بـــسْم ﭐلله ﭐلرّحْمٰن ﭐلرّحــيــم ﭐللَّهُمَّ صَلِّ عَلَى سَيِّدِنَا مُحَمَّدٍ وَ عَلَى آلِهِ و صحبه وَ سَلِّمْ السلام عليكم و رحمة الله و بركاته
lundi 25 juillet 2011
Les corps lumineux et les anges chérubins. Par Ibn Arabi
En premier lieu, la forme corporelle se divise en deux catégories : une forme corporelle élémentaire qui englobe une forme corporelle imaginale et une forme corporelle lumineuse. Commençons donc par parler de la forme lumineuse dont nous dirons ceci : le premier corps que Dieu ait créé est celui des esprits angéliques éperdus (ou hébétés, al-muhayyama) devant la Majesté divine.
Ce sont eux dont procède l’Intellect premier et l’Âme universelle. C’est avec le « corps » de ces esprits angéliques que se finalise la création des « corps lumineux » à partir de la lumière de la Majesté divine. Aucun de ces anges n’a été créé par un autre moyen, exception faite de l’Ame (universelle) qui occupe une position inférieure à l’Intellect.
Tous les anges qui ont été créés après ceux-là font parti du règne de la nature (hukm al-tabî’a) et sont de la même espèce que la sphère à partir de laquelle ils ont été créés et dont ils sont les habitants. Il en va de même pour les anges qui président aux éléments ; la dernière catégorie d’anges est celle qui est créée à partir des œuvres des serviteurs et de leurs souffles. Nous allons tous les mentionner, si Dieu le veut, catégorie par catégorie.
Sache que Dieu –exalté soit-Il – était avant même d’avoir créé les créatures et que cette antériorité n’était pas temporelle. Il s’agit là d’une simple expression destinée à faciliter la compréhension. Elle indique une relation (entre Dieu et le monde) qui doit faire percevoir la réalité à l’esprit de l’auditeur. (A l’origine,) Dieu était dans une Nuée aveugle (‘amâ) sous laquelle il n’y avait pas un souffle d’air et au dessus de laquelle il n’y en avait pas davantage.
La première manifestation divine qui y apparut fut la diffusion de la lumière essentielle telle qu’elle nous est décrite dans ce verset : Dieu est la lumière des cieux et de la terre (Cor.24.35). Lorsque la nuée se fut colorée (insabagha) sous l’effet de la lumière, Dieu y déploya les « formes » (çuwar) des anges éperdus d’amour qui occupent une situation supérieure à celle des corps naturels. Nul Trône, nulle créature ne les y précéda et, lorsqu’Il les eut existentiés, Il se manifesta à eux, si ce n’est que cette théophanie relevait pour eux de la non-manifestation (ghayban) et que cette non-manifestation même devint l’esprit de ces formes (angéliques). Il se manifesta à eux par Son Nom de Beauté (litt. : le Beau) si bien qu’ils furent ravis par la Majesté de Sa Beauté et que, jusqu’à présent, ils ne s’en sont pas relevés (litt. : ne sont pas revenus à eux) !
(Muhyî-d-Dîn Ibn Arabî, Extraits du Chap.13 des Futûhât : De ceux qui portent le Trône divin; traduit par A.Penot)
dimanche 24 juillet 2011
Biographie du Cheikh Abû-l-Hassan Châdhilî par Luc de la Hilay
http://leporteurdesavoir.fr/
Maqam de Sidi BelHassen à Houmaythra (Egypte)
Traduit pour la première fois en français, ce récit de la vie du Cheikh Abû-l-Hassan consigne les principales étapes de l’histoire du célèbre Saint et nous instruit, au travers de ses pérégrinations du Maghreb à Égypte, sur les épisodes prototypiques qui ont esquissés les traits caractéristiques de la Voie initiatique dont il est le Maitre fondateur.
Pour lire la suite, veuillez cliquer ici
Maqam de Sidi BelHassen à Houmaythra (Egypte)
Traduit pour la première fois en français, ce récit de la vie du Cheikh Abû-l-Hassan consigne les principales étapes de l’histoire du célèbre Saint et nous instruit, au travers de ses pérégrinations du Maghreb à Égypte, sur les épisodes prototypiques qui ont esquissés les traits caractéristiques de la Voie initiatique dont il est le Maitre fondateur.
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samedi 23 juillet 2011
Larbi Djeradi - Une grande figure soufie: Yahyâ 'Abd-el-Wâhid (René Guénon)
Par Larbi Djeradi
L'œuvre guénonienne se situe au-delà et en dehors du politique, du littéraire, du philosophique ou de l'anthropologique. Elle se donne et se veut comme exposition singulière, mais néanmoins magistrale au sens propre du terme, de la Tradition qui n'est autre que la véritable métaphysique synonyme parfait de l'intellectualité et de la spiritualité.
Cette œuvre est essentiellement de langue française, bien que certains de ses articles sont écrits en d'autres langues (anglais, italien, arabe) et se distribue sur plus de quarante années (de 1909 à 1950) [1]. Le corpus guénonien [2] actuellement établi, est constitué de 17 ouvrages édités du vivant de leur auteur, de 10 ouvrages posthumes, d'un recueil d'articles [3] pour Regnabit : Revue universelle du Sacré-Cœur [4], et d'une attribution [5]. L'exposition guénonienne de la Tradition Primordiale à travers ses formes orthodoxes (et c'est de cela qu'il s'agit fondamentalement), se pose comme radicalement « autre ». Autre surtout par rapport à l'ensemble du capital culturel de l'occidentalité moderne dont les origines se situent selon Guénon avec les débuts du XIVe siècle. Trois grands moments historiques ponctuent cette modernité : La Renaissance, La Réforme et La Révolution. Ces moments constituent en fait des indicateurs de rupture avec l'« esprit traditionnel » qui prédomine dans l'ensemble des cultures essentiellement structurées par le spirituel. L'anthropologie et la cosmologie traditionnelles gravitent autour de la conception métaphysique orientale de l'unicité du « Principe » unique et premier de toute manifestation et de toute non-manifestation.
Aspects de l'œuvre
Examinée sur le plan du contenu, l'œuvre guénonienne, est selon Tourniac [6], l'exposition de cinq grands thèmes : la Métaphysique et l'ordre cosmologique, la langue symbolique, les rites : leur nature et leur rôle, l'histoire et les cycles cosmiques et les états multiples de l'Etre.
Pour Schuon [7] elle peut être décrite selon quatre aspects majeurs. C'est une œuvre intellectuelle, universelle, traditionnelle et théorique.
Intellectuelle : elle porte sur la connaissance et son instrument fondamental qui est l'Intellect supra-rationnel.
Universelle: elle concerne toutes les formes traditionnelles, en adoptant selon les opportunités le langage spécifique de telle ou telle forme particulière.
Traditionnelle : les données exposées sont celles de l'enseignement traditionnel, en privilégiant les formes orthodoxes. Par tradition il faut entendre : " ce qui rattache toute chose humaine à la Vérité Divine " [8].
Théorique : l'objectif immédiat et premier de l'œuvre n'est pas la réalisation spirituelle, mais simplement une préparation théorique, qui en est indispensable.
L'œuvre guénonienne peut donc être considérée comme un ésotérisme théorique où se trouve exposés la doctrine traditionnelle et son langage : la Symbolique, ainsi qu'une critique générale aussi bien que détaillée de la modernité. Schuon propose une grille de lecture de l'œuvre guénonienne en quatre grandes parties : Une première partie constituée par : « Le théosophisme : histoire d'une pseudo-religion » : contrefaçons de la Tradition. « L'erreur spirite » : critique des théories de la réincarnation, de la transmigration et de la métempsycose.
Une seconde partie constituée par : « Orient et Occident ». « La crise du monde moderne ». « Autorité spirituelle et pouvoir temporel ». « Le règne de la quantité et le signe des temps ».
Cette seconde partie pouvant être désignée dans le jargon moderne comme étant « une philosophie de l'histoire ». Elle n'est en réalité que l'expression du regard métaphysique sur l'histoire où l'action doit être subordonnée à la contemplation aussi bien au niveau individuel que social. Dans cette partie sont exposées les conditions d'un authentique redressement ainsi que les raisons des désordres ou dissolution introduits par la modernité tels que la déviation du symbolisme et les fausses spiritualités.
Une troisième partie constituée par : « L'ésotérisme de Dante ». « Le roi du monde ». « Etudes sur la franc-maçonnerie et le compagnonnage ».
Une quatrième partie constituée par : « Introduction générale à l'étude des doctrines hindoues ». « L'homme et son devenir selon le Vêdânta ». « Symbolisme de la croix ». « Les états multiples de l'Etre ». « La grande triade ».
Cette partie traite de l'ensemble des grandes Traditions : Chine, Egypte, Inde, Judaïsme, Christianisme, Islam. Elle comprend également les conceptualisations majeures concernant : le Salut et la Délivrance. La hiérarchie des différents états de l'Etre. Les lois de correspondance et d'analogie ente le Macrocosme et le Microcosme.
Il est à remarquer que cette classification ne touche pas l'ensemble de l'œuvre. Elle date de 1951. Nous pouvons faire remarquer que même en étant perçue comme théorique, l'œuvre guénonienne a été pour beaucoup de ses lecteurs un « support » indispensable pour la pénétration, la compréhension des doctrines traditionnelles mais également le « point de départ » pour beaucoup de pèlerins sur la voie de la réalisation métaphysique. A ce titre on peut dire qu'elle n'a pas été seulement théorique mais également pratique [9].
Une autre approche descriptive celle de Borella [10], proche de la perspective schuonienne, envisage l'œuvre guénonienne comme une structure construite autour de cinq pôles ou thèmes majeurs :
1 Pôle : critique du monde moderne.
2 Pôle : tradition.
3 Pôle : métaphysique.
4 Pôle : symbolique.
5 Pôle : réalisation spirituelle.
Partant des principes généraux de la symbolique dégagée par René Guénon, Borella s'explique sur son schéma structural : Le premier et le dernier constituent respectivement le pôle préparatoire à la connaissance de l'œuvre (réforme de la mentalité) et son pôle terminal et transcendant (dans la mesure où l'œuvre est essentiellement de nature doctrinale et vise expressément la réalisation comme une fin qui la dépasse). L'essentiel du corpus doctrinal est donc défini par les trois éléments polaires centraux : tradition, métaphysique, symbolique. Chacun de ces pôles marque le sommet d'un triangle doctrinal de base, par rapport auquel le pôle réalisation et le pôle critique occuperont respectivement le sommet supérieur et le sommet le sommet inférieur des pyramides que l'on peut construire sur ce triangle [11].
En fait l'œuvre guénonienne est unipolaire. Elle traite de la métaphysique traditionnelle en envisageant son principe, son but, son langage, ses applications. Son principe : l'unicité de la doctrine métaphysique à travers la multiplicité qualitative des différentes traditions orthodoxes. Son but : la réalisation spirituelle par le rattachement à une institution (ou chaîne) initiatique traditionnelle.
Son langage : la symbolique traditionnelle qui diffère de celle comprise par les modernes. Ses applications : sous formes religieuse, scientifique, artistique ou artisanale. La critique des temps modernes n'est qu'un aspect ou application de la théorie traditionnelles des cycles cosmiques qui aboutit à une « histoire sacrée ».
La réception de l'œuvre
La rencontre, pour certains lecteurs, avec l'œuvre du cheikh, fruit du hasard, terme commode du langage ordinaire pour signifier notre ignorance des causes, a été décisive dans leur cheminement culturel. Que dire de cette lecture et de son impact sur ceux, qui, résolument modernistes, rationalistes, scientistes et imprégnés de l'idéologie de l'époque des « lumières » et souvent coupés de leurs racines intellectuelles traditionnelles, culturelles et même linguistiques ? Et particulièrement des lecteurs appartenant sociologiquement à la culture musulmane ? L'école coloniale, ignorant subtilement la civilisation musulmane, les ayant privé de l'apprentissage de leur propre langue, et surtout de la maîtrise de la langue sacrée ? Cette école les faisait ressembler de très près à ces : « Orientaux qui se sont plus ou moins occidentalisés, qui ont abandonné leur tradition pour adopter toutes les aberrations de l'esprit moderne » [12].
Leur position intellectuelle, en donnant à ce qualificatif son sens moderne, ressemblait dans une certaine mesure à celle de Gide. « Je n'ai rien, absolument rien à objecter à ce que Guénon a écrit. C'est irréfutable » [13].
Mais l'excuse gidienne n'était plus valable pour eux. « Mais, en ce temps, les livres de Guénon n'étaient pas encore écrits. A présent, il est trop tard ; "les jeux sont faits, rien ne va plus" » [14].
Retournant progressivement à leur tradition et, d'abords faut-il le souligner, grâce, surtout « aux lectures orientalistes », ils prirent conscience de l'ampleur des dégâts causés par l'école « de la liberté, de l'égalité et de la fraternité » non seulement dans la déconstruction très avancée de leur identité culturelle mais surtout dans la construction d'une formidable forteresse d'ignorance, de préjugés et d'incompréhension entre les trois grandes traditions (judaïque, chrétienne et islamique) issues pourtant d'un même rameau abrahamique, sans compter « l'oubli » ou « le silence » malheureux des autres (hindouisme, bouddhisme et taoïsme). Les références aux autres traditions, minorisées par ignorance ou par mépris, n'avaient rien à envier au travail de l'entomologiste de musée. « René Guénon a "ré-orienté" des intelligences et des esprits qui avaient été désorientés par les fausses valeurs, les mensonges et les mythes d'une société industrielle et marchande installée dans le confort intellectuel et l'exploitation matérielle depuis des siècles » [15].
C'est donc cette réorientation qui a fait naître de nouvelles préoccupations intellectuelles ; des préoccupations typiquement guénoniennes. « Avoir des préoccupations guénoniennes, c'est avoir des préoccupations d'ordre spirituel, et se poser des questions d'ordre métaphysiques, qui peuvent amener celui qui se les pose à se remettre en question, c'est à dire à remettre en question la vie qui est la sienne, et à réfléchir sur les conditions de cette vie ; si on estime que la vie peut être changée » [16].
Ces préoccupations guénoniennes peuvent devenir des errances intellectuelles si elles ne trouvent pas des assises traditionnelles authentiques sur lesquelles s'appuyer pour éviter tous les dangers des pseudo-spiritualités et des parodies modernes du religieux qui ne sont en réalité qu'une religiosité d'ordre pathologique. Comme le souligne Jean Pierre Lauran, biographe de Guénon : « L'œuvre de Guénon opère ou coopère plutôt à nos retournements intérieurs, elle convertit nos modes de pensée ou, tout au moins, provoque un choc de création. En cela elle est une nourriture spirituelle que le partage multiplie comme les pains de l'Evangile (alors que l'institutionnalisation divise comme les biens matériels). Bien souvent les lecteurs de ses livres ont été ramenés à leur tradition » [17].
Le retour à une tradition où les sédimentations complexes des lectures que nous appellerons « lettristes » du texte traditionnel pour ne pas utiliser le lexique aberrant des médias et des politologues de l'islam, sont éludées et écartées soigneusement. Ceci ne peut être une simple affaire de réorientation des intérêts « culturels » mais une remise en cause fondamentale non seulement de la « personne » ce qui peut être décrypté comme un réinvestissement narcissique mais surtout par une réflexion sur la place et la fonction de la spiritualité dans la cité post-moderne. Comme le souligne Marie-Madeleine Davy : « L'œuvre guénonienne, toujours valable, peut suggérer, non pas une critique - aussi ridicule que vaine -, mais une réflexion, qui dans certains cas relève d'une certaine ambiguïté. » [18]
L'ambiguïté ne résidait pas dans qualité de la relation objectale à la modernité dont une des conséquences comportementales possible serait son rejet pur, simple et simpliste, mais la place et la signifiance de celle-ci dans le cadre général d'un travail de restauration du Sujet. Le point de vue guénonien sur la psychologie en général et sur la psychanalyse en particulier et que l'index-bibliographique de Desilets [19] ne recense que partiellement, jette un éclairage nouveau sur la dialectique du « Soi » et du « moi » dans la problématique d'un Sujet enraciné dans la dynamique de la quête. Une quête de sa propre identité. A partir de recherches approfondies et une immersion dans les grandes Traditions (menées, certainement aussi bien de manière académique que traditionnelle et sur lesquelles, nous ne savons, à l'heure actuelle, relativement peu de choses) [20], la lecture guénonienne de « l'homminité » reformule, en un langage très rationnel, une perspective spirituelle universelle de connaissance et du devenir de toute individualité humaine quel que soit son ancrage culturel et/ou cultuel. L'exposition guénonienne s'enracinant dans l'universel. Le regard traditionnel exposé par Guénon offre :
1 - Une formidable possibilité de compréhension et d'ouverture aux autres mondes et à des civilisations largement ignorées ou méconnues par le grand public musulman particulièrement maghrébin et même par une grande partie des universitaires et des hommes de culture. Ces univers traditionnels remis à l'ordre du jour par l'œuvre guénonienne, partagent avec nous des valeurs et une spiritualité égales sinon supérieures à celles qui nous sont communes avec le monde judéo-chrétien [21].
2 - La possibilité d'une nouvelle réflexion sur la formation en sciences humaines et particulièrement celle du psychologue qui butte sur le constat simple des limites objectives de l'investigation, de l'intervention et de l'aide psychologiques dans l'adaptation et le développement de la personne humaine. La théorisation profane pose, sous forme de certitude absolue implicite, le seuil cognitif comme seuil supérieur de l'état humain. Ce seuil étant situé dans le mental, le psychique, ou le psychologique selon les auteurs et les écoles. Le seuil inférieur étant celui de la sensibilité, de la sensorialité, de la corporéité, du pulsionnel.
3 - La possibilité d'une recherche et d'une réflexion sur la nécessité d'un nouveau cadrage théorique pour les sciences de l'homme en général et de la psychologie en particulier par la « convertibilité », la « réadaptation » ou la « transposition », au sens didactique du terme, d'une connaissance de l'homme en un savoir sur l'homme. Une recherche qu'on peut situer dans le sillage des travaux de Francisco Garcia Bazan [22] sur « le champ d'application de la doctrine métaphysique ». Ou de la réflexion « épistémologique » de Michel Michel [23].
4 - L'important, le nécessaire, l'indispensable travail de ressourcement à notre propre tradition spirituelle. Un travail spirituel et psychologique qui relativise aussi bien l'auto-analyse que l'analyse didactique en reformulant en termes traditionnels un rapport analysant-analysé situé dans une perspective symbolique universelle dépassant la fixation d'une analyse focalisée sur les modalités expressives du transfert-contre-transfert.
5 - Le travail personnel de restructuration, de réorientation, d'enrichissement de notre propre intériorité. Un travail indispensable au regard et à l'écoute cliniques dans le cadre de l'intervention psychologique24.
La fonction du Cheikh
Remise en ordre du champ de l'intellectualité. Exposition de la Tradition Primordiale. Coomaraswamy note que : « M. René Guénon n'est pas "un orientaliste", mais ce que les hindous nommerait un Guru. » [25]
Si l'on considère le sens strict du mot guru, René Guénon n'a ni la fonction ni le statut qu'implique ce terme. Sur ce point là M. Najmoud-dine Bammate précise : « Guénon a toujours affirmé… qu'il n'était pas un maître spirituel et ne voulait pas avoir de disciples. Ce n'était pas un gourou, ni un prophète pas plus qu'il n'était un essayiste ni un orientaliste. » [26]
Celui-ci n'est pas un guru, au sens strict et initiatique du terme, mais il est très certainement un upaguru. La tradition hindoue désigne par le mot upaguru… tout être, quel qu'il soit, dont la rencontre est pour quelqu'un l'occasion ou le point de départ d'un certain développement spirituel ; et, d'une façon générale, il n'est aucunement nécessaire que cet être lui-même soit conscient du rôle qu'il joue ainsi. Du reste, si nous parlons ici d'un être, nous pourrions tout aussi bien parler également d'une chose [la personne et l'œuvre guénonienne] ou même d'une circonstance quelconque qui provoque le même effet ; cela revient en somme à ce que nous avons déjà dit souvent, que n'importe quoi peut, suivant les cas, agir à cet égard comme une « cause occasionnelle » ; il va de soit que celle-ci n'est pas une cause au sens propre de ce mot, et qu'en réalité la cause véritable se trouve dans la nature même de celui sur qui s'exerce cette action, comme le montre le fait que ce qui a un tel effet pour lui peut fort bien n'en avoir aucun pour un autre individu [27].
Ce que précise également Jean-Pierre Laurant : « …la fonction "d'Upaguru" peut revenir aux livres qui disent la Tradition et détruisent l'apparence des choses… » [28].
Du fait que Guénon a insisté sur la symbolique du « Pôle », pas plus d'ailleurs que d'autres symboles, Tourniac y voit en celui-ci, le « Pôle » de son époque, c'est à dire El-qotb, soit le plus haut degré de la hiérarchie spirituelle dans la doctrine du Taçawwuf. Le Principe divin unique, suprême, est symbolisé par le « Pôle » : la « Somme » guénoniènne porte en effet une signature « polaire ». Nombre de commentaires relatifs au symbolisme polaire reviendront d'ailleurs dans les ouvrages de Guénon et nous pourrions en déduire une allusion à la fonction qu'assure l'auteur, même s'il ne la revendique pas expressément [29].
Les prénoms de Jean-René et de Yahya sont hautement symboliques [30]. Le prénom arabe de Yahya est l'exact équivalent de Jean-René, de Jean sur le plan du signifiant, de René sur le plan du signifié ; il exprime précisément une mort et une renaissance symboliques, donc l'état de l'individu deux-fois né, « Dwija » dans la tradition hindoue. Ceci est également vrai pour Palingenius (du grec : qui renaît) un des pseudonymes de Guénon. La renaissance est le fondement et l'essence mêmes de l'Initiation au sens traditionnel du terme. Il symbolise l'Annonciateur, celui qui prophétise, par référence à Jean-Baptiste dit le Précurseur c'est à dire celui qui annonce des changements qualificatifs et significatifs de la Temporalité, mais également, Jean L'Evangéliste celui qui, inspiré par l'ange, écrivit l'Apocalypse et père de la tradition ésotérique dite « johannite ». Par dérivation du prénom Arabe nous pouvons obtenir le qualificatif de « Muhyî » c'est à dire vivificateur, qu'il n'est pas loin de partager avec le Grand Maître de l'ésotérisme islamique, le cheikh El-Akbar, EL-Kebrit el-Ahmar (le « souffre rouge »), le cheikh Muhyî ed-dîn Ibn El 'Arabî. Les références Akbariennes sont nombreuses et fondamentales dans l'œuvre du cheikh Yahya 'Abd El-Wâhid [31].
Par contre sa fonction s'apparente bien à celle d'un Cheikh c'est à dire celle d'un Maître. Curieusement l'aspect formel et didactique de l'enseignement guénonien, s'apparente à celui d'un Cheikh de la tradition exotérique, même si le contenu de son enseignement reste enraciné dans l'ésotérique. Guénon a montré l'intrication et l'implication des deux aspects de la doctrine traditionnelle particulièrement pour l'espace traditionnel musulman et chinois. Cela se reflète harmonieusement dans son enseignement. On pourrait même parler, par analogie à la théorisation psychanalytique, de l'étayage d'un enseignement sur l'autre. N'est ce pas là une des raisons et non la principale qui expliquerait le choix et l'installation de Guénon dans la tradition islamique ? La communauté islamique étant la dernière, celle qui clôture le Kali-Yuga (âge sombre ou dernier âge). Le Cheikh, peut avoir plusieurs fonctions, dont l'une entre autres, la dominante ou la plus perceptible socialement est celle d'enseigner, c'est à dire de transmettre et de communiquer une tradition sous quelque forme que ce soit. Certains réduisent la fonction de Guénon à sa plus simple expression : « En tout état de cause, le rôle de Guénon consiste essentiellement en une fonction de transmission et de commentaire et non de réadaptation » [32].
Pour être plus précis en ce sens, nous ne pouvons qu'être d'accord avec l'avis de Bammate : « Guénon ne voulait pas être un penseur mais un porte-parole » [33].
Ce que nous pouvons quand même souligner, c'est que Guénon donne des indications précises sur les limites de sa propre volonté : « Tout ce que nous pouvons nous proposer, c'est donc de contribuer, jusqu'à un certain point et autant que nous le permettront les moyens dont nous disposons, à donner à ceux qui en sont capables la conscience de quelques-uns des résultats qui semblent bien établis dès maintenant, et à préparer ainsi, ne fût-ce que d'une manière très partielle et assez indirecte, les éléments qui devront servir par la suite au futur jugement, à partir duquel s'ouvrira une nouvelle période de l'histoire de l'humanité terrestre » [34].
Nous sommes bien dans une stratégie de préparation de la Post-Modernité.
Les qualifications du Cheikh
C'est en tant qu'individualité isolée « ayant les aptitudes intellectuelles voulues » et « présentant les qualifications requises » que Guénon a bénéficié de l'enseignement doctrinal et de l'initiation des grandes traditions orthodoxes.
A ce silence que certains reprochent aux orientaux, et qui est pourtant si légitime, il ne peut y avoir que de rares exceptions, en faveur de quelque individualité isolée présentant les qualifications requises et les aptitudes intellectuelles voulues [35].
Le statut du Cheikh
Le Cheikh Yahya 'Abd el Wâhid est pour beaucoup de ses continuateurs la Référence par exellence. Il est une « Autorité Traditionnelle », une « boussole », la voix de la Tradition Primordiale « ed-dine el qayyim » pour le kali-yuga que nous vivons et que nous subissons. Ce statut découle des conditions exceptionnelles de l'expérience guénonienne:
- situation exceptionnelle de désordre causé par la « mentalité » moderne, mais qui néanmoins fait partie de l'ordre universel.
- parcours personnel inédit à travers l'univers de la pseudo-spiritualité. - initiation aux grandes traditions orthodoxes : Christianisme, Hindouisme, Taoïsme, Islam.
La station du cheikh
Maqâm au sens soufi du terme ; degré dans la hiérarchie spirituelle. Guénon « étant parvenu à s'assimiler certaines idées », ne veut ou ne peut rien en dire. Ce que l'on peut supposer, du moins au moment où il écrivait ces lignes, que l'étape du voyage vers l'identité suprême était encore un but à atteindre. Ou bien ce but étant atteint, il était dans une phase de réalisation descendante. Cela pourra accréditer la thèse de ceux qui pensent que Guénon. était préparé et « missionné ».
Dans une autre optique et en se plaçant du point de vue de la symbolique des castes (jâti ou varna) dans la Tradition Hindoue, selon laquelle les individus se situent dans l'une ou l'autre des quatre castes : Brâhmanas, Kshatriyas, Vaishyas, Shudras. Cependant certains sont en dehors de celles-ci. Ils peuvent être soit au-dessous et en deçà des castes ou soit au-dessus et delà : Avarna : « sans caste », c'est à dire au-dessous d'elles. Ce qui correspond à ce que l'on appelle un homme sans religion, un homme sans foi ni lois. Insan bidoun din wa la mala. Ativarna : « au-dessus et au-delà des castes », cas extrêmement rare qui : « s'applique exclusivement à ceux qui ont prie effectivement conscience de l'unité et de l'identité fondamentales de toutes les Traditions » [36]. Serait-ce le cas de Guénon ? Comme l'a été celui du cheikh El-Akbar :
Mon cœur est devenu capable de toutes les formes
Une prairie pour les gazelles, un couvent pour les moines
Un temple pour les idoles, la Ka'ba du pèlerin
Les Tables de la Thora, le Livre du Coran37.
La mission
Nous pouvons dire ce que d'abord sa mission n'est pas. « Quant à nous, nous ne sommes nullement chargés d'amener ou de d'enlever des adhérents à quelques organisation que ce soit, nous n'engageons personne à demander l'initiation ici et là, ni à s'en abstenir et nous estimons même que cela ne nous regarde en aucune façon et ne saurait aucunement rentrer dans notre rôle » [38].
Si, c'est bien le rôle que Guénon s'est fixé à lui-même ou que la discipline traditionnelle et initiatique impose, il est à noter que, pour certaines individualités qui le sollicitaient et qui voulaient s'engager dans la Voie Initiatique et dans le cadre de la tradition islamique, il a quand même, par la force des choses, pris l'initiative de les « conseiller », de les « orienter » vers la Zawia de Mostaganem dirigée d'abords par un grand Maître le cheikh Ahmed El 'Alawi, puis par son successeur le cheikh Adda Ben Tounes.
Même si son œuvre participe dans une certaine mesure à une « restauration initiatique sur des bases vraiment sérieuses », Guénon précise : « Redisons-le encore une fois, ce n'est pas à nous qu'il appartient d'intervenir activement dans des tentatives de ce genre ; indiquer la voie à ceux qui pourront et voudront s'y engager, c'est là tout ce que nous prétendons à cet égard. » [39]
Cette mission ne peut être réduite uniquement à une exposition, partielle et orientée vers la mentalité occidentale ou occidentalisée, de « ce qu'il a compris » de la tradition primordiale. Il a, comme il a su si bien l'exprimer : « contribué à apporter quelque lumière» [40].
L'apport guénonien a eu une authentique influence spirituelle même sur les non-occidentaux. « Ayant pu bénéficier de la barakah de René Guénon, j'ai tenu à ne pas entrer dans le vif des souvenirs personnels » [41].
La barakah ou influence spirituelle du cheikh ne serait-elle pas également diffuse dans son enseignement et diffusée par ses propres écrits ? Ce qui se constate de plus en plus est la très large audience accordée à son œuvre dans pratiquement toutes les traditions par un lectorat de plus en plus sensible à ses thèses et surtout aux qualités certaines de son argumentation. Le travail guénonien est assimilable à « l'activité non-agissante » ou Wu-Wei du Taoïsme de la Tradition ésotérique chinoise. Guénon est-il une boussole infaillible ? [42] Cette mission est-elle de l'ordre d'une volonté et d'un désir personnels ou bien s'agit-il d'une action qui entre dans le cadre d'une stratégie supra-individuelle ? Ce qui est incontestable, est que, l'Ecrit Guénonien historise son action, et surtout sa diffusion et son influence, et l'assimile donc à la catégorie des Maîtres Spirituels « missionnés » et dont les objectifs peuvent être différents ou complémentaires (Autorité et enseignement traditionnel ou /et pouvoir temporel). Cas de l'Emir 'Abd Al-Qâdir, d'Ibn 'Arabî ou même de Saint Bernard, auquel d'ailleurs, il a consacré une étude.
Les limites
Absence de prosélytisme : « la moindre préoccupation de convaincre qui que ce soit ». Pas d'adeptes ni de disciples, et encore moins de Maître autorisé, de la transmission « de l'influence spirituelle, la baraka » ; la baraka guénoniènne n'étant pas celle qui se focalise sur un individu particulier, mais celle qui se diffuse dans des ambiances, des climats particuliers et qui participe dans une certaine mesure à leur émergence et à leur manifestation.
Absence de transmission de initiation traditionnelle. A l'état actuel de nos recherches il ne nous semble pas que le cheikh Yahya 'Abd al Wâhid soit un transmetteur autorisé de la baraka et du « wird » (dhikr ou rosaire) de la Tariqa Chadhiliya à la quelle il appartenait très certainement. Il n'a donc été ni Mokadem, ni Khalifa.
L'œuvre de Guénon ne peut constituer en soi une initiation proprement dite, mais sûrement une excellente propédeutique à l'aspirant métaphysicien au sens traditionnel du terme, le reste comme il le précise très bien est une volonté et un effort strictement personnels.
Absence de « vulgarisation » : enseignement initiateur, réservé à la genèse et la formation de l'élite.
L'exposition même des idées traditionnelles, en dehors de ses limites intrinsèques que lui imposent plus ou moins les différentes formes d'expressions, est assujettie à la nature et aux limites de la réceptivité de la mentalité de l'Occident moderne.
Il est à noter deux points fondamentaux à propos de la diffusion de l'œuvre de Guénon : dans une de ses notes Guénon aurait souhaité faire « paraître ses ouvrages sous le couvert du plus strict anonymat » [43] avec tout ce que peut connoter dans son sens supérieur [44] cette notion dans le domaine traditionnel ; c'est à dire la disparition pure et simple de ce qui a trait à l'individualité et à la notion moderne d'auteur qui impose forcément la présence d'une psychologie. Un anonymat qui : « évite les préoccupations des modernes de faire connaître leur individualité ».
La diffusion de l'œuvre implique également un allocutaire dont Guénon trace les grands traits : Malgré tout, il existe encore actuellement, même en Occident, des hommes qui, par leur « constitution intérieure » ne sont pas des « hommes modernes », qui sont capables de comprendre ce qu'est essentiellement la tradition, et qui n'acceptent pas de considérer l'erreur profane comme un « fait accompli » ; c'est à ceux-là que nous avons toujours entendu nous adresser exclusivement [45].
Les silences
Comme la tradition, pour certaines de ses applications, notamment la magie, la divination Guénon garde lui aussi des silences notamment pour la théorie des cycles temporels.
« Nous ne sommes pas de ceux qui pensent que tout peut-être dit indifféremment, du moins lorsqu'on sort de la doctrine pure pour en venir aux applications ; il y a alors certaines réserves qui s'imposent, et des question d'opportunité qui doivent se poser inévitablement… » [46].
Ce silence concerne également sa propre expérience spirituelle sur laquelle il n'a pratiquement rien dit de pertinent qui doive être retenu pour la postérité, n'a rien voulu en dire, et ne peut en dire quoi que ce soit. Nous n'avons jamais entendu exprimer nulle part quoi que ce soit de notre « expérience intérieure, » qui ne regarde et ne peut intéresser personne, ni du reste de « l'expérience intérieure » de quiconque, celle-ci étant toujours strictement incommunicable par sa nature même [47].
Bibliographie :
1- De 'deux comptes rendus de l'école hermétique' à la revue L'Initiation en 1909 à 'Influence de la civilisation islamique' à la revue El Maarifa au Caire en 1950.
2- En annexe à cet article.
3- Articles repris dans d'autres ouvrages.
4- René Guénon, Ecrits pour Regnabit. Recueil posthume établi, présenté et annoté par Pier Luigi Zoccatelli, Milano, Arché, 1999.
5- " Psychologie ", René Guénon (attribution), texte introduit et édité Par Alessandro Grossato, Milano, Arché, 2001. Attribution, bien que maintenant attestée (sous deux autres versions que celle de Grossato), a reçu une réserve très critique de la part de Bruno Hapel dans un compte rendu de lecture dans la revue Vers la tradition.
6- Jean, Tourniac, 'Nouvelles réflexions sur l'œuvre de René Guenon', les dossiers H, L'Age d'Homme, Lausanne, 1984, p. 27-28.
7- Frithjof, Schuon, 'L'œuvre', Etudes Traditionnelles, numéro spécial, Paris, 1951, p. 256-261.
8- Ibid, p. 258.
9- Dans le langage soufi on peut dire que pour beaucoup de ses lecteurs elle rendu accessible le premier état spirituel celui de " l'éveil " el yaqaza. Cf, l'ouvrage collectif : René Guénon l'éveilleur.
10- Jean, Borella, 'Du symbole selon René Guénon' , L'Herne N° 49 : " René Guenon " , Editions de l'Herne, Paris, 1985, pp. 207-221.
1 - Ibid, p. 207.
2- C.M.M., p . 153.
3- Henri, Bosco , extrait du numéro spécial de la N.R.F , consacré à André . Gide, Gallimard, 1951.
4- André, Gide , Journal 1942-1949, Paris, 1950, p. 195-196.
5- René, Alleau, 'introduction', actes du colloque international de Cerisy-la-Salle, juillet 1973, Milano, Arché, 1980, p . 9.
6- Rolland, Man, 'Comment peut-on être guénonien ?', colloque du centenaire, Domus Medica , Edition le Cercle de Lumière, 1993, p . 190.
7- Jean-Pierre,Laurant, Le sens caché de l'œuvre de René Guenon, Lausanne, L'Age d'Homme , 1975, p . 256.
8- Marie-Madelaine, Davy, 'Remarques sur les notions de métaphysique, d'ésotérisme et de tradition, envisagées dans leur rapports avec le Christianisme', les dossier H, Lausanne, 1984, p. 123.
9- André, Desilets, René Guénon : index-bibliographique, Québec, 1977.
20- Cf : les travaux bio-biliographiques de J-P. Laurant.
2 - Daryush, Shaygan, Hindouisme et Soufisme, Paris, Albin Michel, 1997.
22- Fransico Garcia, Bazan, 'René Guenon o la Tradicion Viviente', traduction partielle d'André Coyne, Lausanne.
23- Michel, Michel, 'Sciences et tradition, la place de la pensée traditionnelle au sein de la crise épistémologique des sciences profanes', L'Herne n° 49 : René Guenon, Paris, Editions de L'Herne, 1985 , p. 44-70.
24- Cf. L'observation de Krishnamurti à propos d'une psychanalyste, in La révolution du silence, Paris, Stock, 1977, p : 119.
25- Ananda, Coomaraswamy, ' Sagesse orientale et savoir occidental' , Etudes Traditionnelles, numéro spécial, Paris, 1951, p. 197.
26- Nadjmoud-dine, Bammate, 'René Guenon et l'islam' , Colloque de Cerisy-La-Salle, 1973, Milano, Arché, 1980, p. 90.
27- I.R.S. p. 162.
28- Jean-Pierre, Laurant, 'René Guenon, maître spirituel', Colloque du centenaire, Domus Medica, Le Cercle de Lumière, 1993, p. 158.
29- Jean, Tourniac, 'Nouvelles réflexions sur l'œuvre de René Guenon', op cité, p. 22.
30- Guénon est-il un Muhyî un vivificateur, un Mujaddid un rénovateur ou un Muslih un réformateur ? Les limites de cet article ne nous permettent pas de discuter ces différents aspects.
3 - Dernière signature de René Guénon que l'on retrouve dès 1931, au début de l'article 'connais-toi toi-même', écrit en arabe pour le n° 1 de la revue Al-Ma'rifah éditée au Caire.
32- Schuon Frithjof : op cit., p. 261. 33- Nadjmoud-dine, Bammate Ammate, 'discours inaugural', Colloque de Cerisy-La-Salle, 1973, Milano, Arché, 1980, p. 7.
34- C.M..M. p. 11.
35- I.G.E..D.H. p. 4 - 5.
36- A.I., p. 31.
37- Claude, Addas, Ibn 'Arabî ou la quête du Soufre Rouge, Paris, Gallimard, 1989, p. 252.
38- A.I. p. 8 - 9.
39- A.I. p. 10.
40- E.D. p. 74.
41- Nadjmoud-dine, Bammate, actes du colloque de Cerisy-la-salle, 13-20 juillet 1973. p. 90.
42- CF Valsan, Gillis.
43- I.R.S. p. 23.
44- R.Q.S.T. p . 88 - 95.
45- I.R.S. p. 27.
46- R.G. 1927 Doc.
47- I.R.S. p. 20.
Al-Ghazzâlî, Lettre au disciple
Traduit par Mehdi Ghorbanian
AU NOM D’ALLAH CLEMENT ET MISERICORDIEUX
Louange à Allah, le Très-Haut, Maître des Mondes; Fin heureuse à ceux qui Le révèrent; Bénédiction et Paix sur son Prophète Muhammad [Paix et bénédiction soient sur lui] ainsi que sur toute sa Famille.
Sache, lecteur, qu’un ancien étudiant qui avait été au service assidu du Cheikh, l’Imâm, Ornement de la religion, Preuve de l’Islâm, Abû Hâmid Muhammad al-Gazâlî (“Rahmatullahi aleih” [Miséricorde d'Allah, le Très-Haut soit sur lui].); qui avait étudié les sciences religieuses auprès de ce maître, réuni les détails des sciences et poussé à la perfection les vertus de l’âme, méditant un jour sur son état, eut l’idée suivante: “J’ai étudié, dit-il, diverses sciences et j’ai passé la fleur de mon âge à les apprendre et à les recueillir; maintenant, il me faut savoir laquelle d’entre elles sera utile demain pour m’assister dans la tombe; quant à celles qui me seront inutiles, je les abandonnerai comme a dit le Messager d’Allah [Sallallahu aleihi wasallâm]: “Mon Allah, protège-moi contre toute science inutile”.
Cette idée l’obséda et le détermina à écrire à son excellence le Cheikh, Preuve de l’Islâm, Muhammad al-Gazâlî; il lui demanda conseil pour se diriger, lui posa certaines questions et la supplia de lui écrire une prière à réciter à des heures déterminées et il ajouta: “Les ouvrages du Cheikh, l’Imâm, tel “Ihyâ-ul-Ulûm-id-dîn” [La Régéneration des sciences religieuses] [1] et autres renferment les réponses à mes sollicitations; cependant, je souhaite vivement que le Cheikh résume ce dont j’ai besoin, en quelques feuillets qui m’accompagneront ma vie durant et dont j’observerai les conseils tant que je serai en vie, si Allahu ta’âlâ le veut”.
Le Cheikh écrivit la lettre suivante en guise de réponse:
Sache, ô jeune homme qui m’aimes et que j’aime — qu’Allahu ta’âlâ prolonge ta vie par la soumission que tu Lui témoignes et qu’IL te conduise dans la voie de ses bien-aimés — que les préceptes les meilleurs le tirent de la mission même du Prophète. Si déjà tu en as tiré une leçon, quel intérêt prendras-tu à la mienne? Mais si, au contraire, tu n’en as rien tiré, qu’as - tu donc appris, dis-le moi, durant tant d’années?
Mon fils! Parmi les conseils donnés par le Prophète d’Allah à ses Compagnons (Ashâb-ı kirâm), on trouve cette sentence: “Lorsqu’un homme a l’esprit préoccupé de soucis sans importance pour lui, c’est le signe que le Très Haut abandonne son serviteur. Celui qui perd une heure de son existence en des recherches pour lequelles il n’a pas été créé mérite qu’Allahu ta’âlâ prolonge ses regrets au jour de la Résurrection. Celui qui dépasse la quarantaine sans que ses bonnes actions ne l’emportent sur les mauvaises, celui-là doit attendre le feu de l’Enfer. A bon entendeur salut!”
Mon fils! le conseil est aisé à donner mais difficile à suivre: il est amer au goût de ceux qui suivent leurs caprices; car les choses défendues sont douces à leur coeur. Je vise, en particulier, ceux d’entre eux qui aspirent à l’étude de la science formelle et se soucient des mérites de l’âme et des voies de ce monde. Ils croient que leur salut dépendra de leur science abstraite, et qu’ils peuvent se passer d’agir. C’est là l’opinion des philosophes. Gloire à Allahu ta’âlâ: ces esprits abusés ignorent que, s’ils n’appliquent pas leur science, elle sera sans aucun doute invoquée contre eux, comme l’a dit le Prophète aleihissalâm: “Le pire supplice, au jour de la résurrection, sera celui du savant à qui Allahu ta’âlâ n’aura pas permis de profiter de sa science”.
On raconte que Gunayd (Abû al-Qâsim, le surnom de Junayd al-Baghdâdî, savant et Walî (Saint), décédé en 910.), après sa mort, apparut en songe à quelqu’un. On lui dit: “Quelle nouvelle, ô Abû al-Qâsim?” Il répondit: “Les belles phrases ont été vaines et les formules mystérieuses se sont avérées stériles; rien ne nous a été utile que les quelques prières rituelles accomplies au sein même de la nuit”.
Mon fils! Ne sois pas avare d’actes vertueux ni d’états mystiques, et sois sûr que la science théorique n’apporte aucune aide. En voici un exemple: Qu’un homme au désert porte dix sabres hindous et d’autres armes encore, qu’il soit brave et combatif, qu’un lion redoutable vienne à l’attaquer, crois-tu que ces armes écarteraient le danger s’il ne s’en sert pour frapper le lion? Et, bien sûr, elles ne repousseront pas le danger si l’homme ne les saisit et ne les brandit pour frapper. Ainsi l’intellectuel qui lit cent mille problèmes scientifiques et les apprend par coeur, sans les mettre en pratique! Il n’en tire de profit que par l’exercice. Autre exemple: Le malade atteint de fièvre et de jaunisse; son traitement doit se faire par l’oxymel [2] et par l’infusion d’orge. La guérison ne s’obtient qu’en employant ces deux médicaments.
En effet:“Tu as mille remèdes: c’est en vain...N’est utile que celui qui en prend enfin!” [3]
Etudierais-tu, pendant cent ans, dans mille livres, que seuls tes actes te disposeraient à la miséricorde divine. Car Lui le Très Grand a dit: “Qu’on ne comptera à l’homme que ses propres actes” (Coran, LIII, 40.). “Celui qui espère se rencontrer avec son Seigneur, qu’il fasse oeuvre pie” (Coran, XVIII, 110.) “En punition de leurs actes” (Coran, IX, 83, 96). “Les Croyants qui pratiquent le bien auront le paradis pour séjour. Séjour éternel qu’ils ne voudront échanger contre aucun autre” (Coran, XVIII, 107.). “D’autres générations les suivirent. Elles délaissèrent la prière pour s’abandonner à leurs penchants. Un triste destin leur est réservé. Exception sera faite pour ceux qui se repentiront, croiront et pratiqueront les bonnes oeuvres. Pour ceux-là, ils entreront en paradis et ne seront frustrés d’aucun de leurs mérites” (Coran, XIX, 60-61.)
Que dis-tu de cette tradition [4]: L’Islâm est bâti sur cinq fondements: Attester qu’il n’y a pas d’autre divinité qu’Allah et que Muhammad aleihissalâm est le prophète d’Allah, prier, faire l’aumône, jeûner le mois de Ramadân, accomplir le pèlerinage à la Mecque pour ceux qui en ont la possibilité.
La Foi, c’est en même temps le verbe, la sincérité et les oeuvres. Les preuves de l’importance des oeuvres sont innombrables. L’homme atteint, sans doute, le paradis par la grâce et la générosité d’Allahu ta’âlâ, mais il l’atteint aussi après s’être préparé par son obéissance et son adoration, car “la miséricorde d’Allah est proche de ceux qui font le bien” (Coran, VII, 54.). Si l’on dit: “L’homme arrive aussi au paradis par la foi seule”, nous répondons: “Oui, mais quand? et que de difficiles obstacles doit-il surmonter avant d’arriver au but! Le premier de ces obstacles est celui de la foi elle-même; arrivera-t-il au paradis avec cette foi? ne lui sera-t-elle pas ravie avant qu’il n’y entre? Et s’il est conduit au paradis, il sera un élu déçu et pauvre”. Al-Hasan al-Basrî [5] dit: “Allahu ta’âlâ dit à ses serviteurs au jour de la résurrection: ô mes serviteurs, entrez au paradis par la grâce de ma miséricorde et partagez-en les degrés entre vous, selon vos actions”.
Mon fils, tant que tu ne pratiqueras pas le bien, tu ne trouveras pas de récompense. On raconte qu’un Israélite adora Allahu ta’âlâ durant soixante-dix ans. Allahu ta’âlâ voulut faire connaître ce cas aux anges. Il lui en envoya un pour lui dire qu’il ne méritait pas le paradis malgré cette longue adoration. Le message transmis, l’adorateur répondit: “Nous avons été créés pour l’adoration; il nous faut adorer”. L’ange, de retour, dit: “Mon Allah tu connais mieux que moi sa réponse”. Et Allahu ta’âlâ alors: “S’il ne cesse pas de Nous adorer, Nous ne cesserons non plus de le combler de Nos grâces. Je lui ai déjà pardonné ses fautes, vous en êtes témoins, ô mes anges!”
Le Prophète d’Allah dit: “Demandez-vous des comptes à vous-mêmes avant qu’on ne vous en demande et pesez vos actions avant qu’on ne vous les pèse”. ‘Alî [6] dit: “Celui qui croit toucher au but sans effort est un homme de désir; et celui qui ne compte que sur l’effort fait acte de présomption”.
Al-Hasan al-Basrî dit: “Aspirer au paradis sans accomplir de bonnes actions est un grand péché”. Il dit aussi: “Le signe distinctif de la vérité, c’est d’oublier la récompense promise aux bonnes actions, sans en abandonner la pratique”. Hadrat Muhammad (aleihissalâm) dit: “L’homme intelligent se juge sévèrement et travaille pour l’autre vie; le sot suit les caprices de sa fantaisie et compte sur Allahu ta’âlâ pour réaliser ses espoirs!”
Mon fils! Que de nuits tu as passées en études, te privant de sommeil; je ne sais quel était ton but. Si c’était pour ce bas monde, pour ses biens, pour ses dignités et pour t’en vanter devant tes égaux et tes semblables, alors malheur à toi, oui malheur à toi! Si, par contre, ton intention était de vivifier la loi du Hadrat Prophète, de former ton caractère, de soumettre ton âme portée au mal, tu es alors bienheureux, oui, tu es bienheureux. Il a dit vrai celui qui a écrit:“Les yeux veillent en vain toute autre que Ta Face;
En vain coulent les pleurs pour un autre que Toi”.
Choisis, mon fils, la durée de ta vie: tu mourras; l’objet de ton amour: tu le perdras; d’agir comme il te plaît; Allah te rétribuera.
Mon fils! A quoi bon tant d’études, théologie, logique, médecine, rhétorique, poésie, astronomie, prosodie, syntaxe, morphologie, si c’est du temps perd en désaccord avec Allah?
J’ai trouvé ceci dans l’Evangile de Hadrat Î’sâ [7]: “Entre l’instant où le mort est mis dans le cercueil et celui où on la dépose sur le bord de la tombe, Allah, par sa Grandeur, lui pose quarante questions dont la première est celle-ci: “Tu t’es montré, ô mon serviteur, très pur aux yeux des créatures durant bien des années. Mais cette pureté, tu ne me l’as pas montrée, non, pas même une heure”; et, pourtant, chaque jour Allah regarde dans ton coeur et dit: “Que de soucis tu te donnes pour les autres quand tu es comblé de mes bienfaits! Mais toi, tu es sourd et tu n’entend pas”!
Mon fils! Connaissance sans pratique est folie! Pratique sans connaissance, inutilité. Sache que si la science ne t’éloigne pas aujourd’hui des choses défendues et ne t’invite pas à la soumission, elle ne te gardera pas davantage demain du feu de l’Enfer. Ne mets pas en pratique tes connaissances aujourd’hui et tu diras demain au jour de la Résurrection, si tu n’es pas parvenu à rattraper les jours passés: “Laisse-nous retourner sur terre. Nous y ferons le bien” (Coran, XXXII, 12). On te dira: “Imbécile, mais tu en viens!”
Mon fils! affermis ton esprit, déroute ton âme et mortifie ton corps, car la tombe est la demeure et le peuple des cimetières t’attend. Garde-toi bien d’arriver chez eux sans viatique. Abû Bakr as-Siddîq [8] dit: “Les corps sont une cage ou une étable: Demande-toi ce qu’est le tien. Si tu es du nombre des oiseaux célestes, quand tu entendras battre le tambour qui te rappellera à ton Seigneur, tu t’envoleras à tire d’ailes jusqu’au plus haut degré du Paradis; comme le Prophète a dit: “Le trône du Clément a tremblé à la mort de Sa ‘d bin Mu’az” [9]. Par contre, malheur à toi, si tu es du nombre des bestiaux, suivant la parole du Tout-Puissant: “Ceux-là sont comme des bêtes. Que dis-je, ils sont plus égarés encore” (Coran, VII, 178. Cf. aussi Coran, XXV, 46).
Ne crois donc pas être en sûreté lors de ton passage du fond de la maison terrestre au fond de l’abîme du Feu. — On raconte qu’Al-Hasan al-Basrî a demandé un jour un verre d’eau fraîche; lorsqu’il eut saisi le verre, il perdit connaissance et le verre tomba. Ranimé, on lui dit: “Qu’as-tu ô Abû Sa’îd?” Il répondit: “Je me suis rappelé le désir des habitants de l’Enfer lorsqu’ils crient à ceux du Paradis: “Répandez sur nous un peu d’eau, ou un peu de vos joies célestes!”
Mon fils! s’il te suffisait d’avoir la science abstraite, sans les oeuvres, la voix divine irait crier en vain: “Y a-t-il quelqu’un qui appelle, qui implore, qui se repent?” On raconte qu’un groupe de Compagnons du Raçoûlullah cita le nom d’Abdallah Bin ‘Omar (Coran, VII, 48) devant Hadrat le Prophète, qui dit? “Ce serait un excellent homme s’il priait la nuit”. Il dit aussi à l’un de ses Compagnons: “Ami, ne dors pas trop la nuit, car celui qui dort trop la nuit se retrouve démuni le jour de la Résurrection!”
Mon fils! “Récite le Coran, la nuit. C’est là une oeuvre pie” [10]: c’est une injonction. — “A l’aurore, ils étaient déjà en prière, ils demandaient pardon” (Coran, XVII, 81.): c’est une action de grâces. - “Et ceux qui implorent le pardon d’Allahu ta’âlâ au lever de l’aurore” (Coran, LI, 18.): c’est une invocation. Raçoûlullah a dit: “Allahu ta’âlâ aime trois voix: celle du coq, celle qui récite le Coran et celle qui implore le pardon du Créateur à l’aurore”. Sufyân at-Tawrî (Coran, III, 15.) a dit: “Allahu ta’âlâ fait souffler à l’aube un vent que chargent les appels et les demandes adressées à Allahu ta’âlâ”. Il a dit aussi: “A la tombée de la nuit, un héraut crie au pied du Trône divin: Debout, âbid d’Allah! Ils se lèvent et rendent grâces; puis un autre héraut appelle au milieu de la nuit: Ames pieuses, éveillez-vous! Ils se lèvent et prient jusqu’au point du jour. A l’aube un héraut appelle de nouveau: Vous qui avez à implorer pardon, debout! Ils se lèvent et implorent le pardon d’Allah. Au lever du soleil, un dernier héraut appelle: Hommes légers, debout! Ils se lèvent de leurs lits, tels les morts ressuscités de leurs tombes”.
Mon fils! On raconte que le sage Luqmân [11] parmi les conseils qu’il donna à son fils, place ces paroles: “Mon fils! que le coq ne soit pas plus vigilant que toi lorsqu’il appelle Allah à l’aurore; alors que toi, tu dors”. Et voici ces vers:“Une colombe a gémi, dans la nuit, sur une branche:
Je dormais... Mon Allah, mon Allah! Mon amour est un menteur:Sur un véritable amour, elle n’eût pas pris d’avance...
Je suis l’amant aux yeux secs, mais elle verse des pleurs!”
Mon fils, savoir ce que c’est qu’obéir et adorer, voilà la quintessence de la science. Elle exige, sache-le bien, que tu suives le Législateur dans ses ordres comme dans ses défenses, qu’ils s’agisse de paroles ou d’actions. En d’autres termes, tout ce que tu dis, fait et abandonnes, doit être inspiré par l’observance de la Loi. Si, par exemple, tu choisis pour jeûner le jour de la Fête du Sacrifice ou les jours consacrés à sécher au soleil la chair des victimes [12], tu enfreindras la règle. Ou encore, si tu exécutes la prière, vêtu d’une robe arrachée par force à autrui, tu pècheras, bien que ton acte ait les apparences d’une adoration.
Mon fils! Il te faut donc conformer tes paroles et les actes à la Loi [13]; car connaître et agir en dehors des règles qu’elle prescrit sont des erreurs. Ne te laisse pas davantage égarer par les excès extravagants du mysticisme: pour suivre cette voie, il faut effort et lutte, il faut suspendre les désirs de nafs, anéantir ses caprices par le glaive de l’exercice et non par de folles et vaines chimères. Sache que la langue débridée et le coeur comblé de désirs futiles sont des signes funestes. Si tu n’humilies pas ton nafs par une lutte sincère contre ses désirs et ses caprices, tu n’illumineras pas ton coeur par la connaissance. Sache aussi qu’il est impossible de répondre par écrit ni verbalement à certaines des questions que tu m’as adressées. Si tu parviens à cet état, tu en connaîtras la nature; sinon, le connaître est impossible parce qu’il appartient au domaine de goût: tout ce qui relève de ce domaine, il est impossible de le décrire par des paroles, comme l’on ne connaît la douceur de ce qui est doux et l’amertume de ce qui est amer que par le goût. Ainsi, on raconte qu’un impuissant écrivit à un ami lui demandant de lui expliquer le plaisir sexuel. Il reçut la réponse suivante: “O un tel, je te croyais impuissant seulement, or je constate maintenant que tu es, à la fois, impuissant et sot; car ce plaisir est du domaine du goût: y arrives-tu? tu en connais la nature, sinon sa description est impossible en paroles ou par écrit”.
Mon fils! Quelques-unes de tes questions ressemblent à cette dernière. Quant à celles auxquelles on peut répondre, je les ai mentionnées dans ma Régénération des sciences religieuses et dans d’autres de mes livres. J’en cite ici une partie tout en y renvoyant. Je dis: “L’homme qui suit la voie de la vérité a quatre obligations à observer: C’est d’abord une foi très vive, sans trace d’hérésie.
C’est ensuite un repentir sincère après lequel tu ne reviennes plus au péché. En outre, c’est un effort pour contenter tes rivaux afin que personne ne puisse te réclamer une réparation quelconque. Enfin, c’est l’étude des sciences religieuses conformément aux ordres d’Allah; puis, celle des autres sciences qui aident au salut de l’âme."
On raconte qu’aş-Şiblî [14] dit: “J’ai suivi quatre cents maîtres et j’ai lu quatre milles hadiths. Puis j’en ai choisi une seule que j’ai mis en pratique à l’exclusion de toute autre, parce que je l’ai médité, et j’y ai trouvé ma délivrance et mon salut. J’y ai trouvé aussi la science entière des Anciens et des Modernes. Je m’en suis contenté. Voici cet hadîth: “Raçoûlullah dit un jour à l’un de ses Compagnons: “travaille pour la vie d’ici-bas dans la mesure où tu résideras sur la terre; travaille pour la vie future dans la mesure où tu dois y demeurer; travaille pour son Seigneur autant que tu as besoin de Lui et travaille pour le feu de l’Enfer autant que tu pourrais en supporter l’ardeur”.
Mon fils! Si tu connais cet hadith, tu n’auras pas besoin de beaucoup de science.
Médite aussi cette autre histoire: Hâtim al-Aşamm [15] était du nombre des amis de Şaqîq al-Balhî [16]. Un jour celui-ci lui demanda: “Tu me suis depuis trente années déjà; quels avantages en as-tu retirés?” Hâtim répondit: “J’en ai retiré huit qui me suffisent, parce que j’espère obtenir par là ma délivrance et mon salut”. Saqîq demanda alors quels étaient ces avantages? Hâtim répondit:
1) J’ai observé les créatures et j’ai vu que chacune d’elles avait un être qu’elle aimait et chérissait. Il est de ces êtres aimés qui accompagnent la personne qui les aime jusqu’à la maladie grave; d’autres qui l’accompagnent jusqu’au bord du tombeau puis se retirent en la laissant toute seule; mais aucun n’entre avec elle dans la tombe. Cela m’a donné à réfléchir et je me suis dit: “le meilleur ami de l’homme serait celui qui le servirait jusque dans la tombe pour lui tenir compagnie”. Un tel ami, seules les bonnes oeuvres m’en ont tenu lieu. Je les ai alors aimées afin qu’elles me soient un flambeau dans ma tombe, qu’elles m’y tiennent compagnie et ne m’y laissent pas seul.
2) J’ai constaté, en second lieu, que les gens suivent leurs caprices et se hâtent de satisfaire aux désirs de leurs nafs. J’ai alors médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “En revanche, ceux qui auront respecté leur Seigneur et vaincu leurs passions, auront le paradis pour séjour” (Coran, LXXIX, 40-41). J’ai été sûr alors que le Coran est la pure vérité. Je me suis mis à combattre les tendances de mon nafs et me suis apprêté à leur faire la guerre et à barrer la route à ses caprices jusqu’à ce qu’elle devienne docile et s’habitue à se soumettre à Allah.
3) J’ai vu tous les êtres humains courir après les biens du monde, les tenir et les garder âprement; j’ai alors médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “Vos biens sont périssables, les biens d’Allah sont éternels” (Coran, XVI, 98). Ce que je possédais, je l’ai alors dépensé pour l’amour d’Allahu ta’âlâ et l’ai distribué aux pauvres afin qu’il me soit un trésor auprès d’Allahu ta’âlâ.
4) J’ai vu certaines personnes croire que l’honneur et la puissance résidaient dans le nombre des clientèles et des partisans; je les ai vues s’en vanter. D’autres prétendaient qu’ils résidaient plutôt dans les biens et le grand nombre des enfants; elles en étaient fières. D’autres ont cru que la puissance et l’honneur consistaient à enlever de force les biens de leurs semblables, à les traiter injustement et à verser leur sang. Un groupe, enfin, a cru que cette puissance résidait dans la dépense des biens, dans leur dissipation et dans la prodigalité avec laquelle on en usait; j’ai alors médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “Le plus méritant auprès d’Allahu ta’âlâ est celui qui le craint le plus”(Coran, XLIX, 13.). J’ai donc opté pour cette crainte d’Allahu ta’âlâ et j’ai fermement cru que le Coran est la pure vérité et que les conjectures de ce groupe et ses considérations sont vaines et éphémères.
5) J’ai vu les gens se dénigrer ou se calomnier; j’en ai trouvé la cause dans la jalousie suscitée par les biens, le prestige et la science. J’ai donc médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “C’est nous qui leur avons réparti la nourriture en ce monde” (Coran, XLIII, 31.). J’ai alors appris que la distribution, à l’origine, a été faite par Allahu ta’âlâ; je n’ai plus jalousé personne et je me suis contenté de la répartition des biens telle qu’elle avait été faite par Allahu ta’âlâ.
6) J’ai vu les gens se déclarer ennemis pour toute sorte de fins et de motifs; j’ai alors médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “Satan est votre ennemi. Considére-comme tel” (Coran, XXXV, 6.). J’ai donc appris qu’il n’était pas permis d’avoir d’autre ennemi que Satan.
7) J’ai vu tous les hommes travailler avec tant d’ardeur et prodiguer tant d’efforts en vue d’obtenir leur nourriture et leur subsistance qu’ils devenaient souvent l’objet de soupçons et d’accusations, qu’ils se dégradaient et se déshonoraient. J’ai donc médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “Il n’est point d’être vivant sur terre qui ne s’en remette à Allahu ta’âlâ de le nourrir” (Coran, XI, 8.). J’ai alors compris que ma subsistance dépend d’Allahu ta’âlâ et qu’IL me la garantit. Je me suis mis à l’adorer et j’ai cessé de convoiter autre chose.
8) J’ai vu tous les êtres humains se fier à la créature; à l’argent, aux biens et à la propriété, au métier et à l’industrie, enfin à un autre être humain. J’ai alors médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “Allah suffit à qui s’y fie. Il réalise toujours ses desseins. Il les réalise à son heure” (Coran, LXV, 3.). J’ai donc pleine confiance en Allahu ta’âlâ qui me suffit et qui est le meilleur des protecteurs.
Saqîq dit: “Qu’Allah t’assiste, ô Hâtim, j’ai examiné la Thora, les Psaumes, l’Evangile et le Furkan [17] et j’ai constaté que les quatre livres ont pour objet ces huit avantages. Celui donc qui les met en pratique mettra en pratique, par le fait même, les préceptes de ces quatre livres”.
Mon fils! Tu as appris par ces deux récits que tu n’as pas besoin de pousser trop loin ta science; et maintenant voici ce que doit faire celui qui suit la voie de la vérité.
Sache qu’à celui qui suit la voie d’Allahu ta’âlâ, il faut un maître pour guide et éducateur, qui, par sa bonne éducation, corrigera les mauvais penchants et leur substituera de bonnes habitudes. L’éducation ressemble, en effet, au travail du laboureur qui déracine les épines, sarcle le blé afin qu’il pousse mieux et donne une abondante moisson. Tout homme donc qui désire suivre la vraie voie ne peut se passer d’un maître pour l’éduquer et le guider dans la voie d’Allahu ta’âlâ. Allahu ta’âlâ a, en effet, envoyé un Apôtre pour guider les créatures Vers Lui. Cet Apôtre laisse après sa mort des successeurs pour servir de guides dans la voie d’Allah. Le Maître capable de remplacer le Prophète doit être savant. Cela ne veut pas dire que tout savant peut être un successeur du Prophète! Je vais d’ailleurs t’indiquer les principaux signes distinctifs qui le caractérisent, afin que tout savant ne prétende pas à la qualité de guide. Je pense qu’il y faut un homme qui s’éloigne du monde et de ses honneurs; il doit aussi avoir fréquenté assidûment un homme perspicace qui, par d’autres intermédiaires, remonte au Seigneur des prophètes. Il doit, également, pouvoir s’habituer à manger peu, à dormir peu et à parler peu. Il doit, en outre, prier beaucoup, jeûner de même et faire fréquemment l’aumône. Il doit aussi, grâce à la fréquentation de son propre Maître perspicace, marcher dans la voie des vertus morales comme la patience, la prière, la reconnaissance, la certitude, la quiétude, la longanimité, l’humilité, la science, la sincérité, la pudeur, la fidélité à ses promesses, le sérieux, le calme, la réflexion et autres vertus semblables. Il est donc une des lumières qui peuvent être prises pour modèle, lumière du Prophète; mais on le rencontre rarement, bien plus rarement qu’on ne rencontre le soufre rouge! Et celui qui a le bonheur de trouver un tel Maître et d’être agréé par lui, doit le respecter extérieurement et intérieurement. Le respect extérieur doit se manifester par la soumission complète au Maître; le disciple ne doit pas non plus protester à propos de telle ou telle question, même lorsqu’il connaît l’erreur du Maître. Il ne doit pas non plus étendre son tapis de prière devant lui en dehors des heures de prière. La prière terminée, le disciple enlèvera le tapis et ne multipliera pas les prières surérogatoires devant lui; et il exécutera les ordres du Maître selon ses forces et sa capacité. — Quant au respect intérieur, voici en quoi il consiste: tout ce que le disciple aura entendu et accepté extérieurement de la part du Maître, il ne doit pas le nier intérieurement; autrement il serait taxé d’hypocrisie; s’il n’arrive pas à cette sincérité totale, il quittera la présence de ce Maître jusqu’à ce que l’adhésion interne soit en harmonie avec l’adhésion externe. Il devra aussi se prémunir contre les mauvaises fréquentations afin que le pouvoir des démons et des hommes pervers n’ait point de prise sur son coeur: il sera alors exempt de souillure satanique. Dans tous les cas, il optera pour la pauvreté, non pour la richesse.
Sache de plus que le mysticisme requiert deux qualités: la droiture avec Allahu ta’âlâ et la longanimité avec les hommes.
Celui qui est droit avec Allahu ta’âlâ, et qui se conduit bien avec les gens, les traitant avec patience, est un mystique. La droiture avec Allahu ta’âlâ consiste à sacrifier les désirs de son nafs aux ordres d’Allah. — Se bien conduire avec les autres c’est ne pas les obliger à suivre tes désirs, mais c’est t’obliger toi-même à suivre leur volonté, à condition qu’ils ne dérogent pas aux lois de la religion.
Tu m’as interrogé aussi sur la soumission à Allahu ta’âlâ. Elle repose sur trois principes:
1) Observer les préceptes de la religion (les commandements et les interdits de l’Islâm)
2) Accepter sans protester la destinée telle qu’Allah l’a voulue.
3) Chercher à satisfaire le vouloir divin plutôt que sa volonté propre.
Tu m’as interrogé sur la confiance en Allahu ta’âlâ:
Allahu ta’âlâ veut que tu renforces ta Foi en ses promesses, c’est-à-dire que tu croies d’une part que ce qui a été écrit à ton sujet s’accomplira sans aucun doute, quand bien même l’Univers conjuguerait ses efforts pour te l’éviter; d’autre part, que ce qui n’a pas été écrit pour toi, ne t’arrivera pas, quand bien même tout le monde t’aiderait.
Tu m’as interrogé sur la sincérité; elle veut que toutes tes actions soient pour Allah. Que ton coeur donc ne se réjouisse pas de louanges que les gens t’adresseront; ne te soucie pas non plus de leur blâme.
Sache que l’hypocrisie naît de la flatterie adressée aux autres. Tu la guériras en considérant qu’ils sont dominés, comme des objets, incapables de procurer du repos ou de causer de la fatigue: tu peux donc éviter l’hypocrisie à leur égard. Tandis que si tu leur attribues un pouvoir et une volonté propres, tu seras fatalement poussé à l’hypocrisie!
Mon fils! Quelques-unes seulement des réponses à tes autres questions se trouvent formulées dans mes ouvrages, consulte-les à leur sujet. Quant aux autres, elles ne sauraient être écrites. Mets en pratique ce que tu sais, pour que l’on te soit révélé ce que tu ignores.
Mon fils! Ne me propose donc désormais les problèmes qui t’embrassent que par la voie intérieure. Et rappelle-toi la parole d’Allahu ta’âlâ: “Il vaudrait mieux pour eux attendre...” (Coran, XLIX, 5.). Accepte le conseil de Hızır aleihissalâm [18]: “Ne me demande jamais aucune explication avant que je ne t’informe moi-même” (Coran, XVIII, 69.). Ne sois pas pressé. Tout arrive et te sera dévoilé en son temps. As-tu médité la parole d’Allahu ta’âlâ: “Un jour viendra où Je vous produirai mes miracles. Ne vous montrez pas impatients” (Coran, XXI, 38.). Ne m’interroge donc pas avant l’heure et sois sûr et certain que tu n’arriveras qu’à force de marcher... “N’ont-ils jamais parcouru le monde? ils auraient connu la fin malheureuse de leurs devanciers” (Coran, XXX, 8; XXXV,43; XL, 22.).
Mon fils! Je t’assure que si tu marches dans la voie de soufisme, tu verras des merveilles à chaque étape. Sacrifie ton âme, car l’essence est dans le sacrifice, comme l’a dit Dû n-Nûn al-Misrî [19] à l’un de ses disciples: “Si tu peux donner ta vie, viens à moi; sinon ne t’occupes pas des futilités du Soufisme”.
Mon fils! je vais te donner huit conseils; reçois-les pour que ta science ne soit pas ton ennemie au jour de la Résurrection; quatre concernant ce que tu dois pratiquer et quatre, ce que tu dois éviter.
Voici d’abord ce que tu dois éviter:
1) Te garder absolument de discuter avec autrui, car la discussion cause bien des dommages et recèle plus de mal que de bien. Elle est, en effet, la source de tous les vices comme l’hypocrisie, la jalousie, la fierté, la rancune, l’inimitié, l’orgueil et les autres. Certes tu peux discuter sur une question avec une personne ou un groupe da personnes mais à condution que tu veuilles leur montrer la vérité. Et ce vouloir doit s’accompagner de deux signes:
N’établir aucune différence entre la vérité découverte par toi et celle qui serait découverte par un autre.
Préférer discuter dans un lieu retiré plutôt que devant une grande assemblée.
Ecoute, je vais te donner une règle:
Sache que poser des questions au sujet de certaines difficultés, c’est exposer une maladie de coeur au médecin; la réponse, c’est l’effort que le médecin prodigue pour la guérir.
Sache aussi que les ignorants sont des cardiaques et les savants, leurs médecins. Le savant incomplet ne réussit pas le traitement. Le savant vraiment savant ne traite pas tout malade, mais seulement celui qu’il estime apte à recevoir le traitement et le salut. Si le mal est chronique ou incurable, l’art du médecin est de dire: celui-là est inguérissable. Il ne s’occupera donc pas de la soigner, car il perdrait son temps.
Sache qu’il y a, sous le nom d’ignorants, quatre espèces de malades: l’un est curable, les autres non. Le premier de ceux-ci est celui dont les questions et les réponses sont provoquées par la jalousie et la haine [20].
Répondre au jaloux de son mieux, avec éloquence et clarté, c’est le pousser davantage dans la voie de la haine, de l’inimitié et de la jalousie. Il ne faut donc pas se soucier de lui:
“On espère guérir toutes les maladies, hormis l’inimitié dont la cause est l’envie”.
Tu dois donc t’éloigner de lui et l’abandonner avec sa maladie. Allahu ta’âlâ, n’a-t-il pas dit: “Ecarte-toi de celui qui refuse de Nous prier et qui ne recherche que les plaisirs de ce bas monde”? (Coran, LIII, 30; XX, 17.)
Le jaloux, par ses propos et par ses oeuvres, incendie le grain de ses actes. Comme l’a dit notre Prophète Muhammad aleihissalâm: “La jalousie dévore les bonnes actions, comme le feu consume le bois”.
Le mal du second vient de sa sottise. Lui aussi est inguérissable. Comme l’a dit Îsâ aleihissalâm: “Il ne m’a pas été impossible de ressusciter les morts, mais j’ai été incapable de guérir les sots” [21]. Car le sot est un homme qui travaille à apprendre en peu de temps quelque chose, tant dans les connaissances révélées que dans les rationnelles. Poussé par sa sottise, il interroge et contrarie le grand savant qui a passé sa vie à étudier les sciences révélées et rationnelles. Ce sot est un ignorant qui s’imagine cependant que ce qui l’embarasse, embarasse aussi le grand savant [22]. S’il ne se rend pas compte de cette erreur, ses questions et ses répliques viennent de sa sottise. Tu n’as donc pas à t’occuper de lui répondre.
Le troisième demande à être dirigé: tout ce qu’il ne comprend pas dans les paroles des grands savants, il en attribue la cause à la faiblesse de ses facultés intellectuelles. S’il interroge, c’est en vue de tirer profit de la réponse, mais c’est un sot qui ne saisit pas les vérités; il ne faut pas non plus t’occuper de lui répondre, comme a dit Muhammad aleihissalâm: “Nous, les prophètes, il nous a été ordonné de parler aux gens selon leur intelligence”.
Le seul qui soit curable, c’est le vrai chercheur de la vérité: sage et compréhensif; il ne doit pas être l’esclave de la jalousie, de la colère, des honneurs, des biens de ce monde et des passions. Il doit rechercher la voie droite. Ses questions et ses réponses ne doivent être suscitées ni par l’envie, ni par l’entêtement ni par un amour excessif de la critique. Celui-là est guérissable; tu peux donc te soucier de lui répondre; bien plus: tu dois lui répondre.
2) Tu dois, en second lieu, éviter avec le plus grand soin d’être un sermonneur et un missionnaire. Car cela présente bien des inconvénients. A moins, toutefois, que tu ne joignes l’exemple à la parole; puis tu inviteras les autres à t’imiter. Médite la parole qui fut dite à Hadrat Î’sâ fils de Marie: “Sermonne alors ton nafs d’abord; si elle en profite, sermonne alors les autres. Sinon, aie honte devant ton Seigneur”. Mais si tu te vois contraint d’entreprendre cette tâche, garde-toi de deux défauts:
De l’affectation dans la parole, les expressions, les gestes, les extravagances, les vers et les strophes. Allahu ta’âlâ déteste les hommes affectés. L’affectation révèle en effet, le désordre et l’insouciance intérieurs. Prêcher, c’est pousser l’homme à se rappeler le feu de l’autre vie, sa négligence à servir le Créateur, le temps passé à s’occuper de choses inutiles; c’est l’inviter à penser aux obstacles qui peuvent l’empêcher de croire en l’au-delà, à penser aussi à l’état dans lequel il se trouvera entre les mains de l’ange de la mort, à se demander s’il peut répondre aux questions de Munkar et de Nakr [23], à s’occuper sérieusement de son état au jour de la résurrection. Pourra-t-il passer sain et sauf le pont [24] qui sépare ce monde de l’autre ou bien tombera-t-il dans le précipice? toutes ces choses resteront gravées dans son coeur et le tourmenteront. L’embrassement du Feu, les lamentations à la pensée de ces malheurs, cela s’appelle l’avertissement.
Informer les gens et leur montrer ces choses, attirer leur attention sur leur négligence et leurs excès, les inciter à penser à leurs défauts afin que l’ardeur de ce Feu touche les membres de l’assemblée et que ces malheurs les effrayent de telle sorte qu’ils rattrapent, dans la mesure du possible, les jours passés de leur vie et regrettent ceux qui ont été employés à autre chose qu’à la soumission à Allahu ta’âlâ, ces idées que je viens de résumer forment ce que l’on appelle un sermon. Si tu voyais l’inondation atteindre une maison où se trouve ton semblable avec toute sa famille, tu crierais: “Prenez garde! prenez garde! fuyez devant le torrent!” Dans une pareille situation, tu n’avertirais pas le propriétaire de la maison avec des manières, des expressions affectées, des traits d’esprit et des allusions, certes pas! Ainsi doit être le prédicateur: il doit éviter tout cela.
Le deuxième défaut, c’est de prétendre à soulever tes auditeurs pour qu’ils expriment avec ostentation leur enthousiasme devant tes dons et ton génie, par exemple en déchirant leurs vêtements, afin qu’on se récrie: Quel extraordinaire orateur! Tu ne pencherais alors que vers les choses d’ici-bas, ce qui est un fruit de la futilité. Mais ton élan et ton ardeur doivent prendre pour buts d’appeler les gens de ce monde à l’autre, de la désobéissance à l’obéissance, de l’attachement aux choses de ce monde à la vie ascétique, de l’avarice à la générosité, du doute à la certitude, de l’oubli négligent au sursaut de la conscience, de la vanité à la piété; et de leur faire aimer l’au-delà et détester ce monde; de leur apprendre la science de l’adoration et de l’ascétisme; et de ne pas les faire présumer de la générosité d’Allahu ta’âlâ, ni de sa miséricorde; car ce qui domine leur nature, c’est l’éloignement de la voie de la religion, la recherche de ce qu’Allahu ta’âlâ n’agrée pas et la pratique des mauvaises moeurs. Jette alors la peur dans leurs coeurs, effraie-les, terrifie-les, qu’ils redoutent le péril qui les attend, ils s’attacheront alors fermement à obéir à Allahu ta’âlâ et à cesser de Lui désobéir.
Telle est la voie à suivre pour sermonner autrui et lui donner des conseils. Toute autre manière de prêcher constitue un danger pour celui qui parle comme pour celui qui écoute. Bien mieux, on l’a dit: un mauvais prédicateur est un monstre de perfidie diabolique qui écarte les gens de la voie droite pour les perdre. Ils doivent donc le fuir, car Satan en personne n’altérait pas leur Foi autant que lui. L’auditeur qui en aurait le pouvoir devrait le faire descendre de la chaire et l’empêcher de poursuivre ses ravages — conséquence naturelle du précepte qui commande de faire le bien et interdit de pratiquer le mal.
3) Tu dois, en troisième lieu, éviter de fréquenter les princes et les sultans. Tu dois même éviter de les rencontrer, car leur rencontre et leur société, autant que leur fréquentation, constitue un danger. Si, cependant, tu es obligé de les fréquenter, évite de les complimenter, car Allahu ta’âlâ est courroucé quand on loue les oppresseurs et les scélerats. Et celui qui implorerait pour eux une longue vie, exprimerait ainsi le désir qu’il soit désobéi à Allahu ta’âlâ sur la Terre.
4) Tu dois, quatrièmement en enfin, éviter d’accepter quoi que ce soit des dons et des cadeaux des Sultans, quand bien même tu serais sûr qu’ils ont été bien acquis. Car, accepter leurs dons, c’est corrompre la religion, puisque c’est en venir à les flatter, les respecter, à approuver leur injustice. Tout cela corrompt la religion. Le moindre mal qui puisse en résulter c’est qu’en acceptant leurs dons et en profitant de leurs richesses, tu n’en arrives à aimer ces Sultans. Or, celui qui aime quelqu’un, aime par le fait même à le vivre le plus longtemps possible et demeurer en ses fonctions. — Prendre plaisir à voir persister l’injustice, c’est vouloir que l’injustice opprime les créatures d’Allahu ta’âlâ, c’est vouloir la ruine du monde. Quoi de plus nuisible à la foi et à la fin de l’homme? Garde-toi bien d’être fasciné par le démon ou trompé par des paroles comme celles-ci: “Qu’il vaut mieux soutirer de l’argent de ces Sultants pour le donner aux pauvres. Ils dépensent, eux, cet argent dans la débauche et la désobéissance; tu le dépenseras, toi, pour les faibles: tu agis donc mieux qu’eux”. Le maudit a coupé le cou à beaucoup de gens par des tentations semblables et les dégâts qu’il a causés sont profonds et immenses. J’en ai parlé dans la Régénération des sciences, consulte cet ouvrage.
Voici maintenant les quatre autres conseils que tu dois mettre en pratique:
1) Ta conduite avec Allahu ta’âlâ doit être telle que si ton serviteur agissait de même avec toi, tu en serais content, n’y trouverais nulle offense et nul sujet de colère; ce que, par contre, tu ne permets pas à ton prétendu serviteur, Allahu ta’âlâ, qui est ton vrai Maître, ne l’acceptera pas, non plus, de ta part.
2) Fais à autrui ce que tu voudrais qu’il te fit, car la foi de l’homme n’est parfaite que lorsqu’il désire pour tout le monde ce qu’il aime pour soi-même.
3) Soit que tu enseignes ou que tu étudies, il faut que ta science améliore ton coeur et ton âme. Si tu apprenais qu’il ne te reste à vivre qu’une semaine, tu ne t’occuperais alors ni de jurisprudence, ni de controverse, ni de sources [24] ni de théologie ou d’autres sciences semblables, parce que tu sais qu’elles ne t’enrichissent pas. Mais tu t’occuperais de surveiller ton coeur et d’étudier les dispositions de ton âme, de t’éloigner des attaches du monde et de purifier ton âme des mauvaises habitudes, tu t’occuperais d’aimer Allahu ta’âlâ, de l’adorer et d’acquérir les plus belles vertus. Souviens-toi que l’homme, chaque instant, peut mourir.
Mon fils, écoute encore ces quelques paroles, médite-les bien pour y trouver ton salut. Si l’on te disait que le sultan va venir te faire visite dans une semaine, je sais bien qu’alors tu ne t’occuperais qu’à améliorer ce qui va tomber sous ses yeux: vêtements, corps, maison, meubles, etc. Maintenant, médite ce que je viens de te signaler; car tu es capable de comprendre et celui qui est intelligent saisit, en peu de mots. Le Prophète aleihissalâm, bien-aimé d’Allahu ta’âlâ dit: “Allahu ta’âlâ ne regarde pas vos visages, ni vos actions, mais IL regarde vos coeurs et vos intentions." Si tu veux savoir les états que peut connaître le coeur, reporte-toi à la “Ihyâ-ul-ulûm-id-dîn” et à d’autres de mes ouvrages. Car cette science est un devoir individuel [25]; les autres sont des devoirs qui incombent à l’ensemble de la communauté [26], sauf ce qui touche aux devoirs envers Allah, tels les ablutions rituelles, les prières et autres.
Qu’Allahu ta’âlâ t’assiste pour que tu apprennes et pratiques tout ce que je viens de t’exposer, si Allah le veut.
4) N’amasse pas des biens de ce monde plus qu’il ne te faut pour entretenir ta famille pendant une année: ainsi faisait Muhammad aleihissalâm avec certaines de ses femmes. Il disait: “Mon Allah fais que la nourriture de la famille de Muhammad aleihissalâm soit suffisante”. Il n’agissait ainsi que pour ses femmes dont la résignation (à cause de l’humanité) était faible. Pour celles dont la résignation était ferme, il se bornait à souhaiter la nourriture d’un jour ou même d’une demi-journée.
Mon fils, j’ai écrit cette lettre sur tes instances. Il te reste à la mettre en pratique; et ne m’obulie pas dans tes pieuses prières. Quant à l’oraison que tu m’as demandée, cherche-la dans les invocations que rapportent les Traditions authentiques. Récite, cependant, l’appel suivant dans les circonstances critiques et surtout à la fin de tes prières:
“Mon Allah, je te demande une grâce totale, une protection constante, une miséricorde complète, une santé effective, une vie large, une existence heureuse, des bienfaits extrêmes, des faveurs en tous domaines, des marques de la plus délicate générosité et de la bonté la plus directe.
“Mon Allah, sois avec nous et ne sois pas contre nous.
“Mon Allah, termine par le bonheur nos vies; réalise largement nos espoirs; joins par la santé nos matins à nos soirs; dirige notre fin vers ta misércorde; déverse l’abondance de ton pardon sur nos fautes; accorde-nous la faveur de nous corriger de nos défauts; fais de la piété notre viatique; dirige vers ta religion notre effort, mets en Toi notre confiance et sois notre constant appui. Mon Allah, affermis-nous dans la voie de la droiture; éloigne-nous pendant cette vie de ce qui pourrait causer notre repentir, au jour de la Résurrection; allège-nous le poids des péchés; donne-nous le pain halâl; écarte de nous la malice des Méchants; délivre nous, ainsi que nos pères et mères, nos frères et soeurs, du Feu de l’enfer par ta miséricorde, ô très Fort, très Miséricordieux, Généreux et Protecteur; ô très Savant et très Puissant, ô mon Allah, ô mon Allah, ô mon Allah, par ta miséricorde, ô Toi le plus Miséricordieux des miséricordieux, l’Alpha et l’Oméga; ô Toi, Possesseur de la plus grande force, qui as pitié des pauvres et des déshérités, et le très Misérocordieux; il n’y a pas d’autre dieu que Toi. Gloire à Toi, j’ai été du nombre des Injustes; et bénédiction d’Allah sur notre Prophète Mohammad aleihisselâm, sa Famille et tous ses Compagnons (Ashab), et louange à Allahu ta’âlâ, Maître des Mondes.
Notre Prophète “sallallahu aleihi wa sallam” a communiqué: “La personne qu’Allah le Très-Haut apprécie le plus, c’est celle qui apprend sa religion et qui l’enseigne aux autres. Apprenez votre religion de la bouche des savants islamiques!”
Celui qui ne peut pas trouver un vrai savant doit étudier les livres des savants Ahl-i sunna et essayer de les propager. Un musulman qui a de la connaissance, de la pratique et de la sincérité s’appelle “savant islamique”. Si l’une de ces trois particularités n’existe pas chez quelqu’un qui fait semblant de savant est appelé “bigot ou religieux malfaisant”. Le savant islamique est le gardien de la religion, mais le bigot est le collaborateur du Satan [27].
Notes:
[1] On peut aussi traduire par: “la vivification des sciences religieuses”: c’est le principal ouvrage d’al-Gazâlî parmi ceux qui s’adressent au grand public. Cet important et célèbre ouvrage est l’expression la plus claire et la plus adéquate de la crovance Ahl-i Sunna (sunnite) de l’Islâm. Il est fondé sur la révélation (le Coran, Kur’ân-al karîm) la Tradition et sur le sentiment même de la piété, non sur la théologie dialectique; et il s’adresse à la généralité des croyants. Il est composé avec un très grand art, partagé en quatre quarts contenant chacun 10 livres ou traités spéciaux.
Le premier quart a pour objet les pratiques religieuses essentielles: la pureté légale, les ablutions rituelles, la prière, l’aumône, le jeûne, le pèlerinage, la lecture ou la récitation du Coran, son explication, les heures canoniques. Au début sont deux traités sur la science et sur las fondements de la foi.
Le second quart a pour objet les bonnes moeurs: dans la nourriture, la mariage, le commerce, les affaires, les voyages. Il contient aussi des traités sur l’amitié et la fraternité, la retraite et la vie solitaire, le licite et l’illicite, l’audition de la musique et des chants; il est terminé par des exemples tirés de la vie du Hadrat le Prophète.
Les deux autres quarts, plus étendus que les deux précédents, sont consacrés à la mystique et à sa morale: le troisième quart, la partie négative de cette morale; le quatrième, la partie positive, ou: ce qui perd et ce qui sauve. La partie négative roule sur la correction des moeurs, le refrènement des appétits de la chair, les dangers de la langue, et contient des traités contre la colère, la haine, l’envie, l’avarice, l’amour de l’argent, contre l’orgueil, l’amour de la gloire et des honneurs. Enfin les livres de la partie positive portent des titres qui sont des noms d’états mystiques: le repentir, la patience et la reconnaissance, la crainte et l’espérance, la pauvreté et l’ascétisme, l’amour et le désir, la familiarité et la satisfaction avec Allah et l’abandon à Allah. Les derniers livres sont sur la mort, la résurrection et les états de l’au-delà.
Al-Gazâlî renvoie bien souvent dans la Lettre au Disciple [“Ayyuhal Walad”] la Régénération. C’est pourquoi nous en avons donné cette courte analyse.
[2] Sikanjabine: mot persan d’un remède désignant un breuvage composé d’eau, de miel ou de sucre et de vinaigre.
[3] Vers en persan dans le texte.
[4] Hadîth = Tradition. Ce mot signifie d’abord une communication ou un récit en général, de nature profane ou religieuse, puis en particulier “une information relative aux actes ou aux paroles du Hadrat le Prophète Muhammad aleihissalâm”. C’est dans ce dernier sens qu’il est employé dans ce texte. Cf. Encyc. de l’Islâm II, 201.
[5] Walî (Saint) et théologien célèbre du premier siècle de l’hégire (642-728). Cf. Encycl. de l’Islâm, II, 290. On appelle ce grand savant Islamique Tabi’în parce qu’il vecut à l’époque des Compagnons (Ashâb-ı kiram) de Muhammad aleihissalâm.
[6] ‘Alî, fils d’Abû Tâlib, cousin et gendre du Hadrat le Prophète Muhammad alehissalâm, IVème Calife ahl-i Sunna (décédé en 61 = 40 de l’hégire). Il était âgé de 63 ans.
[7] En réalité ce sont des paroles de l’Evangile original.
[8] Premier Calife de Muhammad aleihissalâm (décédé en 634 = 13 de l’hégire).
[9] Il mourut par suite des blessuers reçues à la bataille du Fossé de Médine, l’an 5 de l’hégire.
[10] Fils aîné du deuxième Calife ‘Omar Bin Hattab (Radıallahu anh). Il fut en particulier l’un d’Ashâb-ı kirâm les plus considérés de Muhammad aleihisalâm (décédé en 693 = 73 de l’hégire). Il était agé de 89 ans.
[11] Célèbre savant en religion, mujtahid et walî (Saint Islamique) du 2ème siècle de l’hégire.
[12] Il s’agit des trois jours qui suivent immédiatement la Fête musulmane de Sacrifice. En effet, la viande des bêtes sacrifiées est desséchée pour être gardée et consommée plus tard. — On partage la viande des bêtes sacrificiées en trois parties; on en donne une partie aux pauvres et aussi une partie aux voisins et une partie chez-soi.
[13] Religion, sharia.
[14] Jurisconsulte (savant de fıqh) célèbre. Il naquit en 861, et mourut en 945. Il eut ausi un penchant pour le tasawwuf (soufisme). Il était un grand walî (Saint).
[15] Maître de Hatim al-Atamm décédé en 790.
[16] Grand awliya, soufiste, né à Balh, où il mourut en 852. On dit qu’il feignit d’être sourd; d’où son sobriquet.
[17] Autre nom du Coran; il distingue le vrai du faux
[18] Il a vécu après Hadrat Ibrahîm. Il est un Prophète ou Walî (Saint). Il a voyagé avec Moûçâ aleihissalâm. Son âme paraissait en forme d’homme pour aider les pauvres.
[19] Originaire de Nubie, (la région au sud de l’Egypte, à la frontière de l’Ethiopie), mourut à Baghdad en 860. Il est le grand soufiste, comme le premier, qui a systématisé la connaissance de tasawwuf en Egypte.
[20] Textuellement: de jalousie, les ignorants qui suivent leurs caprices, jalousent les savants Islamiques.
[21] C’est un miracle de Jésus (Îsâ aleihissalâm). Il ressuscitait les morts. Il dit: “Je n’ai pas pu faire saisir la vérité aux personnes imbéciles”.
[22] L’auteur vise les détracteurs.
[23] Noms de deux anges qui examinent et punissent sérieusement les morts dans leurs tombes. Les deux anges interrogent les morts avec sévérité et grandeur par le commandement d’Allahu ta’âlâ. Cf. Encyc, de l’Islam Alimleri. A comparer avec Gaude-Froy-Demombynes, Les Institutions Musulmanes, page 64: “A peine s’est éteint le bruit des pas de ceux qui l’ont enfermé dans la tombe, que le mort est visité par deux anges terribles, Nakîr et Munkar, qui l’interrogent: “Quel est ton Seigneur? Quelle est ta foi? Quel est ton prophète? S’il répond en récitant la profession de foi musulmane, la “chahâda” qu’on a répétée autour de lui avant sa mort et qui doit avoir été le thème de ses dernières paroles, les anges le quittent doucement et ouvrent dans la tombe une porte d’où il peut voir son siège dans le Paradis. S’il ne répond pas ou s’il répond mal, les anges le frappent avec des massues de fer et dans la tombe une porte s’ouvre qui lui montre sa place en Enfer”.
[24] Il s’agit des sources de la croyance et du droit Islamique, c’est-à-dire du Coran, des Hadiths, etc...
[25] Fard ‘ayn; c’est-à-dire devoir qui doit être accompli par tous les musulmans et individuellement.
[26] Fard kifâyah, c’est-à-dire prière collective qui est accomplie par une partie quelconque de la communauté musulmane, sans que tous ses membres soient individuellement tenus de l’accomplir. Quand quelques Musulmans l’accomplissent, les autres ne doivent pas le faire.
[27] La connaissance qui n’est pas acquise avec sincérité pour la pratiquer n’a aucune utilité. (Hadika). V.1. page 366 et 367 et (Maktubât) volume 1. lettres 36, 40, 59 et 157.
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