بـــسْم ﭐلله ﭐلرّحْمٰن ﭐلرّحــيــم ﭐللَّهُمَّ صَلِّ عَلَى سَيِّدِنَا مُحَمَّدٍ وَ عَلَى آلِهِ و صحبه وَ سَلِّمْ السلام عليكم و رحمة الله و بركاته
samedi 24 mars 2012
La Profession de Foi des adeptes de la Sounna
La profession de foi des adeptes de la Sunna
Extrait de 'Ihya 'Ulum ed Din
par
Abou Hamid Al-Ghazâlî
C’est de croire qu’Allah est Un, sans associé, singulier sans semblable, incommensurable sans contraire, unique sans égal, éternel sans début, infini sans commencement, existant pour toujours sans finitude, perpétuel sans fin, subsistant par Lui-même sans rupture, impérissable sans discontinuité, Il ne cesse et Il n’a cessé d’être qualifié par les Attributs de la Majesté. Il n’est pas soumis à la discontinuité des durées et à la disparition des temps car Il est le Premier et le Dernier, le Manifeste et le Latent.
Il n’est ni un corps circonscrit, ni une substance finie et déterminée. Il ne ressemble pas au corps ni en matière de détermination ni en matière de soumission à la division. Il n’est pas une substance et les substances ne s’incarnent pas en Lui. Il n’est pas un accident et les accidents ne s’incarnent pas en Lui. Car Il ne ressemble à aucun existant et aucun existant ne lui ressemble, rien ne Lui est semblable et Il n’est semblable à rien. Il n’est pas délimité par la mesure. Il n’est pas contenu dans l’étendue, Il n’est pas délimité par les directions. Il n’est pas cerné par la terre et les cieux.
Il est établie ( istawa ) sur le trône ( al 'arch ) selon la modalité qu’Il à indiquée et selon le sens qu’Il a voulu, d’un établisement transcendant le contact, la stabilité, l’effectivité, l’incarnation et le déplacement.
Le trône ne le porte pas, ce sont plutôt le Trône et les Anges qui le porte et qui sont maintenus par la Bienveillance de Sa Toute Puissance et soumis à Son Pouvoir.
Il est au-dessus du Trône et au-dessus de tout jusqu’à l’infini d’une transcendance qui ne le rapproche ni du Trône ni du ciel et qui ne l’éloigne ni de la terre ni de ses profondeurs. Il est celui qui possède les degrés sublimes par rapport au Trône et à la terre, et malgré tout cela Il est proche de tout existant, Il est plus proche des serviteurs que leurs veines jugulaires et Il est témoin sur toute chose car Sa proximité ne ressemble pas à l’essence des corps. Il ne s’incarne en aucune chose et aucune chose ne s’incarne en Lui, son Exaltation interdit qu’Il soit contenu dans un espace et Sa transcendance interdit qu’Il soit délimité par un temps car Il était avant qu’il crée l’espace et le temps et Il est maintenant comme Il était ; Il est Manifeste par rapport à Ses créatures par Ses Attributs, il n’y a rien d’autre que Lui dans Son Essence et Son Essence n’est pas dans autrui, Sa transcendance interdit qu’Il s’expose aux accidentes du changement et de la génération, Il n’est pas soumis aux contingences et aux accidentes car Il ne cesse par les Attributs de la Perfection de se passer de tout parachèvement de la perfection. De par Son Essence, Son Existence est connue par les entendements et appréhendée par le discernement, par bienfait de Sa part en faveur des justes dans la Demeure du séjour éternel et par parachèvement de Sa part des béatitudes qui procure la vision de Sa face Auguste.
Les Attributs de la vue et de la puissance :
Il est vivant, Puissant, Dominateur, Contraignant, non soumis à la déficience et à l’impuissance, à l’assoupissement et au sommeil, à l’extérieur et à la mort. Il est le Maitre du royaume, de la Gloire et de la Toute-Puissancce. Le pouvoir et la Domination, la Création et l’Ordre Lui appartiennent en propre et les cieux sont pliés dans Sa droite. Il est le seul Créateur et Concepteur, l’Unique Existenciateur et Façonneur. Il a crée les créatures ainsi que leurs œuvres. Il a déterminé leurs subsistances et les termes de leurs vies. Déterminations sont innombrables et Ses connaissances sont infinies.
La science :
Il sait toutes les connaissances. Sa science embrasse tout ce qui se passe depuis les profondeurs de la terre jusqu’aux cieux les plus élevés et rien n’échappe à Sa science, même pas le poids d’un grain de moutarde dans la terre et dans le ciel. Il connaît même le déplacement de la fourmi noire sur la pierre lisse au cours de la nuit sombre. Il perçoit le mouvement des corpuscules de poussière dans l’atmosphère, Il connaît le secret et ce qui est plus subtil encore, Il connaît les soucis des consciences, les mouvements des idées qui traversent les esprits et les contours des secrets intimes par une science éternelle par laquelle Il ne cesse d’être qualifié depuis l’éternité des éternités, non par une science qui se renouvelle et qui se réalise dans Son Essence par acquisition.
La volonté :
Il a voulu les êtres créés et il régit tout ce qui existe. Ainsi rien ne se passe dans le monde de la manifestation et dans le monde des anges, qu’il soit important ou insignifiant, grand ou petit, bon ou mauvis, utile ou nuisible, fidélité ou impiété, connaissance ou ignorance, réussite ou échec, accroissement ou diminution, obéissance ou désobéissance, sans qu’il soit par Sa volonté, Son Décret, Son Arrêt, Sa Sagesse et Son Bon vouloir. Rien n’échappe à Son Bon vouloir, nie le regard furtif, ni l’éclair d’une pensée traversant l’esprit. Ce qu’Il veut sera et ce qu’Il ne veut pas ne sera pas. Il est Celui qui Commence la création et qui le recommence, Il fait ce qu’Il veut, rien ne peut récuser Son jugement et rien ne peut s’opposer à Son décret. Le serviteur ne peut échapper à Sa désobéissance que s’il bénéfice de Sa Grâce et de Sa Miséricorde et il n’a pas la force de lui obéir que par la grâce de Son amour et de Sa volonté et Son bon vouloir, ils en seraient incapables. Sa volonté subsiste dans Son Essence avec l’ensemble de Ses Attributs. Il ne cesse d’être qualifié, voulant dans sont éternité l’existence des choses au moment qu’Il a déterminé et elles sont existé comme Il les a déterminées et voulues dans Son éternité, sans avancement i retardement. Il a déterminé toutes les choses sans ordonner les idées et épier les temps favorables, voilà pourquoi aucune affaire ne le retient par rapport à une autre.
L’ouïe et la vue :
Il est Audiant et Voyant. Aucune chose étendue n’échappe à Son Ouïe même si elle est subtile ; aucune choses visible n’échappe à Sa vue même si elle est extrêmement fine. Aucune étendue ne voile Son Ouïe et aucunes ténèbres n’empêche Sa vue. Il voit sans pupille ni paupières et entend sans lobes ni oreilles, comme Il sait sans cœur, empoigne sans membre et crée sans organe car Ses qualités ne ressemblent pas à celles des créatures, au même titre que Son essence n’est pas semblable à celles des créatures.
La Parole :
Il parle, ordonne, interdit, promet et menace par une parole éternelle qui subsiste dans Son Essence. Sa Parole ne ressemble pas à celle des créatures. Elle n’est pas un son provoqué par l’infiltration de l’air ou le choc entre corps matériels, ni une lettre articulée par le mouvement des lèvres et de la langue. Le Coran, la Torah, l’Evangile et les Psaumes sont Sa Parole et Ses livres révélés à Ses Messagers. Le Coran est lu par les langues, reproduit dans des textes et gardé dans les cœurs et il est pourtant éternel, subsistant par l’Essence d’Allah sans subir la séparation et la discontinuité en passant dans les cœurs et les feuillets. Moïse a entendu la Parole de d’Allah, sans son ni lettre, au même titre que les justes voient l’Essence de d’Allah sans voir une substance ni un accident. Comme Il possède ces qualités il est vivant, Savant, Puissant, Voulant, Audiant, Voyant, Parlant par la vie, la Science, la Puissance, la Volonté, l’Ouïe, la Vue et le Langage et non par le simple Essence.
Les Actes Divins :
Tout autre existant à part Lui est instauré par Son Agir et il déborde de Sa justice sous le meilleur des rapports, le plus parfait, le plus équitable et le plus impeccable. C’est qu’Il est Sage dans Ses actes et juste dans Ses jugements. Sa justice ne peut pas être comparée à celle des créatures car on imagine que l’injustice puisse émaner du serviteur du fait qu’il gère les possessions d’autrui mais il est inconcevable que l’injustice puisse provenir d’Allah car Il ne rencontre pas des possessions appartenant à autrui pour qu’Il puisse être injuste en les gérant. En effet tout ce qui est autre que Lui, commet les djinns, les humains, les démons, les anges, le ciel, la terre, les animaux, les végétaux, les minéraux, les substances, les accidents le sensible, le perceptible et le contingent, Il l’a conçu par Sa Puissance à partir du néant et l’a produit alors qu’il n’était rien car il existait Seul depuis l’éternité et rien n’était avec Lui. Il a instauré les créatures pour manifester Sa Puissance, pour réaliser ce qui a été décrété d’avance par Sa volonté et pour rendre effective Sa Parole dans l’éternité non parce qu’Il en a besoin ou parce qu’Il en dépend.
Il est le Bienfaiteur par la création, la conception et l’obligation de l’adorer, sans que la moindre nécessité ne s’impose à Lui. Il accorde les faveurs et l’amélioration sans obligation. Et s’Il versait le châtiment comme un liquide sur les créatures, ce serait une justice de Sa part. Il rétribue Ses serviteurs pour leur obéissance par générosité non par obligation et par mérite. Son droit à l’obéissance s’impose par le fait qu’Il l’a rendu obligatoire par la bouche de Ses prophètes, non par la simple raison. Mais Il a envoyé les Messagers et confirmé leur véracité par les miracles éclatants, et ils sont transmit Son Ordre et Ses interdits ainsi que Sa Promesse et sa Menace, et il incombe aux créatures de croire en ce qu’Ils ont apporté.
La signification de la deuxième partie de la deuxième partie de la profession de foi :
Il s’agit du témoignage en faveur de l’Envoyé d’Allah en attestant qu’Allah a envoyé le Prophète, le Messager, l’illettré, le guide, le qurayshite, Muhammad avec son Message, à tous les Arabes, à tous les non-arabes, aux djinns et aux humains, que par Sa Loi Il a abrogé les lois sauf ce qui a été confirmé par la Sienne, qu’Il l’a préféré à tous les prophètes, qu’il a fait de lui le Maître de l’humanité, qu’Il a interdit la perfection de la foi sur la seule base de l’affirmation de l’unicité, à savoir le fait de dire : Il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah, (لآ اله الآ الله) si on ne lui ajoute pas le témoignage en faveur de l’Envoyé d’Allah, (محمد رسول الله) à savoir le fait de dire : Muhammad est l’Envoyé d’Allah. Il a imposé aux créatures de croire en ce qu’il a rapporté sur Lui à propos des questions du bas monde et de la vie future. Il a indiqué qu’Il n’accepte la foi du serviteur tant qu’il ne croit pas à ce qu’Il a rapporté sur l’outre tombe, à commencer par l’interrogatoire des deux anges Munkir et Nakir qui sont deux personnages terribles et effrayants : ils font asseoir le serviteur dans sa tombe avec son corps et son esprit l’interrogent sur le tawhid (affirmation de l’Unicité Divine) et le Message en lui demandant : « qui est ton Seigneur ? Qu’elle est ta religion ? Qui est ton Prophète ? » Ils sont les agents de l’épreuve de la tombe et leur interrogatoire constitue la première épreuve à laquelle on s’expose après la mort.
Le serviteur est tenu également de croire au châtiment de la tombe car c’est une vérité, une sagesse et une justice qui s’imposent au corps et à l’esprit. Il doit croire à la résurrection et au fait qu’Allah revivifie les corps après leur désintégration, comme Il les a crées la premières fois et qu’Il rend au corps sont esprit, tel qu’il tait dans le bas monde avant sa mort et fait de lui une personne semblable à ce qu’elle était. Il doit croire à la balance, à ses deux plateaux, à son aiguille, à la description de leur grandeur qui est comparable aux couches des cieux et de la terre, dans lesquelles les œuvres seront pesées grâce à la Puissance d’Allah , les unités de pois seront constituées ce Jour lé des pièces ayant le poids de grains de poussières et de graines de moutarde pour assurer la perfection de la justice ; les feuillets où sont inscrites les bonnes actions du serviteur seront mis dans le plateau de lumière et ils pèseront lourdement dans la balance en fonction du degré de leur valeur auprès d’Allah et par Sa grâce ; les feuillets des mauvaises actions seront mis dans le plateau sombre et pèseront moins lourd par la grâce de l’équité d’Allah. Il doit croire aussi que l’Heure ultime est vraie et que le sirât est vrai : C’est un pont suspendu au dessus de l’enfer, plus tranchant que l’épée et plus fin que le cheveu, sur lequel glisseront les pas des mécréants qui seront jetés en enfer, tandis que les pas des croyants tiendront fermement, et ils seront conduits au Paradis. Il doit croire au bassin d’eau, le bassin de notre prophète Muhammad où les croyants s’abreuveront avant d’entrer aux Paradis et après avoir traversé le sirât ; sa largeur s’étend sur une distance équivalent à un mois de marche ; son eau est d’une blancheur plus éclatante que le lait et elle est plus douce que le miel.Autour de ce bassin les brocs sont plus nombreux que les étoiles du ciel. Il comporte deux canaux qui l’alimentent par l’eau du fleuve al-Kawthar.
Il doit croire au jugement et à la différenciation des gens à ce sujet : Il y aura celui qui sera soumis à un interrogatoire serré pour rendre les comptes ; il y aura celui qui entrera au Paradis sans rendre des comptes, savoir celui qui fait partie des rapprochés. Allah interrogera les musulmans sur leurs œuvres, on doit croire qu’Il fera sortir de l’enfer les croyants qui on affirmé l’Unicité divine après avoir subi la vengeance, jusqu’à ce qu’il n’y reste pas un seul unificateur, par la grâce d’Allah .
On doit croire à l’intercession des Prophètes, puis à celles des savants, puis à celle des martyrs, puis à celle de l’ensemble des croyants ; chacun d’eux selon sa position auprès d’Allah . Ceux qui resteront parmi les croyants sans intercesseur quitteront l’Enfer par la grâce d’Allah . Même celui qui ne possède que le poids d’un grain de poussière de foi le quittera. Il doit croire au mérite. Ainsi les meilleurs homes, après l’Envoyé d’Allah sont dans l’ordre : Abû bakr , puis ‘Umar , puis ‘Uthman , puis ‘Alî . Il doit aussi avoir une bonne opinion de tous les Compagnons et les louer, comme Allah les a loués, ainsi que Son Messager. Tout ceci est rapporté par les informations et attesté par les traditions.
Celui qui croit à tout cela fermement fait partie des adeptes de la vérité et des gens de la Sunna et il se sépare des gens égarés.
Nous implorons d’Allah la perfection de la certitude de la fermeté dans
l’attachement à la foi, pour nous et pour touts les musulmans !
Il est le Plus Miséricordieux des miséricordieux.
http://www.soufisme-fr.com/forum.php
Les dégats des mots
Les dégats des mots - Abu Hamid Al Ghazali -Ed.Iqra 1995
(En fait, il s'agit d' une traduction d'un abrégé de l'Ihya 'Ulum ad-Dîn , fait par l'Imam JamaledDin Al Quassimi intitulé "Conseil aux croyants d'aprés l'Ihiya" ) -Le traducteur note qu'il a voulu insister surtout sur la médisance , et choisi d'employer "les mots" pour al-lisân au lieu de "langue" qui en est le sens littéral , afin d'éviter toute confusion.
Le texte en arabe est: Le Livre XXIV :4è Livre du 3è quart (Al Mouhlakât) intitulé :Âfât Al Lisân (dégats , infirmités de la langue ) , en version numérisée à ce lien du site www.ghazali.org
LES DEGATS DES MOTS
Introduction
Sache que les dégâts causés par la langue (les mots, la parole) sont énormes, et rien ne peut être plus salutaire que sa retenue. Ainsi la loi religieuse (Coran et hadiths) vante le mutisme et insiste sur l'importance du silence.
On rapporte d'après la tradition que : « Le silence est une sagesse mais rares sont ceux qui le pratiquent».
Le Prophète a dit : « La foi d'un serviteur n'acquière la droiture que si son coeur est droit et le coeur ne peut acquérir la droiture que si la langue est droite... »
Rapporté par Ibn abi ad-Dunia dans son livre - assamte (Le silence) - ainsi que al Kharaiti dans son livre « Makarimu al Akhlak » avec une chaîne faible.).
Mouadh Ibn Jabal demanda au Prophète :
« Ô Envoyé de Dieu serons-nous jugés pour nos paroles ?
Et le Prophète lui répondit :
« ô ibn Jabal ! C'est la moisson de la langue qui le plus souvent jette les gens dans l'Enfer »
Rapporté par Tirmidhi dans le livre de La Foi et il est rapporté également par Ibn Majja.
Et d'après Sahl Ibn Saadine As-Saaidi le Prophète a dit : « Celui qui me garantit ce qu'il a entre ses mâchoires et ce qu'il a entre ses jambes je lui garantis le paradis »
Ce qui peut être interpréter de cette façon :
« Celui qui me garantit (le bon usage) de ce qu'il a entre ses mâchoires (la langue) et de ce qu'il a entre ses jambes (le sexe), je lui garantis le paradis»
Et d'après Abu Horayrah le Prophète a dit :
« Celui qui croit en Dieu et au jour du jugement, qu'il dise du bien ou qu'il garde le silence »
Partie d'un long hadith rapporté par Bukhari et Muslim.
On a dit à Jésus :
« montre-nous une oeuvre qui nous fait entrer au paradis ?»
Il leur répondit : « ne parlez jamais », on lui a dit :
« On ne peut pas se retenir de parler ».
II leur a dit :
« alors, ne parlez que pour dire du Bien ».
Soulayman (Salomon), fils de Daoud (David) a dit :
« Si la parole est en Argent le silence est en Or ».
Et dans les traditions des compagnons du Prophète , on rapporte qu'Abu Bakr mettait une petite pierre dans sa bouche, pour s'empêcher de parler, et il disait en faisant allusion à sa langue « C'est elle qui me fait engager dans les sentiers dangereux ».
Abdallah Ibn Massoud a dit : « Par Dieu, qui, il n'y a d'autre divinité que Lui, nul organe n'a besoin d'être emprisonné plus que la langue qui est déjà enfermée derrière deux obstacles ; les lèvres et les dents ! ».
Taouss a dit : « Ma langue est un lion, si je le libère, il me dévorera».
Si tu te poses la question sur l'origine des grandes vertus du silence (mutisme), sache alors que ces vertus ne sont autres que l'absence des pêchés causés par la langue comme le mensonge, la médisance, la calomnie, l'ostentation, l'hypocrisie, la perversion, la vilenie, la vanterie, les vaines discussions, les disputes..
1 Parler de ce qui ne vous regarde pas
Sachant que le capital du croyant est son temps, les instants de sa vie sont précieux et passent sans retour ; le Prophète a dit :
« Un des signes de perfection de la foi (islam) chez l'individu c'est l'abandon de ce qui ne le regarde pas» D'après Tirmidhi, Ibn Majja et l'imam Malik.
Et le récit suivant est très significatif à cet égard : on y rapporte, d'après Anas :
« Un jeune homme était tombé martyr le jour de la bataille d'Uhud, et nous avons trouvé callée à son ventre une pierre (pour alléger les effets de la faim) ; sa mère essuya la poussière du visage de son fils et dit : le paradis sera doux pour toi mon fils !
Et le Prophète lui dit alors :
« Et qui t'assure qu'il ne parlait pas de ce qui ne le regardait pas ? »
Parler de ce qui ne nous regarde pas c'est dire ce qui peut être délaissé sans que ce soit un pêché, ni un mal présent ou futur ; et plus grave encore, c'est de perdre ton temps et de faire perdre à ton interlocuteur son temps, en posant des questions du genre :
"est-ce que vous jeûnez ?" S'il vous répond par : "Oui !", son jeûne perd sa vertu ultime qui est d'être observé en secret, car l'adoration en secret est plus élevée, s'il répond par : 'Non !', alors il aurait menti ; s'il ne répond pas, il aurait méprisé son interlocuteur, et s'il ruse pour détourner la question, il gaspillera son énergie etc.
Ainsi par une parole (question) sur quelque chose qui ne te regarde pas, tu as exposé quelqu'un à l'ostentation en dévoilant son jeûne ou au mensonge, ou au mépris ou une rude épreuve…
2. Le surplus dans la parole
C'est à définir comme l'excès de parole dans un intérêt quelconque. Si on a besoin de deux mots pour exprimer quelque chose d'utile alors le troisième mot est en plus.
Cette indiscrétion n'est pas interdite mais elle est déconseillée. les domaines de l'excès dans la parole sont illimités et le Coran nous désigne ce qui est important et bon à investir par la parole :
« Il n'y a rien dans la plus grande partie de leurs conversations secrètes, sauf si l'un deux ordonne une charité, une bonne action, ou une grande conciliation entre les gens. Et quiconque le fait, cherchant l'agrément de Dieu, à celui-là Nous donnerons bientôt une récompense»
(Sourate 4-verset 114).
Le Prophète a dit : « Heureux est celui qui retient le surplus de sa langue et dépense le surplus de son argent» D'après Bayhaqui, et al Baraoui (classé hassane).
De notre temps les gens agissent inversement puisqu'ils retiennent le surplus de l'argent et distribuent le surplus de la parole.
Ataa disait :
"les croyants qui vous ont précédé détestaient le surplus de la parole et pour eux le surplus est tout ce qui vient après le Coran, la Tradition , la commanderie du bien, le pourchas du mal, et de parler pour un intérêt vital et obligatoire, et ils avaient à l'esprit les versets suivants qui évoquent les anges préposés à notre surveillance :
« Alors que veillent sur vous des gardiens, des nobles scribes, qui savent ce que vous faites.»
( Sourate 82 - Sourate 10-12)
« II ne prononce pas une parole sans avoir auprès de lui un observateur prêt à l'inscrire. »
(Sourate 50-verset 18).
Le jour du jugement ! Quelle honte pour le fidèle de voir son temps ici-bas rempli de futilités qui n'ont été d'aucun intérêt pour sa Foi, ni pour sa vie et quels regrets !
Un des compagnons disait :
"Parfois, quand quelqu'un me parle, j'éprouve autant l'envie de lui répondre que l'assoiffé de boire, mais je m'abstiens de peur que ce soit un surplus de parole."
3. Parler vainement
Il est dans les habitudes des gens de parler dans leurs assemblées, des femmes, des histoires des débauchés dans les tavernes, des rois, des riches et leur vie de luxe, et de leurs mauvaises habitudes, de rire des gens et de dire des vanités. Cela est illicite.
Allah dit dans le Coran :
« Dans le Livre, Il vous a déjà révélé ceci : lorsque vous entendez qu'on renie les signes de Dieu et qu'on s'en rit, ne vous asseyez point avec ceux-là jusqu'à ce qu'ils entreprennent une autre conversation. Sinon, vous serez comme eux. Dieu rassemblera, certes, les hypocrites et les mécréants, tous dans l'Enfer » ( Sourate 4, verset 140).
Le Prophète a dit : « Un homme profère un mot pour faire rire les gens de l'assemblée, et par ce mot il chute dans l'Enfer plus loin qu'une étoile ».
Il a dit également : « L'homme prononce un mot qui provoque la satisfaction de Dieu, il ne pensait pas que ce mot atteindrait ce qu'il a atteint, et Dieu lui accorde, par ce mot Sa satisfaction jusqu'au jour du jugement, de même un homme prononce un mot qui provoque la colère de Dieu, il ne croit pas qu'il atteindrait ce qu'il a atteint, et Dieu lui inflige par ce mot Son courroux jusqu'au jour du jugement» Rapporté par Tirmidhi, l'imam Malik...
4. Sournoiserie - moraa't - et Polémique
La définition technique du mot moraa't, décrit celui qui contredit les autres en faisant apparaître dans leurs discours des failles, et cela est soit dans les idées, dans la forme grammaticale, dans la prononciation, l'éloquence ou même dans les intentions de l'orateur et cela à tord ou à raison.
Quant à la moujadala, c'est de vouloir mettre un interlocuteur dans l'embarras, le tourner en ridicule, montrer l'incapacité de répondre, le confondre pour enfin mettre en évidence l'ignorance de son adversaire.
Et ces deux attitudes sont fortement déconseillées par le Prophète qui a dit :
« N'agace pas ton frère - Ne fait pas acte de moraa't envers lui - ne plaisante pas avec lui, et ne lui donne pas un rendez-vous sans y aller - et une promesse sans la tenir - »
[ Rapporté par Tirmidlhi d'après Ikrima d'après Ibn Abbas.]
Il a dit également :
" II n'y a pas un peuple qui s'égare sans qu'il leur soit donné d'être polémiste "
[ Rapporté par Tirmidhi, Ibn Majja et Ibn Abi Donia. ]
« Le serviteur (de Dieu) ne peut acquérir la vérité de la foi que lorsqu'il abandonnera la polémique et la papelardise même s'il a raison. » [ Rapporté par Ibn abi Donia.]
Bilal ben Saad a dit « Si vous voyez quelqu'un ayant un caractère de polémiste fier de son opinion et inopportun, alors sachez que sa perdition est totale », quant à Ibn abi al Laïl, parlant à ce sujet il a dit « je ne polémique jamais avec un ami car j'aurais soit à le confondre soit à le mettre en colère.»
L'imam Malik ibn Anas a dit : « Il n'y a rien dans la religion qui nécessite une polémique » et il a dit aussi « les sournoiseries - Miraa' - rendent les coeurs durs - les uns envers les autres - et fait hériter des haines et des inimitiés.»
La Foi oblige le croyant à se tenir à l'écart de toute polémique et papelardise, et quand il s'agit d'une discussion savante, il faut y prendre part pour poser des questions dans le dessein d'apprendre et comprendre, sans aucune volonté de chercher à nuire à ton interlocuteur et à le pousser à se défendre avec du vrai comme du faux, ou prendre la parole pour exprimer une science si tu en es porteur, sans aucune volonté de montrer que tu es savant intelligent et informé etc. et cela en utilisant dans ton discours des vérités ou des mensonges. Sinon garder le silence reste le meilleur remède pour éviter les péchés qui résultent des polémiques et des papelardises.
5. Les disputes
La dispute va au-delà de la polémique et de la papelardise, car si ces dernières n'ont d'autre objectif que de ridiculiser l'adversaire et d'apparaître sous son meilleur jour, dans la discussion la dispute cherche à aboutir à un objectif bien déterminé comme la reprise d'un droit ou la restitution d'un bien, et cela soit en commençant la dispute ou en la repoussant, et l'excès y est interdit, et chaque mot qui ne serait pas dit dans l'objectif visé est un mot en trop.
Mais, sachant que les disputes ne font, en plus, qu'enraciner la colère et la haine, il vaut mieux éviter cela.
6. L’âpreté dans la parole
Une parole est destinée à transmettre des informations quelconques, et tout effort dans les mots où dans la forme qui dépasse l'objectivité est blâmable, telle la recherche de l'éloquence, de la composition - des propos rimées et élevées - un certain artifice dans la parole.. etc. Par contre l'embellissement des paroles dans le dessein d'influencer l'auditoire pour l'intérêt de celui-ci, comme le fait d'essayer d'émouvoir les gens dans leurs religions, [ mais pas dans l'intérêt de celui qui parle pour qu'il soit vu éloquent savant etc, ] tout cela est louable.
7. Le Libertinage, l'Insulte et la Vulgarité
AlFohche [ le libertinage ] se définit par rapport à la clarté de la description de certaines choses relatives à la pudeur, Ibn Abbas a dit :
«Dieu est Pudique, Généreux, Il pardonne et Il fait allusion (à propos des choses pudiques au lieu de les exprimer crûment), Il a fait allusion à l'acte sexuel par le mot contact (al-llams) », d'autres termes sont utilisés pour décrire ce contact.
Lorsqu'ils sont trop expressifs, ces termes sont considérés comme fohche. En général, toute chose qui éprouve la pudeur ne doit pas être citée expressément.
On rapporte que le Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix - a dit : "Évitez d'être grossiers dans votre langage, car Dieu Exalté soit-Il, n'aime pas le fohch (la grossièreté, l'obscénité.) ni le fait d'être grossier".
Il a dit également : "Le croyant n'est pas injurieux, ni maudisseur, ni grossier, ni indécent".
Il a également dit : "Dieu n'aime pas les grossièretés ni les grossiers, crieurs dans les marchés". Quant aux insultes le Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix - a dit : "C'est commettre un acte d'indécence que d'insulter un croyant, et c'est de l'impiété (kufr) que de le combattre (avec les armes)".
On rapporte que le Prophète a dit :
"L'un des grands péchés serait d'insulter ses propres parents.
Étonnés, les compagnons lui ont demandé:
"- Ô Envoyé de Dieu ! Comment quelqu'un peut-il insulter ses parents?
Et le Prophète leur a répondu :
"Il insulte les parents de quelqu'un d'autre et celui-ci réagit à cela en insultant ses propres parents".
Quant à l'indécence le Prophète a dit :
"L'indécence et le langage cru (là ou il faut être pudique), sont deux branches parmi celles de l'hypocrisie" . Les causes qui poussent à cela sont, soit la volonté de nuire à autrui soit la fréquentation des libertins et de ceux qui sont
habituellement grossiers.
8. La plaisanterie
L'excès de plaisanterie est une chose blâmable, car il fait hériter à la longue des attitudes badines, un esprit léger, de la haine dans certains cas, et il fait disparaître entre les croyants la vénération et le respect. Mais il n'est pas pour autant interdit, ni même déconseiller de plaisanter, car le Prophète - sur Lui la Grâce et la Paix - a dit de lui-même :
« Je plaisante, mais je ne dis que la vérité »
En effet il nous est parvenu plusieurs histoires où le Prophète plaisantait avec les croyants :
Une fois une vieille femme a rendu visite au Prophète qui, au cours de la discussion, lui dit :
« Aucune vieille n'entre au paradis ».Et la vieille se mit à pleurer, mais le Prophète lui ajouta :
« Mais tu ne seras pas vieille ce jour là (quand tu rentreras au paradis), puis il récita ce verset :
« C'est Nous qui les avons créées à la perfection et nous les avons faites vierges. » [Sourate 56, verset 35 -36 ]
Une autre fois ; pendant une tournée une dame est venue vers le Prophète et lui dit :
« Ô Envoyé de Dieu ! Fais-moi monter sur un chameau » et le Prophète lui dit :
« Mais nous allons te faire monter sur le fils d'un chameau », et la dame lui répondit
« je n'en ai rien à faire du fils d'un chameau, il ne peut pas me porter » et le Prophète rajouta alors :
« Tout chameau est un fils de chameau ».
On rapporte d'après Aïcha :
au cours d'une sortie avec le Prophète il lui a proposé de faire une course. Ils coururent et le Prophète a gagné la course. Il a dit à Aïcha :
« Celle-ci pour celle-là ».
Faisant allusion, disait Aïcha , au jour où elle était enfant, son père l'avait envoyée avec quelque chose dans la main le Prophète lui dit alors donne-moi ce que tu as ; n'ayant pas voulu le lui donner, il courut derrière elle sans pouvoir la rattraper.
D'après Abu salama , le Prophète sortait sa langue pour son petit-fils al Hassan fils de Ali , et celui-ci s'en étonnait.
On rapporte que Noaïman al ansari était un homme qui aimait plaisanter, à chaque fois qu'il rentrait à Médine, il achetait quelque chose qu'il offrait au Prophète , et quand le commerçant vient demander le prix de la marchandise à Noaïma, celui-ci le ramenait chez le Prophète et lui disait:
« Ô Envoyé de Dieu ! Paye-lui le prix de sa marchandise !» le Prophète lui disait : « Ne me l'a tu pas offert ? », et Noaïman lui répondait:
« Ô Envoyé de Dieu ! Je n'avais pas de quoi payer et j'ai aimé tant que vous le mangiez.. », et le Prophète souriait et ordonnait qu'on paye le marchand.
Ainsi ce genre de bonne humeur et de plaisanterie est admise, mais sans excès ni dans la durée ni dans l'intensité.
Selon une autre opinion qui ce base sur un hadith du Prophète, il est très déconseillé de plaisanter, en effet ce hadith dit
« Ne fait pas acte de mora't (sournoiseries) envers ton frère, et ne plaisante pas avec lui.. ».
Si on objecte aux tenants de cette opinion:
Comment peut-on déconseiller de plaisanter alors qu'il nous est parvenu du Prophète qu'il plaisantait ainsi que ses compagnons ?
Leur réponse est que cela est répréhensible, sauf s'il s'agit de quelqu'un qui est capable, à l'instar du ( comme le ) Prophète et de ses compagnons, en plaisantant de dire la vérité, sans offenser les coeurs des interlocuteurs et sans excès, alors il peut plaisanter.
Mais c'est une grave erreur que de s'adonner tout le temps à la plaisanterie car, on serait alors comme celui qui passe tout son temps à regarder la danse des Africains en prétextant que le Prophète a autorisé Aïcha de les regarder.
Il y a des petits péchés qui deviennent des péchés majeurs à force de les répéter, comme il y a également des choses licites qui deviennent des pêchés mineurs à force de s'y adonner fréquemment.
9. Le fait de maudire
Il est dans l'habitude des gens de maudire des objets, des animaux, ou des hommes,et tout cela est blâmable. le Prophète- a dit:" Le croyant n'est pas maudisseur."
Maudire quelqu'un revient à lui souhaiter du mal ou demander à Dieu de lui faire du mal, car la malédiction a pour sens l'éloignement du maudit de Son Seigneur; alors qu'on doit éviter même de maudire le libertin de son vivant ou après sa mort.
Il y a des savants qui ne déconseillent pas de maudire ceux que Dieu a maudit dans le Coran; en disant par exemple:
" Que Dieu maudisse les renégats, les injustes..."
"Seigneur, ne fais pas dévier nos coeurs après nous avoir mis dans le droit chemin! Etends sur nous Ta grâce, car Tu es le Dispensateur de toutes les grâces."
10. La poésie et les chansons licencieuses
Beaucoup d'encre a coulé à ce sujet. Il en résulte que la poésie est un support d'expression neutre qui peut véhiculer de bonnes ou de mauvaises paroles avec de bonnes ou de mauvaises intentions.Ainsi ce qui est licite de ces paroles et intentions, est licite et ce qui ne l'est pas est alors illicite.On tolère même des paraboles et des images abstraites pour exprimer certaines idées pour dire par exemple de quelqu'un s'il est très généreux:
"S'il n'avait en sa possésion que son âme, il l'aurait donnée..."
Le Prophète a dit:
"Il y a dans une certaine poésie de la sagesse."
Toutefois il est blâmable de trop s'y attacher.
Quant aux chansons, elles sont dans le même cas que la poésie mais de plus pour être licites, il faut que les consonnances de leur rythme n'incitent pas à la débauche et ne séduisent pas les gens au point de négliger leurs obligations religieuses et de sombrer dans l'immoralité. Etc...
"Seigneur, ne fais pas dévier nos coeurs après nous avoir mis dans le droit chemin! Etends sur nous Ta grâce, car Tu es le Dispensateur de toutes les grâces."
11- La moquerie
Le fait de se moquer les uns des autres est illicite, car Dieu dit dans le Coran:
"Ô vous les croyants! Qu'un groupe ne se raille (se moque) pas d'un autre groupe: ceux-ci sont peut-être meilleurs qu'eux. Et que des femmes ne se raillent pas d'autres femmes: celles-ci sont peut-être meilleures qu'elles. Ne vous dénigrez pas et ne vous lancez pas mutuellement des sobriquets (injurieux). Quel vilain mot que "perversion" lorque l'on a déjà la foi. Et quiconque ne se repent pas, ceux-là sont les injustes."
[ Coran 49/11]
Et se moquer de quelqu'un revient à le mépriser, le diminuer, à citer ses défauts pour rire de lui, ou le mimer et le singer; toutefois il y a des amis qui ne se sentent pas offensés de se moquer les uns les autres, cela n'est pas interdit, mais les risques sont courus.
"Seigneur, ne fais pas dévier nos coeurs après nous avoir mis dans le droit chemin! Etends sur nous Ta grâce, car Tu es le Dispensateur de toutes les grâces."
12- La divulgation du secret
C'est encore l'un des dégâts de la langue, le Prophète a dit:"La Parole entre vous est un dépôt."
Il a dit aussi:
"Quand un homme parlant à un autre de quelquechose; une fois prononcée, sa parole devient un dépôt (pour celui qui l'a entendu) ."
Et ainsi divulguer un secret devient la trahison d'un dépôt qu'on vous aurait confié. Il reste alors que cette trahison est illicite si elle engendre des dégâts, sinon c'est de la vilenie.
Al Hassan disait:
"Divulguer le secret de ton frère, c'est le trahir."
"Seigneur, ne fais pas dévier nos coeurs après nous avoir mis dans le droit chemin! Etends sur nous Ta grâce, car Tu es le Dispensateur de toutes les grâces."
13- La promesse mensongère
La langue a tendance à promettre très facilement, alors qu'être fidèle à ses promesses est parfois impossible, et dans ce dernier cas si l'on a fait l'effort de tenir sa promesse sans succès; cela n'est pas grave si ce n'est pas fréquent. Alors que si l'on savait ne pas vouloir ou ne pas pouvoir tenir sa promesse au moment où on la donnait, cela est de l'hypocrisie. Dieu dit dans le Coran:
" Ô vous qui croyez! Soyez fidèles à vos engagements (pactes) ."
Le Prophète a dit:
"Trois choses font de quelqu'un un hypocrite même s'il jeûne, fait sa prière et se dit musulman:
quand il parle il ment, quand il promet il n'honore pas sa promesse, et si on lui confie un dépôt il trahit."
Il ressort de cela que le croyant peut, par la facilité de la parole, s'exposer à la tentation de devenir hypocrite. Aussi, il est de son devoir d'éviter l'image de l'hypocrisie, de même qu'il évite le fond de l'hypocrisie.
14- Le mensonge dans la parole et le serment
Ce genre de mensonge relève des pêchés graves et des défauts pernicieux. Ceci est attesté par plusieurs hadiths de l' Envoyé de Dieu , en ce sens:
"Prenez garde au mensonge! Il est associé à l'impudence. Et tous deux conduisent en Enfer."
"Le mensonge est l'une des portes de l'hypocrisie."
Passant près de deux hommes qui s'entendaient sur la vente d'une chèvre et qui s'échangeaient des serments; l'un deux disait:
"Par Dieu! Je ne peux baisser pour toi son prix au-delà de telle somme! " L'autre lui répliquait:
"Par Dieu! Je ne te le donnerai pas au-delà de telle somme! ".
L'Envoyé de Dieu a dit une fois que l'acheteur de la chèvre était passé devant lui:
"Le pêché et l'expiation s'imposent à l'un deux."
"Il y a trois sortes d'hommes auxquels Dieu ne s'adressera pas au Jour de la Résurrection et ne les regardera pas. Ce sont:
celui qui ne cesse de rappeler son bienfait (al manane), celui qui vend sa marchandise à coups de jurements impudiques, celui qui fait traîner par terre les pans de son manteau."
"Contre celui qui fait un jurement impudique pour s'accaparer illégalement les biens d'un musulman, Dieu- Qu'IL soit Exalté et Magnifié- sera courroucé au moment de la Rencontre Ultime."
Il a dit à Mo'adh:
" Je te recommande d'être véridique dans tes propos, de t'acquitter de ce qu'on te confie, d'honorer ton engagement, d'offrir à manger, d'être bienveillant avec les croyants."
15- La Médisance
L’indécence de la médisance :
Il serait long d’expliciter les blâmes relatifs à la médisance.
Voici quelques versets coraniques et paroles du Prophète-SAWS- à ce sujet :
« …Et ne médisez pas les uns des autres. L’un de vous aimerait-il manger la chair de son frère mort ? (Non) Vous en aurez horreur… »
[Coran 49/12]
Et le Prophète a dit :
« Tout ce qui appartient à un musulman est illicite pour les autres musulmans : son sang, ses biens, son honneur. »
La médisance touche surtout l’honneur de la personne, mais, vu ses effets, le Prophète l’a associé dans ce hadith aux biens et au sang (la vie).
Le Prophète a aussi dit :
« Ne soyez pas jaloux les uns des autres, ne vous haïssez pas, ne vous accusez pas de débauche, ne tournez pas le dos les uns aux autres, ne médisez pas les uns des autres, soyez des serviteurs de Dieu, frères entre vous. »
« J’ai passé lors du voyage nocturne, près de certains gens qui griffaient leurs visages. J’ai dit :
‘Qui sont ceux-là ô Jibril ?’
‘Ce sont, dit-il, ceux qui médisent des gens et portent atteinte à leurs honneurs.’ »
[ d’après Ahmed et Abou Dawoud]
« Ô vous groupe de ceux qui ont la foi au bout de la langue et non dans le cœur (litt. Croyant par la langue et non par le cœur), ne médisez pas des musulmans, et ne cherchez pas à dévoiler leurs intimités (défaut, vice, vie privée…).
Ne suivez pas les traces de leurs défauts pour les dévoiler, car celui qui s’applique à dévoiler l’intimité, de son frère, Dieu dévoilera son intimité et l’exposera à la honte dans sa propre demeure. » [D’après Ahmed, Abou Dawoud, Al Haythami et Abou Yaala ; hadith rapporté par Al Barra].
D’après Moujahid, l’interprétation du verset dans lequel Dieu dit :
« Malheur à tout calomniateur, diffamateur… »
-->Le calomniateur (al houmaza) : c’est quelqu’un qui lance envers les personnes des propos injurieux.
-->Le diffamateur (al loumazah) : c’est celui qui mange la chair des gens.
Al Hassan a dit :
« Par Dieu, la médisance détruit la foi du croyant plus vite que des mangeurs pourraient finir un festin. »
Il a dit aussi :
« Ô fils d’Adam ! Tu n’atteindras pas la vérité (la douceur) de la foi, tant que tu reprocheras à quelqu’un un défaut que toi-même tu as. Tu dois, alors commencer par corriger tes défauts. Corrige-les en toi-même, ainsi tes préoccupations principales seront pour toi. Les privilégiés de l’amour de Dieu sont ceux qui d’abord se préoccupent de corriger leurs défauts avant de faire des reproches à quiconque. »
Certains ont dit :
« Nous avons fréquenté nos prédécesseurs, ils ne voyaient l’adoration - al ibadat- ni dans le jeûne ni dans la prière mais dans le fait de s’abstenir de toute atteinte (médisance) à l’honneur et à l’intimité des gens."
Ibn Abbas a dit :
« Si tu es tenté d’invoquer les défauts d’un ami, alors souviens-toi de tes propres défauts. »
Définition de la médisance :
C’est le fait de parler de ton frère en des termes qui lui auraient déplu s’il l’avait su. Que ce soit en évoquant des défauts relatifs à son corps, son caractère, son origine, ses œuvres, ses paroles, sa vie ou sa religion, et même en ce qui concerne ses vêtements, son foyer ou sa monture.
a) Médire du corps
C’est dire qu’il a les yeux chassieux, qu’il louche, qu’il est chauve, petit, trop grand, noir, pâle, ou n’importe quelle autre description déplaisante.
b) Médire de l’origine
C’est dire d’une personne que son père est africain, hindou, cordonnier, éboueur, libertin, ignoble ou autres qualificatifs qui lui seraient déplaisantes.
c) Médire du caractère
C’est dire de quelqu’un qu’il est de mauvais caractère, qu’il est avare, orgueilleux, ostentatoire, trop coléreux, incapable, de cœur fragile, téméraire…
d) Médire de ses actes de foi
C’est dire de quelqu’un qu’il vole, il ment, il boit de l’alcool, il est injuste, c’est un traître, il est négligent pour sa prière, ou sa zakat ; ou dire qu’il ne parfait pas sa génuflexion (roukou’) ou sa prosternation (soujoud), qu’il ne fait pas attention aux souillures, il n’est pas obéissant envers ses parents, il ne met pas sa zakat là où il faut et il ne la gère pas bien, il ne fait pas attention lors de son jeûne à la médisance et aux obscénités, il s’attaque à l’honneur des gens …
e) Médire de ses actes dans la vie
C’est dire : il est de mauvais caractère, il néglige les gens, il ne reconnaît à personne le droit sur lui, il se croit ayant-droit sur tout le monde, il mange beaucoup, il dort à n’importe quel moment, et s’asseoit n’importe où…
f) Médire d’une personne pour ses vêtements
C’est dire qu’il a une manche très large ; ses vêtements sont sales, son habit est long…
Ainsi, même avec la bonne foi, quand on invoque quelqu’un en des termes qu’il abhorre, on a médit de lui.
On a mangé de sa chair et on a désobéi à Dieu, et cela est confirmé par ce que l’on rapporte du Prophète –SAWS- qui a dit :
« Savez-vous ce qu’est la médisance ? » Les gens présents ont répondu :
‘-Dieu et Son Messager sont plus savants.’
« -C’est de parler de ton frère en des termes qui lui déplaisent. »
Quelqu’un dit :
« -Et si ce que l’on dit de lui est vrai ? »
Le Prophète –SAWS- lui dit :
« -Si ce que tu dis de lui est vrai alors tu as médis de lui, alors que si ce n’est pas vrai tu l’as calomnié. »
[Rapporté par Muslim, Tirmidhi, Ahmed, et Abou Dawoud.]
La médisance n’est pas que verbale
Sache que l’expression verbale médisante est interdite parce qu’elle exprime les défauts de ton frère et le désigne par des termes déplaisants.
Ainsi tout geste, acte, signe, écriture ou allusion qui exprime les défauts de quelqu’un ou le désigne de manière déplaisante, est considéré comme médisance, et c’est illicite.
C’est dans ce sens que Aïcha a dit :
« Une femme est rentrée chez nous. A sa sortie j’ai fais signe de ma main qu’elle était petite de taille. Le Prophète –SAWS- me dit alors :
‘Tu as médis d’elle.’ »
Et parmi les formes de médisance les plus graves ; la singerie, tel marcher en boitant,…car l’expression dans ce cas est plus descriptive.
La médisance se commet également par la plume car la plume est considérée comme la deuxième langue de l’homme. Alors c’est de la médisance qu’un écrivain outrage quelqu’un par ses écrits ; sauf si des excuses aimables accompagnent cette citation- comme on verra ultérieurement-.
Quant aux expressions (non nominatives) comme :
« -Certains gens ont dit telle ou telle chose… » ; cela n’est pas une médisance, mais la médisance c’est de désigner une personne bien précise morte ou vivante.
Par contre dire : quelqu’un qui est passé me voir… ; ou quelqu’un de ceux que j’ai vu aujourd’hui…Si celui qui écoute comprend de qui il s’agit, la médisance est alors commise, car ce qui doit être éviter c’est l’expression qui désigne une personne précise, même par une expression ambiguë, mais si l’on ne comprend pas de qui il s’agit, cela devient permis, et le Prophète –SAWS- quand il désapprouvait quelque chose chez quelqu’un disait :
« Qu’ont-ils certains gens à faire tel ou tel…? »
Il ne désignait jamais quelqu’un.
L’Envoyé de Dieu –SAWS- a dit :
« L’auditeur est l’un des médisants. »
[Rapporté par Tabarani, d’après Ibn ‘Omar].
Celui qui médit et celui qui l’écoute sont associés dans le pêché, tant que celui qui écoute ne conteste pas par sa langue ou par son cœur, s’il a peur (de parler). Si l’auditeur a la possibilité de se lever, ou de dévier le cours de la discussion et qu’il ne l’a pas fait, alors il reste associé dans le pêché.
Mais si l’auditeur demande à son interlocuteur de se taire, alors que son cœur apprécie c’est l’hypocrisie.
[…] il faut réagir en exprimant la gravité de l’offense et défendant clairement et avec vigueur la personne dont on a médit. Le Prophète –SAWS- a dit :
« Celui qui ne défend pas un croyant humilié devant lui alors qu’il en ait capable ; au jour de la résurrection Dieu l’humiliera devant tout le monde. »
[Rapporté par Ahmed et Tabarani].
« Celui qui combat pour l’honneur de son frère en l’absence de celui-ci, alors (il lui revient de droit que) Dieu le soustrait au feu. »
[Rapporté par Ahmed et Tabarani d’après Asma bint Yazid].
Les causes de la médisance
1er mobile : la vengeance
Quand un différend met en colère une personne contre une autre ; alors à chaque fois que cette colère revient, la personne en colère, pour exprimer son exaspération et apaiser sa colère, invoque les défauts de son adversaire, et la langue se lance de par sa nature dans la médisance, s’il n’y a pas une foi solide pour l’en empêcher. […]
2ème mobile : la complaisance
La recherche de la concordance avec les amis, la complaisance envers eux, et le désir de prendre part à une plaisanterie pour faciliter la discussion, ce sont là trois mobiles de la médisance.
Quand des amis plaisantent en médisant des gens à tort et à travers, on pense que le fait de les désapprouver dans leur plaisanterie ou de quitter leur assemblée, serait mal vu et ferait leurs amitiés. Alors on les aide dans la mauvaise plaisanterie, croyant que cela fait partie des bonnes manières en matière d’amitié. […]
3ème mobile : pour invalider un témoignage
Quand un homme sent que quelqu’un allait le blâmer auprès d’un parent, et qu’il témoignerait contre lui. Alors pour alléger l’effet de cet éventuel témoignage, soit il le blâme, et médit de lui en le dénigrant, ou bien il commence par évoquer des choses véritables chez son adversaire après quoi il raconte des mensonges. […]
4ème mobile : pour prouver l’innocence
Quand un homme est accusé d’un acte quelconque, pour prouver son innocence, il révèle celui qui a fait cet acte ; alors qu’il pouvait clamer son innocence sans désigner l’auteur de cet acte, ni même révéler un associé dans l’acte pour en chercher des excuses.
[Il est évident que l’auteur ne demande pas la généralisation de ce comportement à des actions graves, car il faut aussi prendre en compte dans ce cas les droits de la société sur l’individu].
5ème mobile : pour se vanter
Pour se vanter, certaines personnes procèdent à la diminution et au dénigrement des autres en disant :
« telle personne est ignorante, sa compréhension des choses est superficielle, et son discours est très faible (arguments)… »
Mais l’objectif est l’affirmation de sa supériorité et la mise en garde des auditeurs de mettre cette personne sur le même pied que lui-même. […]
6ème mobile : la jalousie
Lorsque l’on est jaloux d’un homme que les gens chérissent, louent et honorent, alors en cherchant à mettre fin à ces avantages qu’il a auprès des gens, on ne trouve d’autres solutions que de le dénigrer et de lui salir la face (réputation) devant tout le monde et on ne trouve d’autres moyens pour –ce vil objectif- que la médisance, car on ne supporte pas d’entendre dire du bien de lui ni qu’on lui fasse acte de générosité.
Ainsi est la véritable jalousie qui est différente de la colère et de la haine, car ces dernières sont suscitées par une faute (un délit, un différent…) alors que la jalousie peut être envers un ami bienfaiteur ou un compagnon fidèle…
7ème mobile : le jeu
Pour jouer, plaisanter, être agréable (envers les copains) et passer le temps dans le rire, on parle des défauts des gens, on les singe de manière à faire rire… et le sentiment qui permet cela prend naissance dans la fierté (hautaine) et l’arrogance !
8ème mobile : le mépris
Parfois par mépris pour quelqu’un, on se moque de lui et on le ridiculise, et cela peut se produire en présence de celui-ci comme il peut se produire en son absence (ce qui devient médisance) et le sentiment qui prend naissance dans la fierté (hautaine )et le mépris envers les gens.
Les devoirs spéciaux pour les hommes de l'élite :
1er mobile: La colère
Quand on éprouve par esprit religieux la nécéssité d'étonnement dans (l'expression de ) la dénonciation de l'inconcevable ou pour remédier à une pratique erronée de la religion , alors on s'exclame: "Que c'est étonnant ce que j'ai vu faire un tel faire.!? En citant son nom.
Il est possible que cet étonnement soit véridique. Mais,même véridique un étonnement ainsi exprimé est inacceptable,il était bien dans son droit de s'étonner mais il ne fallait pas citer le nom de la personne .
Car Satan le pousse à user de l'étonnement pour lui rendre légitime la citation du nom de la personne , il devient ainsi médisant , et pêcheur sans se rendre compte.
Par exemple,l'homme qui dit d'un autre:"C'est étonnant que telle personne aime sa servante (jaria) alors qu'elle est laide ",ou "comment telle personne s'assoit avec telle autre personne qui est un ignorant?" etc...
2è mobile: la miséricorde
Ce chemin de miséricorde qui mène à la médisance peut partir d'une compassion pour ce qui arrive à quelqu'un.Alors on dit de lui:" pauvre un tel! Je suis vraiment préoccupé par ses problèmes et par les épreuves qu'il endure." Etant sincère dans son chagrin , la préoccupation le distrait et il cite le nom de la personne et devient médisant , et ainsi l'étonnement , la miséricorde et le chagrin sont des réactions vertueuses , mais Satan conduit à la médisance par des voies insoupçonnées .
On peut avoir ces émotions envers quelqu'un, mais il faut les exprimer sans citer son nom , car par celà Satan lui gâche le thawab (la récompense par Dieu) pour ces émotions .
http://www.soufisme-fr.com/forum.php
Le Livre d'explication des merveilles du Coeur
Imâm Aboû Hamid Al-Ghazâlî
Sache que le cœur est la partie la plus noble de l’homme. Il connaît Dieu, œuvre pour Lui, chemine vers Lui, jouit de Sa proximité et du dévoilement de ce qu’Il a auprès de Lui. Les autres organes et membres sont ses suivants et ses domestiques dont le cœur se sert comme les rois se servent de leurs esclaves.
Celui qui connaît son cœur connaît son Seigneur. Mais la plupart des hommes ignorent leurs cœurs et leurs âmes. Et Dieu s’interpose entre l’individu et son cœur. Cette interposition consiste à le priver de la chance de Le connaître et d’être vigilant en Sa présence. Donc, la connaissance du cœur et de ses qualités constitue le principe de base de la foi et le fondement de la voie des cheminants.
Les accès d’Iblis au cœur de l’homme.
Sache qu’au regard de sa nature originelle, le cœur accepte la guidance et, qu’au regard de ce qui a été placé en lui comme désirs et passions, il est disposé à se détourner de cette bonne voie. Cette lutte en son sein ; entre le soldat des anges et celui des démons, est permanente, jusqu’à ce que le cœur s’ouvre à l’un d’eux pour lui permettre de s’y affermir et de s’enraciner. L’accès de l’autre s’effectue par subtilisation, conformément à la parole de Dieu : « Contre le mal du tentateur qui si dérobe furtivement ». (Coran CXIV-4). En effet, lorsque Dieu est invoqué, le tentateur se dérobe et lorsque l’insouciance gagne, il se réjouit. C’est dire que rien n’expulse autant du cœur la cohorte des agents de Satan que l’invocation et la mention de Dieu, car ils ne peuvent faire face au dhikr. Sache également que le cœur s’apparente à un château fort et que Satan s’apparente à un ennemi qui veut entrer dans le château fort, s’en emparer et le dévaster. Or, on ne peut protéger le château fort qu’en surveillant ses accès et ses portes. De même, ne peut garder ses portes que celui qui les connaît, et on ne peut repousser le démon qu’en connaissant les accès de ce château fort.
Il faut savoir, à ce propose, que les accès et les portes par où le démon se faufile sont les qualités du serviteur qui sont nombreuses. Toutefois nous allons indiquer les portes principales, qui sont des passages que risque d’emprunter la cohorte de Satan.
Parmi ces grandes portes, il y a la jalousie et la cupidité. En effet, lorsque le serviteur convoite quelque chose, sa cupidité le rend aveugle et sourd et elle voile la lumière du discernement par laquelle il reconnaît les accès du démon. Il en va de même lorsqu’il est envieux, car le démon y trouve une bonne occasion pour embellir chez l’homme cupide tout ce qui le fait parvenir jusqu’à son plaisir, quand bien même ce serait répréhensible et pervers.
Parmi ces grandes portes, il y a aussi la colère, le désir et l’emportement. En effet, la colère est un monstre pour l’entendement et la raison. Or, lorsque les soldats de la raison faiblissent,l le démon lance son offensive et se joue de l’homme. On rapporte, à ce propos que Satan dit : Lorsque l’homme est solide, nous le retournons comme les enfants qui retournent la balle.
Parmi ses autres portes, il y a l’amour de l’ornement et de l’embellissement de la maison, des vêtements et les meubles. En effet, le démon ne cesse d’inviter l’homme à restaurer sa maison, à décorer ses plafonds et ses murs et à l’orner de meubles jusqu’à qu’il finisse sa vie dans cette besogne.
Parmi ses portes, il y a aussi la satiété, car elle renforce le désir et détourne de l’obéissance.
Parmi ses portes, il y a également la convoitise des gens. En effet, celui qui convoite quelque chose chez quelqu’un il ne cesse de le louer exagérément pour ce qu’il n’a pas, de l’amadouer sans lui recommander le bien et interdire le mal.
Parmi ses portes, il y a aussi l’empressement. Or le Prophète – Paix et Miséricorde sur lui - a dit : « L’empressement procède du démon et la lenteur procède de Dieu ».
Parmi ses portes, il y a l’amour de l’argent. Lorsque cet amour possède le cœur, il le corrompt, l’oblige à rechercher l’argent par tous les moyens, le propulse dans l’avarice, l’intimide par la pauvreté et l’empêche de s’acquitter des droits exigibles.
Parmi ses portes, il y a aussi le fait de pousser les gens du commun à spéculer sur l’essence de Dieu, sur Ses Attributs et sur des questions inaccessibles à leurs esprits, ce qui les fait douter des principes fondamentaux de la foi.
Parmi ses portes, il y a aussi le fait de suspecter les musulmans, car celui qui juge un musulman par mauvaise suspicion le méprise, lâche sa langue contre lui et s’estime meilleur que lui. La suspicion est favorisée par la perversion de celui qui soupçonne, parce que le croyant recherche toujours des excuses pour le croyant et l’hypocrite cherche toujours les défauts.
Il convient donc, pour l’homme, de se prémunir des situations qui favorisent les accusations pour qu’on ne les soupçonne pas.
Voila quelques indications sur les accès du démon. Le remède contre ces fléaux consiste à boucher ces accès en purifiant le cœur des défauts. Nous aurons l’occasion, si Dieu le veut, de revenir plus en détail sur ces défauts.
Une fois que les racines de ces défauts sont extirpées du cœur, il ne reste plus pour Satan que des insufflations et des passages instables qu’empêchent la mention de Dieu et l’occupation du cœur par la piété.
Il faut dire que le démon est semblable à un chien affamé qui se rapproche de toi. Si tu n’a pas dans les mains un morceau de viande ou de pain il suffit pour le chasser que tu lui dises : Arrête-toi. Mais si tu as quelque chose dans les mains et qu’il est affamé, il ne s’en ira pas sur la simple ordre que tu lui donnes. Il en va de même du cœur dépourvu de nourriture pour le démon ; celui-ci le quitte dès que tu mentionnes Dieu. Quant au cœur dominé par le désir, le dhikr ne touche que ses alentours et ne parvient pas jusqu’à son noyau intime où le démon peut s’installer. Si tu veux une confirmation de tout cela, regarde bien ceci dans ta prière : Vois comment le démon parle à ton cœur en cet endroit en évoquant le marché, les affaires et tout ce qui se rapporte à la gestion des affaires du bas monde.
Sache également qu’on a pardonné à l’homme ce qu’il se dit en lui-même ainsi que ce que tu envisages de commettre sans aller jusqu’à l’acte. Or celui qui renonce à cela par crainte de Dieu son renoncement comptera comme une bonne action ; et s’il y renonce du fait d’un obstacle, nous espérons pour lui le pardon, sauf s’il s’agit d’une résolution car la résolution, de commettre un péché constitue elle-même un péché. On en a pour preuve la parole du Prophète – Paix et Miséricorde sur lui - : « Lorsque deux musulmans s’affrontent l’épée à la main, celui qui est tué, et celui qui a tué, seront en enfer. On lui a demandé : pourquoi celui qui est tué ? Il a dit : Il tenait à tuer son compagnon ».
Du reste, comment ne pas s’en prendre à la détermination et à la résolution alors que les actes dépendent de tes intentions ? Est-ce que l’orgueil, la duplicité et la fatuité ne sont que des affects intérieurs ? Si un homme voit sur son lit une étrangère qu’il croit être sa femme, il ne commet pas de péchés s’il a des rapports avec elle, mais s’il voit son épouse et croit que c’est une étrangère, il commet un péché s’il a des rapports avec elle. C’est dire que tout cela dépend de la résolution du cœur.
L’attachement du cœur au bien
Il est rapporté, dans le hadith que le Prophète – Paix et Miséricorde sur lui - a dit : « O Toi qui retourne les cœurs, attache nos cœurs à Ta religion. O Toi qui oriente les cœurs, tourne notre cœur vers Ton obéissance ! ». Il est dit dans un autre hadith : « Le cœur est semblable à une plume dans un désert que le vent fait se retourner ».
Sache qu’il y a trois sortes de cœurs en matière d’attachement au bien et au mal et concernant leur hésitation.
Le premier cœur est un cœur rempli de crainte révérencielle, purifié par les exercices spirituels et épuré des mauvais caractères. Les idées du bien s’y déploient en puisant dans les trésors du mystère et il reçoit la guidance de la part du roi.
Le deuxième cœur est un cœur dépité, surchargé de désirs et de passions, souillé par les perversions et corrompu par le vice. Le pouvoir du démon s’y déploie avec force et affaiblit celui de la foi. Un tel cœur se remplit de la fumée du désir, s’obscurcit et devient comme un œil rempli de fumée qui ne peut plus voir. Les réprimandes et les exhortations deviennent inefficaces pour ce genre de cœur.
Le troisième cœur est un cœur où commencent à pointer les idées générées par le désir qui l’invitent au mal, mais il est rattrapé par les idées générées par la foi qui l’invitent au bien. Donnons pour illustrer ce cas l’image suivante : le démon lance une offensive contre la raison et renforce l’appel du désir en lui disant : Ne vois-tu pas comment un tel et un tel lâche les brides de leurs âmes charnelles, et il ne cesse ainsi d’évoquer les cas de plusieurs savants. L’âme incline alors vers le démon. A son tour, l’ange lance sa propre offensive en lui disant : Ceux qui ont péri ne sont-ils pas ceux qui ont oublié l’issue finale ? Ne sois pas dupé par l’insouciance des gens. Vois-tu, s’ils se mettent sous le soleil en plein soleil, alors que tu as une maison fraîche et ombrée, vas-tu te conformer à eux ou rechercher ton propre intérêt ? Comment peux-tu te mettre en désaccord avec eux à propos de la chaleur du soleil et ne pas leur manifester ton désaccord pour ce qui conduit en enfer ? L’âme incline alors vers ce que dit l’ange, puis elle sombre dans l’hésitation entre les deux parties adverses jusqu’à ce que le cœur soit dominé par ce qui lui convient. Ainsi, celui qui est créé pour le bien sera prédisposé pour lui : « Dieu ouvre à la soumission le cœur de celui qu’Il veut diriger. Il resserre et oppresse le cœur de celui qu’Il veut égarer comme si celui-ci faisait un effort pour monter au ciel ». (VI-125).
Mon Dieu ! Accorde-nous la réussite pour accomplir ce que Tu aimes et Tu agrées !
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lundi 19 mars 2012
Turba Philosophorum
Avec l'autorisation de Turba Philosophorum
Article paru dans la revue "La Tourbe des Philosophes n°21 (1982)"
Vers le milieu du treizième siècle apparaissait pour la première fois en
Occident un traité alchimique d’une grande importance et qui devait
susciter au cours des siècles un intérêt jamais démenti, puisqu’on le
trouve mentionné dans les ouvrages de nombreux maîtres, depuis Arnaud
de Villeneuve jusqu’à Fulcanelli. Ce traité est généralement connu sous
son titre latin : Turba Philosophorum. C’est la traduction d’un traité
rédigé en arabe au dixième siècle, et dont l’original ne nous est pas
parvenu 1. Quoi qu’il en soit exactement de sa rédaction primitive, cet
ouvrage fait partie, avec la Table d’Emeraude, l’Entretien du Roi Calid 2
avec le Philosophe Morien, et quelques autres, des traités dont la
transmission assura la pénétration de la tradition alchimique en Occident.
Roger Bacon, Arnaud de Villeneuve, Raymond Lulle n’auraient pas
produit leur oeuvre sans la profonde symbiose qui exista, aux douzième et
treizième siècles, entre les milieux intellectuels d’Islam et d’Occident.
Les oeuvres en latin attribuées à Geber sont certainement traduites de
l’arabe, même si leur auteur n’est pas le Jâbir ibn Hayyân qui vécut au
huitième siècle. De nombreux termes du vocabulaire alchimique passent
de l’arabe en latin. Le Gabritius du Rosaire n’est autre que kibrît, soufre,
et sa soeur Beya est bayda’, blanche. Ces choses sont bien connues, et
nous ne les rappelons ici que pour mémoire. 3
Pour lire la suite, cliquer ici
Article paru dans la revue "La Tourbe des Philosophes n°21 (1982)"
Vers le milieu du treizième siècle apparaissait pour la première fois en
Occident un traité alchimique d’une grande importance et qui devait
susciter au cours des siècles un intérêt jamais démenti, puisqu’on le
trouve mentionné dans les ouvrages de nombreux maîtres, depuis Arnaud
de Villeneuve jusqu’à Fulcanelli. Ce traité est généralement connu sous
son titre latin : Turba Philosophorum. C’est la traduction d’un traité
rédigé en arabe au dixième siècle, et dont l’original ne nous est pas
parvenu 1. Quoi qu’il en soit exactement de sa rédaction primitive, cet
ouvrage fait partie, avec la Table d’Emeraude, l’Entretien du Roi Calid 2
avec le Philosophe Morien, et quelques autres, des traités dont la
transmission assura la pénétration de la tradition alchimique en Occident.
Roger Bacon, Arnaud de Villeneuve, Raymond Lulle n’auraient pas
produit leur oeuvre sans la profonde symbiose qui exista, aux douzième et
treizième siècles, entre les milieux intellectuels d’Islam et d’Occident.
Les oeuvres en latin attribuées à Geber sont certainement traduites de
l’arabe, même si leur auteur n’est pas le Jâbir ibn Hayyân qui vécut au
huitième siècle. De nombreux termes du vocabulaire alchimique passent
de l’arabe en latin. Le Gabritius du Rosaire n’est autre que kibrît, soufre,
et sa soeur Beya est bayda’, blanche. Ces choses sont bien connues, et
nous ne les rappelons ici que pour mémoire. 3
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samedi 17 mars 2012
Le dhikr de la langue et le dhikr du cœur
L'imam Abdelwahab Ash-sha'rani a dit : " J'ai entendu dire : " Le dhikr par la langue est autorisé pour les novices comme pour les grands maîtres, car le voile de La Toute-Puissance Divine ne se lève pour personne, même pas pour les prophètes, alors il y est toujours mais il est plus subtil. " "
L'imâm an-Nawâwî a dit : " Les savants sont d'accord pour déclarer licite le dhikr avec le cœur et la langue pour toute personne en état d'impureté, de souillure, de menstrues et de grossesse. Ceci est valable pour le tasbîh, le tahmîd, le takbîr, la prière sur le Prophète - que Dieu lui accorde la grâce et la paix -, le dou'a', etc. "
L'imâm an-Nawâwî a dit encore : " Le dhikr se pratique soit par le cœur, soit par la langue. Ce qui est le mieux, c'est le dhikr de la langue et du cœur à la fois. Toutefois, s'il a à choisir entre ces deux, il est bien évident que le dhikr avec le cœur est meilleur. Ce n'est pas, pour autant, une raison de renoncer aux deux méthodes parce qu'on craint d'être accusé de duplicité. Passant outre, l'invocateur s'adonnera à la fois aux deux, tout en ayant à l'esprit qu'à travers son invocation, il ne recherche que la Face de Dieu. "
Al-Fudayl Ibn 'Iyyâz a dit : " Renoncer à une activité à cause des critiques des gens est une marque de duplicité. Si l'homme ouvrait la voie à leurs remarques et prenait des précautions pour échapper à leurs vaines conjectures, il fermerait devant lui-même la plupart des portes du Bien et égarerait une part importante de ces obligations religieuses. Ce n'est point là la voie des connaisseurs (de Dieu). "
Le cœur de l'insouciant se couvre d'un voile. Il ne trouve au dhikr aucun goût ni aucune douceur. Et il en va de même pour les autres pratiques cultuelles. Il est dit : " Il n'y aucun profit dans le dhikr quand le cœur est absent et insouciant. " Cela ne veut pas dire qu'on doit abandonner le dhikr par la langue quand le cœur n'y est pas. Au contraire, il y a lieu, pour quiconque est doté d'une grandeur d'âme et d'élévation spirituelle, de lutter contre lui-même, de surveiller son cœur fréquemment, en vue de se transporter d'un dhikr par la langue sans le cœur à un dhikr de la langue avec une présence du cœur. Cela peut s'identifier à celui qui, muni de son arc, lance une flèche. S'il n'atteint pas une première fois son but, il essaie une seconde fois et une troisième jusqu'à ce qu'il y parvienne. Il en est ainsi de l'homme avec son cœur. Il tente une fois après l'autre jusqu'à ce qu'il le familiarise avec le dhikr et l'habitue à sa présence à Dieu le Très-Haut.
" L'autorité de l'Islâm ", al-Ghazâlî a dit : " Sache qu'il est apparu aux hommes clairvoyants et perspicaces que le dhikr est la meilleure des oeuvres. Cependant, trois écorces se superposent en lui, l'une est plus près que l'autre du noyau. Au-delà de ces écorces, le dhikr a son véritable noyau. L'écorce n'a de mérite que d'être la voie vers le noyau. "
L'écorce première : C'est le dhikr par la seule langue.
La seconde écorce : C'est le dhikr du cœur lorsque celui-ci a besoin d'y être impliqué pour être présent et si on l'abandonne à sa nature, il continuera à errer dans de vaines pensées.
La troisième écorce : C'est quand le dhikr devient maître du cœur et le domine entièrement, au point qu'il faudrait à l'invocateur de grands efforts pour arracher son cœur au dhikr l'espace d'un instant ; de la même manière que l'insouciant a besoin d'efforts continus pour établir et maintenir son cœur dans le dhikr.
Le quatrième élément : C'est le noyau (le cœur du dhikr avec le cœur). Dans ce cas l'Invoqué (Dieu) devient maître du cœur, et il ne reste aucune trace du-dit dhikr ; ayant atteint son but, le dhikr s'efface et disparaît, ainsi l'invocateur (ou plutôt l'ex-invocateur) ne se tourne ni vers le dhikr ni vers le cœur, mais au contraire, il se noie entièrement dans la présence de l'Invoqué. Le dhikr lui-même devient un voile qui l'occupe de son Seigneur. Tel est l'état que les connaisseurs (les hommes de Dieu) appellent l'anéantissement. "
Al-Ghazâlî a dit encore : " Ceci est le noyau (le cœur) du dhikr. Toutefois, celui-ci commence par la langue, ensuite par un cœur qui s'efforce, puis par un cœur naturel. C'est enfin, l'emprise de l'Invoqué qui devient maître de tout, et c'est l'effacement du dhikr lui-même s'efface. "
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mercredi 14 mars 2012
Mulây Abdelkâdir Al-Jilânî et Satan
Mulây Abdelkâdir Al-Jilânî et Satan : le vrai miracle est le fait de se détacher du moi et d'avoir la certitude que Tout vient de Lui par Sa grâce et conformément à Sa loi
Un jour, alors que cet éminent maître et savant était assis avec ses disciples, un nuage lumineux dans le ciel apparut! Et une voix du ciel lui cria : « Je suis ton Seigneur, je suis satisfait de toi, je t'autorise tout, tu peux t'adonner à l'illicite ou t'interdire le licite »
Ce grand maître était anéantit en Dieu, son ego est mort (pour quelqu'un d'autre cela pourrait être une gloire pour lui et un témoignage de sa proximité, il ne posera même pas de questions et acceptera tout ce qui est annoncé par cette voix)…Mais, ce connaisseur sûr de lui, répondit aussitôt : « Dis : je suis Allah » , on n'entendit plus la voix un moment, et Moulay ‘Abdel qader continue : « Maudit sois tu, tu es Satan », le nuage devient noir, et la voix repris : « Tu as été sauvé par Ta science, ‘Abdel qader ! »
Un disciple posa alors la question : « Mais, mon maître comment tu as fait pour dévoiler la vérité de ce nuage et de cette voix ?»
‘Abdel qâdir répondit : « D'abord, personne parmi les créatures ne pourra se permettre de s'appeler par le Nom suprême d'Allah, sinon il sera brûlé : et le nuage n'a pas pu se prendre pour Allah, mais simplement pour un Seigneur (rabbun). Je me suis rappelé de même, grâce à Dieu du verset : « Ce n'est nullement le fait d'un être humain que Dieu lui adresse la parole si ce n'est par inspiration ou de derrière un écran (voile) ou qu'Il envoie un messager (l'Archange Gabriel) pour qu'il lui inspire avec Sa permission ce qu'Il veut : Coran Sourate 42, verset : 51 ». Enfin, Dieu n'aurait pas rendu licite ce qui est illicite ou illicite ce qui est licite. »
lundi 12 mars 2012
La Shadhiliya en Tunisie
La Chadlia en Tunisie
Pr. MESTAOUI Mohamed Salaheddine
Le nom de Abou El Hassen Echadheli n’a pas attendu une Hadhra, montée en spectacle pour faire partie du vécu tunisien.
Depuis maintenant près de huit siècles, des plus hautes autorités religieuses exotériques au plus humble des croyants, la Tunisie a toujours frémi aux accents du Hizb el Bahr et au Wird Chadhili qui n’a pas cessé de bercer les générations qui se sont succédées.
Avant même de se distinguer par ses particularités culturelles, la Tunisie s’est signalée par ses pratiques spécifiques dans le domaine du sacré.
Sans dévier du dogme fondamental ni des préceptes de la Sunna, elle a su, à travers les âges, faire une place à la spiritualité.
L’ordre qu’Echadheli a fondé sur cette terre a contribué largement à la douceur du caractère et à la modération du comportement de ses habitants.
On sait que sur un plan aussi sobre, la Zitouna se distingue par la Hamazia du jour du Mouled.
Mais au délà de manifestations populaires et spectaculaires, on sait moins ce que l’ordre Chadheli a introduit dans les habitudes et le comportement du tunisien en termes d’ésoterisme.
Un ordre qui s’appuyant sur le dogme fondamental de la religion, préservant les préceptes de base dans leur lettre et leur esprit, il s’inscrit en droite ligne dans l’héritage d’Abou El Kacem Junaïd.
Comme depuis des siècles, la Tunisie vit cet été le moussem du Maquam où tous les jeudis soir, la colline du Jellaz s’anime en s’ouvrant à la véritable spiritualité. Celle qui met en valeur le message que l’Islam, dans sa sagesse veut transmettre à l’humanité.
Quant on arrive à Tunis venant du Sud par la GP1, on ne manque pas de remarquer ces deux imposantes bâtisses, perchées au haut du cimetière du Jellaz.
Le Maqâm est l'édifice qui est situé tout en haut du cimetière du Djellaz
A l’architecture vaguement ottomane, elles se dressent depuis des siècles face à la ville de Tunis, comme des vigies garantes de sa protection et témoins de sa pérennité.
Choisi comme lieu de retraite et de méditation par ABOU EL HASSEN ECHADLI au début du 13e siècle, ce sanctuaire se présente dans le conscient des tunisiens comme le penchant oriental du mausolée de SIDI MEHREZ, sur le versant occidental de la ville.
Si MEHREZ BENKHLAF, reste le Patron incontesté de la médina, ECHADLI garde toutes ses prérogatives dans la mémoire des générations successives.
Mais c’est sur un autre plan que ABOULHASSEN a marqué de son empreinte Tunis et la Tunisie, alors IFRIQUIA, passage obligé vers l’orient et les lieux saints et carrefour des diverses tendances spirituelles en pleine gestation.
C’est vers cette époque que le grand MOHIEDDINE IBN ARABI, se trouvant au bastingage d’un bateau ancré dans la baie de Tunis, a vu EL KHADHIR sortir d’une grotte surplombant le port de Tunis et y retourner.
La Topographie de Tunis ne laissant aucun doute, c’est de la Maghara qu’il doit surement s’agir. La croyance populaire n’assure-t-elle pas que quant l’imam ECHADLI a construit son sanctuaire sous une forme plus humble et moins imposante que celle d’aujourd’hui. Il a été aidé par ELKHADHIR lui-même ?
Toujours est-il jusqu’à nos jours ce lieu a toujours bénéficie d’une vénération sans égale que ce soit de la masse populaire conditionnée par l’hagiographie que par l’élite des ulémas qui, parallèlement à leur vécu de savants exotériques, n’ont pas moins fréquenté le Maquam et la Maghara pour satisfaire leur besoin de perfection.
L’Imam IBN ARAFA a même composé une Wadhifa, sous forme d’invocation que jusqu’à nos jours, on récite après chaque clôture du Coran, soit environ tous les deux mois à la MAGHARA et deux fois durant le moussem du Maquam.
Plus près de nous, le Cheikh TAHAR BEN ACHOUR et son fils, le Cheikh Fadhel n’ont pas manqué au rituel du Jeudi.
Entre ces illustres figures du savoir, combien d’autres ont gravi la cote menant vers le Maquam pour prendre part à la récitation du Coran, l’oraison des Ahzabs et pour certains, à participer au Dhikr de la fin de la nuit.
Entrée du mausolée de Abou Hassan al-Chadhili
LA MAGHARA

Entrée de la grotte (Mogharah)
C’est la bâtisse intérieure, bâtie à flanc de coteau, au dessus de la GP1.
Elle est animée tous les vendredis soir par des récitants du livre saint et le samedi dès l’aube par une foule de visiteurs venus chercher la baraka et des mourides attachés par un choix volontaire, venus, eux, à un rituel de séances d’oraisons tenues hebdomadairement et réglementées depuis des siècles selon un processus immuable qu’on respecte à la lettre.
C’est au dessus de la Maghara, dans une mosquée spacieuse que se tiennent ces séances.
On y accède à partir de cette mosquée en suivant un labyrinthe à l’itinéraire prodigieusement symbolique.
Mais tenons-nous en à l’activité exclusivement estivale dont le Maquam, la partie supérieure tient lieu de rendez-vous tous les jeudis soir à longueur d’été.
Le moussem de Sidi BELHASSEN qu’on a pris l’habitude d’appeler à travers tout le pays « les quatorze semaines » a, en réalité deux visages : l’atmosphère particulièrement conviviale et populaire entre El Asr et Le Maghreb, se transforme à la tombée de la nuit en une ambiance de recueillement et où la spiritualité envahit la colline dont les contreforts renvoient l’écho des psalmodies du livre saint avant de répercuter les accents émouvants des « Ahzabs » chadhilis pour finir de remplir, à l’approche de l’aube, le ciel du rythme de l’incantation du nom d’Allah, arraché à des poitrines dans un état de soumission totale.
Quel est donc le secret de cette colline qui a ce don d’inspirer chacun, selon sa condition, et au sujet de laquelle l’Imam IBN ARAFA a dit « c’est en fréquentant la Maghara Echadhilia que j’ai fini par avoir l’explication de problèmes d’exégèse qui me paraissaient totalement obscurs »
Pourquoi le Maquam et la Maghara de Tunis suscitent-ils cet engouement particulier ? pourtant le Dhikr CHADHILI est partout pratiqué, les oraisons rythmées ne sont pas l’apanage de ces lieux et la veille du vendredi est considéré comme bénie dans tout le monde musulman.
Ces pratiques ont cours au Maroc, en Egypte, en Syrie et ailleurs où on les exécute à temps variable et informel.
Mais c’est à Tunis seulement qu’elles prennent cette dimension de régularité exemplaire dans l’espace et dans le temps.
Les manaquebs de l’Imam ECHADLI, fruits d’une hagiographie florissante, nous apprennent que la tradition de célébrer ce moussem estival dans ce lieu, à dates et lieux précis prend sa source dans une vision qu’a eue le maitre en ce lieu, il y a huit siècles. Le prophète Mohamed, que la paix soit sur lui, lui est apparu et lui a fait la promesse de visiter ce lieu une fois par an jusqu’au jour du jugement, en été, la veille d’un vendredi au cours de la deuxième moitié de la nuit.
C’est donc dans l’espoir de vivre cette visite de l’esprit du prophète que depuis des siècles les générations successives des adeptes Chadhilis procèdent entre le dernière prière de jeudi et la première du vendredi, à un rituel immuable en trois parties : Lecture du Coran, à raison d’un sixième du Livre Saint par semaine, la récitation d’un « Hizb »tiré d’un recueil composé par le maitre et rassemblé par ses successeurs immédiats et enfin, à l’approche de l’aube, l’invocation du Dhikr, sous sa forme la plus dépouillée puisqu’il ne comporte que le nom d’Allah.
ABOU EL Hassen ECHADLI n’est ni né à Tunis, ni enterré entre ses murs. Deux séjours, de quelques années ont pourtant suffi pour que la voie dont il a été l’éponyme et qui allait par la suite se propager à travers le monde musulman et s’y imposer comme l’ordre de la sobriété et de la modération voit le jour. La voie qui, en Tunisie tout particulièrement, a attiré l’élite et dont la vocation est d’abord le « tarbya », l’enseignement d’un comportement exemplaire vis-à-vis de Dieu comme vis-à-vis de la Société.
L’attachement qu’éprouve le tunisien à la Chadhilia ne peut s’expliquer que par cette aptitude de la Tariqua à donner aux diverses catégories de la société qui s’y intéressent, le sentiment de trouver en son sein la réponse à ce besoin de sérénité qu’éprouve chacun dans sa quête de bien-être. Un sentiment qui, sans le détacher de la vie matérielle et des efforts qu’il faut y déployer, lui donne cet équilibre psychique qui le pousse à être meilleur.
Les milliers de personnes qui « montent » chaque jeudi entre juin et septembre ne sont certes pas tous des disciples, connaissant les arcanes de la doctrine et respectant la discipline doctrinale.
Mais tous, du simple visiteur curieux de découvrir cette ambiance conviviale au « mourid » qui en tant que « lecteur du Coran, Hazzab ou Dhaker s’inscrit dans une discipline qui lui permet de s’élever dans un « Soulouk » sans fin.
Dans son « Dorat El Asrar », IBN ESSABIGH rapporte qu’ABOU HAFS EL DJASOUS, vénérable Cheikh de Tunis du début du 7e siècle de l’Hégire, disait à l’un de ses élèves « Mon fils ! guette l’arrivée de ton maitre. Il arrivera d’Occident un Chérif de la descendance Hassanide du Prophète ».
De fait, ABOU EL Hassen est arrivé deux fois à Tunis.
Le première fois en quête de science qu’il trouva, en particulier, auprès de ABOU SAID EL BEJI, disciple d’ABOU MADYANE.
La seconde fois quand ABDESSELEM Ibn Machieh, le seul qui continua à le considérer comme tel jusqu’à sa mort, lui intima l’ordre de rejoindre Chadhela en Ifriquia.« Dieu t’a doté du nom de Chadheli », lui avait-il dit.
Chadhela, c’est la région au nord de Tunis, comprenant la Monaghan actuelle et ses alentours.

Né en 593 (1196) à Ghomara, dans le Rif marocain, ABOU EL Hassen ECHADLI est allé, jeune, en pèlerinage, puis pérégriné à travers le moyen orient, à la recherche du pole (Qutb). C’est à Baghdad qu’ABOU EL FATH EL WASSITI le réorienta vers l’Occident. C’est là qu’il rencontra Ibn Machich et de là que son exceptionnelle destinée devait prendre sa source.
Après Chadhla et la Jbel Zaghouan, Echadeli fut attiré par la Colline du jellaz où il prit l’habitude de se retirer dans des retraites (Khalwa) plus ou moins longues.
C’est en contrebas du Maquam, où il a eu la vision du Prophète que la Paix soit sur lui, qu’il prit une grotte aux formes hautement symboliques, comme lieu de prière et d’invocation.
Plus tard, on a érigé une mosquée au dessus de cette grotte en prenant soin d’aménager un accès à la grotte à partir de la mosquée.
Jusqu’à aujourd’hui, cette grotte n’a pas cessé d’exercer sur les hommes, une impression de vénération profonde que même les grands esprits ne peuvent y échapper.
Un universitaire Italien, musulman et versé dans les sciences sacrées, convié il y a quelques années à un séminaire organisé à Tunis et ayant pour thème « L’Islam et la Paix », a eu l’occasion de visiter cette grotte d’une façon fortuite et sans s’y attendre. Après la visite et le retour au séminaire, devant des assistants médusés, il a décrit avec des accents émouvants les sentiments qu’il éprouva lors de la descente dans la « Maghara ». Sous le choc de sa découverte, il assura qu’à sa remontée, il avait le sentiment de la Fitra, cette pureté primordiale tant recherchée.
Avant lui, des centaines d’Européens de souche, médecins, ingénieurs universitaires et écrivains, touchés par la grâce de l’Islam et gagnés à la doctrine si chère à René Guénon (Abdelwahed Yahia), ont choisi depuis maintenant un demi siècle de venir à Tunis, en été, se ressourcer dans cette ambiance spirituelle, en quête de perfection. C’est que le disciple le plus doué, peut être, de Guénon, Mustapha Abdelaziz (Michel Valsan) a choisi la Chadhilia comme Tariqua et le Maquam de Tunis comme lieu de ses réflexions dont plusieurs revues spécialisées en ont fait leur thème.
Aujourd’hui encore, le fils et les petits fils du Cheikh Mustapha Abdelaziz, ses innombrables disciples de Paris, de Lyon ou d’ailleurs, continuent de rendre visite au sanctuaire du Jellaz, à la Khaloua de souk El Blat, au mausolée de Sidi Mehrez et à la Zitouna.
Que de livres et d’essais ont été écrits par Charles André Gilis, le disciple le plus proche de Michel Valsan traitant de la voie et de la doctrine sous l’inspiration de cette colline qu’on croit, à tort, réservée uniquement aux morts.
Cela fait près de six siècles que la colline du Jellaz, appelée Jebel Errahma, le mont de la miséricorde, joue dans le conscient des générations le rôle de régénérateur de la piété. Piété populaire qu’inconsciemment on monte cherche de père en fils.
Piète de l’élite où ceux qui, dépassant la simple gestuelle du quotidien, vont chercher dans les profondeurs de l’enseignement Chadhili les moyens spirituels qui équilibreraient leur contraintes purement matérielles imposées par la vie.
Chacun, selon ses aptitudes, sa vocation et ses efforts trouve ce qui renforce sa piété, libère sa conscience ou lui donne des raisons de s’élever moralement.
Pourquoi spécialement ce lieu ? Qui à première vue rassemble une foule de visiteurs hétérogène, allant du profane, venu prendre l’air jusqu’au Alim, le savant, venu, là, compléter par la méditation ses connaissances livresques.
Car plus qu’en Egypte ou en Syrie où s’est développé à des dimensions institutionnelles, plus qu’ailleurs, où sa doctrine fait école, c’est à Tunis que le Chadilisme a pris forme et c’est de Tunis que l’imam a commencé de diffuser son enseignement, et former ses premiers disciples, ces fameux quarante compagnons dont une partie l’a suivi dans son émigration vers l’Egypte et dont quelques uns, restés à Tunis, ont continué son œuvre.
C’est généralement vers cette époque que les historiens du soufisme situent l’apparition des « Tutuqs » les confréries.
Comme les autres grands éponymes, Echchadeli n’avait pas l’intention de créer une confrérie sectaire comme on crée un clan.
Il faut comprendre Tariqua dans son acceptation linguistique de voie et de méthode ; La voie Chadhili, exclusivement en conformité avec l’enseignement du Coran et la Sunna, a réussi une large diffusion dans les milieux des ulamas orientaux et de penseurs occidentaux.
Pour ne citer que ceux ouvertement affiliés au Chadhilisme, ou séduite par sa doctrine, disons que beaucoup ont tenu à visiter le Maquam et la Maghara du Jellaz.
C’est par deux fois que le Cheikh Abdelhalim Mahmoud, doyen dEl Azhar a effectué le voyage de Tunis pour s’y recueillir.
Le professeur Sayed Houcine Nasr, alors doyen de la faculté de Tcheran a tenu à passer, seul, près d’une heure, dans la Maghara à la même époque.
Dans ses écrits si emprunt d’herméneutique, René Guénon n’a cité le sanctuaire Chadhili de Tunis que rarement. Il l’a fait dans un ouvrage traitant de Hermès, ce qui pour les initiés, ne relève pas du simple hasard.
Titus Burckhardt, Frithjof Shuon, historiens de la mystique musulmane et eux-mêmes Chadhilis, ont consacré bien des travaux à ce sujet.
Et qui ne se souvient de Michel Valsan, le vénérable Mustapha Abdelaziz, devenu un habitué des séances d’oraisons et de Dhikr pendant de longues années, jusqu’à sa mort en 1973.combien de Tunisiens, novices à cette époque lui doivent l’explication d’une doctrine qu’ils suivaient sans en comprendre les arcanes.
Qu’on soit simple visiteur adepte novice ou mouride accompli, on trouve toujours dans l’ordre Chadhili, la voie la plus appropriée à sa vocation, dans la pratique du rituel ou dans l’esprit de la doctrine.
Et si ailleurs, le tronc a donné naissance à diverses branches que le temps a fini par distinguer les unes des autres, en Tunisie, l’ordre est resté uniforme, centralisé, structuré comme l’ont voulu les héritiers immédiats de l’imam restés en Tunisie.
Le mérite revient en premier lieu au Maquam et à la Maghara qui ont exercé sur cette école, si effritée ailleurs, un effet centralisateur qui explique le secret de sa pérennité. La conservation intacte de ses structures et de son esprit doivent aussi beaucoup à cette noble famille de la médina de Tunis qui, investie de la charge de l’ordre, a su perpétuer depuis maintenant deux siècles la tradition Chadhilie dans sa pureté originelle. Encore aujourd’hui, sous l’égide du cheikh Hassen Belhassen, que Dieu lui accorde longue vie, neuvième de la lignée les différentes sections du rite Chadhili, sourdes à toute innovation, s’articulent comme à l’origine.
Support essentiel de la communion de la Société tunisienne, l’ordre Chadhili de Tunis n’a pas dévité, tout au long des ans, de sa voie exemplaire, celle de la sobriété (Ashw) de la modération et de la rectitude.
Ceux qui arrivent par la GP1 en peuvent soupçonnez combien de cette colline un esprit saint se diffuse sur la Cité.
Pr. MESTAOUI Mohamed Salaheddine
http://www.mestaoui.com/
Voir aussi le Cimetière du Djellaz en visite virtuelle sur le site http://www.vvt360.com/visite-virtuelle/ejallaz
A suivre inchAllâh
Depuis maintenant près de huit siècles, des plus hautes autorités religieuses exotériques au plus humble des croyants, la Tunisie a toujours frémi aux accents du Hizb el Bahr et au Wird Chadhili qui n’a pas cessé de bercer les générations qui se sont succédées.
Avant même de se distinguer par ses particularités culturelles, la Tunisie s’est signalée par ses pratiques spécifiques dans le domaine du sacré.
Sans dévier du dogme fondamental ni des préceptes de la Sunna, elle a su, à travers les âges, faire une place à la spiritualité.
L’ordre qu’Echadheli a fondé sur cette terre a contribué largement à la douceur du caractère et à la modération du comportement de ses habitants.
On sait que sur un plan aussi sobre, la Zitouna se distingue par la Hamazia du jour du Mouled.
Mais au délà de manifestations populaires et spectaculaires, on sait moins ce que l’ordre Chadheli a introduit dans les habitudes et le comportement du tunisien en termes d’ésoterisme.
Un ordre qui s’appuyant sur le dogme fondamental de la religion, préservant les préceptes de base dans leur lettre et leur esprit, il s’inscrit en droite ligne dans l’héritage d’Abou El Kacem Junaïd.
Comme depuis des siècles, la Tunisie vit cet été le moussem du Maquam où tous les jeudis soir, la colline du Jellaz s’anime en s’ouvrant à la véritable spiritualité. Celle qui met en valeur le message que l’Islam, dans sa sagesse veut transmettre à l’humanité.
ABOU EL Hassen
Le Maqâm est l'édifice qui est situé tout en haut du cimetière du Djellaz
A l’architecture vaguement ottomane, elles se dressent depuis des siècles face à la ville de Tunis, comme des vigies garantes de sa protection et témoins de sa pérennité.
Choisi comme lieu de retraite et de méditation par ABOU EL HASSEN ECHADLI au début du 13e siècle, ce sanctuaire se présente dans le conscient des tunisiens comme le penchant oriental du mausolée de SIDI MEHREZ, sur le versant occidental de la ville.
Si MEHREZ BENKHLAF, reste le Patron incontesté de la médina, ECHADLI garde toutes ses prérogatives dans la mémoire des générations successives.
la zaouïa du saint Mehrez ibn Khalef dans la vieille ville
(visiter la mosquée Mohamed Bey en face qui est fantastique)
C’est vers cette époque que le grand MOHIEDDINE IBN ARABI, se trouvant au bastingage d’un bateau ancré dans la baie de Tunis, a vu EL KHADHIR sortir d’une grotte surplombant le port de Tunis et y retourner.
La Topographie de Tunis ne laissant aucun doute, c’est de la Maghara qu’il doit surement s’agir. La croyance populaire n’assure-t-elle pas que quant l’imam ECHADLI a construit son sanctuaire sous une forme plus humble et moins imposante que celle d’aujourd’hui. Il a été aidé par ELKHADHIR lui-même ?
Toujours est-il jusqu’à nos jours ce lieu a toujours bénéficie d’une vénération sans égale que ce soit de la masse populaire conditionnée par l’hagiographie que par l’élite des ulémas qui, parallèlement à leur vécu de savants exotériques, n’ont pas moins fréquenté le Maquam et la Maghara pour satisfaire leur besoin de perfection.
L’Imam IBN ARAFA a même composé une Wadhifa, sous forme d’invocation que jusqu’à nos jours, on récite après chaque clôture du Coran, soit environ tous les deux mois à la MAGHARA et deux fois durant le moussem du Maquam.
Plus près de nous, le Cheikh TAHAR BEN ACHOUR et son fils, le Cheikh Fadhel n’ont pas manqué au rituel du Jeudi.
Entre ces illustres figures du savoir, combien d’autres ont gravi la cote menant vers le Maquam pour prendre part à la récitation du Coran, l’oraison des Ahzabs et pour certains, à participer au Dhikr de la fin de la nuit.
Entrée du mausolée de Abou Hassan al-Chadhili
LA MAGHARA
Entrée de la grotte (Mogharah)
C’est la bâtisse intérieure, bâtie à flanc de coteau, au dessus de la GP1.
Elle est animée tous les vendredis soir par des récitants du livre saint et le samedi dès l’aube par une foule de visiteurs venus chercher la baraka et des mourides attachés par un choix volontaire, venus, eux, à un rituel de séances d’oraisons tenues hebdomadairement et réglementées depuis des siècles selon un processus immuable qu’on respecte à la lettre.
C’est au dessus de la Maghara, dans une mosquée spacieuse que se tiennent ces séances.
On y accède à partir de cette mosquée en suivant un labyrinthe à l’itinéraire prodigieusement symbolique.
Mais tenons-nous en à l’activité exclusivement estivale dont le Maquam, la partie supérieure tient lieu de rendez-vous tous les jeudis soir à longueur d’été.
Le moussem de Sidi BELHASSEN qu’on a pris l’habitude d’appeler à travers tout le pays « les quatorze semaines » a, en réalité deux visages : l’atmosphère particulièrement conviviale et populaire entre El Asr et Le Maghreb, se transforme à la tombée de la nuit en une ambiance de recueillement et où la spiritualité envahit la colline dont les contreforts renvoient l’écho des psalmodies du livre saint avant de répercuter les accents émouvants des « Ahzabs » chadhilis pour finir de remplir, à l’approche de l’aube, le ciel du rythme de l’incantation du nom d’Allah, arraché à des poitrines dans un état de soumission totale.
Quel est donc le secret de cette colline qui a ce don d’inspirer chacun, selon sa condition, et au sujet de laquelle l’Imam IBN ARAFA a dit « c’est en fréquentant la Maghara Echadhilia que j’ai fini par avoir l’explication de problèmes d’exégèse qui me paraissaient totalement obscurs »
Pourquoi le Maquam et la Maghara de Tunis suscitent-ils cet engouement particulier ? pourtant le Dhikr CHADHILI est partout pratiqué, les oraisons rythmées ne sont pas l’apanage de ces lieux et la veille du vendredi est considéré comme bénie dans tout le monde musulman.
Ces pratiques ont cours au Maroc, en Egypte, en Syrie et ailleurs où on les exécute à temps variable et informel.
Mais c’est à Tunis seulement qu’elles prennent cette dimension de régularité exemplaire dans l’espace et dans le temps.
Les manaquebs de l’Imam ECHADLI, fruits d’une hagiographie florissante, nous apprennent que la tradition de célébrer ce moussem estival dans ce lieu, à dates et lieux précis prend sa source dans une vision qu’a eue le maitre en ce lieu, il y a huit siècles. Le prophète Mohamed, que la paix soit sur lui, lui est apparu et lui a fait la promesse de visiter ce lieu une fois par an jusqu’au jour du jugement, en été, la veille d’un vendredi au cours de la deuxième moitié de la nuit.
C’est donc dans l’espoir de vivre cette visite de l’esprit du prophète que depuis des siècles les générations successives des adeptes Chadhilis procèdent entre le dernière prière de jeudi et la première du vendredi, à un rituel immuable en trois parties : Lecture du Coran, à raison d’un sixième du Livre Saint par semaine, la récitation d’un « Hizb »tiré d’un recueil composé par le maitre et rassemblé par ses successeurs immédiats et enfin, à l’approche de l’aube, l’invocation du Dhikr, sous sa forme la plus dépouillée puisqu’il ne comporte que le nom d’Allah.
ABOU EL Hassen ECHADLI n’est ni né à Tunis, ni enterré entre ses murs. Deux séjours, de quelques années ont pourtant suffi pour que la voie dont il a été l’éponyme et qui allait par la suite se propager à travers le monde musulman et s’y imposer comme l’ordre de la sobriété et de la modération voit le jour. La voie qui, en Tunisie tout particulièrement, a attiré l’élite et dont la vocation est d’abord le « tarbya », l’enseignement d’un comportement exemplaire vis-à-vis de Dieu comme vis-à-vis de la Société.
L’attachement qu’éprouve le tunisien à la Chadhilia ne peut s’expliquer que par cette aptitude de la Tariqua à donner aux diverses catégories de la société qui s’y intéressent, le sentiment de trouver en son sein la réponse à ce besoin de sérénité qu’éprouve chacun dans sa quête de bien-être. Un sentiment qui, sans le détacher de la vie matérielle et des efforts qu’il faut y déployer, lui donne cet équilibre psychique qui le pousse à être meilleur.
Les milliers de personnes qui « montent » chaque jeudi entre juin et septembre ne sont certes pas tous des disciples, connaissant les arcanes de la doctrine et respectant la discipline doctrinale.
Mais tous, du simple visiteur curieux de découvrir cette ambiance conviviale au « mourid » qui en tant que « lecteur du Coran, Hazzab ou Dhaker s’inscrit dans une discipline qui lui permet de s’élever dans un « Soulouk » sans fin.
DIEU t’a nommé CHADHELI
De fait, ABOU EL Hassen est arrivé deux fois à Tunis.
Le première fois en quête de science qu’il trouva, en particulier, auprès de ABOU SAID EL BEJI, disciple d’ABOU MADYANE.
La seconde fois quand ABDESSELEM Ibn Machieh, le seul qui continua à le considérer comme tel jusqu’à sa mort, lui intima l’ordre de rejoindre Chadhela en Ifriquia.« Dieu t’a doté du nom de Chadheli », lui avait-il dit.
Chadhela, c’est la région au nord de Tunis, comprenant la Monaghan actuelle et ses alentours.

Né en 593 (1196) à Ghomara, dans le Rif marocain, ABOU EL Hassen ECHADLI est allé, jeune, en pèlerinage, puis pérégriné à travers le moyen orient, à la recherche du pole (Qutb). C’est à Baghdad qu’ABOU EL FATH EL WASSITI le réorienta vers l’Occident. C’est là qu’il rencontra Ibn Machich et de là que son exceptionnelle destinée devait prendre sa source.
Après Chadhla et la Jbel Zaghouan, Echadeli fut attiré par la Colline du jellaz où il prit l’habitude de se retirer dans des retraites (Khalwa) plus ou moins longues.
C’est en contrebas du Maquam, où il a eu la vision du Prophète que la Paix soit sur lui, qu’il prit une grotte aux formes hautement symboliques, comme lieu de prière et d’invocation.
Plus tard, on a érigé une mosquée au dessus de cette grotte en prenant soin d’aménager un accès à la grotte à partir de la mosquée.
Jusqu’à aujourd’hui, cette grotte n’a pas cessé d’exercer sur les hommes, une impression de vénération profonde que même les grands esprits ne peuvent y échapper.
Un universitaire Italien, musulman et versé dans les sciences sacrées, convié il y a quelques années à un séminaire organisé à Tunis et ayant pour thème « L’Islam et la Paix », a eu l’occasion de visiter cette grotte d’une façon fortuite et sans s’y attendre. Après la visite et le retour au séminaire, devant des assistants médusés, il a décrit avec des accents émouvants les sentiments qu’il éprouva lors de la descente dans la « Maghara ». Sous le choc de sa découverte, il assura qu’à sa remontée, il avait le sentiment de la Fitra, cette pureté primordiale tant recherchée.
Avant lui, des centaines d’Européens de souche, médecins, ingénieurs universitaires et écrivains, touchés par la grâce de l’Islam et gagnés à la doctrine si chère à René Guénon (Abdelwahed Yahia), ont choisi depuis maintenant un demi siècle de venir à Tunis, en été, se ressourcer dans cette ambiance spirituelle, en quête de perfection. C’est que le disciple le plus doué, peut être, de Guénon, Mustapha Abdelaziz (Michel Valsan) a choisi la Chadhilia comme Tariqua et le Maquam de Tunis comme lieu de ses réflexions dont plusieurs revues spécialisées en ont fait leur thème.
Aujourd’hui encore, le fils et les petits fils du Cheikh Mustapha Abdelaziz, ses innombrables disciples de Paris, de Lyon ou d’ailleurs, continuent de rendre visite au sanctuaire du Jellaz, à la Khaloua de souk El Blat, au mausolée de Sidi Mehrez et à la Zitouna.
Que de livres et d’essais ont été écrits par Charles André Gilis, le disciple le plus proche de Michel Valsan traitant de la voie et de la doctrine sous l’inspiration de cette colline qu’on croit, à tort, réservée uniquement aux morts.
Cela fait près de six siècles que la colline du Jellaz, appelée Jebel Errahma, le mont de la miséricorde, joue dans le conscient des générations le rôle de régénérateur de la piété. Piété populaire qu’inconsciemment on monte cherche de père en fils.
Piète de l’élite où ceux qui, dépassant la simple gestuelle du quotidien, vont chercher dans les profondeurs de l’enseignement Chadhili les moyens spirituels qui équilibreraient leur contraintes purement matérielles imposées par la vie.
Chacun, selon ses aptitudes, sa vocation et ses efforts trouve ce qui renforce sa piété, libère sa conscience ou lui donne des raisons de s’élever moralement.
Pourquoi spécialement ce lieu ? Qui à première vue rassemble une foule de visiteurs hétérogène, allant du profane, venu prendre l’air jusqu’au Alim, le savant, venu, là, compléter par la méditation ses connaissances livresques.
Car plus qu’en Egypte ou en Syrie où s’est développé à des dimensions institutionnelles, plus qu’ailleurs, où sa doctrine fait école, c’est à Tunis que le Chadilisme a pris forme et c’est de Tunis que l’imam a commencé de diffuser son enseignement, et former ses premiers disciples, ces fameux quarante compagnons dont une partie l’a suivi dans son émigration vers l’Egypte et dont quelques uns, restés à Tunis, ont continué son œuvre.
C’est généralement vers cette époque que les historiens du soufisme situent l’apparition des « Tutuqs » les confréries.
Comme les autres grands éponymes, Echchadeli n’avait pas l’intention de créer une confrérie sectaire comme on crée un clan.
Il faut comprendre Tariqua dans son acceptation linguistique de voie et de méthode ; La voie Chadhili, exclusivement en conformité avec l’enseignement du Coran et la Sunna, a réussi une large diffusion dans les milieux des ulamas orientaux et de penseurs occidentaux.
Pour ne citer que ceux ouvertement affiliés au Chadhilisme, ou séduite par sa doctrine, disons que beaucoup ont tenu à visiter le Maquam et la Maghara du Jellaz.
C’est par deux fois que le Cheikh Abdelhalim Mahmoud, doyen dEl Azhar a effectué le voyage de Tunis pour s’y recueillir.
Le professeur Sayed Houcine Nasr, alors doyen de la faculté de Tcheran a tenu à passer, seul, près d’une heure, dans la Maghara à la même époque.
Dans ses écrits si emprunt d’herméneutique, René Guénon n’a cité le sanctuaire Chadhili de Tunis que rarement. Il l’a fait dans un ouvrage traitant de Hermès, ce qui pour les initiés, ne relève pas du simple hasard.
Titus Burckhardt, Frithjof Shuon, historiens de la mystique musulmane et eux-mêmes Chadhilis, ont consacré bien des travaux à ce sujet.
Et qui ne se souvient de Michel Valsan, le vénérable Mustapha Abdelaziz, devenu un habitué des séances d’oraisons et de Dhikr pendant de longues années, jusqu’à sa mort en 1973.combien de Tunisiens, novices à cette époque lui doivent l’explication d’une doctrine qu’ils suivaient sans en comprendre les arcanes.
Qu’on soit simple visiteur adepte novice ou mouride accompli, on trouve toujours dans l’ordre Chadhili, la voie la plus appropriée à sa vocation, dans la pratique du rituel ou dans l’esprit de la doctrine.
Et si ailleurs, le tronc a donné naissance à diverses branches que le temps a fini par distinguer les unes des autres, en Tunisie, l’ordre est resté uniforme, centralisé, structuré comme l’ont voulu les héritiers immédiats de l’imam restés en Tunisie.
Le mérite revient en premier lieu au Maquam et à la Maghara qui ont exercé sur cette école, si effritée ailleurs, un effet centralisateur qui explique le secret de sa pérennité. La conservation intacte de ses structures et de son esprit doivent aussi beaucoup à cette noble famille de la médina de Tunis qui, investie de la charge de l’ordre, a su perpétuer depuis maintenant deux siècles la tradition Chadhilie dans sa pureté originelle. Encore aujourd’hui, sous l’égide du cheikh Hassen Belhassen, que Dieu lui accorde longue vie, neuvième de la lignée les différentes sections du rite Chadhili, sourdes à toute innovation, s’articulent comme à l’origine.
Support essentiel de la communion de la Société tunisienne, l’ordre Chadhili de Tunis n’a pas dévité, tout au long des ans, de sa voie exemplaire, celle de la sobriété (Ashw) de la modération et de la rectitude.
Ceux qui arrivent par la GP1 en peuvent soupçonnez combien de cette colline un esprit saint se diffuse sur la Cité.
Pr. MESTAOUI Mohamed Salaheddine
http://www.mestaoui.com/
Voir aussi le Cimetière du Djellaz en visite virtuelle sur le site http://www.vvt360.com/visite-virtuelle/ejallaz
A suivre inchAllâh
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