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jeudi 1 avril 2021

La demeure du Pôle et le sceau du Soleil - Turba Philosophorum

   
    Turba Philosophorum

Médaille offerte au Roi-Soleil par le duc d'Aumont. 



Article paru dans Le Miroir d'Isis N° 20 (novembre 2013)

A.A.


Notre  étude  sur  la  figure  et la  fonction  d'Hermès-Idrîs  telles  qu'elles  apparaissent  dans  la  tradition islamique a montré que celui-ci assume une fonction polaire - il est le « pôle des esprits humains » - mais aussi solaire, puisque sa demeure est dans le ciel du Soleil. Or il se trouve que cet aspect tantôt polaire, tantôt solaire n'est pas sans relation avec certaines correspondances numériques, et c'est ce que nous souhaiterions nous attacher à développer quelque peu dans ce qui suit.








mercredi 20 mars 2013

René Guénon - Le tombeau d’Hermès


 
 
 
(René Guénon, Le tombeau d’Hermès, publié dans les Etudes Traditionnelles, décembre 1936, repris dans le recueil posthume Formes traditionnelles et cycles cosmiques
 
 
Ce que nous avons dit sur certaines entreprises « pseudo-initiatiques » peut faire comprendre facilement les raisons pour lesquelles nous sommes fort peu tenté d’aborder des questions touchant, plus ou moins directement, à l’ancienne tradition égyptienne. Nous pouvons encore, à ce propos, ajouter ceci : le fait même que les Egyptiens actuels ne se préoccupent aucunement des recherches concernant cette civilisation disparue suffirait à montrer qu’il ne peut y avoir à cela, au point de vue qui nous intéresse, aucun bénéfice effectif ; s’il en était autrement, en effet, il est bien évident qu’ils n’en auraient pas abandonné en quelque sorte le monopole à des étrangers, qui d’ailleurs n’en ont jamais fait rien de plus qu’une affaire de simple érudition. La vérité est que entre l’Egypte antique et l’Egypte actuelle, il n’y a qu’une coïncidence géographique, sans la moindre continuité historique ; aussi la tradition dont il s’agit est-elle encore plus complètement étrangère, dans le pays où elle exista jadis, que le Druidisme ne l’est pour les peuples qui habitent aujourd’hui les anciens pays celtiques ; et le fait qu’il en subsiste des monuments beaucoup plus nombreux ne change rien à cet état de choses. Nous tenons à bien préciser ce point une fois pour toutes, afin de couper court à toutes les illusions que se font trop facilement à cet égard ceux qui n’ont jamais eu l’occasion d’examiner les choses de près ; et, en même temps, cette remarque détruira encore plus complètement les prétentions des « pseudo-initiés » qui, tout en se recommandant de l’antique Egypte, voudraient donner à entendre qu’ils se rattachent à quelque chose qui subsisterait en Egypte même ; nous savons d’ailleurs que ceci n’est point une supposition purement imaginaire, et que certains, comptant sur l’ignorance générale, en quoi ils n’ont malheureusement pas tout à fait tort, poussent effectivement leurs prétentions jusque -là. Cependant, en dépit de tout cela, il arrive que nous nous trouvons presque dans l’obligation de donner, dans la mesure du possible, quelques explications qui nous ont été demandées de divers côtés en ces derniers temps, par suite de l’incroyable multiplication de certaines histoires fantastiques dont nous avons dû parler quelque peu en rendant compte des livres auxquels nous faisions allusions tout à l’heure. Il faut dire, du reste, que ces explications ne se rapporteront pas en réalité à la tradition égyptienne elle-même, mais seulement à ce qui la concerne dans la tradition arabe ; il y a là tout au moins, en effet, quelques indications assez curieuses, et qui sont peut-être susceptibles de contribuer malgré tout à éclairer certains points obscurs, bien que nous n’entendions aucunement exagérer l’importance des conclusions qu’il est possible d’en tirer.

Nous avons fait remarquer précédemment que, en fait, on ne sait pas réellement à quoi a pu servir la Grande Pyramide, et nous pourrions aussi bien dire la même chose des Pyramides en général ; il est vrai que l’opinion la plus communément répandue veut y voir des tombeaux, et, sans doute, cette hypothèse n’a rien d’impossible en elle-même ; mais, d’un autre côté, nous savons aussi que les archéologues modernes, en vertu de certaines idées préconçues, s’efforcent volontiers de découvrir des tombeaux partout, même là où il n’y en eut jamais la moindre trace, et cela n’est pas sans éveiller en nous quelque méfiance. En tout cas, on n’a jamais, jusqu’ici, trouvé aucun tombeau dans la Grande Pyramide ; mais, même s’il y en avait un, l’énigme ne serait pas encore entièrement résolue par-là, car évidemment, cela n’exclurait pas qu’elle ait pu avoir en même temps d’autres usages, plus importants même peut-être, comme peuvent en avoir eu aussi certaines autres Pyramides qui, elles, ont bien servi de tombeaux ; et il est possible encore que, comme certains l’ont pensé, l’utilisation funéraire de ces monuments ait été plus ou moins tardive, et que telle n’ait pas été leur destination primitive, au temps même de leur construction. Si cependant on objecte à cela que certaines données anciennes, et d’un caractère plus ou moins traditionnel, sembleraient qu’il s’agit bien de tombeaux, nous dirons ceci, qui peut sembler étrange au premier abord, mais qui pourtant est précisément ce que tendraient à faire admettre les considérations qui vont suivre : les tombeaux en question ne doivent-ils pas s’entendre en un sens purement symbolique ?

En effet, il est dit par certains que la Grande Pyramide serait le tombeau de Seyidna Idris, autrement dit du Prophète Hénoch, tandis que la seconde Pyramide serait celui d’un autre personnage qui aurait été le Maître de celui-ci, et sur lequel nous aurons à revenir : mais, présentée de cette façon et prise au sens littéral, la chose renfermerait une absurdité manifeste, puisque Hénoch ne mourut pas, mais fut enlevé vivant au Ciel ; comment donc pourrait-il avoir un tombeau ? Il ne faudrait cependant pas trop se hâter de parler ici, à la mode occidentale, de « légendes » dépourvues de fondement, car voici l’explication qui en est donnée ; ce n’est pas le corps d’Idriss qui fut enterré dans la Pyramide, mais sa science ; et, par-là, certains comprennent qu’il s’agit de ses livres ; mais quelle vraisemblance y a-t-il à ce que des livres aient été enfouis ainsi purement et simplement, et quel intérêt cela aurait-il pu présenter à un point de vue quelconque (1) ? Il serait beaucoup plus plausible, assurément, que le contenu de ces livres ait été gravé en caractères hiéroglyphiques à l’intérieur du monument ; mais, malheureusement pour une telle supposition, il ne se trouve précisément dans la Grande Pyramide ni inscriptions ni figurations symboliques d’aucune sorte (2). Alors, il ne reste plus qu’une seule hypothèse acceptable : c’est que la science d’Idris est bien vraiment cachée dans la Pyramide, mais parce qu’elle se trouve incluse dans sa structure même, dans sa disposition extérieure et intérieure et dans ses proportions ; et tout ce qu’il peut y avoir de valable dans les « découvertes » que les modernes ont faites ou cru faire à ce sujet ne représente en somme que quelques fragments infimes de cette antique science traditionnelle.

Cette interprétation s’accorde d’ailleurs assez bien, au fond, avec une autre version arabe de l’origine des Pyramides, qui en attribue la construction au roi antédiluvien Surid : celui-ci, ayant été averti en songe de l’imminence du Déluge, les fit édifier selon le plan des sages, et ordonna aux prêtres d’y déposer les secrets de leurs sciences et les préceptes de leurs sagesses. Or on sait qu’Hénoch ou Idris, antédiluvien lui aussi, s’identifie à Hermès ou Thoth, qui représente la source de laquelle le sacerdoce égyptien tenait ses connaissances, puis, par extension, ce sacerdoce lui-même en tant que continuateur de la même fonction d’enseignement traditionnel ; c’est donc bien toujours la même science sacrée qui, de cette façon encore, aurait été déposée dans les Pyramides (3).

D’un autre côté, ce monument destiné à assurer la conservation des connaissances traditionnelles, en prévision du cataclysme, rappelle encore une autre histoire assez connue, celle des deux colonnes élevées, suivant les uns précisément par Hénoch, suivant les autres par Seth, et sur lesquelles aurait été inscrit l’essentiel de toutes les sciences ; et la mention qui est faite ici de Seth nous ramène au personnage dont la seconde Pyramide est dite avoir été le tombeau. En effet, si celui-ci fut le Maître de Seyidna Idris, il ne peut avoir été autre que Seyidna Shîth, c’est-à-dire Seth, fils d’Adam ; il est vrai que d’anciens auteurs arabes le désignent par les noms, étranges en apparence, d’Aghatîmûn et d’Adhîmûn ; mais ces noms ne sont visiblement que des déformations du grec Agathodaimôn, qui, se rapportant au symbolisme du serpent envisagé sous son aspect bénéfique, s’applique parfaitement à Seth, ainsi que nous l’avons expliqué en une autre occasion (4). La connexion particulière qui est établie ainsi entre Seth et Hénoch est encore très remarquable, d’autant plus que l’un et l’autre sont aussi mis en rapport, d’autre part, avec certaines traditions concernant un retour au Paradis terrestre, c’est-à-dire à l’« état primordial », et par suite avec un symbolisme « polaire » qui n’est pas sans avoir quelque lien avec l’orientation des Pyramides ; mais ceci est encore une autre question, et nous noterons seulement en passant que ce fait, impliquant assez clairement une référence aux « centres spirituels », tendrait à confirmer l’hypothèse qui fait des Pyramides un lieu d’initiation, ce qui, d’ailleurs, n’aurait été en somme que le moyen normal de maintenir « vivantes » les connaissances qui y avaient été incluses, aussi longtemps du moins que subsisterait cette initiation.

Nous ajouterons encore une autre remarque : il est dit qu’Idris ou Hénoch écrivit de nombreux livres inspirés, après qu’Adam lui-même et Seth en avaient déjà écrit d’autres (5) ; ces livres furent les prototypes des livres sacrés des Egyptiens, et les Livres hermétiques plus récents n’en représentent en quelque sorte qu’une « réadaptation », de même aussi que les divers livres d’Hénoch qui sont parvenus sous ce nom jusqu’à nous. D’autre part, les livres d’Adam, de Seth et d’Hénoch devaient naturellement exprimer respectivement des aspects différents de la connaissance traditionnelle, impliquant une relation plus spéciale avec telles ou telles sciences sacrées, ainsi qu’il en est toujours pour l’enseignement transmis par les divers Prophètes. Il pourrait être intéressant, dans ces conditions, de se demander s’il n’y aurait pas quelques chose qui corresponde d’une certaine façon à ces différences, en ce qui concerne Hénoch et Seth, dans la structure des deux Pyramides dont nous avons parlé, et même aussi, peut-être, si la troisième Pyramide ne pourrait pas alors avoir de même quelque rapport avec Adam, puisque, bien que nous n’avons rencontré nulle part aucune allusion explicite à ceci, il serait, somme toute assez logique de supposer qu’elle doive compléter le ternaire des grands Prophètes antédiluviens (6). Bien entendu, nous ne pensons nullement que ces questions soient de celles qui sont susceptibles d’être résolus actuellement ; du reste, tous les « chercheurs » modernes se sont pour ainsi dire « hypnotisés » à peu près exclusivement sur la Grande Pyramide, bien que, après tout, elle ne soit pas tellement plus grande que les deux autres, en réalité, que la différence en soit très frappante ; et, quand ils assurent, pour justifier l’importance exceptionnelle qu’ils lui attribuent, qu’elle est la seule qui soit exactement orientée, peut-être ont-ils le tort de ne pas réfléchir que certaines variations dans l’orientation pourraient bien n’être pas dues simplement à quelque négligence des constructeurs, mais refléter précisément quelque chose qui se rapporte à différentes « époques » traditionnelles ; mais comment pourrait-on s’attendre à ce que des Occidentaux modernes aient, pour les diriger dans leurs recherches, des notions tant soit peu justes et précises sur des choses de ce genre (7) ?

Une autre observation qui a aussi son importance, c’est que le nom même d’Hermès est loin d’être inconnu à la tradition arabe (8) ; et faut-il ne voir qu’une « coïncidence » dans la similitude qu’il présente avec le mot Haram (au pluriel Ahrâm), désignation arabe de la Pyramide, dont il ne diffère que par la simple adjonction d’une lettre finale qui ne fait point partie de sa racine ? Hermès est appelé El-muthalleth bil-hikam, littéralement « triple par la sagesse » (9), ce qui équivaut à l’épithète grecque Trismegistos, tout en étant plus explicite, car la « grandeur » qu’exprime cette dernière n’est, au fond, que la conséquence de la sagesse qui est l’attribut propre d’Hermès (10). Cette « triplicité » a d’ailleurs encore une autre signification, car elle se trouve parfois développée sous la forme de trois Hermès distincts : le premier, appelé « Hermès des Hermès » (Hermes El-Harâmesah), et considéré comme antédiluvien, est celui qui s’identifie proprement à Seyidna Idris ; les deux autres, qui seraient postdiluviens, sont l’« Hermès Babylonien » (El-Bâbelî) et l’« Hermès Egyptien » (El-Miçrî) ; ceci paraît indiquer assez nettement que les traditions chaldéenne et égyptienne auraient été dérivées directement d’une seule et même source principale, laquelle, étant donné le caractère antédiluvien qui lui est reconnu, ne peut guère être autre que la tradition atlantéenne (11).

Quoi qu’on puisse penser de toutes ces considérations, qui sont assurément aussi éloignées des vues des égyptologues que de celles des modernes investigateurs du « secret de la Pyramide », il est permis de dire que celle-ci représente véritablement le « tombeau d’Hermès », car les mystères de sa sagesse et de sa science y ont été cachés de telle façon qu’il est certainement bien difficile de les y découvrir (12).

 

 (1) Il est à peine besoin de faire remarquer que le cas de livres déposés rituellement dans un véritable tombeau est tout différent de celui-là.

(2) Sur tout cela encore, on rencontre parfois des assertions singulières et plus ou moins complètement fantaisistes ; ainsi, dans l’Occult Magazine, organe de la H.B. of L., nous avons relevé une allusion aux « 78 lames du Livre d’Hermès, qui gît enterré dans une des Pyramides » (numéro de Décembre 1885, p. 87) ; il s’agit manifestement ici du Tarot, mais celui-ci n’a jamais représenté un Livre d’Hermès, de Thot ou d’Hénoch que dans certaines conceptions très récentes, et il n’est « égyptien » que de la même façon que le sont les Bohémiens à qui on a aussi donné ce nom. Sur la H.B. of L., cf. notre livre sur Le Théosophisme.

(3) Une autre version encore, non plus arabe, mais copte, rapporte l’origine des Pyramides à Shedîd et Sheddâd, fils d’Ad ; nous ne savons trop quelles conséquences on pourrait en tirer, et il ne semble pas qu’il y ait lieu d’y attacher une très grande importance, car, à part le fait qu’il s’agit ici de « géants »,on ne voit pas quelle intention symbolique elle pourrait bien recouvrir.

(4) Voir notre étude sur Sheth, chapitre XX de Symboles fondamentaux de la Science sacrée. L’Agathodaimôn des Grecs est souvent identifié aussi à Kneph, représenté également par le serpent, et en connexion avec l’« Œuf du Monde », ce qui se réfère toujours au même symbolisme ; quant au Kakodaimôn, aspect maléfique du serpent, il est évidemment identique au Set-Typhon des Egyptiens.

(5) Les nombres indiqués pour ces livres varient, et, dans bien des cas, ils peuvent être uniquement des nombres symboliques ; ce point n’a d’ailleurs qu’une importance assez secondaire.

(6) Il va de soi que ceci ne veut point dire que la construction des Pyramides doive leur être littéralement attribuée, mais seulement qu’elle a pu constituer une « fixation » des sciences traditionnelles qui leur sont rapportées respectivement.

(7) L’idée que la Grande Pyramide diffère essentiellement des deux autres semble être très récente ; on dit que le Khalife El-Mamûn, voulant se rendre compte de ce que contenaient les Pyramides, décida d’en ouvrir une ; il se trouva que ce fut la Grande Pyramide, mais il ne semble pas qu’il ait pensé qu’elle devait avoir un caractère absolument spécial.

 (8) A côté de la forme correcte Hermès, on trouve aussi, chez certains auteurs, la forme Armis, qui en est évidemment une altération.

(9) Hikam est le pluriel de Hikmah, mais les deux formes du singulier et du pluriel sont également employées avec le sens de « sagesse ».

(10) Il peut être curieux de remarquer que le mot muthalleth désigne aussi le triangle, car on pourrait, sans trop forcer les choses, y trouver quelque rapport avec la forme triangulaire des faces de la Pyramide, qui a dû être déterminée aussi « par sagesse » de ceux qui en établirent les plans, sans compter que le triangle se rattache par ailleurs, au symbolisme du « Pôle » et, à ce dernier point de vue, il est bien évident que la Pyramide elle-même n’est en somme qu’une des images de la « Montagne sacrée ».

(11) Il est facile à comprendre que tout ceci se situe, en tout cas, assez loin déjà de la tradition primordiale ; et il serait d’ailleurs bien peu utile de désigner spécialement celle-ci comme la source commune de deux traditions particulières, puisqu’elle est nécessairement celle de toutes les formes traditionnelles sans exception. - On pourrait, d’autre part, conclure de l’ordre d’énumération des trois Hermès, pour autant qu’il semble avoir quelque signification chronologique, à une certaine antériorité de la tradition chaldéenne par rapport à la tradition égyptienne.

(12) Pendant que nous en sommes à ce sujet, nous signalerons encore une autre fantaisie moderne : nous avons constaté que certains attribuent une importance considérable au fait que la Grande Pyramide n’aurait jamais été achevée ; le sommet manque en effet, mais tout ce qu’on peut dire de sûr à cet égard, c’est que les plus anciens auteurs dont on ait le témoignage, et qui sont encore relativement encore récents, l’ont toujours vu tronquée comme elle l’est aujourd’hui. De là, à prétendre que ce sommet manquant correspond à la « pierre angulaire » dont il est parlé en divers passages de la Bible et de l’Evangile, il y a vraiment bien loin, d’autant plus que, d’après des données plus authentiquement traditionnelles, la pierre en question serait, non point un « pyramidion », mais bien une « clef de voûte » (Keystone), et, si elle fut « rejetée par les constructeurs », c’est que ceux-ci, n’étant initiés qu’à la Square Masonry, ignoraient les secrets de l’Arch Masonry. - Chose assez curieuse, le sceau des Etats-Unis figure la Pyramide tronquée, au-dessus de laquelle est un triangle rayonnant qui, tout en étant séparé, et même isolé par le cercle des nuages qui l’entoure, semble en quelque sorte en remplacer le sommet ; mais il y a encore dans ce sceau dont certaines organisations « pseudo-initiatiques » cherchent d’ailleurs à tirer parti d’une façon quelque peu suspecte, d’autres détails qui sont au moins bizarres : ainsi, le nombre des assises de la Pyramide, qui est de treize, est dit correspondre à celui des tribus d’Israël (en comptant séparément les deux demi-tribus des fils de Joseph), et ceci n’est peut-être pas tout à fait sans rapport avec les origines réelles de certaines divagations contemporaines sur la Grande Pyramide, tendant, comme nous l’avons déjà dit précédemment, à faire de celle-ci, pour des fins plutôt obscures, une sorte de monument « judéo-chrétien ».

 

(René Guénon, Le tombeau d’Hermès, publié dans les Etudes Traditionnelles, décembre 1936, repris dans le recueil posthume  Formes traditionnelles et cycles cosmiques).
 
 

mardi 19 mars 2013

René Guénon - Hermès.


 

(René Guénon, Hermès, article publié dans le Voile d’Isis, avril 1932, et repris dans le recueil posthume Formes traditionnelles et cycles cosmiques.)

En parlant de la tradition hermétique précédemment, nous disions que celle-ci se réfère proprement à une connaissance d’ordre non pas métaphysique, mais seulement cosmologique, en l’entendant d’ailleurs dans sa double application « macrocosmique » et « microcosmique ». Cette affirmation, bien que n’étant que l’expression de la stricte vérité, n’a pas eu l’heur de plaire à certains, qui, voyant l’hermétisme à travers leur propre fantaisie, voudraient tout y faire rentrer indistinctement ; il est vrai que ceux-là ne savent guère ce que peut être la métaphysique pure… Quoi qu’il en soit, il doit être bien entendu que nous n’avons nullement voulu déprécier par là les sciences traditionnelles qui sont du ressort de l’hermétisme, ni celles qui y correspondent dans d’autres formes doctrinale d’Orient et d’Occident ; mais il faut savoir mettre chaque chose à sa place, et ces sciences, comme toute connaissance spécialisée, ne sont tout de même que secondaires et dérivées par rapport aux principes, dont elles ne sont que l’application à un ordre inférieur de réalité. Seuls peuvent prétendre le contraire ceux qui voudraient attribuer à l’« Art royal » la prééminence sur l’« Art sacerdotal » (1) ; et peut-être est-ce justement là, au fond, la raison plus ou moins consciente de ces protestations auxquelles nous venons de faire allusion.

Sans nous préoccuper autrement de ce que chacun peut penser ou dire, car il n’est pas dans nos habitudes de tenir compte de ces opinions individuelles qui n’existent pas au regard de la tradition, il ne nous paraît pas inutile d’apporter quelques nouvelles précisions confirmant ce que nous avons déjà dit, et cela en nous référant plus particulièrement à ce qui concerne Hermès, puisque du moins nul ne peut contester que c’est de celui-ci que l’hermétisme tire son nom (2). L’Hermès grec a effectivement des caractères qui répondent très exactement à ce dont il s’agit, et qui sont exprimés notamment par son principal attribut, le caducée, dont nous aurons sans doute à examiner plus complètement le symbolisme en quelque autre occasion ; pour le moment, il nous suffira de dire que ce symbolisme se rapporte essentiellement et directement à ce qu’on peut appeler l’« alchimie humaine » (3), et qui concerne les possibilités de l’état subtil, même si celles-ci ne doivent être prises que comme moyen préparatoire d’une réalisation supérieure, comme le sont, dans la tradition hindoue, les pratiques équivalentes qui relèvent du Hatha-Yoga. On pourra d’ailleurs transférer ceci à l’ordre cosmique, puisque tout ce qui est dans l’homme a sa correspondance dans le monde et inversement (4) ; ici encore, et en raison de cette correspondance même, il s’agira proprement du « monde intermédiaire », où sont mises en œuvre des forces dont la nature duelle est très nettement figurée par les deux serpents du caducée. Nous rappellerons aussi, à cet égard, qu’Hermès est représenté comme le messager des Dieux et comme leur interprète (herméneutès), rôle qui est bien celui d’un intermédiaire entre les mondes céleste et terrestre, et qu’il a en outre la fonction de « psychopompe », qui, dans un ordre inférieur, se rapporte manifestement aussi au domaine des possibilités subtiles (5).

On pourrait peut-être objecter, quand il s’agit d’hermétisme, qu’Hermès tient ici la place du Thoth égyptien auquel il a été identifié, et que Thoth représente proprement la Sagesse, rapportée au sacerdoce en tant que conservateur et transmetteur de la tradition ; cela est vrai, mais, comme cette assimilation n’a pu être faite sans raison, il faut admettre qu’en cela on doit envisager plus spécialement un certain aspect de Thoth, correspondant à une certaine partie de la tradition, celle qui comprend les connaissances se rapportant au « monde intermédiaire » ; et, en fait, tout ce qu’on peut savoir de l’ancienne civilisation égyptienne, d’après les vestiges qu’elle a laissés, montre précisément que les connaissances de cet ordre y étaient beaucoup plus développées et y avaient pris une importance bien plus considérable que partout ailleurs. Du reste, il est un autre rapprochement, nous pourrions même dire une autre équivalence, qui montre bien que cette objection serait sans portée réelle : dans l’Inde, la planète Mercure (ou Hermès) est appelée Budha, nom dont la racine signifie proprement la Sagesse ; ici encore, il suffit de déterminer l’ordre dans lequel cette Sagesse, qui dans son essence est bien le principe inspirateur de toute connaissance, doit trouver son application plus particulière quand elle est rapportée à cette fonction spécialisée (6).

À propos de ce nom de Budha, il est un fait curieux à signaler : c’est qu’il est en réalité identique à celui de l’Odin scandinave, Woden ou Wotan (7) : ce n’est donc point arbitrairement que les Romains assimilèrent celui-ci à leur Mercure, et d’ailleurs, dans les langues germaniques, le mercredi ou jour de Mercure est, actuellement encore, désigné comme le jour d’Odin. Ce qui est peut-être encore plus remarquable, c’est que ce même nom se retrouve exactement dans le Votan des anciennes traditions de l’Amérique centrale, qui a d’ailleurs les attributs d’Hermès, car il est Quetzalcohuatl, l’« oiseau-serpent », et l’union de ces deux animaux symboliques (correspondant respectivement aux deux éléments air et feu) est aussi figurée par les ailes et les serpents du caducée (8). Il faudrait être aveugle pour ne pas voir, dans des faits de ce genre, une marque de l’unité foncière de toutes les doctrines traditionnelles ; malheureusement, un tel aveuglement n’est que trop commun à notre époque où ceux qui savent vraiment lire les symboles ne sont plus qu’une infime minorité, et où, par contre, il ne se rencontre que trop de « profanes » qui se croient qualifiés pour interpréter la « science sacrée », qu’ils accommodent au gré de leur imagination plus ou moins désordonnée.

Un autre point qui n’est pas moins intéressant est celui-ci : dans la tradition islamique, Seyidna Idris est identifié à la fois à Hermès et à Hénoch ; cette double assimilation semble indiquer une continuité de tradition qui remonterait au-delà du sacerdoce égyptien, celui-ci ayant dû seulement recueillir l’héritage de ce que représente Hénoch, qui se rapporte manifestement à une époque antérieure (9). En même temps, les sciences attribuées à Seyidna Idris et placées sous son influence spéciale ne sont pas les sciences purement spirituelles, qui sont rapportées à Seyidna Aïssa, c’est-à-dire au Christ ; ce sont les sciences que l’on peut qualifier d’« intermédiaires », parmi lesquelles figurent au premier rang l’alchimie et l’astrologie ; et ce sont bien là, en effet, les sciences qui peuvent être dites proprement « hermétiques ». Mais ici se place une autre considération qui pourrait, à première vue tout au moins, être regardée comme une assez étrange interversion par rapport aux correspondances habituelles : parmi les principaux prophètes, il en est un, comme nous le verrons dans une prochaine étude, qui préside à chacun des sept cieux planétaires, dont il est le « Pôle » (El-Qutb) ; or ce n’est pas Seyidna Idris qui préside ainsi au ciel de Mercure, mais Seyidna Aïssa, et c’est au ciel du Soleil que préside Seyidna Idris ; et, naturellement, ceci entraîne la même transposition dans les correspondances astrologiques des sciences qui leur sont respectivement attribuées. Ceci soulève une question fort complexe, que nous ne saurions avoir la prétention de traiter entièrement ici ; il se peut que nous ayons l’occasion d’y revenir, mais, pour le moment, nous nous bornerons à quelques remarques qui permettront peut-être d’en entrevoir la solution, et qui, en tout cas, montreront au moins qu’il y a là tout autre chose qu’une simple confusion, et que ce qui risquerait de passer pour tel aux yeux d’un observateur superficiel et « extérieur » repose au contraire sur des raisons très profondes en réalité.

D’abord, il ne s’agit pas là d’un cas isolé dans l’ensemble des doctrines traditionnelles, car on peut trouver quelque chose de tout à fait similaire dans l’angélologie hébraïque : en général, Mikaël est l’ange du Soleil et Raphaël l’ange de Mercure, mais il arrive parfois que ces rôles sont inversés. D’autre part, si Mikaël, en tant qu’il représente le Metatron solaire, est assimilé ésotériquement au Christ (10), Raphaël est, d’après la signification de son nom, le « guérisseur divin », et le Christ apparaît aussi comme « guérisseur spirituel » et comme « réparateur » ; d’ailleurs, on pourrait trouver encore d’autres rapports entre le Christ et le principe représenté par Mercure parmi les sphères planétaires (11). Il est vrai que, chez les Grecs, la médecine était attribuée à Apollon, c’est-à-dire au principe solaire, et à son fils Asklêpios (dont les Latins firent Esculape) ; mais, dans les « livres hermétiques », Asklêpios devient le fils d’Hermès, et il est aussi à remarquer que le bâton qui est son attribut a d’étroits rapports symboliques avec le caducée (12). Cet exemple de la médecine permet d’ailleurs de comprendre comment une même science peut avoir des aspects qui se rapportent en réalité à des ordres différents, d’où des correspondances également différentes, même si les effets extérieurs qui en sont obtenus sont apparemment semblables, car il y a la médecine purement spirituelle ou « théurgique », et il y a aussi la médecine hermétique ou « spagyrique » ; ceci est en relation directe avec la question que nous envisageons présentement ; et peut-être expliquerons-nous quelque jour pourquoi la médecine, au point de vue traditionnel, était considérée essentiellement comme une science sacerdotale.

D’un autre côté, il y a presque toujours une étroite connexion établie entre Hénoch (Seyidna Idris) et Elie (Seyidna Dhûl-Kifl), enlevés l’un et l’autre au ciel sans être passés par la mort corporelle (13), et la tradition islamique les situe tous deux dans la sphère solaire. De même, suivant la tradition rosicrucienne, Elias Artista, qui préside au « Grand Œuvre » hermétique (14), réside dans la « Citadelle solaire », qui est d’ailleurs proprement le séjour des « Immortels » (au sens des Chirajîvîs de la tradition hindoue, c’est-à-dire des êtres « doués de longévité », ou dont la vie se perpétue à travers toute la durée du cycle) (15), et qui représente un des aspects du « Centre du Monde ». Tout cela est assurément très digne de réflexion, et, si l’on y joint encore les traditions qui, un peu partout, assimilent symboliquement le Soleil lui-même au fruit de l’« Arbre de Vie » (16), on comprendra peut-être le rapport spécial qu’a l’influence solaire avec l’hermétisme, en tant que celui-ci, comme les « petits mystères » de l’antiquité, a pour but essentiel la restauration de l’« état primordial » humain : n’est-ce pas la « Citadelle solaire » des Rose-Croix qui doit « descendre du ciel en terre », à la fin du cycle, sous la forme de la « Jérusalem céleste », réalisant la « quadrature du cercle » selon la mesure parfaite du « roseau d’or » ?

(1) Nous avons envisagé cette question dans Autorité spirituelle et pouvoir temporel. - À propos de l’expression d’« Art royal » qui s’est conservée dans la Maçonnerie, on pourra noter ici la curieuse ressemblance qui existe entre les noms d’Hermès et d’Hiram ; cela ne veut pas dire, évidemment, que ces deux noms aient une origine linguistique commune, mais leur contribution n’en est pas moins identique, et l’ensemble H R M dont ils sont essentiellement formés pourrait encore donner lieu à d’autres rapprochements.

(2) Nous devons maintenir que l’hermétisme est bien de provenance helléno-égyptienne, et qu’on ne peut sans abus étendre cette domination à ce qui, sous des formes diverses, y correspond dans d’autres traditions, pas plus qu’on ne peut, par exemple, appeler « Kabbale » une doctrine qui ne serait pas spécifiquement hébraïque. Sans doute, si nous écrivions en hébreu, nous dirions qabbalah pour désigner la tradition en général, de même que, écrivant en arabe, nous appellerions taçawwuf l’initiation sous quelque forme que ce soit : mais, transportés dans une autre langue, les mots hébreux, arabes, etc., doivent être réservés aux formes traditionnelles dont leurs langues d’origines sont l’expression respective, quelles que soient par ailleurs les comparaisons ou même les assimilations auxquelles elles peuvent donner lieu légitimement ; et il ne faut en aucun cas confondre un certain ordre de connaissance, envisagé en lui-même, avec telle ou telle forme spéciale dont il a été revêtu dans des circonstances historiques déterminées.

(3) Voir L’homme et son devenir selon le Vêdânta, chap. XXI.

(4) Ainsi qu’il est dit dans les Rasâïl Ikhwân es-Çafâ, « le monde est un grand homme, et l’homme est un petit monde » (el-âlam insân kabir, wa el insân âlam çeghir). - C’est d’ailleurs en vertu de cette correspondance qu’une certaine réalisation dans l’ordre « microcosmique » pourra entraîner, à titre de conséquence accidentelle pour l’être qui y est parvenu, une réalisation extérieure se rapportant à l’ordre « macrocosmique », sans que cette dernière ait été recherchée spécialement et pour elle-même, ainsi que nous l’avons indiqué à propos de certains cas de transmutations métalliques dans notre précédent chapitre sur La Tradition hermétique.

(5) Ces deux fonctions de messager des Dieux et de « psychopompe » pourraient, astrologiquement, être rapportées respectivement à un aspect diurne et à un aspect nocturne ; on peut aussi, d’autre part, y retrouver la correspondance des deux courants descendant et ascendant que symbolisent les deux serpents du caducée.

(6) Il ne faut pas confondre ce nom de Budha avec celui de Buddha, désignation de Shâkya-Muni, bien que l’un et l’autre aient évidemment la même signification radicale, et que d’ailleurs certains attributs du Budha planétaire aient été transférés ultérieurement au Buddha historique, celui-ci étant représenté comme ayant été « illuminé » par l’irradiation de cet astre, dont il aurait ainsi en quelque sorte absorbé l’essence en lui-même. - Notons à ce propos que la mère de Buddha est appelée Mâyâ-Dêvî et que, chez les Grecs et les Latins, Maïa était aussi la mère d’Hermès ou de Mercure.

(7) On sait que le changement du b en v ou w est un phénomène linguistique extrêmement fréquent.

(8) Voir à ce sujet notre étude sur La Langue des oiseaux, où nous avons fait remarquer que le serpent est opposé ou associé à l’oiseau suivant qu’il est envisagé sous son aspect maléfique ou bénéfique. Nous ajouterons qu’une figure comme celle de l’aigle tenant un serpent dans ses serres (qui se rencontre précisément au Mexique) n’évoque pas exclusivement l’idée de l’antagonisme que représente, dans la tradition hindoue, le combat du Garuda contre le Nâga ; il arrive, notamment dans le symbolisme héraldique, que le serpent est ici remplacé par l’épée (substitution particulièrement frappante quand celle-ci a la forme de l’épée flamboyante, qui est à rapprocher par ailleurs des foudres que tient l’aigle de Jupiter), et l’épée, dans sa signification la plus élevée, figure la Sagesse et la puissance du Verbe (voir par exemple Apocalypse, I, 16). - Il est à noter qu’un des principaux symboles du Thoth égyptien était l’ibis, destructeur de reptiles, et devenu à ce titre un symbole du Christ ; mais, dans le caducée d’Hermès, nous avons le serpent sous ses deux aspects contraires, comme dans la figure de l’« amphisbène » du moyen âge (voir Le Roi du Monde, chap. III, in fine, en note).

(9) Ne faudrait-il pas conclure de cette même assimilation que le Livre d’Hénoch, ou du moins ce qui est connu sous ce titre, doit être considéré comme faisant partie intégrante de l’ensemble des « livres hermétiques » ? - D’autre part, certains disent en outre que le prophète Idris est le même que Buddha ; ce qui a été indiqué plus haut montre suffisamment en quel sens doit être entendue cette assertion, qui se rapporte en réalité à Budha, l’équivalent hindou d’Hermès. Il ne saurait en effet s’agir ici du Buddha historique, dont la mort est un évènement connu, tandis qu’Idris est dit expressément avoir été transporté vivant au ciel, ce qui répond bien à l’Hénoch biblique.

(10) Voir Le Roi du Monde, chap. III.

(11) Peut-être faut-il voir là l’origine de la méprise que commettent certains en considérant Buddha comme le neuvième avatâra de Vishnu ; il s’agirait en réalité d’une manifestation en rapport avec le principe désigné comme le Budha planétaire ; en ce cas, le Christ solaire serait proprement le Christ glorieux, c’est-à-dire le dixième avatâra, celui qui doit venir à la fin du cycle. - Nous rappellerons, à titre de curiosité, que le mois de mai tire son nom de Maïa, mère de Mercure (qui est dite être l’une des Pléiades), à laquelle il était anciennement consacré ; or, dans le Christianisme, il est devenu le « mois de Marie », par une assimilation, qui n’est sans doute pas uniquement phonétique, entre Maria et Maïa.

(12) Autour du bâton d’Esculape est enroulé un seul serpent, celui qui représente la force bénéfique, car la force maléfique doit disparaître par là même qu’il s’agit du génie de la médecine. - Notons également le rapport de ce même bâton d’Esculape, en tant que signe de guérison, avec le symbole biblique du « serpent d’airain » (voir à ce sujet notre étude sur Sheth).

(13) Il est dit qu’ils doivent se manifester de nouveau sur la terre à la fin du cycle : ce sont les deux « témoins » dont il est parlé au chapitre XI de l’Apocalypse.

(14) Il incarne en quelque sorte la nature du « feu philosophique », et l’on sait que, d’après le récit biblique, le prophète Elie fut enlevé au ciel sur un « char de feu » ; ceci se rapporte au véhicule igné (taijasa dans la doctrine hindoue) qui, dans l’être humain, correspond à l’état subtil (voir L’Homme et son devenir selon le Vêdânta, chap. XIV).

(15) Voir L’homme et son devenir selon le Vêdânta, chap. I. - Rappelons aussi, au point de vue alchimique, la correspondance du Soleil avec l’or, désigné par la tradition hindoue comme la « lumière minérale » ; « l’or potable » des hermétistes est d’ailleurs la même chose que le « breuvage d’immortalité », qui est aussi appelé « liqueur d’or » dans le Taoïsme.

(16) Voir Le Symbolisme de la Croix, chap. IX.

(René Guénon, Hermès, article publié dans le Voile d’Isis, avril 1932, et repris dans le recueil posthume Formes traditionnelles et cycles cosmiques.)

Voir aussi : "Quelques remarques à propos d'Hermès-Idrîs - Turba Philosophorum"

lundi 18 mars 2013

Quelques remarques à propos d'Hermès-Idrîs - Turba Philosophorum




                                                                Turba Philosophorum




« Le lieu le plus élevé est celui autour duquel tourne la meule du monde des Corps célestes : c'est le Ciel du Soleil, siège (symbolique) de la station spirituelle d'Idrîs – sur lui la Paix ! Sept sphères sont au-dessous et sept sont au-dessus de la sienne, qui est donc la quinzième. Au-dessus se trouvent : le Ciel de Mars, le Ciel de Jupiter, le Ciel de Saturne, le Ciel des Mansions lunaires, le Ciel non-étoilé qui est celui des « Tours » (zodiacales), le Ciel de l'Escabeau et le Ciel du Trône ; au-dessous se trouvent : le Ciel de Vénus, le Ciel de Mercure, le Ciel de la Lune, la sphère de l'Ether, la sphère de l'Air, la sphère de l'Eau et la sphère de la Terre. En tant que Pôle des Cieux, (Idrîs) est exalté par le lieu (où il réside). » (Kitâb fuçûç al-hikam)

 



Article paru dans Le Miroir d'Isis n°18 (2011)





A. A.

« Le monde de la Nature : des formes dans un miroir unique... Non ! Plutôt une forme unique dans des miroirs multiples. »

(Ibn Arabî, Kitâb fuçûç al-hikam, ch. sur Idrîs).

 

 À l'occasion d'une précédente étude1, nous avons été amené à citer l'article de René Guénon intitulé « Hermès » paru dans le Voile d'Isis en 1932 (2). Ce texte participe du véritable « miracle » qui s'opère à ce moment dans la ligne éditoriale de la revue grâce à l'action à distance de celui qui vient alors de rejoindre cette contrée éminemment « hermétique » de Miçr, au pied de la Grande Pyramide dont il est parfois dit, comme lui-même l'a rappelé, qu'elle est le « tombeau d'Hermès »3. Nous n'ignorons pas, naturellement, que Guénon a insisté en permanence dans son oeuvre sur la prééminence de la métaphysique pure, et que par conséquent pour lui l'essentiel n'est pas du domaine de l'hermétisme proprement dit. Dans le cas qui nous occupe, cela signifie entre autres que son rattachement à une tariqa shadilite et à une baraka akbarienne (et cela depuis 1912 au moins) est incomparablement plus important que des coïncidences de lieu dans lesquelles il n'est sans doute pas interdit de voir un signe, mais dont il ne faut pas non plus exagérer la signification, ce qui reviendrait à se placer à un point de vue plus proche du Voile d'Isis ancien style (occultiste) que des Études traditionnelles  encore à venir à l'époque que nous évoquons.



Pour lire la suite, cliquer ici













 
1 « Dante et l'énigme du 515 », Le Miroir d'Isis n° 17. A lire  ici
2 « Hermès », Le Voile d'Isis, 1932, repris dans Formes traditionnelles et cycles cosmiques, p.128-137 (dans la suite, simplement H suivi du numéro de la page dans cette édition).
3 « Le Tombeau d'Hermès », Le Voile d'Isis, 1948, repris dans Formes traditionnelles et cycles cosmiques, p.138-148 (dans la suite, simplement TH).

Voir aussi l'article : " René Guénon - Hermès."