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samedi 15 février 2014

Ka’ba, circumambulations et pierre noire





 Contemple la Maison :

 pour les cœurs sanctifiés

 sa Lumière brille à découvert

 Ils la regardent par Dieu, sans voile,

 son auguste et sublime secret leur apparaît.

 (Futûhât, I, 47)


Rappel descriptif

Située au centre de la grande Mosquée sacrée de la Mère des Cités -la Mecque-, le Temple de la Ka’ba-Maison sacrée de Dieu [Bit Allah el Haram]-, est une construction de forme cubique recouverte d’un voile de brocart noir (kiswa) brodé de versets coraniques en lettres d’or partiellement échancré sur une grande porte en cuivre.

Tout à la fois centre terrestre et spirituel, elle est le point d’orientation vers lequel se tournent les musulmans pour prier (Qibla) et le but de leur pérégrination conformément aux piliers de l’Islam.

Dans son angle oriental est enchâssé une pierre noire de forme elliptique cernée d’argent ; orientée en direction de la vaste plaine d’Arafat (*), elle marque l’endroit où doit commencer les circumambulations (tawaf) rituelles, étape incontournable du grand pèlerinage (Hajj).

(*) Le Mont-Arafat dite Jabal ar-Rahmah (montagne de la Miséricorde) est une colline à l’est de la Mecque, là où Adam et Eve séparés ont été réunis et pardonnés. Centre informel, c’est là où l’Envoyé (saws) a prononcé son dernier sermon. (Le pèlerin est tenu de s’y tenir le neuvième jour de Dhou- l-Hijja sans quoi son pèlerinage est invalidé).

 Historique sacré

Le premier temple de la Mecque appelée alors Bakka a été édifiée par Adam. (Coran III, 96) (1) Détruite par le déluge où seul survécut Noé, elle a été reconstruite et revivifiée par Abraham et son fils Ismaël(2) puis orientée vers Jérusalem  [Maqâm d’Ibrahim « station d’Abraham »] (3) ; enfin, par Muhammad (sala Allah ‘alih wa salam),  cette revivification sera pleinement actualisée et réorientée restituant la sacralité et l’universalité du lieu tout en bouclant le cycle des révélations prophétiques. (4)

« Quand la Ka’ba était un sanctuaire de forme circulaire, au début du cycle adamique, on ne pouvait lui assigner une quelconque orientation. Abraham, en reconstruisant le Temple avec Ismaël son fils, lui donna, une forme et une orientation correspondant exactement à la direction de Jérusalem. De plus, on remarquera que la diagonale tracée à partir de l’angle syrien du Temple est orientée vers l’immense plaine de ‘Arafat, contrée qui jouxte le territoire sacré environnant la Mekke.

Jérusalem est considérée comme ville sainte par les trois religions dites monothéistes et l’endroit où elle fut primitivement édifiée se situe au lieu sacré qui était dénommé Salem, la cité de la Paix (Genèse 14/18). C’est en cet endroit béni qu’Abraham-dont le nom hébreu premier était encore « Abram, père très haut », et bien avant la naissance de son fils Ismaël, rencontra providentiellement le Roi de Justice, roi de Salem, Melchisédek (Malki-Sèdèq en hébreu), Prêtre du Dieu suprême (El-Elion en hébreu).

[…]

Plus tard, par inspiration divine, le nom d’Abram deviendra Abraham, « père d’une multitude », et c’est en tant que représentant du « Roi du Monde », selon l’expression de René Guénon (Le Roi du Monde, chapitre VI) qu’il reconstruisit avec son fils Ismaël le sanctuaire de la Ka’ba, détruit à l’époque du Déluge, et le revivifia, restituant ainsi à la Mekke sa fonction sacrée et centrale de Dépôt de la Tradition primordiale et universelle inaugurée par le prophète Adam.

Cette Présence divine, centrale et sainte que la Métropole de l’Islam universel, dernière révélation, conserve depuis Adam, Noé, Abraham et Ismaël, fut réactualisée en sa plénitude, au moment de « la Prière des deux Qibla », l’an deux de l’Hégire, avec le Sceau des Prophètes, Muhammad, par ordre divin, dans le nouveau cycle de l’Islam historique.

 La Mekke, avec la Ka’ba en son cœur, est ainsi redevenue ce qu’elle était primordialement : le Centre effectif du véritable Islam œcuménique et de la Présence plénière de Dieu sur terre ».(5)

La Ka’ba et La circunambulation ou le Trône et la procession des anges

Faire retour au Centre, à l’Unique (tawhid), telle est la signification profonde de l’orientation de la prière et du pèlerinage à la ka’ba, projection terrestre du Trône divin.

 L’Orant s’oriente, s’achemine, puis, de même que les anges circumambulent autour du Trône, il accomplit sept circumambulations (Tawaf)( Coran XVII, 29) autour de la Ka’ba.

« Sache que pendant le Tawaf, tu ressembles aux anges rapprochés processionnant et tournant autour du Trône. Ne pense pas que le but soit que ton corps tourne autour du Temple mais bien plutôt que ton cœur processionne en commémorant le seigneur au temple, afin que ce rappel ne provienne initialement que de Lui et ne s’achève que par Lui, comme les Tournées commencent du Temple pour finir au Temple.

Sache que le tawaf sublime est celui du cœur autour de la Présence seigneuriale et que le Temple est un symbole apparent situé dans le monde du royaume (mulk) de la présence qui ne peut être contemplée par la vue sensible, cette présence étant celle du Monde de la royauté céleste (malakût). De façon analogue, le corps est le symbole extérieur dans le monde apparent (‘âlam al-shahâda) du cœur qui ne peut être attesté par la vue sensible, car le cœur se trouve dans le monde de la réalité occultée (‘âlam al-ghayb).

Sache que le monde du royaume et le monde sensible conduisent au monde de la réalité occultée et au monde de la Royauté céleste celui à qui Dieu a ouvert la porte. Cette analogie est suggérée par le fait que le temple fréquenté (bayt ma’mûr) dans les cieux correspond à la Ka’ba.

Le Tawâf que les Anges font autour du Temple fréquenté ressemble à celui que les êtres humains font autour de ce temple (terrestre). Lorsque le degré (rutba) de la majorité des créatures se trouva amoindri au point de ne plus leur permettre de faire de telles tournées, on leur ordonna d’imiter les anges dans la mesure du possible et on leur promit que ceux qui ressembleraient à certains seraient d’entre eux. .. » (6)

La ka’ba et la pierre noire ou le cœur et son trésor caché (7)

Quand Adam repentant retrouvât grâce auprès de Dieu et reçut l’ordre de partir (de l’Inde, dit-on) pour l’Arabie, l’Ange Gabriel lui offrit une perle blanche étincelante… Splendeur de l’Esprit qui se matérialisera enpierre noire pour se dissimuler aux regards sensibles ainsi que l’a suggéré le Prophète (sala Allah ‘alih wa salam) :

« La pierre noire et le Maqam sont deux perles du Paradis. Allah a voilé leur lumière et s’Il n’avait pas voilé leur lumière, elles auraient éclairé ce qu’il y a entre l’Orient et l’Occident ».

Il incombe à chacun, par la Grâce de Dieu, de chercher le moyen d’en retrouver l’éclat.

 Selon cette autre parole du Prophète (saws) :

« la Pierre noire est la droite (yamîn) de Dieu sur terre, avec laquelle Il appose Son Sceau sur la créature comme l’homme serre la main de son frère » (8)

 Et celle d’Ali (que Dieu l’agrée) :

« Lorsque le Très-Haut contracta alliance avec la descendance de l’homme, il enregistra le contrat dans un livre qu’il scella avec cette pierre. .. »

C’est dans le «souvenir de Dieu » qui est fidélité au pacte prééternel : « Ne suis-Je pas votre Seigneur ? » (Coran VII, 172), liant Dieu à ses créatures(Mithaq) qu’il est possible de découvrir ce trésor caché, la Perle angélique enfouie au tréfonds de son cœur afin de ré-endosser la nature édénique dans la Proximité divine.

Pierre-témoin, de notre fidélité et de notre engagement, l’embrasser et la toucher à l’instar de l’Envoyé de Dieu (saws), c’est comme se dépouiller et revêtir son être réel.

Omar (que Dieu l’agrée) dit: « Je sais que tu n’es qu’une pierre et que tu ne peux m’apporter ni bien ni mal. Si je n’avais pas vu le Prophète (saws) te toucher et t’embrasser, je ne t’aurais jamais touchée ni embrassée.» (Sahih Boukhari) Puis il sanglota.

La destruction de la Ka’ba annoncera la fin des temps-ci. Il est en effet dit que lorsque Dieu voudra détruire notre monde il débutera par la Ka’ba.

Wallâhu A’lam






(1) Selon Abd Allâh Ibn’Amru : « Alors que Dieu fit descendre Adam hors du Jardin paradisiaque, Il lui dit : « Avec toi, Je vais faire descendre un temple (bayt) autour duquel on circulera comme on le fait autour de Mon Trône… »- « La première maison qui fut suscitée pour les hommes pour qu’y soit célébré le culte de Dieu est celle qui se trouve à Bakka » (Ad-Durr ul-manthûr, as-Suyûtî, 2/93).

 (2) C’est lorsque Ismaël (alayhis salâm) atteindra sa treizième année, qu’Abraham (alayhis salâm) reçut l’ordre de bâtir un édifice dédié au culte de Dieu à l’emplacement originel de la Ka’ba, lieu où ne subsistait plus qu’une petite colline et que lui avait indiquée l’Ange Gabriel (Djibraîl). Tous deux entreprirent ainsi les travaux de remise à jour des fondations restantes . « Et quand Abraham et Ismâil élevaient les assises de la Maison: “O notre Seigneur, accepte ceci de notre part! Car c’est Toi l’Audient, l’Omniscient ». (Coran II, 127) et (Coran II, 125)

(3) Grosse pierre sur laquelle se trouve l’empreinte des pieds d’Abraham, à l’endroit même où il prenait support lorsqu’il construisit avec son fils Ismaël (alayhas salâm), la Kaaba [Coran IV, 97]. C’est devant ce maqâm que L’Imam préside la prière rituelle.

(4) (Coran V, 3)

(5) pp.106-107 Les Secrets du pèlerinage en Islam, de Al-Ghazâli chez Albouraq. Traduit par Maurice Gloton.

 (6) p. 268 Les secrets du Pèlerinage en Islam Ghazali al Bouraq

 (7) “Ni la terre ni le ciel ne peuvent Me contenir, le cœur de Mon serviteur croyant Me contient” a dit L’Envoyé (saws)-Hadith Qûtsi-.

 (8) Hadith du Prophète (saws) rapporté par Ibn’Abbâs, ‘Abdallâh et Ibn Omar




samedi 19 octobre 2013

À propos des pèlerinages - René Guénon

                                                

 
 
Études sur la Franc-Maçonnerie et le Compagnonnage, tome 1, René Guénon, éd. Éditions Traditionnelles, 1971

        

                              À PROPOS DES PÈLERINAGES*

 

[*] Publié dans « Voile d’Isis », juin 1930.

 

La récente reproduction, dans le Voile d’Isis, du remarquable article de M. Grillot de Givry sur les lieux de pèlerinages nous amène à revenir sur cette question à laquelle nous avons déjà fait ici quelques allusions, ainsi que M. Clavelle le rappelait dans sa présentation de cet article.

Notons tout d’abord que le mot latin peregrinus, d’où vient « pèlerin », signifie à la fois « voyageur » et « étranger ». Cette simple remarque donne lieu déjà à des rapprochements assez curieux : en effet, d’une part, parmi les Compagnons, il en est qui se qualifient de « passants » et d’autres d’« étrangers », ce qui correspond précisément aux deux sens de peregrinus (lesquels se trouvent d’ailleurs aussi dans l’hébreu gershôn) ; d’autre part, dans la Maçonnerie, même moderne et « spéculative », les épreuves symboliques de l’initiation sont appelées « voyages ». D’ailleurs, dans beaucoup de traditions diverses, les différents stades initiatiques sont souvent décrits comme les étapes d’un voyage ; parfois, c’est d’un voyage ordinaire qu’il s’agit, parfois aussi d’une navigation, ainsi que nous l’avons signalé en d’autres occasions. Ce symbolisme du voyage est peut-être d’un usage plus répandu encore que celui de la guerre, dont nous parlions dans notre dernier article ; l’un et l’autre, du reste, ne sont pas sans présenter entre eux un certain rapport, qui s’est même traduit parfois extérieurement dans les faits historiques ; nous pensons notamment ici au lien étroit qui exista, au moyen âge, entre les pèlerinages en Terre Sainte et les Croisades. Ajoutons encore que, même dans le langage religieux le plus ordinaire, la vie terrestre, considérée comme une période d’épreuves, est souvent assimilée à un voyage, et même qualifiée plus expressément de pèlerinage, le monde céleste, but de ce pèlerinage, étant aussi identifié symboliquement à la « Terre Sainte » ou « Terre des Vivants »1.

L’état d’« errance », si l’on peut dire, ou de migration, est donc, d’une façon générale, un état de « probation » ; et, ici encore, nous pouvons remarquer que tel est bien en effet son caractère dans des organisations comme le Compagnonnage. En outre, ce qui est vrai à cet égard pour des individus peut l’être aussi, dans certains cas tout au moins pour des peuples pris collectivement : un exemple très net est celui des Hébreux errant pendant quarante ans dans le désert avant d’atteindre la Terre promise .

[1] Pour ce qui concerne le symbolisme de la « Terre Sainte » nous renvoyons à notre étude sur le Roi du Monde, et aussi à notre article paru dans le numéro spécial du Voile d’Isis consacré aux Templiers.

[Note de l’Éditeur : Voir aussi le chapitre III de Aperçus sur l’Ésotérisme chrétien et le chapitre XI de Symboles fondamentaux de la Science sacrée.]



Il faut d’ailleurs faire ici une distinction, car cet état, essentiellement transitoire, ne doit pas être confondu avec l’état nomade qui est normal à certains peuples : même arrivés à la Terre promise, et jusqu’au temps de David et de Salomon, les Hébreux furent un peuple nomade, mais, évidemment, ce nomadisme n’avait pas le même caractère que leur pérégrination dans le désert1. Il y a même lieu d’envisager un troisième cas d’« errance », que l’on peut désigner plus proprement par le mot de « tribulation » : c’est celui des Juifs après leur dispersion, et aussi selon toute vraisemblance, celui des Bohémiens ; mais ceci nous entraînerait trop loin, et nous dirons seulement que ce cas aussi est applicable également à des collectivités et à des individus. On voit par là combien ces choses sont complexes et combien il peut y avoir de distinctions à faire parmi des hommes se présentant extérieurement sous les mêmes apparences, confondus avec les pèlerins au sens ordinaire de ce mot, d’autant plus qu’il faut encore ajouter ceci : il arrive parfois que des initiés, parvenus au but, des « adeptes » même, reprennent, pour des raisons spéciales, cette même apparence de « voyageurs ».

Mais revenons aux pèlerins : on sait que leurs signes distinctifs étaient la coquille (dite de saint Jacques) et le bâton ; ce dernier, qui a aussi un étroit rapport avec la canne compagnonnique, est naturellement un attribut du voyageur, mais il a bien d’autres significations, et peut-être consacrerons-nous quelque jour à cette question une étude spéciale.

 

[1] La distinction des peuples nomades (pasteurs) et sédentaires (agriculteurs), qui remonte aux origines mêmes de l’humanité terrestre, a une grande importance pour la compréhension des caractères spéciaux des différentes formes traditionnelles.

 


 Quant à la coquille, en certaines régions, elle était appelée « creusille » et ce mot doit être rapproché de celui de « creuset » ce qui nous ramène à l’idée d’épreuves, envisagée plus particulièrement selon un symbolisme alchimique, et entendue dans le sens de la « purification », la Katharsis des Pythagoriciens, qui était précisément la phase préparatoire de l’initiation1.

La coquille étant regardée plus spécialement comme l’attribut de saint Jacques, nous sommes amenés à faire à ce propos une remarque concernant le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. Les routes que suivaient autrefois les pèlerins sont souvent appelées, aujourd’hui encore, « chemins de saint Jacques » ; mais cette expression a en même temps une tout autre application : le « chemin de saint Jacques », en effet dans le langage des paysans, c’est aussi la Voie Lactée ; et ceci semblera peut-être moins inattendu si l’on observe que Compostelle, étymologiquement, n’est pas autre chose que le « champ étoilé ». Nous rencontrons ici une autre idée, celle des « voyages célestes » d’ailleurs en corrélation avec les voyages terrestres ; c’est encore là un point sur lequel il ne nous est pas possible d’insister présentement, et nous indiquerons seulement que l’on peut pressentir par là une certaine correspondance entre la situation géographique des lieux de pèlerinages et l’ordonnance même de la sphère céleste ; ici, la « géographie sacrée » à laquelle nous avons fait allusion s’intégrera donc dans une véritable « cosmographie sacrée ».

 

Pièce de monnaie  découverte en Calabre (Italie) lorsque celle-ci  faisait partie de la Grande-Grèce (-480 avant JC)


[1] On pourra se reporter ici à ce que nous avons dit dans Le Roi du Monde sur la désignation des initiés, dans des traditions diverses, par des termes se rapportant à l’idée de « pureté ».

 
Encore à propos des routes de pèlerinages, il convient de rappeler que M. Joseph Bédier a eu le mérite de reconnaître le lien existant entre les sanctuaires qui en marquaient les étapes et la formation des chansons de geste. Ce fait pourrait être généralisé, nous semble-t-il, et l’on pourrait dire la même chose en ce qui concerne la propagation d’une multitude de légendes dont la réelle portée initiatique est malheureusement presque toujours méconnue des modernes. En raison de la pluralité de leurs sens, les récits de ce genre pouvaient s’adresser à la fois à la foule des pèlerins ordinaires et… aux autres ; chacun les comprenait suivant la mesure de sa propre capacité intellectuelle, et quelques-uns seulement en pénétraient la signification profonde, ainsi qu’il arrive pour tout enseignement initiatique. Il y a lieu de noter aussi que, si divers que fussent les gens qui parcouraient les routes, y compris les colporteurs et même les mendiants, il s’établissait entre eux, pour des raisons sans doute assez difficiles à définir, une certaine solidarité se traduisant par l’adoption en commun d’un langage conventionnel spécial, « argot de la Coquille » ou « langage des pérégrins ». Chose intéressante, M. Léon Daudet a fait remarquer dans un de ses récents livres que beaucoup de mots et de locutions appartenant à ce langage se rencontrent chez Villon et chez Rabelais1 ; et, au sujet de ce dernier, il indique aussi, ce qui est assez digne de remarque au même point de vue, que, pendant plusieurs années, « il pérégrina à travers le Poitou, province à ce moment-là célèbre par les mystères et les farces qu’on y interprétait et aussi par les légendes qui y couraient ; dans Pantagruel, on retrouve

 

[1] Les Horreurs de la Guerre, pp. 145, 147 et 167.

 

trace de ces légendes, de ces farces, et un certain nombre de termes appartenant en propre aux Poitevins »1. Si nous citons cette dernière phrase, c’est que, outre qu’il y est fait mention de ces légendes dont nous parlions tout à l’heure, elle soulève encore une autre question en liaison avec ce dont il s’agit ici, celle des origines du théâtre : celui-ci, tout d’abord, fut d’une part essentiellement ambulant, et d’autre part revêtu d’un caractère religieux, au moins quant à ses formes extérieures, – caractère religieux qui est à rapprocher de celui des pèlerins et des gens qui en prenaient les apparences. Ce qui donne encore plus d’importance à ce fait, c’est qu’il n’est pas particulier à l’Europe du moyen âge ; l’histoire du théâtre dans la Grèce antique est tout à fait analogue, et l’on pourrait aussi trouver des exemples similaires dans la plupart des pays d’Orient.

Mais il faut nous borner, et nous envisagerons seulement encore un dernier point, à propos de l’expression de « nobles voyageurs » appliquée aux initiés, ou tout au moins à certains d’entre eux, précisément en raison de leurs pérégrinations. Là-dessus, M. O. V. de L. Milosz a écrit ce qui suit : « Les « nobles voyageurs », c’est le nom secret des initiés de l’antiquité, transmis par la tradition orale à ceux du moyen âge et des temps modernes. Il a été prononcé pour la dernière fois en public le 30 mai 1786, à Paris, au cours d’une séance du Parlement consacrée à l’interrogatoire d’un accusé célèbre (Cagliostro), victime du pamphlétaire Théveneau de Morande.


[1] Ibid. p. 173.


Les pérégrinations des initiés ne se distinguaient des ordinaires voyages d’études que par le fait que leur itinéraire coïncidait rigoureusement, sous ses apparences de course aventureuse, avec les aspirations et les aptitudes les plus secrètes de l’adepte. Les exemples les plus illustres de ces pèlerinages nous sont offerts par Démocrite, initié aux secrets de l’alchimie par les prêtres égyptiens et le mage Ostanès, comme aux doctrines asiatiques par ses séjours en Perse et, selon quelques historiens, aux Indes ; Thalès, formé dans les temples d’Égypte et de Chaldée ; Pythagore, qui visita tous les pays connus des anciens (et très vraisemblablement l’Inde et la Chine) et dont le séjour en Perse fut marqué par les entretiens qu’il y eut avec le mage Zaratas, en Gaule par sa collaboration avec les Druides, enfin en Italie par ses discours à l’Assemblée des Anciens de Crotone. À ces exemples, il conviendrait d’ajouter les séjours de Paracelse en France, Autriche, Allemagne, Espagne et Portugal, Angleterre, Hollande, Danemark, Suède, Hongrie, Pologne, Lithuanie, Valachie, Carniole, Dalmatie, Russie et Turquie, ainsi que les voyages de Nicolas Flamel en Espagne, où Maistre Canches lui apprit à déchiffrer les fameuses figures hiéroglyphiques du Livre d’Abraham Juif. Le poète Robert Browning a défini la nature secrète de ces pèlerinages scientifiques dans une strophe singulièrement riche d’intuition : « Je vois mon chemin comme l’oiseau sa route sans trace ; quelque jour, Son jour d’heur, j’arriverai. Il me guide, Il guide l’oiseau. » Les années de voyage de Wilhelm Meister ont la même signification initiatique »1. Nous avons tenu à reproduire ce passage en entier, malgré sa longueur, en raison des exemples intéressants qu’il renferme ; sans doute pourrait-on en trouver encore beaucoup d’autres plus ou moins connus, mais ceux-là sont particulièrement caractéristiques, encore qu’ils ne se rapportent peut-être pas tous au même cas parmi ceux que nous avons distingués plus haut, et qu’il ne faille pas confondre les « voyages d’études », même réellement initiatiques avec les missions spéciales des adeptes ou même de certains initiés d’un moindre degré.
                                                                         Pythagore




Pour en revenir à l’expression de « nobles voyageurs », ce sur quoi nous voulons surtout attirer l’attention, c’est que l’épithète « nobles » semble indiquer qu’elle doit désigner, non pas toute initiation indistinctement, mais plus proprement une initiation de Kshatriyas, ou ce qu’on peut appeler l’« art royal » suivant le vocable conservé jusqu’à nos jours par la Maçonnerie. En d’autres termes, il s’agirait alors d’une initiation se rapportant, non à l’ordre métaphysique pur, mais à l’ordre cosmologique et aux applications qui s’y rattachent, ou à tout ce qui en Occident, a été compris sous l’appellation générale d’« hermétisme »2. S’il en est ainsi, M. Clavelle a eu parfaitement raison de dire que, tandis que saint Jean correspond au point de vue purement métaphysique de la Tradition, saint Jacques correspondrait plutôt au point de vue des « sciences traditionnelles » ; et, même sans évoquer le rapprochement, cependant fort plausible, avec le « maître Jacques » du compagnonnage, bien des indices concordants tendraient à prouver que cette correspondance est effectivement justifiée.
le pharaon Amasis aurait dit que personne n'était en mesure de savoir quelle était la hauteur de la Grande Pyramide et Thalès aurait relevé le défi en calculant le rapport entre son ombre et celle d'un corps de référence, au moyen d'un gnomon ou d'un bâton : « Ainsi, vous, Thalès, le roi d'Égypte vous admire beaucoup, et, entre autres choses, il a été, au-delà de ce qu'on peut dire, ravi de la manière dont vous avez mesuré la pyramide sans le moindre embarras et sans avoir eu besoin d'aucun instrument. Après avoir dressé votre bâton à l'extrémité de l'ombre que projetait la pyramide, vous construisîtes deux triangles par la tangence d'un rayon, et vous démontrâtes qu'il y avait la même proportion entre la hauteur du bâton et la hauteur de la pyramide qu'entre la longueur des deux ombres. » (Source Wiki)
 

[1] Les Arcanes, pp. 81-82.

[2] Sur la distinction des deux initiations sacerdotale et royale, nous renverrons à notre dernier livre, Autorité spirituelle et pouvoir temporel.

 

C’est bien à ce domaine, que l’on peut qualifier d’« intermédiaire », que se réfère en effet tout ce qui s’est propagé par la voie des pèlerinages, aussi bien que les traditions du Compagnonnage ou celles des Bohémiens. La connaissance des « petits mystères », qui est celle des lois du « devenir », s’acquiert en parcourant la « roue des choses » mais la connaissance des « grands mystères », étant celle des principes immuables, exige la contemplation immobile dans la « grande solitude », au point fixe qui est le centre de la roue, le pôle invariable autour duquel s’accomplissent, sans qu’il y participe, les révolutions de l’Univers manifesté.


 

                                   Mihrâb de la Grande Mosquée de Kairouan


Décor de coquille en marbre sculpté du Mihrâb de la Grande Mosquée de Kairouan
 
 
 
 
Trompes cannelées en forme de coquille de la coupole du mihrab (vers 836) dans la Grande Mosquée de Kairouan
 
 
La mosquée de Tinmel (Maroc) . 1153
 
 
            Mihrâb du Mausolée de Sayyida Ruqayya , fille d' ‘Alî (Paix sur eux), Le Caire, Égypte (1133) 
                                                                      Mosquée de Cordoue



                                                                Mosquée de Cordoue

mardi 7 mai 2013

Pèlerinage à la MECQUE : Ressourcement au pays de la Révélation




 

Dr Ahmed Elouazzani

 

Introduction

Le pèlerinage est l’exercice par excellence pour développer les qualités de sobriété et d’endurance. La haute spiritualité qui accompagne ce voyage exceptionnel dans la vie de chacun peut entretenir l’énergie pour le voyage éternel vers Dieu. De tout temps, le pèlerinage a été pour le musulman une entreprise de grande importance, une étape de la vie qui sépare un passé de dissipation d’un avenir de pureté. La réunion des millions de fidèles, dans un endroit précis et à une époque précise, revêtus tous du même pan de tissu blanc est une expérience impressionnante, qui rappelle le jour dernier que chacun est appelé à connaître.

Dans cet article, nous voulons mettre à la disposition du public francophone, un guide succinct en mettant l’accent sur l’aspect pratique du pèlerinage. Comme il y a trois types de pèlerinage, nous avons adopté ici le pèlerinage intitulé A-TTAMATOU’1, celui qui a été vivement recommandé par le Prophète BSSL2 pendant son pèlerinage d’adieu3.

L’accomplissement du pèlerinage, Hajj, est une institution divine prescrite durant la sixième4 année de l’hégire.

Dieu dit : « Et à Dieu le devoir sur les êtres d’accomplir le pèlerinage de la demeure, pour quiconque en a les moyens. Quant à celui qui se rend ingrat, Dieu est certes au-delà des mondes »5.

C’est une obligation à réaliser pour tout musulman au moins une fois dans sa vie, à condition qu’il satisfasse un certain nombre d’exigences6.

La raison pour laquelle tout croyant doit faire le pèlerinage, réside dans l’amour de Dieu et en commémoration du voyage d’Abraham7 et de sa famille. Le croyant cherche ainsi à plaire à Dieu, car ce pèlerinage peut lui permettre de se faire pardonner tous ses péchés, comme l’a précisé le Prophète BSSL :

« Quiconque accomplit le pèlerinage pour l’amour de Dieu et s’abstient de toutes relations sexuelles avec son épouse, et ne fait pas de mal et ne commet pas de péchés, alors il retournera chez lui [après un pèlerinage sans péchés] comme s’il était à nouveau né  »8.

A. Le petit pèlerinage : OUMRA9

IHRAM : état de sacralisation

Quand le pèlerin s’apprête à accomplir la OUMRA, il lui est conseillé de :

1. se tailler les ongles, se couper les moustaches, s’épiler les aisselles et le pubis, puis de se laver (les ablutions majeures) et de se parfumer.

2. le pèlerin met autour de sa taille un pagne propre (un « RIDA", un morceau de tissu non cousu pour couvrir les parties intimes) et couvre la partie supérieure de son corps par un "IZAR" propre (une houppelande pour couvrir le tronc). Il est souhaitable que les étoffes soient de préférence de couleur blanche.

Il est tout a fait permis de porter les habits de l’IHRAM chez soi avant d’arriver au MIKAT10.

3. Arrivé au MIKAT, il est souhaitable d’accomplir une prière surérogatoire (2 rak’ats) ou une prière obligatoire, ensuite il formule son intention de la OUMRA.

4. Une fois la prière accomplie et que le pèlerin décide d’entrer en état de sacralisation, il dit « LABBAYKA LLAHOMA LABBAYK OUMRA »

Ce qui signifie :

 « Je réponds à ton appel, Ô Dieu, par une OUMRA  »

Il est permis pour celui qui craint un empêchement quelconque qui le force à interrompre sa OUMRA de rajouter à la formule précitée :

« ALLAHOMMA IN HABISSANI HABISSE, FA MAHILLY MINA AL-ARDI HAYTOU TAHBISSOUNI »11

Qui signifie :

« Mon Seigneur, je me désacraliserai là où Tu m’arrêteras »

5. Ensuite, il dit à haute voix la fameuse formule de la TALBIYYA sans toutefois se donner de mal :

« LABBAYKA LAHOMMA LABAYK, LABBAYKA LACHARIKA LAKA LABAYK, INNALE- HAMDA WA NI’MATA LAKA WALE MOLK, LA CHARIKA LAK »

cela signifie :

« Me voici Seigneur, me voici pour accomplir le pèlerinage, Tu n’a point d’associés, La Louange et Le Bienfait T’appartiennent ainsi que la loyauté, Tu n’a point d’associés ».

Après la TALBIYYA le pèlerin invoque Dieu exalté Soit-Il et prie sur le Prophète BSSL. Il renouvelle la TALBIYYA à tout changement d’état tel monter ou descendre de l’autocar, après les prières et la rencontre des compagnons de route…

Le pèlerin doit retenir sa langue afin de pas professer de paroles obscènes et doit détourner son regard de tout ce qui est illicite.

Arrivée à MAKKAH

6. Arrivé à MAKKAH et ayant posé ses bagages à l’hôtel, il est souhaitable de se laver le corps, puis de se diriger vers la mosquée sacrée et d’y entrer de préférence par la porte de Bani-chaïba (Bab Essalam). En devançant le pied droit, le pèlerin dit :

« BISMI-LLAH, WA-SSALATOU WA SSALAMOU ’ALA RASSOULI-LLAH, AOUDHO BI WAJHI LLAHI ADHIM WA-BI WAJHIHI LE-KARIM WA SOULTANIHI AL-KADIM MINA CHAITANI RAGIM, ALLAHOUMMA IFTAH-LI ABWABA RAHMATIKA »

cela signifie :

« Au nom de Dieu et que les bénédictions et les salutations soient sur le messager de Dieu. Je cherche refuge auprès de Dieu le très grand et auprès Sa face généreuse, et Son autorité éternelle, contre Satan le lapidé, Ô Dieu ouvre moi les portes de Ta miséricorde ».

7. Dès qu’il voit la KAABA12, il lève les deux bras pour formuler les invocations en disant :

« ALLAHOMA ANTA AS-SALAM, WA MINKA AS-SALAM, ALLAHO ZID HADA BAYTA TACHRIFAN, WA TA’DIMAN, WA TAKRIMAN, WA MAHABATAN, WA BIRA, WA ZID MAN CHARRAFAHO, WA KARRAMAHO, MIMMAN HAJJAHO AWI’TAMARAHOU, TACHRIFAN, WA TAKRIMAN, WA MAHABATAN, WA BIRA »

cela signifie :

« Seigneur ! C’est Toi la paix ! de toi émane la paix, accorde nous la paix.

Seigneur accorde à cette édifice encore de l’honneur, plus de grandeur, de noblesse, de majesté et de respect.

Accorde au pèlerin qui l’honneur et le respecte : honneur, grandeur, noblesse, considération et bien-être ».

TAWAF AL QODOUM (La circumambulation d’arrivée)13

8. Ensuite il va directement au TAWAF en état de pureté, puis se dirige vers la pierre noire (AL-HADJAROU AL ASWADE), puis l’embrasse ou la touche de la main s’il le peut, ou bien il se contente de lui faire signe s’il ne peut y arriver.

9. Ensuite il se met face à elle (sur une ligne tracée sur le sol, qui marque où l’on commence le TAWAF), formule l’intention de TAWAF en disant :

« BISMI-LLAHI, ALLAHO-AKBAR »

10. Il commence alors son TAWAF en tournant autour de la KAABA de sorte que la KAABA soit à sa gauche, hâtant le pas, invoquant Dieu et priant sur le Prophète BSSL.

11. Quand il arrive à l’angle dit Yéménite, il le touche de la main sans l’embrasser en disant :

« RABBANA ATINA FI DOUNIA HASSANAH, WA FIL-AKHIRATI HASSANAH, WA QINA ADABA-NNAR ».

cela signifie :

« Seigneur ! Fais-nous prospérer en cette vie et dans l’au-delà et préserve nous du supplice de l’enfer ».

Il termine ainsi le première tour (CHAWT). Le pèlerin doit faire sept tours, à chaque passage devant la pierre noire il compte un tour (CHAWT).

12. Après la 7ème étape il va au MOULTAZEM (partie entre la pierre noire et la porte), il y fait des implorations ferventes, pleurant humblement et demandant à Dieu car les implorations y sont exaucées.

13. Ensuite le pèlerin se met derrière la station d’Abraham (MAQAMOU IBRAHIM) et y accomplit deux rak’ats. La 1ère rak’at avec la Fatiha et sourate 109 : Les mécréants ; la seconde avec Fatiha et sourate 112 : La Pureté.

14. Une fois cette prière terminée, il va à l’eau de Zam-Zam et en boit et en verse sur sa tête. Tout en buvant , il invoque Dieu et lui présente ses vœux. Il peut dire :

« ALLAHOUMA INNI AS-ALOUKA ’ILMAN NAFI’AN, WA RISKAN WA SI’AN, WA CHIFA-AN MIN KOLLI DA-IN »

ce qui signifie :

« Seigneur je t’implore de m’accorder un savoir utile, un avoir immense et la sauvegarde de tout mal ».

Il revient de nouveau à la pierre noire pour l’embrasser ou la toucher de la main ,s’il en a la possibilité.

LE SA’Y - procession entre SAFA et AL-MARWA14

15. Il va au SA’Y et y accède par la porte de SAFA, en disant :

« INNA SAFA WALE-MARWATA MIN CHA’AIRI LLAHI, FAMANE HADJJA LE BAYTA AWI I’TAMARA, FALA JOUNAHA ’ALAYHI ANNE YATTAWAFA BIHIMA, WA MAN TATAWA’A KHAYRANE FAINNA LLAHA CHAKHIRONE ALIM » 15

cela signifie :

« SAFA et MARWA font partie des lieux voués au culte de Dieu. Celui qui accomplit le grand ou le petit pèlerinage fera bien d’effectuer le va et vient entre ces deux buttes. Dieu saura gré à quiconque aura accompli une œuvre pie. Il est l’Omniscient ».

Il monte sur SAFA de manière à apercevoir la KAABA puis dit :

« ALLAHOU AKBAR(3 fois), LA ILAHA ILLA-LLAH, WAHDAHOU LACHARIKA LAHOU, LAHOU MOULKOU WA LAHO-HAMDOU, WA HOUWA ’ALA KOULLI CHAY-IN KADIR, LA ILAHA ILLA-LLAH WAHDAHOU, SADAKA WA’DAHOU, WA NASARA ABDAHOU, WA HAZAMA AL-AHZABA WAHDAHOU »

cela signifie :

« Dieu est Grand (3 fois), Il n’y a pas de Dieu que Lui, Seul, sans associé, à Lui appartient la souveraineté et à Lui la louange, et Il est Capable de toute chose. Il n’y a pas de Dieu que Lui. Il a accomplit sa promesse, soutenu Son serviteur et, seul, il a défait les coalisés  ».

Il implore Dieu de lui accorder ce qu’il désire des biens de ce bas monde et de l’au-delà.

Il quitte SAFA en se dirigeant vers AL-MARWA tout en invoquant Dieu le long de ce parcours.

16. Au fond de la vallée délimitée par les colonnes vertes, le pèlerin accélère sa marche entre les colonnes. Quand il les dépasse, il reprend sa marche normale.

Il ne cesse d’invoquer Dieu et de prier sur le Prophète BSSL le long de ce trajet.

17. Arrivé à AL-MARWA, il y monte et répète les mêmes formules que pour SAFA. Ainsi se termine le première trajet. Puis il reprend sa marche dans la direction de SAFA, jusqu’à ce qu’il arrive à SAFA. Ainsi se termine le deuxième trajet. Il y monte, invoque Dieu puis reprend sa marche vers AL-MARWA, et ainsi de suite jusqu’à l’accomplissement de 7 trajets comprenant 4 arrêts à SAFA et 4 arrêts à AL-MARWA.

18. Une fois le 7ème trajet terminé, le pèlerin coupe ses cheveux, ainsi la OUMRA est achevée et il peut se désacraliser.

B. Le grand pèlerinage : HAJJ

Le JOUR DE TARWIYYA : le 8 Dhou-al-Hijja

1. En ce jour, le pèlerin reprend son IHRAM comme il l’a fait auparavant pour sa OUMRA (cf. étapes 1 et 2) et formule l’intention du pèlerinage, il se rend le matin à MINA, sans omettre la TALBIYYA.

2. Le pèlerin y accomplit 5 prières : DOHR, ASR, MAGHREB, ICHA et FAJR. Il raccourcit les prières sans toutefois les rassembler.

Le JOUR DE ARAFAT : le 9 Dhou-al-Hijja

3. Après le lever du soleil, il quitte MINA en direction de ARAFAT. Si cela est possible, il s’arrête à NAMIRA (la mosquée de ARAFAT) et y reste jusqu’à midi. Il y accomplit avec l’imam, les deux prières de DOHR et ASR, toutes deux réunies et raccourcies. Après le pèlerin se rend à ARAFAT. Il s’y arrête à n’importe quel endroit. Le Prophète BSSL a dit :

«  je me suis arrêté ici, mais ARAFATE toute entière est valable pour y faire station  »16. Et a dit encore :

« La meilleure parole que j’ai dit moi et les Prophètes qui m’ont précédé dans l’après-midi du jour de ’ARAFA :

« LA ILAHA ILLA ALLAHOU WAHDAHOU LA CHARIKA LAHOU, LAHOUL-MOULKOU, WA LAHOU AL-HAMDOU, WA HOUWA ’ALA KOULLI CHAY IN QADIR »17.

Ce qui signifie : « Il n’y a pas de Dieu autre que Dieu, Seul, sans associé, à Lui appartient la souveraineté et à Lui la louange, et Il est Capable de toute chose  »

 Il serait bon -si les conditions le permettent- de prendre place près des rochers en bas de la colline ARRAHMA où s’arrêta le Prophète BSSL.

On peut être assis ou debout ou même en voiture. On prie et on implore Dieu jusqu’au coucher du soleil, à la tombée visible de la nuit.

 4. A ce moment, le pèlerin se dirige calmement vers MOZDALIFA.

Dès son arrivée, le pèlerin accomplit les deux prières de MAGHREB et ICHA.

Il passe la nuit à MOZDALIFA à n’importe quel endroit. Le Prophète BSSL a dit :

«  je me suis installé ici, mais MOZDALIFA toute entière est valable  »18.

Le JOUR DE L’AÎD : le 10 Dhou-al-Hijja

5. Dès qu’il voit poindre l’aube, il accomplit la prière de FAJR, ramasse sept cailloux (appelés aussi jamarates pluriel de jamra ) ou plus dans le but de les jeter, plus tard, dans le grand bassin appelé « JAMARATE AL-AKABA », et se rend à « MACH’AR AL-HARAM » . Il implore Dieu et exprime ses vœux.

6. Il continue, ensuite, son chemin à Mina, répétant toujours LA TALBIYYA.

En passant en chemin par la vallée de AL-MOUHASSIR19, il active sa marche ou accélère sa voiture sur une distance de 80 m.

Quand il arrive à MINA, il va directement au « JAMRA AL-AKABA » (le 3ème bassin dans le sens de la marche vers KAABA) et y jette les sept cailloux. Il lance chaque cailloux en disant « ALLAHOU AKBAR ». Il peut ajouter cette formule :

« ALLAHOMA J’ALHOU HAJJANE MABROURANE, WA SA’YANE MACHKOURANE, WA TIJARATAN LAN TABOUR »

cela signifie :

« Seigneur ! exauce mon pèlerinage, agrée mon effort et pardonne mes péchés ».

IMMOLATION

7. S’il a une bête à sacrifier, il l’égorge lui même, sinon il charge un autre de le faire, que ce soit une personne ou une instance autorisée telle que la banque islamique saoudienne. Toute MINA est valable pour le sacrifice. Le Prophète BSSL a dit :

«  j’ai fait mon sacrifice ici, mais MINA toute entière est un lieu pour le sacrifice  »20.

RASER OU COUPER LES CHEVEUX

8. Le pèlerin se rase ensuite les cheveux ou se les fait couper. Mais le rasage est préférable.

Arrivé à ce stade le pèlerin peut se désacraliser. Tout lui sera permis, sauf le rapport sexuel. C’est la petite désacralisation appelée en arabe « TAHALLOUL AL-ASGHAR ».

Le Prophète BSSL a dit :

«  Quand l’un de vous aura jeté les « jamarates » d’AKABA et aura rasé les cheveux, tout lui sera permis sauf les femmes  »21.

C’est à dire il peut couvrir sa tête et reprendre ses habits habituels.

TAWAF AL IFADHA22

 9. Après il entre à la MECQUE pour effectuer le « TAWAF AL IFADHA », l’un des 4 fondements du pèlerinage. Il se rend à la KAABA en état d’ablution et accomplit le TAWAF, identique au TAWAF de l’arrivée, seulement il n’a pas à porter son RIDA comme il l’avait fait au début, ni à activer sa marche durant les 3 premiers tours du TAWAF.

Après le TAWAF, le pèlerin accomplit deux rak’as derrière la station d’Abraham comme il les avait fait au début.

Ensuite le pèlerin accomplit le SA’Y (la procession) entre SAFA et MARWA conformément au premier.

Une fois terminé, le pèlerin est totalement libéré de toute interdiction notifiée par l’IHRAM. C’est la grande désacralisation appelée en arabe : « TAHALLOUL AL-AKBAR »

Le jour même , il retourne à Mina et y passe la nuit.

LES JOURS DE TACHRIQ : 11 et 12 Dhou-al-Hijja

10. Le lendemain, 11 Dhou-al-Hijja, après midi, il jette les jamarates dans les trois bassins. Il commence par le premier (appelé JAMRA A-SSOUGHRA) qui se trouve près de la mosquée de KHIF. Il y jette sept cailloux, l’un après l’autre, accompagnant chacun la formule ALLAHOU-AKBAR. Il s’écarte ensuite un peu pour faire des implorations.

Il avance ensuite vers le 2ème bassin (appelé JAMRA AL-WOUSTA) et y jette encore sept cailloux comme il vient de le faire au premier. Puis il s’en écarte pour invoquer et implorer son Seigneur face à la KAABA.

Ensuite il avance vers le 3ème et dernier bassin (appelé « JAMRA AL-AKABA ») pour y jeter encore sept cailloux accompagnant chacun de la formule « ALLAHOU AKBAR ». Ayant terminé cela, le pèlerin se retire sans s’arrêter pour les implorations.

11. Le lendemain à midi, il recommence ce qu’il a fait la veille.

S’il est pressé de rentrer chez lui, il retourne à la MECQUE après ces « jamarates » avant le coucher du soleil.

S’il n’est pas pressé il passe la nuit à MINA, afin d’accomplir le lendemain après midi les « jamarates » puis il regagne la MECQUE pour y rester les jours qui lui restent avant son départ. En effet, il faut profiter de ces précieux jours pour accomplir la prière à la mosquée sacrée et pour faire des TAWAF.

TAWAF D’ADIEU23

12. Quand l’heure de départ arrive, la dernière chose que doit faire le pèlerin c’est d’effectuer le TAWAF d’adieu suivi de deux rak’as derrière la station d’ABRAHAM (MAQAMOU IBRAHIM). Le Prophète BSSL a dit :

« Que le TAWAF soit le couronnement de ce que vous faites avant de quitter la MECQUE »24.

Il reprend le chemin du retour en disant : « LA ILAHA ILLA LLAHOU WAHDAHOU LA CHARIKA LAHOU, LAHOUL-MOULKOU, WA LAHOU AL-HAMDOU, WA HOUWA ’ALA KOULLI CHAY IN QADIR, AYIBOUNE,TA-IBOUNE, ABIDOUNE, LI-RABINA HAMIDOUNE. LA ILAHA ILLA ALLAHOU WAHDAHOU, SADAKA WA’DAHOU, WA NASARA ABDAHOU, WA HAZAMA AL-AHZABA WAHDAHOU  »

cela signifie :

« Il n’y a pas de Dieu que Lui, Seul, sans associé, à Lui appartient la souveraineté et à Lui la louange, et Il est Capable de toute chose, Nous rentrons repentants, adorant Dieu, nous prosternant devant Lui, le remerciant. Il n’y a pas de Dieu que Lui. Il a accomplit sa promesse, soutenu Son serviteur, et, seul, il a défait les coalisés ».

C. LA VISITE DE LA MOSQUEE DU PROPHETE BSSL25

Médine est la ville sacrée où le Prophète BSSL a vécu, le lieu où il a été enterré et le lieu de son Hégire. C’est une ville inviolable où il n’est même pas permis ni de battre les arbres ,ni de couper les plantes, ni d’effrayer le gibier. C’est la ville de la miséricorde, de la bénédiction et de la foi. le Prophète BSSL a dit :

«  La foi tend à regagner Médine tel le serpent qui tend chaque fois à regagner son gîte »26 .

La prière dans la Mosquée du Prophète BSSL équivaut à mille prières dans une autre mosquée ; le Prophète BSSL a dit à ce propos :

« Une prière dans Ma Mosquée ici, est plus méritoire que mille prières ailleurs, sauf la Mosquée Sacrée de la MECQUE »27.

Il est donc recommandé de voyager à Médine afin de visiter la Mosquée du Prophète BSSL et de le saluer.

Le Prophète BSSL a dit : « Il n’est pas permis de partir en voyage pieux que vers trois Mosquées : la Mosquée Sacrée, Ma Mosquée ici, et la Mosquée Al-AKSA »28.

La manière d’accomplir cette visite :

1- Il est souhaitable d’entrer à la mosquée en avançant le pied droit, tout en disant :

« BISMI ALLAH, WA SSALATOU WA SSALAMOU ’ALA RASSOULI ALLAH, A’OUDOU Bl ALLAHI AL ADIM, WA Bl WAJHIHI AL KARIM, WA SOULTANIHI AL QADIM, MINA ACHAYTANI RAJIM, ALLAHOMA IFTAH LI ABWÂBA RAHMATIKA ».

Qui veux dire :

 « Au nom de Dieu, et que la Bénédiction et la Paix soient sur le Messager de Dieu. Je cherche refuge auprès de Dieu le Très Grand, et auprès de Sa Face Généreuse, et Son Autorité Eternelle, contre Satan le lapidé, ô Dieu ouvre-moi les portes de Ta Miséricorde ».

2- Accomplir une prière surérogatoire (deux rak’ats) ou obligatoire dans (A-RAWDA CHARIFA) cela est plus méritoire.

A-RAWDACHARIFA signifie en Arabe le jardin honoré : cette appellation est donnée à l’espace compris entre la chaire du vendredi et la maison du Prophète BSSL. Le Prophète BSSL disait :

« l’espace compris entre ma chaire et ma maison est l’un des jardins du paradis »29.

3 - Se présenter debout face au tombeau du Prophète BSSL avec quiétude et à voix basse.

Il est conseillé de le saluer avec la formule suivante :

« AS-SALAMOU ’ALAYKA YA RASOULA-LLAHI WA RAHMATOU LLAHI WA BARAKATOUHOU ».

Cela signifie

« Que la Paix, la Miséricorde, et la Bénédiction de Dieu soient sur toi ô Messager de Dieu ».

 Puis, on se déplace légèrement à droite pour saluer ABOU-BAKR (que dieu soit satisfait de lui) :

« AS-SALAMOU ’ALAYKA YA ABA-BAKR ».

Et une fois encore légèrement à droite pour saluer OMAR (que Dieu soit satisfait de lui) :

« AS-SALAMOU ’ALAYKA YA OMAR ».

 4 - Il est souhaitable aussi pendant le séjour à Médine d’aller à la mosquée de QOBA (première mosquée construite en Islam), afin de prier, car le Prophète a dit :

« Celui qui a fait ses ablutions chez lui, puis est venu à la mosquée de QOBA pour y prier, aura la récompense d’une OUMRA »30.

 5 - Il est souhaitable de rendre visite à AL-BAQI’ (cimetière de Médine où se trouvent les tombes de plus de 10 000 compagnons du Prophète ainsi que leurs successeurs et plusieurs savants de l’islam).

6 - Il est souhaitable de rendre visite aux tombeaux des martyrs de OUHOUD dont celui de Hamza ,l’oncle du Prophète (que Dieu soit agrée de lui) . Tous ces martyrs sont tombés pendant la bataille de OUHOUD la 3ème année de l’Hégire. le Prophète a dit :

 - « OUHOUD est une montagne que nous aimons et qui nous aime » 31

- « OUHOUD est une des montagnes du Paradis » 32

 

Notes :

1 Le pèlerinage A-TTAMATOU’ : c’est le fait d’accomplir le petit pèlerinage-la OUMRA-, de se désacraliser puis d’accomplir le grand pèlerinage-le HAJJ. Voir le détail des étapes dans la suite de l’article

2 BSSL signifie : Bénédiction et Salutation Soient sur Lui.

3 C’est l’unique pèlerinage effectué par le Prophète BSSL l’an 10 de l’Hégire, au cours duquel le Prophète BSSL a incité ses compagnons d’accomplir plutôt le pèlerinage A-TTAMATOU’ .

4 Suivant d’autres avis des savants, le pèlerinage a été institué la 9ème année de l’hégire

5 Sourate 3 verset 97

6 Conditions qui rendent le pèlerinage obligatoire : être musulman, être sain d’esprit, avoir atteint l’âge de puberté, posséder les moyens matériels et physiques.

7 Plusieurs rites de pèlerinage commémorent les oeuvres du Prophète Abraham ainsi que son épouse Hagar et son fils Ismaël.

8 Boukhari et Mouslim

9 Tous les rites de pèlerinage ont été déduits à partir des Hadiths authentiques qui décrivent en détail le pèlerinage de l’adieu du Prophète BSSL comme le Hadith de Jaber rapporté par Imam Moslim…

10 Règles à respecter durant le IHRAM :

 Il est cependant interdit au pèlerin durant son IHRAM :

• de porter des vêtements cousus et façonnés, c’est à dire qui prennent la forme des membres corporels comme les chemises et les pantalons …,

• de couper ses ongles ou ses cheveux,

- de se parfumer,

- de se livrer aux préliminaires du rapport sexuel,

- de se couvrir la tête, pour les hommes,

• de contracter un pacte de mariage, ou même de témoigner pour un mariage

Il faut préciser que la femme, quant à elle, ne pourra se couvrir ni le visage ni les mains.

En cas de transgression d’une de ces règles, le pèlerin devra expier son péché par l’un des moyens suivants :

• soit sacrifier (immoler) une bête (un ovin ou un caprin),

• soit jeûner trois jours,

• soit accomplir une expiation qui consiste à nourrir six pauvres (la valeur d’un demi-litre de blé par personne).

 Cette expiation est répétée autant de fois que la faute sera commise.

Il est aussi interdit de tuer du gibier. Cette violation est rachetée par l’offrande d’une bête équivalente (cf. sourate 2 - la Vache, verset 95)

11 Dans ce cas, s’il y a un empêchement, le pèlerin n’est tenu d’offrir, en guise de compensation, une offrande à l’endroit de l’empêchement. Il quitte son IHRAM sans expiation.

12 Lorsque l’on voit la KAABA, les implorations sont exaucées

13 Pour faire le TAWAF, il faut être en état de pureté corporelle et vestimentaire

le fidèle ressemble pendant le TAWAF aux anges qui gravitent autour du trône de Dieu

14 Commémoration à notre mère Hagar qui a effectué 7 fois l’aller et le retour entre les deux monts SAFA et MARWA à la recherche de l’eau pour son bébé Ismaël

15 Coran sourate 2 verset 150

16 Rapporté par Mouslim

17 Rapporté par Boukhari

18 Rapporté par Mouslim

19 La vallée dans laquelle Dieu a détruit l’armée de Abrahah qui s’apprêtait à détruire la mosquée sacrée KAABA

20 Rapporté par Mouslim

21 Rapporté par Abou Daoud

22 Ce TAWAF que l’on accomplit le jour de l’Aïd est l’un des 4 fondements du pèlerinage

23 Ce dernier TAWAF n’est pas obligatoire pour la femme qui est en état de menstrues ou de lochies

24 Rapporté par Mouslim

25 L’objectif ultime de cette visite c’est d’augmenter notre amour envers le Prophète BSSL

26 Rapporté par Abou Daoud

27 Rapporté par Mouslim

28 Rapporté par Boukhari

29 Rapporté par Boukhari et Mouslim

30 Rapporté par Ahmed, nasa-i, Ibnou Majja et Hakim

31 Rapporté par Mouslim

32 Rapporté par Boukhari