot ? D'autant plus qu'il y a en France le « verlan », inconnu en Allemagne, et remis à la mode depuis 20 ans ,mais pratiqué bien avant.
 
    Maintenant ,pour clore ce court  aperçu sur les langues on notera , ce qui est l'évidence, que le français, pourtant venant en partie des Francs (mais les Francs étaient- ils des Germains?) (5) a peu de racines germaniques : le français a beaucoup de mots grecs et arabes et sa tournure d'esprit est plutôt  orientée vers ces pays; les Allemands, eux,  ont  inventé l'expressions « indo-germanische Sprachen » (là où nous disons « langues indo-européennes ») car leur langue a des accointances avec le sanscrit dont tire parfois parti Martin Heidegger. Or, en dehors de cela, nous avons relevé un grand nombre de mots étroitement apparentés aux racines arabo-sémitiques que nous tenons à disposition des chercheurs : nous ne voyons pas de raison  à ces ressemblances qui reste une énigme pour nous (et ne sont pas le fait d'emprunts), à moins de remonter jusqu'à un passé fort lointain (cf. nos notes dans la Revue VLT , n° 73 de 1998).

 Ce qui est intéressant au point de vue traditionnel, c'est le nombre d'expressions religieuses conservées encore par les Allemands actuels, comme : Gott sei  dank ! grüB Gott! Alles Gute (cf. l'arabe :bi-khir); et en dialecte du sud : pfüiti (= behüte dich [Gott] = Dieu te garde! )...etc...On peut dire que l'Allemand actuel est foncièrement chrétien. D'où la surprise de voir depuis peu beaucoup d'Allemands se convertir à l'islam .Un  peu comme en France, l'Islam était la religion des immigrés (turcs) ,très isolés et peu appréciés dans l'Allemagne profonde : en 1972 , on ne comptait que 2000 Allemands de souche convertis et vivant clandestinement, essayant de ne pas être repérés pour leur non-consommation de charcuterie . Alors qu'en France, il y en avait depuis près de 100 ans et évalués en 1980 au nombre d 'environ 100 000 (actuellement , près de 500 000).  Mais depuis, on a vu un consul, puis ambassadeur d'Allemagne en Algérie revendiquer son islamité et même écrire des livres sur la chose; nous parlons de Murad Hofmann (« Der Islam als Alternative », Diederichs Verlag, 1992). Ils sont plutôt de confrérie Naqshabendie, comme la plupart des Turcs immigrés.
 
 
(4)titre allemand: »Ganz unten » ,1985.
(5)Les Allemands les appellent « Westgermanen » et les situent sur la rive  gauche du Rhin ;  leur langue est l'ancien haut-allemand (althochdeutsch) appelé en France : le francique ou le franconien. On retrouve leur trace dans de multiples lieux avec déjà  l'Ile-de-France,  (la France se dit : « Frankreich ») et en Allemagne : Frankfurt, Frankental, Oberfranken ...etc. Les descendants directs sont les Mérovingiens. Ces peuples nous semblent très différents de ce que l'on entend en général sous le nom de Germains ou Allemands; d'ailleurs, ils changent forcément de mentalité en s'acclimatant en Ile-de-France. On peut supposer qu'ils sont à l'origine d'un certain esprit « parisien ».
Il est vrai que  cet adjectif a une connotation de « liberté » et de « franchise » dans tous les sens du mot ; ainsi, si l'on dit « franc-maçon », c'est qu'il s'agit à l'origine d' hommes libres, non-esclaves (ce qui indiquerait une caste de guerrier) .Or, « homme libre » se traduit par Freiherr = baron, premier grade de l'aristocratie ultérieure. Le franc-maçon doit donc être noble à l'origine. Coïncidence supplémentaire, en arabe « rajal horr » (homme libre) signifie non-esclave et se disait autrefois pour l'homme de pure souche arabe. Enfin, apparenté à « baron », l'espagnol dit : « varonil » (prononcez : baronil) pour « viril ». Le vrai Franc n'est donc pas un homme ordinaire. Son statut d'exception allait contribuer à fonder un nouvel Etat : l'Ile-de-France. D'autres peuples ont aussi cette vieille notion d'homme authentique, comme les Bantous : « ba-ntu »,pluriel de « mu-ntu » : l'homme, ou encore en arabe : « qawm » : le peuple (des initiés) (cf. notre article « Le Don des Langues » sur Internet : www.al-simsimah)
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               Un autre sujet d'étonnement et d'incompréhension concerne le domaine « sacré » des Français, à savoir  la nourriture et la gastronomie.

D'abord, l'omniprésence du porc, matin midi et soir ! Ils auront beau nous vanter la variété indéfinie de la charcuterie (Wurst) - au moins 70 sortes de saucisses – dont la plus fine est sans doute la « Kalbsleberwurst » - , celui qui est allergique ou abstinent sera très gêné en Allemagne (et en Alsace) : difficile d'y échapper. Celui qui par malheur ne boit ni bière ni vin et refuse la charcuterie est déjà suspect et ce refus est considéré  comme une vexation pour les hôtes. On se demande comment les Israëlites ont pu tenir aussi longtemps en Allemagne...et comment se dissimuler en période de persécution ? Mais comme partout , on respecte le Bouddhiste et on insulte le Sémite! Etranges limites de la tolérance. Le lobby du porc est tellement puissant qu'il est impossible de dire à un médecin allemand que la charcuterie est malsaine (sans parler de l'interdit de certaines religions), alors que toutes les études s'accordent à  le dire. En fait, l'Allemand se nourrit de porc parce qu'il est moins cher et donc il préfère restreindre le budget nourriture au profit d'autres dépenses, au risque de  sa santé. Et même dans la charcuterie, il évite le jambon (Schinken) au profit des différentes saucisses (Würstchen) meilleur marché !  L'alimentation étant ainsi reléguée bien loin des préoccupations quotidiennes, la cuisine de la ménagère allemande est un lieu qui, pour nous, manque cruellement d'instruments de travail et où pendant  longtemps nous n'avons vu aucune casserole mais des marmites sans manche (« Topf »), obligeant à se servir de « Feuerlappen » (littéralement : « chiffons à feu ») pour ne pas se brûler ; ils n'avaient pas de mot pour distinguer : bol, plat ,terrine, le tout étant désigné par le terme: « Schüssel » qui manque de précision pour un vrai cuistot ! Peut-être est-ce encore un témoignage de l'origine nomade des peuplades germaniques.

     A part cela, la nourriture est excellente en Allemagne et notamment les 70 sortes de pain ; quant aux fromages,  ils ne peuvent rivaliser avec le champion toutes catégories que constitue la France. Mais il y a un problème inattendu que  l'on ne rencontre d'habitude  que dans le tiers -monde ( Egypte, Sénégal, Turquie...): c'est le problème de l'EAU. Il y a déjà 50 ans , les Allemands ne buvaient plus l'eau du robinet : elle rouillait  les lames de rasoir et était fortement déconseillée; en 1956 , on pouvait encore se baigner dans le Rhin, à hauteur de Mayence ;impossible quelques années plus tard ! ...Etonnez-vous après cela que les Allemands aient été les premiers écologistes d'Europe ;  aucun mérite à cela : ils étaient devenus vertueux par nécessité ! Mais au moins ils avaient pris conscience des problèmes posés par l'industrialisation à outrance de leur cher pays, pendant que tous les dupes de France vantaient le progressisme de leurs voisins! En même temps, on loue leur peu de réacteurs nucléaires et on critique leurs centrales thermiques !

Quelle hypocrisie!

On avouera, une fois de plus, que le couple franco-germain est pétri de contradictions et leur somme hypothétique en ferait une force peu commune en Europe et dans le monde. On  verra plus loin que c'est l'Europe nouvelle qui a enterré cette possibilité.
                                                                         
                                                                                J.F.
  Suite 05/04/2020


Ce qui frappe les Allemands, c'est le manque de  respect en général des Français devant toute autorité, toute hiérarchie et toute référence sacrée.


 Il y a quelque chose de « voltairien » dans le Français moyen qui admire facilement la belle intelligence, même si elle piétine des valeurs universelles. C'est ainsi que la notion de Laïcité a recouvert tout de suite une connotation d'anticléricalisme et que De Gaulle a dû expliquer, pour rassurer les croyants, que la République laïque alléguée dans le préambule de la Constitution de la Vè signifiait non pas une attaque contre la Catholicisme, mais une neutralité envers les Religions. Ce concept de laïcité n'a pas son équivalent dans les autres pays et est bien difficile à traduire car elle n'a pas de sens dans des pays comme l'Angleterre ou l'Allemagne (qui ont pourtant persécuté leurs dissidents dans le passé)  pour lesquels il est évident que l'on doit être chrétien  ou au moins non-athée. Cette notion n'étant pas du tout évidente  ni univoque, il y a encore beaucoup de Français pour lesquels  être laïque, c'est être anti-religieux ou au moins anti-catholique ! On l'a bien vu quand  la haine – pas du tout neutre –  s'est déchaînée contre l'Islam  chez des enseignants prétendus laïques quand le problème du « voile » a été soulevé,  en partie à cause des excès intégristes qui ont jeté de l'huile sur le feu: avant, la question n'avait jamais été soulevée. Et la fameuse tolérance française a volé en éclats. Ainsi la France n'était toujours pas guérie de son « laïcisme » de 1905, périodes de persécutions des Ecoles  chrétiennes. Le Christianisme étant quasi agonisant en France, on  s'en est pris alors à une religion bien vivante : l'Islam. Si bien que le Français moyen souffre déjà d'un préjugé défavorable dans des pays européens majoritairement croyants comme l'Espagne, l'Italie, évidemment, et  dans presque tout le reste du monde.
Malheureusement , une belle occasion de neutralité et de tolérance était perdue en France, car la laïcité pouvait avoir son revers positif : voilà un pays où il n'y avait pas de religion officielle et où pouvait fleurir (au moins virtuellement) un véritable universalisme de races et de religions, avec l'éminente  garantie de la Res  publica… C'était à sa façon la catholicité de la France (cf. notre CR du « Royaume du Graal » de Jean Robin), au sens grec originel du mot.
   Ce rendez-vous avec l'Histoire  semble avoir échoué, car la folie « djihadiste » ne désarme toujours pas et rend pour l'instant la Mission de la France quasi impossible (car cette « laïcité » mise à mal en était le revers : les desseins de Dieu sont impénétrables).



 

samedi 8 février 2020

De Gaulle et la France - J.F.


 
 
 
          En préambule, qu'on nous permette de rappeler ce que nous écrivions dans notre compte rendu du livre de Jean Robin (« La France, Royaume du graal », Trédaniel, 1992) publié sur Internet ([http://www.al-simsimah,2017]

  « Guénon se plaçait à un point de vue véritablement universel (contrairement à Robin) où il n'y a plus ni nations ni races (*); pour nous, son apport à un lieu doté d'une élection divine résidait essentiellement dans un lieu subtil (et non géographique) qui s'appelle « langue française »** dans son aspect ésotérique et eschatologique et qui en effet n'a rien à voir avec une quelconque « idolâtrie nationaliste », comme le dit si bien l'auteur qui, par moments, laisse échapper quelques vérités indépendantes de sa volonté! »

    Ce n'est pas parce que Guénon avait  dit : « il  n 'y a rien de spécifiquement français dans ce que j'écris, sinon la langue »  qu'il se désintéressait du Destin de la France***. Son silence apparent s'explique selon nous parce qu'il jouait discrètement son rôle de Protecteur missionné par le Centre du Monde, indiquant même par sa signature arabe (revue "the Speculative Mason", 1931) (AWY)**** qu'il était une protection, car  le mot arabe « awâ » (terme coranique que l'on retrouve notamment dans la sourate 93 – « Dhuhâ ») a le sens de:  asile, refuge, protection; cette sourate nous semble d'ailleurs désigner en partie la Fonction de Cheykh 'abdel-Wahed Yahya – wa 'Llahu a'lam!
 
 
           Bibliographie (non exhaustive), où nous avons trouvé quelques bases de réflexions et (très rarement) quelques idées traditionnelles:
-"Charles De Gaulle, le Libérateur", Jean Soulairol, 1945
-"De Gaulle", Jean Lacouture (1965)
-"La Vè République de Ch. De Gaulle et G.Pompidou", Pierre Limagne, 1978
-"De Gaulle, les Services secrets et l'Algérie",  C.Melnik, 1988
-"De Gaulle secret", François Broche, 1993
-"Les Hommes de De Gaulle", du même, 2006
-"Gouverner selon De Gaulle", Pierre Lefranc, 2008
-"De Gaulle", Eric Roussel, 2008
-"De Gaulle, la Grandeur et  le Néant", Dominique Venner, 2010
-"Charles le Catholique", Gérard Bardy, 2011
 
 
(*) Ainsi, il était aussi bien opposé au Pangermanisme (celui de Schuré ou de R. Steiner) qu'au Panarabisme (à ne pas confondre avec le panislamisme). Son projet s'appelait: « Union pour une Entente intellectuelle entre les Peuples », et non union raciale ou politique.
(**) Cf. la fin de notre article sur le « Don des Langues »
(***)De Gaulle, à des intimes, parlera de façon très appropriée de sa  Fonction Suprême au service de  la « Mission de la France ». ("sa fonction " désigne ici De Gaulle lui-même et non Guénon.-    cf. F.Broche,"Les Hommes de De Gaulle", p.128)
 
(****) « Ishara » évidemment non remarquée par M.Robin !
 
 
 LE  DESTIN  DE  LA  FRANCE
 
 
        Devançant les considérations que nous aurons ultérieurement  à développer  sur Jeanne d'Arc (1412-1431), nous citerons ces paroles remarquables d'un journaliste allemand:

"Jehanne a marqué la France de l'empreinte divine. Après cela, quiconque touche à la France touche à Dieu(1). Elle a changé en croisade toute intervention de la France, forçant ainsi le monde à prendre  parti. Elle n'a, depuis lors, cessé de diviser les nations"(2) Friedrich Sieburg (1893-1964)

(1)C'est en Allemagne que l'on dit :"Glücklich wie Gott in Frankreich" –
(2)Quant à diviser le monde, on se souviendra de la déclaration inouïe :"Vive le Québec libre!", assénée dans le pays même ! -   ( Les italiques sont de nous.)
 
     Nul doute que  cette idée a guidé De Gaulle dans sa conception du Destin et de la Mission de la France: qu'on l 'écoute ou non, la France avait son mot à dire; et qui sait  si certaines paroles affirmées avec l'Autorité légitime de De Gaulle n'ont pas eu de répercussion plus tard et même encore actuellement, où beaucoup d'imposteurs ont l'outrecuidance de se réclamer de  De Gaulle (cf. les 2 remarquables ouvrages de Jean-Louis Debré, un des derniers "gaullistes" de France : "Ce que je  ne pouvais pas dire" et "Tu le raconteras plus tard";  2016-2018  /Folio/poche).
 
     Ce statut de la France, lieu privilégié, n'a cessé d'exciter les jalousies et les guerres subséquentes; il est la cause de malentendus qu'il faut dissiper avant de poursuivre plus  avant . Nous disions que De Gaulle était le seul homme d'Etat à avoir distingué dans sa pensée comme dans son action la FRANCE et les "Français" : en quelque sorte, les Français sont les "locataires" de la Maison France.  Le fait que la France soit un lieu "élu" n'implique absolument pas que les Français soient une "race " élue" (notion qui a causé bien des dégâts depuis 3000 ans). Rappelons en passant que dans l'Islam , la seule supériorité d'un être tient à sa piété ,et non à sa naissance ,ni à sa richesse.L'orgueil de la "race" a attisé tous les nationalismes et fait le lit de beaucoup  de guerres. Autrement dit , la France est un terreau sur lesquels poussent les meilleures fleurs, lesquelles, n'en déplaise aux chauvins, sont souvent d'origine étrangère, fait qui pulvérise les prétentions des extrémistes de droite, tenants de la race blanche supérieure et de l'Europe "chrétienne", au moment où elle l'est le moins ! Et la France risque de devenir ce pays "moisi" que dénigrait un récent chef d'Etat français, valet de l'américanisation, tout en supprimant les crédits nécessaires pour que vive  la Francophonie; la place vide laissée par la France dans les pays francophones (tout le Maghreb et une bonne partie de l'Afrique noire) a été vite occupée par les "Goethe-Institut, ou les Colleges américains, qui n'avaient aucun lien ni historiques ni culturels avec ces mêmes pays francophones, francophiles et bien déçus de l'être encore, mais jusqu'à quand ?...Ainsi ,les meilleurs étudiants du Tiers-Monde vont maintenant en Belgique, en Roumanie, au Canada, voire aux USA, où ils sont bien accueillis, pays bien contents de damer le pion à cette France prétentieuse et qui n'a plus guère les moyens de ses prétentions, ayant tourné complètement le dos à la conception traditionnelle de la politique instaurée par De Gaulle (ainsi le chef actuel de l'Etat français), comme nous le montrerons plus loin.
 
      Maintenant, nous sommes bien conscients qu'il ne suffit pas d'affirmer que la France est un lieu privilégié, voire le siège d'une élection divine. On a le droit de nous demander des comptes.
 
    Mais pour cela, il faut remonter aux origines de la monarchie française, c'est à dire à Clovis (fin du Vè siècle / env. 566-611), de son nom franc Chlod-wig (= célèbre guerrier); nous disons bien monarchie élective et non royauté, qui viendra après et qu'il ne faut pas confondre. Ce monarque n'est pas seulement le seul ("monos"), c'est surtout le meilleur ("melior inter pares", au contraire du roi qui est "primum inter pares"). C'est cette royauté, devenue  héréditaire, qui sera à l'origine des dégénérescences successives, jusqu'à la fin tragique de Louis XVI et sa famille et le naufrage de l'aristocratie.

D'ailleurs, après l'interruption napoléonienne de la royauté, Louis-Philippe ( 1830-1848) ne sera pas oint (même s'il fut couronné, ce qui n'est pas la même chose) et élu par un parlement, ce qui fera de lui, non pas le roi de France, mais le roi des Français, règne qui aboutira  à des émeutes et une éphémère république pour devenir un nouvel "Empire". De Gaulle qui avait toutes les capacités d'un monarque  - mais qui n'était pas roi – tiendra compte de cette différence et sa Constitution, toujours debout malgré les attaques misérables des Chirac, Sarkozy..etc, aura un style régalien (par ex : le droit de grâce) convenant  parfaitement à la "constitution "  primordiale de De Gaulle : contrairement à ses successeurs, il aura le sens de la Grandeur, qui manquera toujours aux  idolâtres de l' "american way  of life", lesquels ne conçoivent que le gigantisme (condamné depuis longtemps dans certains textes sacrés sur la fin des temps), dont la démesure et le ridicule crèvent les yeux pour qui sait voir dans le sinistre quartier de la Défense.
 
    Il y a ainsi au point de départ, une élection divine qui est symbolisée par la Sainte ampoule apportée par une colombe. Les anglais auraient, paraît-il, une prétention analogue concernant un de leurs rois. Mais on ne nous fera pas croire que la reine Elizabeth II aurait été consacrée avec une Sainte ampoule; de toute façon, devenue chef de l'Eglise ( ce qui est le comble de la parodie anti-traditionnelle) elle aura perdu tout charisme et tout privilège. L'Angleterre conservatrice aura peut-être gardé certains symboles et usages, et un semblant de royauté; il n'empêche, comme Guénon le faisait remarquer à propos de la Maçonnerie anglaise, que les peuples nordiques et surtout anglo-saxons ont perdu l'Esprit et qu'il y a plus d'espoir dans les pays latins, malgré leur côté contestataire et anticlérical, quant aux possibilités de redressement traditionnel, car "on ne met pas de vin nouveau dans les outres vieilles, de peur qu'elles ne se rompent et que le Vin ne se répande à terre" (Le Christ).Un connaisseur des Anglais nous disait il y a une vingtaine d'années: "il suffirait que l'Esprit souffle de nouveau pour que la Tradition se ranime" ... Nous attendons toujours et avons appris avec stupeur que l'Eglise anglicane exigeait maintenant que les Maçons dévoilent publiquement leur secret initiatique! Nous disons bien  Anglais, car il y a plus d'espoir du côté  des Irlandais et Ecossais catholiques (comme par hasard, les seuls francophiles),  qu'il ne faut pas confondre avec les Anglo-saxons, originaires d'Allemagne,  et que Charlemagne  combattit jusqu'au VIIIè siècle, car ils vivaient encore dans le paganisme et la sauvagerie, et se sont très tardivement convertis, pour se jeter quelques siècles après dans le réformisme protestant, très anti-traditionnel de mentalité...
 
    La 2è preuve de la sollicitude divine réside dans l'élection de Jeanne d'Arc et dans l'assistance dont elle bénéficie dans sa Mission, toute jeune fille dirigeant des guerriers, ce qui ne s'était  jamais vu;
   Enfin, ne déparant pas cette triade providentielle, arrive De Gaulle qui sauve 2  fois la France : quelles preuves supplémentaires veut-on du statut privilégié de la France? IL fallait des esprits faux,   haineux (F.N. = F.Haine !) et antitraditionnels pour contester ces évidences (nous voulons dire : la sollicitude divine )  tout en essayant plus tard de s'en emparer   sans vergogne pour rattraper ces erreurs devenues trop aveuglantes, et qui risquaient de leur faire perdre le soutien des catholiques intégristes...Et l'on brandit le slogan "patriotisme" toujours confondu avec le nationalisme le plus agressif et le plus raciste possible, essayant de détourner l'héritage  gaullien (avec une évolution récente intéressante: les Le Pen n'attaquent  plus les Juifs et vont même jusqu'à se faire inviter en Israël - entre colonialistes , on s'entend toujours! - , toute leur haine se déversant sur les Maghrébins qu'ils confondent avec les Arabes d'Orient ; mais en arrière-plan se dissimule la haine de l'Islam).
 
     Un pays (il n'y a pas de "nation" dans un monde traditionnel) est comme un être vivant ; c'est    à dire qu 'il a  un corps, une Ame et un ESPRIT.
 
    Sa forme hexagonale et surtout sa situation dans l'extrême occident (dernier pays avant l'Amérique) lui donne des avantages uniques en Europe : elle  a accès à 3 mers et océans , ses paysages sont très divers ; à part le désert, on trouve toutes les sortes de modes de vie possibles, et, ce qui n'est pas fortuit, des régions indépendantes ayant leur langue et dialectes propres, ce qui n'est le cas dans aucun pays d'Europe : l'Allemagne n'a des variantes que du même fonds germanique, l'Espagne a (à part le basque) des dialectes tous d'origine latine mais la France a au moins 4 ethnies sans rapport structurel ni généalogique entre elles : le provençal, le basque, le breton et l'alsacien, auxquels  on pourra, suivant les régionalismes, ajouter un certain nombre de dialectes  et de patois ( 1). Ceci explique la nécessité d'un certain centralisme (le "jacobinisme")  pour éviter que le pays  n'éclate dans des particularismes chauvins et agressifs. Evidemment, dans un Empire traditionnel (celui de Charlemagne), sans rapport avec cette parodie d'empire de l'europe actuelle, le problème ne se poserait pas, car il y avait de véritables régions que l'on  a fait semblant de récréer pour des raisons européo-mercantiles depuis quelques années. Autrement dit, les républiques successives  ont joué de l'unité de la langue française pour réaliser l'unité sociale et administrative de la France, mais avec une certaine brutalité, notamment envers les Bretons (cf. Le slogan sur certains cafés , en 1900 : "ici, il est interdit de cracher par terre et de parler breton !" -sic
 
Nous n'allons pas revenir sur la question de la langue, traitée déjà par ailleurs, rappelons seulement  la formule de Goethe : "L'AME d'un peuple vit dans sa langue".
 
    Quand les régions traditionnelles sont mortes , on a essayé de les remettre à la mode avec ce "folklore", ( mot anglais, idée anglo-saxonne) que critiquait Guénon, car c'était une tentative de résurrection d'un cadavre. Les jolis vêtements traditionnels régionaux remis à l'honneur étaient portés auparavant par tous les habitants, et correspondaient à leur emploi et leur fonction sociale; cela n'avait rien d'artificiel. C'est à partir de cette époque que l'on crée les musées qui sont des cimetières de vie sociale : quand une civilisation est bien vivante ; elle n'enferme pas ses symboles  culturels dans ces mouroirs que sont les Musées.
 
Cette âme d'un  peuple a été stérilisée, et comme la France est un pays ouvert au monde, malgré ses réactions parfois xénophobes (qui sont des réactions de protection légitimes, car chaque Français, même inculte, a la notion instinctive de devoir préserver une certaine qualité française qu'on ne trouve pas ailleurs) (a), il y a eu une vague d'engouement envers les idées, modes et ...sectes anglo-américaines, surtout après  1945, - et ce n'est pas un hasard – car il y a eu une véritable occupation américaine en France, sous prétexte de plan Marshal, à laquelle De Gaulle a mis le hola en 1963 (au bout de 18 ans!). A cette époque essaiment les propagandistes, par exemple les  Mormons, dont on n'avait jamais entendu parler en France. En 1955, les USA sont déjà le pays des 256 sectes ! Sans De G. nous serions encore colonisés. Alors les Anglo-saxons ont trouvé d'autres moyens : en faisant traduire toutes leurs oeuvres en français et en refusant la réciproque ; idem pour le cinéma , le théâtre. Ils ont réussi à imposer leur "culture" . Depuis, la France n'est plus un pays vraiment libre pour accomplir sa Mission  comme l'aurait voulu le Général, et les petits Giscard, ( 2), Sarkozy et Macron se sont vite attelés à la noble tâche de se rapprocher des nations antitraditionnelles . IL ne manquait plus que l'Europe, ce qui est fait depuis Maastricht (évènement couronné par l'étrange tremblement de terre qui a eu lieu exactement à ce moment en Europe du nord / avril 1992) et le vote anticonstitutionnel de 2007, annulant un référendum, ce qui bafoue la Constitution de la Vè. Après cela, Sarkozy peut bramer aux quatre vents son attachement au gaullisme.
 
          Si la France fut  si souvent attaquée ( et même de l'intérieur, notamment par Sarkozy) et envahie, c'est pour cet attrait mystérieux qu'elle exerce et ce joyau  sacré qu'elle dissimule, invisible pour les esprits grossiers qui pensent que l'on dirige la France comme on fait son "job" (grossière expression reprise par Sarkozy de  George W. Bush.). Comment après cela, s'étonner que De Gaulle ait pensé que la France avait un rôle spécial à jouer dans le monde, et que  quand elle parlait, il fallait sinon lui obéir, du moins l'écouter.                                        
      Après le corps et l'Ame d'un pays, il ne reste plus que l'ESPRIT; et c'est à ce niveau qu'il subsiste encore un espoir; et pourtant Michel Vâlsan avait prévenu ses disciples : "Ne croyez pas que le Dajjal épargnera la France" (hasha 'Llah!).; et selon les Evangiles : "Même les Elus seront en danger d'être trompés".
 
L'HOMME
 
                    Pour une aussi si noble tâche, il fallait un homme hors du commun, et nous allons essayer d'étayer cette thèse par des témoignages, citations et réflexions personnelles.
 
        La différence éclate quand on pense à la haine antigaulliste de Mitterrand et son ambition de toujours (dès 1946, il avait  à peine 30 ans) d'évincer De Gaulle, lequel s'est  très tôt méfié, car il le trouvait louche, chose qui, à ma connaissance n'a jamais été vraiment expliquée : De Gaulle avait ses raisons, notamment le fait que la "résistance "de Mitterrand n'avait pas de bases claires; son réseau n'était ni FFI ni FFL et surtout il s'était abouché avec une bande de cagoulards dont certains trahiront et d'autres se rallieront à la Résistance, celle dirigée par De Gaulle.Mais ses liens avec des ennemis du Chef de la Résistance n'ont pas arrangé les choses (3).Autrement dit, Mitterrand donnait  l'impression de faire de la résistance une affaire personnelle, "à son compte", n'ayant aucun sens de l'abnégation au service du pays; on l'a dit fidèle en amitité, c'est une qualité qui, en politique, présente des revers : un véritable homme d'Etat est toujours seul, c'est à dire qu'il évite au maximum les compromissions et les pressions "tribales": il est au service du pays et non des hommes (donc : au service de la France, et non des Français). Mitterrand était incapable de cette vertu.
 
Par ailleurs, si l'on fait un portrait concis des deux hommes, en notant juste quelques traits pertinents, on remarque que:
-De G. est au-dessus des partis; et il est inexact de le cataloguer "de droite". M., lui, est un politicard arriviste, mangeant à tous les rateliers. (Paul Thibaud a écrit : "Le comportement pervers de Mitterrand consiste à disposer des valeurs en faisant semblant de les incarner")
-De G. est un catholique croyant et pratiquant, mais "laïque";
 
-M. a une vague teinture chrétienne, mais il se conduit comme un mécréant. C'est pourquoi certains ont cru qu'il était maçon; il s'en est toujours défendu : la confusion doit venir d'un autre Mitterrand  (Jacques) du G: O:
 
        Pour compléter le portrait, nous ajouterons que  Mitterrand, à peine élu,  a vite marqué son territoire: il a osé -ce qu'aucun président  n'avait fait -, s'asseoir à l'Elysée dans le fauteuil laissé vide par De Gaulle, et plus tard il a été porter une gerbe au pied de la statue de Jeanne d'Arc! Quand on sait comme il se moquait de De Gaulle en disant qu'il se prenait pour Jeanne d'Arc, on voit le symbolisme  inversé et parodique de ces deux actes. Pour nous, c'était un geste plein d'hypocrisie opportuniste. Son féal sujet, Jack Lang, crut bon d'ajouter cette formule sinistre: "Nous sommes passés des ténèbres à la lumière!." (mai 1981)
Que ceux qui ne croient pas aux symboles ne se mêlent plus de politique !
 
Dans les pays arabes, on remarque qu'il est entouré de sionistes, jusque dans ses ministères, ce qui entrave sa politique extérieure. Mais ça ne gêne pas le français moyen qui ne comprend rien à ces subtilités, surtout quand ces dernières lui sont  soigneusement cachées...(que penser du fait que des hommes comme Minc, Attali et BHL(4) soient les conseillers permanents -  et grassement rémunérés  - de tous les présidents successifs depuis Mitterrand ? Silence complet des médias sur la question ! - le seul qui ait mis les pieds dans le plat récemment est Juan Branco ("Le Crépuscule").
 
       Disons en passant un mot des opposants, notamment Pierre Mendès-France. On lui doit l'indépendance de  la Tunisie ( 1956), ce qui n'est pas rien. Mais ce brave homme qui avait des qualités humaines et aussi certainement bien des illusions sur ses capacités à gouverner en général, et surtout à gouverner la France en particulier, a commis un petit livre haineux et petit comme ses conceptions politiques ( "la République moderne"/idées-Gallimard). N'ayant aucun sens de la grandeur, il fait dans cet ouvrage des critiques contre De Gaulle qui sont une projection de ses propres limites. Il était trop attaché à la cuisine parlementaire de la IVè, qui jouait à gouverner et faisait et défaisait les gouvernements.

Quant  aux autres opposants "en bandes organisées", socialistes, communistes( 5) et extrémistes de droite, ils sont tous d'accord pour faire passer mensongèrement  De Gaulle pour un dictateur, un néo-fasciste ou un putschiste ("le Coup d'Etat permanent" est peut-être  un bon pamphlet, mais pas un livre politique sérieux, tant il sue la jalousie, le dépit des nains qui n'arrivent pas à sauter à la gorge du géant!). A ce sujet, Michel Vâlsan dira :"Les Français ont guillotiné leur roi, ils ne s'en sont jamais remis. Maintenant, ils ont un monarque .De quoi se plaignent -ils ?". En fait, comme le leur reprochera plus tard le Général avant de  démissionner, ils parlent et agissent en boutiquiers qui n'aiment pas que l'on dérange leur petit commerce électoraliste : c'est tout ce qu'ils ont retenu du droit démocratique à voter. On ne sait si la formule  "la droite la plus bête du monde " est de De Gaulle, mais il est sûr qu'il a répondu à quelqu'un qui lui demandait ce qu'il reprochait aux socialistes : "c'est justement qu'ils ne sont pas socialistes!"
 
( 1) Lesquels  ne sont pas des langues, mais de l'ancien français, comme en Vendée, et qui ont donné le parler canadien (le "joual") où l'on retrouve par moments de façon frappante et pittoresque l'accent et l'intonation des régions vendéennes et poitevines des 16è-17è siècles.
(a) Pourquoi, fait unique au monde, y a-t- il chaque année 70 millions de touristes qui visitent la France, soit plus que sa population globale ?
(2)Qu'on se rappelle le lamentable discours en anglais scolaire de Giscard, à peine élu en mai 1974! Aucun président, jusque-là, n'avait  fait preuve de cette allégeance servile
(3 cf. Pierre Péan :"une Jeunesse  française"
(4)Responsable avec Sarkozy de la destruction de la Libye et de l'assassinat ignominieux du chef de l'Etat, Mu'ammar Qadhâfi; dont les répercussions n'en finissent pas de déstabiliser le monde africain. Ce même BHL a claironné fièrement à la radio  peu après: "j'ai défendu les intérêts d'Israël" ! Personne n'a relevé cet aveu compromettant. On croit rêver ! ( idem avec DSK :"Je mobilise toute mon énergie à soutenir Israël" – et cet homme était candidat à la présidentielle de 2012
( 5)Qu'on n'oublie pas que quand le pied-noir Albert Camus, en 1956,  a défendu les droits des Arabes, c'à d des Algériens , il s'est fait traiter de "traître" par le PCF  (cf. Docu. de Benhamou, F3, 22/1/2020) qui avait  voté les pleins pouvoirs à Guy Mollet pour réprimer les autochtones. Le répresseur de l'époque, ministre de l'Intérieur, s'appelait Mitterrand !
(6) Reconnaissons que Mitterrand se rachètera  de bien des erreurs à la fin de sa vie et il reniera son anti-gaullisme primaire; mais le mal était fait...(cf. Entretiens  avec Pierre Péan). Surtout il révélera tardivement les raisons de sa méfiance envers les Américains, montrant qu'il n'était pas dupe :
 
"La France ne le sait pas mais nous sommes en guerre avec l'Amérique. Oui, une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort...apparemment. Oui, ils sont très durs les Américains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans partage sur le monde. C'est une guerre inconnue,une guerre permanente, sans mort apparemment et pourtant, une guerre à mort" ("Le Dernier Mitterrand", par G-M Benhamou, 1997)
 
DE GAULLE  SECRET
 
  C'est  le titre même d'une n.ième biographie que nous avons citée dans la bibliographie supra. Ouvrage bien décevant, car l'auteur, François Broche, comme beaucoup d'autres  ne conçoit la biographie que sous l'angle psychologique, ne considérant que le point de vue religieux chez son personnage, ce qui n'est pas inintéressant, mais ne présente rien de mystérieux;

       Les vraies questions à poser, à condition d'avoir autre chose que la culture générale de base des journalistes, aurait consisté à se demander si De Gaulle, comme certains l'ont laissé entendre, connaissait l'oeuvre de René Guénon.(7) Or M. Broche, p.116, cite ingénument les noms de Maritain, Daniel-Rops et Stanislas Fumet, sans en tirer autrement parti. Il serait bien étonnant que ces 3 écrivains qui connaissaient fort bien René Guénon ne lui en aient  jamais dit un mot ! Sans parler  de Michel Vâlsan, qui, lui, était capable de dire à l'avance approximativement ce que le Général allait décider, quand tout le monde était dans l'expectative. Malheureusement, certains parasites de l'oeuvre guénonienne ont fait  courir le bruit que Guénon aurait reçu de M. Vâlsan une "initiation" !!! Ce genre de rumeur typiquement parisienne et occultiste venait sans doute d'un doux illuminé fort en délires du nom de Parvulesco. Qu'est-ce qu'un Cheykh musulman aurait bien pu transmettre à un catholique comme De Gaulle?
 
   A part quelques réflexions intéressantes dans ce livre ,  nous n'avons pas affaire à ce que, suivant Guénon, nous appelons la perspective traditionnelle, éclairage qui aurait fait apparaître justement le côté "secret", en tout cas réservé, de De Gaulle et la signification de cette "Mission " de la France dont il était le serviteur. Nous n'avons pas lu tous les livres écrits sur De Gaulle, évidemment, ce serait impossible et fastidieux , mais tout ce que nous avons pu lire ou entendu dire  omet toujours ce côté des choses. Même Jean -Louis Debré, pourtant  gaulliste authentique, est muet sur ce point. Ce qui brouille un peu les cartes, c'est le style "hagiographique" de la plupart des livres sur De Gaulle , par exemple Pierre Lefranc (  "Gouverner selon De Gaulle"), qui en fait des tonnes; ou, au contraire, les vieux ennemis droitistes comme Dominique Venner qui ne peut voir l'Histoire qu'à travers le prisme du Lepénisme! Ah ! L'Algérie française et l'OAS auront décervelé bien des esprits faibles.!
 
        Certains ont essayé d'aborder le supposé "Gallicanisme" de De Gaulle...A moins de remonter jusqu'à la Pragmatique Sanction de Bourges(1438), décrétée par Charles VII et l'Assemblée des évêques, qui en serait la 1ère affirmation, nous préférons laisser  ce sujet à des théologiens expérimentés! (Pour ceux qui aiment les symboles , nous signalerons  que Colombey-les-deux Eglises, non seulement a deux églises, mais que le " Y" qui termine Colombey exprime aussi une dualité!)
 
          Pour conclure ce portrait, nous constatons que De Gaulle présente 3 qualités traditionnelles rarement réunies:
-c'est un Ecrivain, exposant très tôt sa conception du sort du monde et de la Mission de la France.
-C'est un Homme d'Etat sans aucune ambition personnelle ni désir d'enrichissement; intégre et désintéressé ; vertus inconnues des hommes politiques de la 3è et 4è république.
-C'est un  Homme d'action plus qu'un militaire.
La conjonction de ces 3 qualités fonde sa qualification à régir la France et à s'insérer de façon active dans les "affaires du monde", ce qui a retenu l'attention de l'Autorité traditionnelle qui l'a investi de sa Fonction et lui a donné la protection et les moyens correspondants :
  • il survivra à la guerre de 1914-18,
  • il échappera aux Allemands en 1940;
  • il survivra aux attentats ou tentatives d'attentat de Pont -sur-Seine, du petit Clamart et de Sainte Hermine (Vendée).
  • Nous aimerions ajouter pour le plaisir de l'ironie  qu'il a survécu à 4 ans de vexations de la part des autorités anglaises (notamment, un certain Churchill, qui voulait "le faire mettre aux fers"!     Après, on dira que les militaires sont agressifs!)
  • Mais les héros ont leur lacunes et leurs faiblesses comme nous allons le voir, évitant de céder aux dithyrambes habituelles

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                   Thomas Molnar (1921- 2010), écrivain catholique intégriste, extrémiste de droite et bien sûr colonialiste, a une conception du "héros contre-révolutionnaire" qu'il applique malencontreusement à De Gaulle en le traitant de "faux héros", dans la même charrette que le Pape Paul VI et...Nixon , ce qui est inattendu ! Ce faisant, il ignore  ce qu'est le point de vue traditionnel inauguré par Guénon  et donc tout le côté traditionnel de l'Homme d'Etat De Gaulle ; et quant à la  mission de la France, elle se réduit chez ces gens-là à la politique du "sabre et du goupillon" ! Ainsi, De Gaulle refusant  de continuer l 'occupation et le massacre de la population algérienne est un faux héros et un traître; Comme les choses sont simples avec les colonialistes sûrs de leur bon droit qui confine à une odieuse niaiserie : si les Algériens ont tort de ne pas  se laisser coloniser, pourquoi les Français se battraient-ils contre les envahisseurs allemands ? Là est condamnée toute Résistance légitime. Puisque seule compte la Force et non le Droit. Ce qui explique, en passant, que beaucoup de gens comme  les disciples de Molnar deviendront des collabos, des néo-nazis ou des traîtres à leur  patrie, dont ils ont trop souvent le mot à la bouche.( voir le petit livre de Thomas Molnar: "La Contre-Révolution, 10/18 -1972) .
     
                       In  cauda  venenum ...
 
        Ce n'est pas là-dessus qu'il fallait critiquer  le Général; il y avait d'autres sujets que les hagiographes passent  pudiquement sous silence:
 
-L'énergie nucléaire et les essais atomiques dans le Sahara et le Pacifique, avec son contingent d'irradiés dont il sera interdit de parler (on dit même qu' un ministre de De Gaulle, malgré la protection de son bunker, y aurait perdu un oeil!). Après De Gaulle, il ne sera plus possible de maîtriser le "lobby" nucléaire qui sera un gouffre financier profitant grassement à ses administrateurs...sans parler de ses dangers! Les apprentis sorciers ne savent toujours pas comment arrêter une centrale nucléaire.
 
-Les relations avec la Chine, au prix de l'écrasement du Tibet (dont l'invasion  avait commencé dès oct. 1950, et non en 1956, comme les falsificateurs de l'histoire l' écrivent)) et du massacre de ses moines ;  depuis ce temps -là (1964,) plus personne n'ose prendre leur défense publiquement et même le Dalaï Lama n'est pas reçu officiellement en France, de peur de déplaire aux Maîtres chinois.
-L'abandon du jour au lendemain des ex-colonisés qui ne voulaient pas d'accord  avec la France, craignant un néo-colonialisme (par ex : la Guinée de Sekou Touré, qui basculera dans une dictature "marxiste" sanglante pendant des années).
 
-Le massacre des harkis, prévisible, pour lesquels rien de sera fait, en Algérie et dont les survivants seront hébergés dans des camps dans le sud de la France (Témoignage d'un ancien chef de harkis : "j'ai vu mes hommes bouillis dans des marmites").
 
           Tout cela n'est pas très glorieux  et demande une explication : en fin de cycle, et  a fortiori à la fin des temps, les derniers responsables, même prédestinés et aidés par l'Autorité traditionnelle, présentent des faiblesses, des lacunes quand ce ne sont pas de graves imperfections .
   De Gaulle n'y a pas fait exception,  et la plus dure sanction pour lui sera mai 68 où il comprit que le pouvoir lui échappait. Et comme ce n'était pas un "dictateur", non seulement il ne fit pas tirer sur la foule comme les dirigeants communistes ou fascistes, mais il se retira dignement en 1969 ( b)
 
( b) Coïncidence : c'est cette année que M. Vâlsan publia sa remarquable étude sur Jeanne d'Arc, juste après le départ du Chef de l'Etat (comme nous l'avons signalé dans notre CR du livre de Jean Robin), que seraient  bien en peine d'écrire tous les adulateurs opportunistes de Jeanne, même quand il s'agit de faire du racolage électoraliste. Si Jeanne revenait, gageons qu'elle chasserait à grands coups d'épée tous  ces faux dévots qui essaient chaque année de la récupérer...

(7)Nous savons que Jacques Chirac, lui, mesurait  fort bien l'importance de Guénon (dont il avait sans doute entendu parler par le directeur du Musée Guimet, qu'il fréquentait quand il était étudiant), au point d'envoyer au Caire chaque année  un faire part, le 7 janvier, à la famille Guénon à l'occasion de la commémoration de la disparition de René Guénon (1951); Ce genre de culture  est inexistante chez les 3 présidents suivants !